Deux mondes différents - Audrey Jousserand - E-Book

Deux mondes différents E-Book

Audrey Jousserand

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Beschreibung

Dès notre première rencontre, il a changé ma vie. Il a brisé ma carapace, il a découvert la fille que j'étais. Avant de le rencontrer, je ne m'intéressais absolument pas à ce genre de garçon. Je n'aimais pas les "Bad Boys" comme lui. Et puis, ma vie sentimentale était déjà assez compliquée avant qu'il ne s'immisce dans mon coeur. Ce garçon n'arrête pas de me faire tourner en rond mais bien-sûr, trop aveugle pour m'en apercevoir, je suis tombée dans ses bras. Je me dis qu'à tout moment je peux retourner dans mon ancien pays et tourner la page, l'oublier. Mais ça m'est impossible. Il a pris une trop grande place dans mon coeur pour que je puisse l'oublier aussi facilement...

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Veröffentlichungsjahr: 2024

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Ähnliche


Nous étions si différents, Pourtant, beaucoup de choses nous reliaient

Sommaire

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Remerciements

1

Septembre, 5 heures 35…

Mon réveil allait sonner d’une minute à l’autre. J’étais couchée dans mon lit, les yeux fixés au plafond en attendant que la sonnerie retentisse. Dans quelques heures, une nouvelle année commençait pour moi et j’avais hâte. Tout me semblait tellement plus dur depuis la séparation de mes parents. Cela ne faisait que quelques mois que j’avais emménagé ici. Je vivais avec ma mère il y a encore deux semaines. D’après la justice, elle ne pouvait plus s’occuper de moi, sûrement dû à ses précédents problèmes de santé. J’étais donc condamnée à vivre avec mon père, alcoolique et impulsif sur les bords.

Mon réveil sonne et je saute du lit. Je pars dans mon dressing puis enfile ma tenue de sport.

Vous vous demandez sûrement ce que je peux bien faire à cinq heures trente-cinq du matin dehors en tenue de sport, alors que je suis censée me préparer pour la rentrée en première année de littérature.

Tous les matins, j’ai pour habitude de me lever une heure et demie plus tôt pour aller courir. Ça me permet d’évacuer le stress, la pression et de me sentir bien avant d’aller en cours. Ça m’aide aussi à maintenir un bon état physique, et également d’éviter mon père. J’ai pris cette habitude en Corée, tous les matins je partais courir avec mes amis. J’ai besoin de garder ces habitudes pour me sentir rattaché encore à eux, juste un peu. Il le faut, pour moi.

J’enfile mes écouteurs et pars courir pendant une heure.

Le vent doux caresse ma peau blanche et le soleil levant m’éblouit. Je me sens bien à cet instant-là. C’est le moment de la journée que je préfère. Personne pour m’embêter et je suis livrée à moi-même, mais c’est ce que j’aime.

Je profite juste du soleil, de la fraîcheur et du calme.

Chicago est une grande ville où à cette heure-ci, beaucoup de monde part déjà au travail. C’est une ville bondée, mais agréable. J’ai vécu ici, avec mes parents, pendant mes trois premières années de vie. Mais je n’en ai gardé aucun souvenir.

Je passe sur l’un des ponts de la ville et tourne dans une allée pour rentrer chez moi. Cette petite maison blanche munie de grandes colonnes de la même couleur, ravivant le porche, est emplie de souvenirs. Des bons, comme des mauvais. Et pourtant, pour rien au monde je ne voudrais en partir.

En revenant, je traverse la grande pièce à vivre et monte les escaliers, toujours en courant. La musique à fond, je pars prendre une douche. J’enfile mon uniforme et me boucle les cheveux.

Manière d’être un minimum potable pour la rentrée.

— Mia ! Dépêche-toi.

Mon père est en train de hurler mon prénom du bas des escaliers. Je lève les yeux au ciel, soûlée par son comportement. Depuis sa séparation avec maman, il passe la plupart de son temps à boire et se retrouve toujours dans de sales situations. Je me demande encore comment il a pu avoir ma garde.

La justice m’épatera toujours.

J’attrape mon sac de cours et descends mettre mes converses blanches. Je tourne ma tête en direction du salon et trouve mon père avachi sur le fauteuil, une bière à la main, comme à son habitude.

En arrivant devant le grand bâtiment blanc, je ne prends pas le temps de contempler le paysage et pars jusqu’au hall. C’est ma première rentrée à la Chicago State University. C’est l’une des plus grandes universités de Chicago, mais également la meilleure. Mon rêve est de devenir danseuse professionnelle. Je n’ai pas besoin d’aller en cours pour ça, mais mon père me l’a obligée et tant que je ne suis pas majeure, je me dois d’obéir à tous ses ordres.

Je regarde le tableau d’affichage pour connaître ma classe, lorsque quelqu’un me saute dessus. Des petites mains se posent sur mes yeux et je souris en reconnaissant la personne. J’ai fait la connaissance d’une fille superbe lors de mon arrivée à Chicago, lors de mon inscription à l’école, cet été. Elle vient d’emménager dans la ville, elle aussi, et je suis ravie de voir un visage familier parmi tout ce monde inconnu.

— Ton voyage en Corée s’est bien passé ?

Je lui raconte mes vacances en compagnie de mes amis. Elle écoute attentivement, un air intéressé scotché sur le visage. Nous nous apprêtons à rejoindre notre classe quand une bande de trois garçons nous coupent dans notre lancée.

— Elena ?

Le garçon en question s’approche de nous. Sa grande taille et ses cheveux châtain me coupent le souffle.

Je pensais que ce genre de garçon n’était que dans le film. Je me suis bien trompée.

Ses yeux, d’un gris magnifique, zigzaguent entre mon amie et moi. Il replace, à coup d’épaule, son sac noir posé nonchalamment sur une épaule et sourit.

— Ethan ?

Elena semble heureuse de le voir. Sans m’en rendre compte, je dévisage les jeunes hommes. À la droite d’Ethan se trouve un garçon brun, plus petit, mais bien plus corpulent. Ses cheveux noirs sont très courts, je suis même obligée de plisser les yeux pour voir s’il n’a pas plutôt le crâne rasé. Ses yeux sont d’un noir intense, tellement noir que je m’en sens mal à l’aise. A la gauche du fameux Ethan se trouve un homme blond. Grand, musclé et un sourire mesquin affiché sur les lèvres, il cherche quelqu’un des yeux. Il se permet plutôt de mater ouvertement toutes les filles qui passent devant lui !

Le dernier des garçons attire mon attention. En retrait, il est appuyé contre le mur, les mains dans les poches. Ses cheveux bruns retombent légèrement sur son front. Il les repousse en passant ses doigts le long de ses cheveux, ce qui lui donnait un air vraiment mignon. Ses beaux yeux verts croisent les miens. Je me surprends à le fixer à mon tour. Ses yeux ont beau être d’un vert magnifique, j’ai l’impression qu’ils sont noirs, comme détruits, vides de tout sentiment. Il relève légèrement la tête, comme pour reprendre une posture de chef et fronce les sourcils.

— Et qui est cette belle fille ? demande Ethan.

— Oh, je te présente Mia (Je lui jette un regard) c’est une amie que j’ai rencontré cet été. Elle est nouvelle ici. Mia, je te présente des amis. Voici Ethan, Liam et Matt. Lui, dit-elle en pointant le brun ténébreux, c’est Tyler.

Tyler… ce prénom me rappelle quelqu’un.

Ethan me prend dans ses bras et me serre contre lui. Je me crispe immédiatement. Je recule et lui sourit, pour rester poli. Dans mon pays, nous n’avons pas de contacts entre filles et garçons. Je sais que je ne suis plus à Séoul, mais j’ai été élevé ainsi, et c’est encore nouveau pour moi, tout ça.

Je reprends mes esprits et me gratte la nuque pour trouver les mots. Sans le vouloir, mon regard traverse le groupe de garçons pour se reposer sur le grand brun. Ses yeux verts semblent chercher le moindre détail m’appartenant. Si je ne détourne pas le regard de suite, on pourrait me prendre pour une psychopathe à fixer un inconnu ainsi.

— Enchantée !

Ma voix est tellement ridicule.

— Oh ! Tu as un drôle d’accent ! D’où viens-tu ? me demande Ethan.

Tout en expliquant en une simple phrase ma venue ici, je me tourne en direction de Tyler. Son regard est braqué sur son téléphone, mais alors que je m’apprête à me reconcentrer sur la conversation, je remarque Tyler se crisper. Ce détail ne m’échappe pas et je suis surprise de voir ses mains se resserrer un peu plus fort autour de son mobile. Il relève les yeux et me fixe d’un air froid. Bouleversée par la noirceur de ses iris, je détourne le regard.

Ce fameux Tyler m’intrigue, mais il m’agace déjà !

— En tout cas ton accent est très mignon. C’est rare les yeux bleus pour des Coréens si je ne me trompe pas, non ?

Ethan pose ses yeux noirs dans les miens alors qu’Elena le bade.

Dites-moi, mais elle cache bien son jeu elle !

— Oui, c’est vrai. Mais mon père est américain et ma mère coréenne, alors, un peu dire que-

— Bon ! Ce n’est pas que je m’en branle de vous entendre parler des yeux de cette fille, mais sa petite vie ne m’intéresse pas. Les cours ont commencé.

Tyler passe entre Ethan et moi en me bousculant au passage. La colère bout à l’intérieur de moi et sans que je puisse retenir mes gestes, je lui attrape le bras pour qu’il se retourne vers moi. Son biceps se contracte sous mon contact, me procurant un frisson qui m’était inconnu jusqu’à aujourd’hui.

— Sérieusement ? Non mais qu’est-ce qu’il te prend à toi ?

Il s’arrête et se dégage de mon emprise de manière violente. Je ne lâche pas sa silhouette du regard, tout en essayant de comprendre son comportement. J’entends Ethan glousser derrière moi alors que le blond sourit de plus belle, visiblement amusé par la situation. Tyler se tourne enfin et s’approche de moi, un peu trop proche même. Il a l’air d’hésiter quelques instants, puis reprend vite un air dur et impassible.

— Qu’est-ce qu’elle a, la petite Asiatique ?

Soudain, un semblant de déjà-vu s’empare de moi. Plus je fixe cet homme, plus il me semble le connaître. Mais d’où ?

— Ne m’appelle plus comme ça.

Il ricane et me tourne le dos pour partir en cours. Sa carrure impressionnante, accompagnée d’une certaine assurance, se dégagent dans sa démarche.

— Mais qu’est-ce qu’il lui prend ? je demande agacée par son comportement.

— Il est tout le temps comme ça. Mais c’est qu’elle a du caractère, la petite Mia ! rigole Ethan.

Je lève les yeux au ciel, ce qui ne manque pas de faire rire le brun, qui passe son bras par-dessus mon épaule ainsi que celle d’Elena. Après cette intervention, Elena et moi nous séparons des garçons pour rejoindre l’amphithéâtre. En entrant dans la grande pièce, je remarque que pas mal de places sont encore libres malgré le monde déjà installé. Je tire Elena pour prendre l’une des meilleures places.

— Alors c’est lui, ce fameux Ethan avec qui tu as passé tes vacances ? je lui demande en souriant.

— Peut-être bien. Tu verras, ils sont vraiment sympas.

— Ce qui est sûr, c’est que ce Tyler est un connard !

Elle rigole de plus belle, mais nous nous stoppons vite lorsqu’une voix, dont j’en connais dorénavant le propriétaire, retentit derrière nous.

— Ce n’est très pas gentil ça.

Je me retourne et tombe nez à nez avec Tyler assis derrière moi. Il s’appuie sur ses coudes, les sourcils toujours froncés.

Tu vas finir par rester bloqué avec les sourcils froncés, abrutis.

— Qu’est-ce que tu fais là ?

— Je te signale que tu es ici dans ma ville, dans ma fac et dans mon putain de champs de vision. Alors ne pose pas de question inutile. J’aurais bien voulu t’éviter aussi !

Je soupire et attrape mes affaires avant de descendre plus bas, accompagnée d’Elena, pour l’éviter. Il ricane une fois de plus et se lève pour s’assoir derrière nous, une fois de plus.

L’année va être bien longue…

Elena et moi nous dirigeons vers les casiers avant d’aller à la cafétéria sans tarder. Nous prenons notre plateau et nous avançons vers les tables. Sans tarder, j’aperçois le groupe de garçons de ce matin. La petite brune me propose de nous joindre à eux. Je soupire, embarrassée par la situation. Avant que je ne puisse acquiescer, Elena se précipite pour s’assoir face à Ethan. Je roule des yeux et m’installe aux côtés de Liam. Il mange si vite que je n’ai pas le temps de voir la quantité de pâtes qu’il met dans sa fourchette. En me voyant le dévisager, il rigole et m’explique.

— Désolé, je commence dans quelques minutes et il faut que je me dépêche.

— Tu as quel cours ?

Il se tourne vers moi et sourit, faisant apparaître des petits sillons au coin de ses yeux.

— Danse urbaine.

— Tu aimes la danse urbaine ?

Je suis prise de court. Peut-être l’occasion de me faire un nouvel ami avec les mêmes goûts que moi ? Un point positif qui me rassure et me fait me sentir chez moi. Finalement, ce groupe n’est peut-être pas aussi fou que je ne l’aurais cru.

— Bien sûr ! Depuis tout petit, je n’arrête pas de danser.

— Je suis surprise de savoir que toi aussi tu aimes danser.

— Tu sais, il n’y a pas que les filles qui aiment la danse.

Ça, je le sais.

La sonnerie retentit quand je m’apprête à lui répondre. Je jette un coup d’œil à mon assiette encore bien remplie et je me dépêche de manger. À côté de moi, Liam s’esclaffe tandis que Tyler lève les yeux au ciel.

Rien que dans sa manière de gesticuler, ce mec m’agace.

— Merde, je n’ai pas le temps.

Je débarrasse mon plat et rejoins Liam vers la sortie après avoir salué Elena, d’un baiser sur la joue. À vrai dire, je ne sais pas du tout où nous devons aller, alors je préfère le suivre vers la salle de danse. Nous traversons deux couloirs remplis d’étudiants tout aussi excités les uns que les autres de se revoir.

Je suis contente d’avoir trouvé une école avec des cours de danse inclut dans le programme.

J’ai toujours aimé danser. Quand j’étais petite, je ne m’arrêtais jamais. Mon père ne me supportait plus – m’a-t-il déjà supporté, finalement ? – Mes parents m’avaient inscrite dans une école de danse très populaire en Corée, ''Art High School'' à Séoul. J’ai tout de suite été accepté et j’ai réalisé une partie de mes rêves. J’étais une petite fille joyeuse et encouragée par mes parents, j’étais heureuse. Nous étions tous heureux. Jusqu’à ce que ma mère, aimante envers sa famille et tellement attentionnée, quitte mon père et que ma vie prenne un grand tournant. J’ai dû arrêter la danse, car ma mère ne pouvait plus me payer les cours. J’ai dû quitter mes 8 amis pour aller vivre en Amérique, un endroit inconnu pour moi. J’ai continué à m’entraîner dur chez moi, mais ce n’était pas de vrais cours, alors je me suis inscrite dans la plus grande université de Chicago, connu pour ses meilleurs cours de danse, en espérant m’améliorer pour réussir à intégrer la Haute école d’Art de Busan et ainsi réaliser mon rêve : devenir danseuse professionnelle, comme mes amis de Corée.

— Je crois que c’est ici !

Liam me sort de ma rêverie et je réalise que nous sommes devant une salle d’où filtre une musique douce. Il ouvre la porte et me fait signe d’entrer. Beaucoup de femmes et d’hommes sont vêtus d’un legging de sport et d’un tee-shirt large ou moulant. Je pars sans plus tarder dans les vestiaires pour me changer. En revenant dans le studio, je m’échauffe à la barre avec Liam. La professeure de danse entre dans la salle.

Alors, les histoires dans les livres ne sont pas des allégories ! En tout cas pour cette professeure. La tête haute, le dos droit, fine, les hanches bien taillées, les cheveux noirs coiffés en chignon sans qu’aucuns cheveux ne dépassent.

— Bonjour à tous. Je suis madame Brown et je suis votre professeur de danse. Pour les cours de cette année, il n’y aura que des duos hommes-femmes. Je vous laisse choisir votre partenaire et je vous expliquerai la suite.

Je regarde les hommes autour de moi. Je n’en connais aucun. Tous ceux qui m’entourent me semblent bien trop égocentriques. Au fond, j’essaie de trouver un coéquipier comme l’un de mes amis danseurs, mais je sais que je ne trouverai jamais quelqu’un comme eux.

Liam s’approche de moi et me sourit.

— Tu m’acceptes en tant que partenaire ?

Je lui rends son sourire et lui attrape la main qu’il me tend. Il m’attire à lui et passe son bras autour de mes épaules, tout en attendant les explications.

— Donc, cette année, je veux voir le niveau que vous avez. Je vous mets donc en duo pour que vous puissiez me montrer votre talent en danse. Je n’attends pas la perfection bien sûr, puisque pour certains, c’est votre première année, mais j’attends quand même que votre danse soit d’un bon niveau. Le style de danse n’est pas attribué, à vous de choisir celui que vous souhaitez réaliser.

— Du contemporain ! chuchoté-je à Liam les yeux remplis d’étoiles.

Celui-ci sourit et nous nous mettons au travail. Je commence à bien aimer cette professeure de danse. Bien sûr, ce n’est pas monsieur Choi, mon professeur de Corée, mais je commence à l’apprécier.

Nous nous plaçons dans un coin de la salle et nous asseyons sur le parquet afin de réfléchir à quelques pas. Deux ombres défilent par la fenêtre et attirent mon attention. Une main se lève et s’écrase sur le visage de la deuxième personne. J’ouvre la bouche, surprise. Je n’arrive pas à distinguer les visages, mais la seule chose que j’arrive à voir, ce sont des silhouettes d’hommes. L’un a une capuche sur la tête et se tient la mâchoire. L’homme d’en face lui attrape le col du sweat et le plaque contre le mur du fond. Je secoue l’épaule de Liam et pointe du doigt la fenêtre.

— Merde !

Il attrape son téléphone et y pianote dessus, un peu paniqué. Je comprends immédiatement qu’il s’agit de l’un de ses amis lorsque Liam quitte la salle en courant. Curieuse, je décide de sortir en courant également et de le suivre à la trace.

— Tu ferais mieux de rester en cours.

— Hors de question, je viens avec toi.

— Mia, ça ne va pas être beau à voir.

Il s’arrête en arrivant devant l’homme à la capuche, assis contre le mur, le visage relevé et caché dans son coude. En attendant une présence, l’heureux élu de cette bagarre dévoile son visage bleuté par les hématomes et recouvert de sang. Sa lèvre inférieure et son arcade semblent touchées et le sang y coule à flots. Lorsqu’il remarque ma présence, il se relève précipitamment et hurle, noir de colère.

— Dégage d’ici !

Liam se tourne vers moi, me faisant signe de rentrer.

Je déteste me sentir contrôlé. Mais malgré tout, le regard menaçant de Tyler me pousse à reculer. Ethan et Matt ne tardent pas à arriver alors que je reste clouée sur place, à regarder Liam ordonner à Tyler de s’assoir. Le brun attrape le blessé par le col du sweat-shirt pour le maîtriser.

— Arrête ! Calme-toi Tyler !

Malgré tous ces hurlements, je n’arrive pas à bouger. Je vois simplement cet homme atrocement défiguré et pourtant, je ressens un pincement au cœur. Les jointures de ses mains sont blanches dues à la pression qu’il exerce pour serrer ses poings. Ça m’est même douloureux.

— Mia, rentre chez toi.

Je relève le visage vers le grand blond qui me surplombe de quasiment deux têtes. Son imposante carrure m’empêche de voir ce qu’il se passe derrière lui.

— Rentre, s’il te plaît.

Je finis par acquiescer et me tourne pour entrer dans le bâtiment. Avant de franchir la porte, j’ose lancer une dernière œillade furtive à Tyler. Son regard vif croise le mien, bien trop préoccupé. Je décide de céder à ce combat acharné et rejoins le groupe de danse.

16 heures…

Les cours de la journée prennent fin. Elena et moi sortons de l’université pour rejoindre l’arrêt de bus en discutant. Elle m’embrasse la joue lorsqu’une Mercedes noire se gare à proximité de nous puis elle entre, enjouée. J’enfile mes écouteurs et rejoins la maison en essayant de faire le vide.

La soirée se découle de façon habituelle. Mon père et moi mangeons sans nous adresser une seule fois la parole, ou seulement pour dire ''passe-moi l’eau''. Aucune politesse entre nous.

Vous devez vous demander pourquoi mon père et moi ne nous respectons pas un minimum.

Lui et moi ne nous supportons plus depuis la séparation avec ma mère. Je n’essaie pas d’engager une discussion avec lui, car chaque discussion dérive toujours sur une dispute et j’en ai marre de me battre avec lui. À vrai dire, ça ne me touche pas le fait que mon père ne m’apprécie pas. Ça ne me touche plus. Je n’ai plus la force de souffrir, encore une fois.

Une fois rassasiée, je descends au sous-sol pour rejoindre la salle de danse que mes parents m’ont concocté lorsque j’étais plus jeune. J’adore cette petite salle. Un miroir recouvre tout le mur d’en face et une barre d’étirement borde le mur de gauche. Le parquet gris s’accorde parfaitement avec les murs blancs et roses de la salle. Je me réfugie ici souvent le soir pour m’entraîner un peu. J’arrive à me libérer du poids de la journée.

5 heures 35…

Ce matin en me levant, je pars courir comme à mon habitude, sans oublier de passer devant cette petite maison. En revenant, je constate que mon père est déjà parti au bar. Je vais pouvoir en profiter un peu. Je me prépare un petit café et, pendant qu’il refroidit, je monte mettre mon uniforme et me coiffer. Je détache ma couette pour libérer mes cheveux bruns. Les boucles tombent parfaitement sur mes fines épaules. Une fois prête, je descends boire mon café et pars à l’université.

Les cours se succèdent d’une extrême lenteur. Toutes les matières m’ennuient. Les cours en général m’ennuient.

Une fois le cours de Monsieur Smith terminés, Elena et moi sortons d’un pas précipité pour rejoindre le groupe d’amis à la cafétéria. Je m’installe aux côtés de mon amie et Liam, puis nous entamons le repas.

J’examine le visage de Tyler et y repère bien trop facilement les plaies causées par les chocs entre lui et le deuxième homme, hier. Lorsque j’analyse son visage et remonte à ses pupilles, ses iris me scrutent elles aussi. Bien trop gênée, je détourne le regard pour me concentrer sur mon assiette.

J’attrape ma fourchette, mais une secousse me fait tomber la nourriture de ma fourchette. Mes pâtes à la sauce tomate se répandent sur le haut de mon uniforme blanc. Je lève les yeux vers Tyler. Un sourire mesquin se dessine sur ses lèvres.

— Oups, désolé.

Mais quel abruti !

Je me lève, furieuse, sous les rires de Matt.

— Tu as un problème, peut-être ? me lance le brun.

J’attrape mon verre d’eau et le lui lance le contenu à la figure. De nerf, il se lève et m’attrape le poignet pour me tirer vers son visage avant de chuchoter :

— N’ose même pas refaire ça.

Son regard noir me pétrifie sur place. Je retiens ma respiration de façon automatique et me défait de son emprise. Je quitte la cafétéria, complètement déboussolée, pour rejoindre les toilettes afin de me rincer. J’ai beau frotter, la tâche s’étale sur mon haut blanc.

— Ce n’est pas vrai !

Je m’appuie sur la vasque et ferme les yeux pour réfléchir à une solution. Je ne vais quand même pas sortir ainsi.

Pourquoi faut-il que cela m’arrive. Je n’ai même pas d’affaires de rechange.

— Excuse-moi. Tu as un problème ?

Je pivote en direction de la voix. Une fille avec des cheveux longs, teintés en rose, se tient devant moi. Ses cheveux sont attachés en une couette parfaite. Elle est taillée comme une mannequin. Ses traits d’eye-liners sont parfaitement dessinés et du blush rouge est étalé sur ses joues rebondies.

— J’ai taché mon uniforme. Mais je n’ai pas d’affaires de rechange.

— Oh, j’ai un chemisier dans mon casier si tu veux. Il ressemble à notre haut. Je peux te le prêter.

— C’est vrai ? Merci beaucoup-

— Hayley, me coupe-t-elle.

Elle me sourit et me tend la main. Son sourire ne m’inspire rien de bon, mais son geste amical me pousse à faire de même. Elle me fait signe de la suivre et je m’exécute.

Elle sort de son casier un chemisier blanc assez court – bien court même – et légèrement transparent.

— Tu es sûre que c’est accepté, ce genre de chemisier ?

D’un hochement de stage, elle me le confirme. Je regarde le vêtement en fronçant les sourcils, pas sûre de cette information, et pars dans les toilettes. De toute façon, je n’ai pas le choix. Je me change en vitesse et je repars à la cafétéria après l’avoir remercié.

Je rejoins mon amie et les garçons.

— Tu as trouvé de quoi te changer ? me demande Elena.

Elle s’arrête et me dévisage, soudain gênée. Ethan et Matt me regardent en souriant, un air moqueur dans les yeux.

— Qu’est-ce qu’il y a ? demandé-je inquiète.

— Qui t’a passé ce chemisier ? me demande Liam, inquiet.

— Hum… une fille aux cheveux roses. Je ne sais plus son prénom.

Tyler manque de s’étrangler en buvant. Un sourire moqueur apparaît sur mon visage. Bien fait pour toi, abruti.

— Hayley ? me demande-t-il.

— Oui, c’est ça !

Mon air enjoué semble amuser Tyler et Matt qui se regardent avec un énième sourire mesquin scotché au visage. Tout le monde retourne à son assiette sauf Elena qui me fixe toujours. Je lui fais signe d’arrêter et nous continuons de manger sans parler. Je relève les yeux vers Tyler, mais celui-ci me regarde avec avidité. J’ancre mes yeux dans les siens essayant de ne pas détourner la première. Oui, un jeu d’enfant. Il sourit et se mord la lèvre inférieure avant que je ne détourne les yeux, rouge de gêne.

16 heures…

La journée vient de finir. Je sors des cours avec Elena. Nous rejoignons l’arrêt de bus tout en discutant du dernier cours de monsieur Smith, mais une voix masculine nous interrompt.

— Mademoiselle Young ?

Le proviseur se tient derrière moi et me regarde, mécontent. — Oui monsieur ?

— Je voudrais vous voir dans mon bureau, tout de suite.

Je regarde mon amie, inquiète. Je suis le proviseur jusqu’à son bureau. Le stress prend place en moi. Que voulait-il me dire ? Est-ce que ça avoir avec ma tenue ? J’en suis quasiment sûre quand je trouve Hayley aux casiers, le sourire aux lèvres. Cette fille m’a lancé un piège.

— Installez-vous, me dit-il en montrant la chaise située face au grand bureau gris. Je vous convoque car votre tenue d’aujourd’hui est irrespectueuse. L’université n’est pas un défilé de mode. Tout le monde doit venir habillé avec son uniforme, et non avec un chemisier aussi… décolleté et transparent.

— Mon uniforme s’est taché à midi et-

— Je ne veux pas le savoir ! Ce sera deux heures de colle pour vous, mademoiselle Young.

Je reste bouche-bée, ne sachant pas quoi faire. Le directeur me fait signe de sortir, et vite. Je me lève tout en tirant la chemise de manière à cacher le bas de mon ventre et sors du bureau. Plus qu’énervée par le piège que m’a tendu Hayley, je prends le chemin jusqu’à l’arrêt de bus.

Je m’apprête à monter dans le bus, n’ayant pas envie de marcher jusqu’à la maison, lorsque je reçois un appel de mon père.

— Mia ! Rentre vite à la maison s’il te plaît, il y a un problème.

— Papa ? Mais qu’est-ce qu’il se passe ?

Il raccroche.

Je regarde mon écran, inquiète. Pour que mon père m’appelle, c’est qu’il doit se passer quelque chose de grave. Je décide de ne pas prendre le bus et pars en courant jusqu’à chez moi.

C’est pas vrai ! Pas ça, s’il vous plaît !

2

Lorsque j’arrive devant la grande maison, mon souffle se coupe.

Comment cela a-t-il pu arriver ?

De gigantesques flammes jaillissent des fenêtres de la maison. Mon père est dehors, complètement déboussolé et à moitié titubant. Plusieurs camions de pompiers sont garés dans la rue et essaient désespérément d’éteindre le feu. La façade est déjà noircie par les flammes. Je n’arrive pas à y croire.

Un pompier s’approche de nous, désolé de ce qu’il va suivre.

— Monsieur Young, comme vous voyez votre maison n’est plus habitable. Tout a pris feu.

Mon père me regarde l’air hagard et cherche une solution pour ce soir. Il sort son téléphone, à la recherche d’un hôtel près d’ici. Au bout de quelques minutes seulement, il s’énerve et raccroche. Je me rapproche et remarque assez facilement qu’il n’arrive pas à articuler trois mots, sûrement à cause de tout l’alcool qu’il a consommé. Je décide de prendre mon téléphone et d’appeler à mon tour les différents hôtels de Chicago, sans réponse positive. Au bout de 20 minutes d’appel, je me résigne à abandonner les recherches. Après tout, il est normal que tout soit complet, il est plus de cinq heures de l’après-midi.

— Tu ne peux pas appeler ton ami ? je demande après quelques minutes de réflexion.

— Mikael Scott ?

J’acquiesce et sans hésiter, il attrape son téléphone et compose le numéro avant de s’éloigner.

Je reste devant la maison carbonisée. Elle contenait tous les souvenirs que j’avais avec mes amis et ma mère. Il y avait aussi tous les trophées de danse que j’avais gagnés et cela me rend folle de rage. Comment le feu avait-il pu démarrer ?

— Ils nous attendent.

Mon père me sort de mes pensées et nous partons en direction du centre-ville pour rejoindre la maison de monsieur Scott, laissant derrière nous une maison, remplie de souvenirs, se détruire à petit feu.

J’en avais presque oublié la beauté de cette maison. La façade blanche et grise, l’herbe verte et fraîche et ce grand portail blanc m’impressionnent. Presque quinze ans que je ne suis pas revenu ici et pourtant, revoir cette maison me fait chaud au cœur.

La demeure Scott est l’une des plus grandes de Chicago. Ça ne m’étonne pas. La famille Scott est connue pour sa richesse et sa fameuse entreprise qui dirige tout le côté financier de Chicago.

Mon père sonne à la porte et celle-ci s’ouvre sur une belle femme brune aux yeux verts. Je ne la reconnais pas…

— Bonjour Peter.

— Bonjour Meli. Merci de nous accueillir.

Elle se tourne vers moi, un magnifique sourire aux lèvres.

— Bonjour Mia.

— Bonjour madame Scott.

— Oh, s’il te plaît, appelle-moi Meli, depuis le temps qu’on se connaît.

Elle vient m’embrasser et je lui rends l’accolade. Je ne me souviens pas d’elle. Je devais avoir trois ans, la dernière fois que je l’ai vu. En fait, depuis le divorce de papa et maman.

Nous entrons dans le salon et nous posons sur le canapé, comme nous l’a demandé Meli. Mikael vient tout juste de rentrer du travail et d’après Meli, c’est un exploit qu’il rentre aussi tôt. Papa part lui dire bonjour.

Je n’arrive pas à rester assise. Je marche dans la grande pièce tout en examinant tout ce qui m’entoure. Le salon est composé d’un grand canapé blanc en tissu et d’une télévision immense accrochée sur le mur d’en face. Un poêle à bois se trouve sur la gauche et une grande bibliothèque recouvre le mur sur ma droite.

C’est fou comme ces personnes sont complètement différentes de moi. Mes parents se sont toujours battus afin de subvenir à nos besoins.

Entre la cuisine et le salon se trouve la salle à manger, munie d’une grande table très chaleureuse et d’un escalier en colimaçon blanc marbré.

Meli s’approche de moi et me sourit, faisant apparaître deux petites fossettes sur ses joues.

— Alors Mia, comment tu vas, depuis le temps ?

— Ça va, merci.

— Toujours danseuse ?