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Extrait : "Au lever du rideau, le théâtre est dans l'obscurité : aucun acteur n'est en scène, excepté le bon Ange et le mauvais Ange de la famille de Marana, placés sur le piédestal, à la droite des spectateurs. Le mauvais Ange st renversé sur le dos, dans m'attitude d'un vaincu ; le bon Ange est debout près de lui, le glaive à la mais et un pied sur sa poitrine. Ils doivent avoir l'apparence d'un groupe de bois sculpté et peint."
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Seitenzahl: 126
Veröffentlichungsjahr: 2015
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EAN : 9782335054781
©Ligaran 2015
Au lever du rideau, le théâtre est dans l’obscurité : aucun acteur n’est en scène, excepté le bon Ange et le mauvais Ange de la famille de Marana, placés sur un piédestal, à la droite des spectateurs. Le mauvais Ange est renversé sur le dos, dans l’attitude d’un vaincu ; le bon Ange est debout près de lui, le glaive à la main et un pied sur sa poitrine. Ils doivent avoir l’apparence d’un groupe de bois sculpté et peint.
LE BON ANGE.
SŒUR MARTHE.
DON JUAN.
DON LUIS DE SANDOVAL.
DON JOSÉ.
DON CRISTOVAL.
DON MANUEL.
DON PEDRO.
DON HENRIQUEZ.
DON FABRIQUE.
DOM MORTÈS.
DOM SANCHEZ.
LE MAUVAIS ANGE.
LE COMTE DE MARANA.
LE SÉNÉCHAL.
GOMEZ.
HUSSEIN.
UN VALET.
UN PAGE.
TERESINA.
INÈS.
VITTORIA.
PAQUITA.
CAROLINA.
JUANA.
SŒUR URSULE.
L’ANGE DU JUGEMENT.
UN ANGE.
LA VIERGE.
Le mauvais ange, le bon ange.
(Éclats de rire dans le fond.)
Silence !
À moi, don Juan !… à moi !…
(Éclats de rire dans le fond.)
Les mêmes, Don Juan, Don Cristoval, Don Manuel, Carolina, Juana, Vittoria, pages, valets.
La porte du fond s’ouvre ; on aperçoit une salle à manger toute resplendissante de lumières ; de jeunes cavaliers et de jeunes femmes se lèvent de table ; deux Nègres, vêtus en pages, entrent en portant des flambeaux ; la scène s’éclaire.
Allons, Cristoval, assez de xérès et de porto comme cela ! c’est boire en muletier et non en gentilhomme. Au salon, pour les glaces et les sorbets ! (Tendant les bras.) À moi, Carolina !
Me voilà, monseigneur !…
Alors décidément, don Juan, tu me l’enlèves ?
Il ne m’enlève pas, je te quitte.
Et pourquoi me quittes-tu, infidèle ?
Parce que, depuis trois jours que nous nous connaissons, il y en a deux que je ne t’aime plus, et un que je te déteste.
Plains-toi encore de la fausseté des femmes, Cristoval !
Cela tombe admirablement bien ; car, pendant le dîner, je me suis fiancé à la Juana.
M’aurais-tu fait cette infidélité, païenne ?…
Au contraire, j’agis par pure charité chrétienne : ce pauvre Cristoval est si triste d’avoir perdu Carolina, qu’il mourrait de chagrin s’il ne trouvait à la minute quelqu’un qui le consolât.
Très bien ! alors, à moi la Vittoria !
Non pas, monseigneur ! j’aime don Juan et pas un autre.
Oh ! sur mon honneur, voilà un trait merveilleux et qui demande récompense.
(Il porte la main à sa chaîne d’or.)
Si tu as quelque chose à me donner, monseigneur, donne-moi ton poignard.
Qu’en veux-tu faire ?
Que t’importe ?
Prends, ma jalouse.
(Vittoria prend le poignard à la ceinture de don Juan et le passa à la sienne.)
Si tu fais de tels cadeaux à la femme que tu n’aimes plus, que donneras-tu à celle que tu commences à aimer ?
Je lui donnerai une fois ce qu’elle me montrera du doigt, deux fois ce qu’elle me demandera des yeux, et trois fois ce qu’elle exigera des lèvres.
Tu es magnifique, seigneur don Juan ; mais je serai encore plus généreuse que toi… (L’embrassant au front.) Je ne veux pas que tu me donnes, je veux que tu me rendes.
Si j’étais roi, voilà un baiser qui me coûterait une province.
Mais, comme tu n’es que comte, je me contenterai d’un de tes châteaux. Combien en as-tu ?
Il n’en sait pas le nombre.
Non ; seulement, ils sont à moi comme les Espagnes sont à l’infant.
C’est égal, je te prête dessus. (Lui effeuillant son bouquet de roses sur la tête.) L’infant deviendra roi.
C’est chose dite, j’emprunte.
Tu oublies que la moitié des biens que tu engages appartient à don José.
Qu’est-ce que don José ?
Mais ton frère aîné, ce me semble.
Ah ! oui. Eh bien, si j’ai un conseil d’ami à lui donner, à ce frère, c’est de trouver un juif qui lui achète son droit d’aînesse pour un plat de lentilles ; le juif sera volé.
Mais il est donc décidé à vivre toujours, le vieux comte ?
Tiens, ne m’en parle pas ; Juana ; tu as peut-être entendu dire qu’il y a un Père éternel au ciel, n’est-ce pas ? Eh bien, je crois, Dieu me pardonne ! qu’il est descendu sur la terre.
Monseigneur don Juan, votre père se meurt.
(Silence d’un instant.)
Et il m’envoie chercher ?
Non ; il a entendu vos éclats de rire, et il ne veut pas vous attrister ; il envoie chercher son confesseur dom Mortès.
(Le Domestique sort.)
Adieu, don Juan ; nous ignorions la maladie du vieux comte, et nous demandons pardon à Dieu d’avoir blasphémé dans une maison qui appartenait à la mort.
Adieu, don Juan ; tu es un impie, et tu perdrais l’âme d’une sainte en soufflant dessus.
Adieu, don Juan ; j’espère que Dieu me pardonnera dans l’autre monde de t’avoir aimé un instant dans celui-ci.
Surtout si nous faisons pénitence ensemble. Prenons jour.
Jamais !
Alors, je t’attendrai de huit à neuf heures du matin, à la petite maison du parc.
J’y serai.
Et toi, Vittoria, tu ne me dis rien ?
Si fait ; je te dis que, tel que tu es, don Juan, maudit et damné d’avance, je t’aime ; et je te dis encore que, si Carolina vient au rendez-vous que tu lui donnes, foi d’Espagnole, je la tuerai.
Adieu, ma charmante, (À ses Pages.) Éclairez.
Le bon ange, le mauvais ange, Don Juan.
Adieu, jeunes fous et belles courtisanes, qui jouez comme des enfants avec des baisers et des poignards, sans savoir ce qu’on en peut faire ; partez avec vos flambeaux, vos rires et votre bruit, et laissez-moi seul et dans l’obscurité : mes pensées ont besoin de silence et de ténèbres. Puissent, cette nuit, mes richesses, mes châteaux et mes titres, ne pas s’évanouir comme vous !… Mon père ne me demande pas, je m’en doutais ; il demande dom Mortes, je m’en doutais encore. Il faut que ce prêtre passe par ici pour entrer dans la chambre de mon père, je lui parlerai le premier. Allons, don Juan, il ne s’agit plus de séduire une jolie femme ou de combattre un brave cavalier ; plus de paroles dorées, plus de bottes secrètes : tu as affaire à un prêtre, parle-lui la sainte langue de l’Église.
Les mêmes, Dom Mortès.
Vous êtes un digne serviteur de Dieu, mon père, toujours prompt à la prière et à la consolation.
C’est mon devoir, monseigneur.
Aussi, n’avons-nous pas douté quand nous vous avons fait mander…
Pardon, mais je croyais que le comte seul avait besoin…
Tous deux, mon père, tous deux : la parole divine est peut-être plus nécessaire encore à ceux qui doivent vivre qu’à ceux qui vont mourir. N’avez-vous pas quelques minutes à me consacrer, mon père ?
Parlez, monseigneur.
Vous avez connu mon noble père dans sa jeunesse ?
J’ai eu l’honneur d’étudier avec lui à l’université de Salamanque.
Vous savez qu’il était d’un caractère…
Plein de grandeur et de seigneurie.
Mais en même temps fougueux et passionné.
Cela lui a fait faire de grandes armes en Italie, monseigneur.
Et de grands péchés en Espagne, mon père.
Il a toujours obéi aux ordres de son roi, comme doit le faire un bon Castillan.
Certes ; mais il n’a pas toujours suivi les commandements de Dieu, comme aurait dû le faire un bon catholique.
Je ferai tout pour ramener là.
Il y a un péché qui doit lourdement charger sa conscience.
Lequel ?
Vous savez qu’avant d’épouser ma mère, il avait eu de… je ne sais quelle esclave mauresque, gitane ou bohémienne, qu’il avait ramenée d’Afrique, un fils qu’il a traité comme mon frère, et à qui il a permis de s’appeler don José, comme je m’appelle don Juan ?
Je le sais.
Eh bien, mon père, voilà ce dont il est urgent qu’il se repente pour le salut de son âme ; et il se repentira certainement, si un saint homme comme vous lui reproche sa faiblesse pour cet enfant, s’il lui défend de le revoir avant sa mort, et s’il lui présente ce sacrifice comme une expiation de sa faute.
Et pourquoi ?
Parce que, comme un païen et un hérétique qu’il est, il dissiperait les richesses des Marana en des jeux de cartes et de dés, au lieu d’en doter de saints couvents, comme je le ferais, moi ;… en orgies avec de jeunes étudiants, au lieu de donner une chasse d’argent à Saint-Jacques de Compostelle, et une chape d’or à Notre-Dame del Pilar, comme je le ferais, moi ;… enfin, en débauches avec de belles courtisanes du démon, au lieu de récompenser largement les saints hommes qui se dévouent au salut et à la consolation des mourants, comme je ferais encore, moi… Comprenez-vous, mon père ?…
Oui, oui, monseigneur… Cependant, je crois que, si don José était à votre place…