Don Pèdre - Voltaire - E-Book

Don Pèdre E-Book

Voltaire

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Beschreibung

EXTRAIT : "TRANSTAMARE : De la cour de Vincenne aux remparts de Tolède, Tu m'es enfin rendu, cher et prudent Almède. Reverrai-je en ces lieux ce brave du Guesclin ? ALMEDE : Il vient vous seconder. TRANSTAMARE : Ce mot fait mon destin. Pour soutenir ma cause, et me venger d'un frère, Le secours des Français m'est encor nécessaire. Des révolutions voici le temps fatal : J'attends tout du roi Charle et de son général..."

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EAN : 9782335086829

©Ligaran 2015

Avertissement de Beuchot

La tragédie de Don Pèdre a été faite, ou du moins commencée, en 1761 ; mais Voltaire l’abandonna bientôt après, la reprit au bout d’un mois, et la promit pour dans deux ans. Il s’y remit enfin après un long intervalle, et la fit imprimer à la fin de 4774. L’édition que je crois l’originale est intitulée Don Pèdre, roi de Castille, tragédie, et autres pièces, 1775. Les pièces qu’on trouve à la suite de la tragédie sont :

I.Éloge historique de la raison, prononcé dans une académie de province, par M. de Chambon. Ce morceau est daté de 1774.

II.De l’Encyclopédie.

III.Dialogue de Pégase et du Vieillard, avec des Notes de M. de Morza.

IV.La Tactique, suivie d’une longue note.

En tête de la tragédie sont l’Épître dédicatoire à M. d’Alembert et le Discours historique et critique sur la tragédie de Don Pèdre. L’Épître dédicatoire a été composée en janvier 1775, entre l’élection de Malesherbes à l’Académie française, qui est de la fin de décembre 1774, et sa réception, qui est du 16 février 1775. Cette tragédie n’a pas été représentée.

Épître dédicatoire

À M. D’ALEMBERT, SECRÉTAIRE PERPÉTUEL DE L’ACADEMIE FRANÇAISE, MEMBRE DE L’ACADÉMIE DES SCIENCES, ETC. PAR L’ÉDITEUR DE LA TRAGÉDIE DE DON PÈDRE

MONSIEUR,

Vous êtes assurément une de ces âmes privilégiées dont l’auteur de Don Pèdre parle dans son discours. Vous êtes de ce petit nombre d’hommes qui savent embellir l’esprit géométrique par l’esprit de la littérature. L’Académie française a bien senti, en vous choisissant pour son secrétaire perpétuel, et en rendant cet hommage à la profondeur des mathématiques, qu’elle en rendait un autre au bon goût et à la vraie éloquence. Elle vous a jugé comme l’Académie des sciences a jugé M. le marquis de Condorcet ; et tout le public a pensé comme ces deux compagnies respectables. Vous faites tous deux revivre ces anciens temps où les plus grands philosophes de la Grèce enseignaient les principes de l’éloquence et de l’art dramatique.

Permettez, monsieur, que je vous dédie la tragédie de mon ami, qui, étant actuellement trop éloigné de la France, ne peut avoir l’honneur de vous la présenter lui-même. Si je mets votre nom à la tête de cette pièce, c’est parce que j’ai cru voir en elle un air de vérité assez éloigné des lieux communs et de l’emphase que vous réprouvez.

Le jeune auteur, en y travaillant sous mes yeux, il y a un mois, dans une petite ville, loin de tout secours, n’était soutenu que par l’idée qu’il travaillait pour vous plaire.

Ut caneret paucis ignoto in pulvere verum.

Il n’a point ambitionné de donner cette pièce au théâtre. Il sait très bien qu’elle n’est qu’une esquisse ; mais les portraits ressemblent : c’est pourquoi il ne la présente qu’aux hommes instruits. Il me disait d’ailleurs que le succès au théâtre dépend entièrement d’un acteur ou d’une actrice ; mais qu’à la lecture il ne dépend que de l’arrêt équitable et sévère d’un juge et d’un écrivain tel que vous. Il sait qu’un homme de goût ne tolère aujourd’hui ni déclamation ampoulée de rhétorique, ni fade déclaration d’amour à ma princesse, encore moins ces insipides barbaries en style visigoth, qui déchirent l’oreille sans jamais parler à la raison et au sentiment, deux choses qu’il ne faut jamais séparer.

Il désespérait de parvenir à être aussi correct que l’Académie l’exige, et aussi intéressant que les loges le désirent. Il ne se dissimulait pas les difficultés de construire une pièce d’intrigue et de caractère, et la difficulté encore plus grande de l’écrire en vers. Car enfin, monsieur, les vers, dans les langues modernes, étant privés de cette mesure harmonieuse des deux seules belles langues de l’antiquité, il faut avouer que notre poésie ne peut se soutenir que par la pureté continue du style.

Nous répétions souvent ensemble ces deux vers de Boileau, qui doivent être la règle de tout homme qui parle ou qui écrit,

Sans la langue, en un mot, l’auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu’il fasse, un méchant écrivain ;

et nous entendions par les défauts du langage non seulement les solécismes et les barbarismes dont le théâtre a été infecté, mais l’obscurité, l’impropriété, l’insuffisance, l’exagération, la sécheresse, la dureté, la bassesse, l’enflure, l’incohérence des expressions. Quiconque n’a pas évité continuellement tous ces écueils ne sera jamais compté parmi nos poètes.

Ce n’est que pour apprendre à écrire tolérablement en vers français que nous nous sommes enhardis à offrir cet ouvrage à l’Académie en vous le dédiant. J’en ai fait imprimer très peu d’exemplaires, comme dans un procès par écrit on présente à ses juges quelques mémoires imprimés que le public lit rarement.

Je demande pour le jeune auteur l’arrêt de tous les académiciens qui ont cultivé assidûment notre langue. Je commence par le philosophe inventeur, qui, ayant fait une description si vraie et si éloquente du corps humain, connaît l’homme moral aussi bien qu’il observe l’homme physique.

Je veux pour juge le philosophe profond qui a percé jusque dans l’origine de nos idées, sans rien perdre de sa sensibilité.

Je veux pour juge l’auteur du Siège de Calais, qui a communiqué son enthousiasme à la nation, et qui, ayant lui-même composé une tragédie de Don Pèdre, doit regarder mon ami comme le sien, et non comme un rival.

Je veux pour juge l’auteur de Spartacus, qui a vengé l’humanité dans cette pièce remplie de traits dignes du grand Corneille : car la véritable gloire est dans l’approbation des maîtres de l’art. Vous avez dit que rarement un amateur raisonnera de l’art avec autant de lumière qu’un habile artiste ; pour moi, j’ai toujours vu que les artistes seuls rendaient une exacte justice… quand ils n’étaient pas jaloux.

C’est aux esprits bien faits
À voir la vertu pleine en ses moindres effets ;
C’est d’eux seuls qu’on reçoit la véritable gloire.

Et je vous avouerai que j’aimerais mieux le seul suffrage de celui qui a ressuscité le style de Racine dans Mélanie, que de me voir applaudi un mois de suite au théâtre.

Je présente la tragédie de Don Pèdre à l’académicien qui a fait parler si dignement Bélisaire dans son admirable quinzième chapitre dicté par la vertu la plus pure, comme par l’éloquence la plus vraie, et que tous les princes doivent lire pour leur instruction et pour notre bonheur. Je la soumets à la saine critique de ceux qui, dans des discours couronnés par l’Académie, ont apprécié avec tant de goût les grands hommes du siècle de Louis XIV. Je m’en remets entièrement à la décision de l’auteur éclairé du poème de la Peinture, qui seul a donné les vraies règles de l’art qu’il chante, et qui le connaît à fond, ainsi que celui de la poésie.

Je m’en rapporte au traducteur de Virgile, seul digne de le traduire parmi tous ceux qui l’ont tenté ; à l’illustre auteur des Saisons, si supérieur à Thomson et à son sujet ; tous juges irréfragables dans l’art des vers très peu connu, et qui ont été proclamés pour jamais dans le temple de la gloire par les cris mêmes de l’envie.

Je suis bien persuadé que le jeune homme qui met sur la scène don Pèdre et Guesclin, préférerait aux applaudissements passagers du parterre l’approbation réfléchie de l’officier aussi instruit de cet art que de celui de la guerre, qui, ayant fait parler si noblement le célèbre connétable de Bourbon, et le plus célèbre chevalier Bayard, a donné l’exemple à notre auteur de ne point prodiguer sa pièce sur le théâtre.

Il souhaite, sans doute, d’être jugé par le peintre de François Ier, d’autant plus que ce savant et profond historien sait mieux que personne que, si on dut appeler le roi Charles V habile, ce fut Henri de Transtamare qu’on dut nommer cruel.

J’attends l’opinion des deux académiciens philosophes, vos dignes confrères, qui ont confondu de lâches et sots délateurs par une réponse aussi énergique que sage et délicate, et qui savent juger comme écrire.

Voilà, monsieur, l’aréopage dont vous êtes l’organe, et par qui je voudrais être condamné ou absous, si jamais j’osais faire à mon tour une tragédie, dans un temps où les sujets des pièces de théâtre semblent épuisés ; dans un temps où le public est dégoûté de tous ses plaisirs, qui passent comme ses affections ; dans un temps où l’art dramatique est prêt à tomber en France, après le grand siècle de Louis XIV, et à être entièrement sacrifié aux ariettes, comme il l’a été en Italie après le siècle des Médicis.

Je vous dis à peu près ce que disait Horace :

Plotius et Varius, Mæcenas, Virgiliusque,
Valgius, et probet hæc Octavius optimus, atque
Fuscus, et hæc utinam Viscorum laudet uterque, etc.

Et voyez, s’il vous plaît, comme Horace met Virgile à côté de Mécène. Le même sentiment échauffait Ovide dans les glaces qui couvraient les bords du Pont-Euxin, lorsque, dans sa dernière élégie de Ponto, il daigna essayer de faire rougir un de ces misérables folliculaires qui insultent à ceux qu’ils croient infortunés, et qui sont assez lâches pour calomnier un citoyen au bord de son tombeau.

Combien de bons écrivains dans tous les genres sont-ils cités par Ovide dans cette élégie ! Comme il se console par le suffrage des Cotta, des Messala, des Fuscus, des Marius, des Gracchus, des Varus, et de tant d’autres dont il consacre les noms à l’immortalité ! Comme il inspire pour lui la bienveillance de tout honnête homme, et l’horreur pour un regrattier qui ne sait être que détracteur !

Le premier des poètes italiens, et peut-être du monde entier, l’Arioste, nomme, dans son quarante-sixième chant, tous les gens de lettres de son temps pour lesquels il travaillait sans avoir pour objet la multitude. Il en nomme dix fois plus que je n’en désigne ; et l’Italie n’en trouva pas la liste trop longue. Il n’oublie point les dames illustres, dont le suffrage lui était si cher.

Boileau, ce premier maître dans l’art difficile des vers français, Boileau, moins galant que l’Arioste, dit, dans sa belle épître à son ami, l’inimitable Racine :

Et qu’importe à nos vers que Perrin les admire,
Que l’auteur de Jonas s’empresse pour les lire…
Pourvu qu’ils puissent plaire au plus puissant des rois ;
Qu’à Chantilly Condé les souffre quelquefois ;
Qu’Enghien en soit touché ; que Colbert et Vivonne,
Que La Rochefoucauld, Marsillac, et Pompone,
Et mille autres qu’ici je ne puis faire entrer,
À leurs traits délicats se laissent pénétrer.

J’avoue que j’aime mieux le Mæcenas Virgiliusque, dans Horace, que le plus puissant des rois