Enquête à Mont-de-Marsan - Isabelle Laffourcade - E-Book

Enquête à Mont-de-Marsan E-Book

Isabelle Laffourcade

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Beschreibung

À la fin d’un vernissage au Centre d’Art Contemporain de Mont-de-Marsan, le directeur du journal local est retrouvé mort, appuyé contre une œuvre. Le commissaire Lafourcade enquête, bien que ni l’art, ni à la série Games Of Throne sujet de l’expo, ne soit de grandes passions pour lui. Préoccupations écologiques, visite de Marquèze, évocation de sources guérisseuses, très nombreuses dans le département…

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Isabelle Laffourcade

mort au musée

© – 2024 – 79260 La Crèche

Tous droits réservés pour tous pays

Le commissaire Hervé Lafourcade ne décolérait pas : son amoureuse était partie à Venise sans lui. Lui qui rêvait d’accompagner Joëlle dans les rues bordées de canaux, de marcher infiniment sur les pavés élastiques de la ville piétonne, de boire un cocktail qu’on ne boit qu’en Italie, un Bellini ou un Spritz en duo, en regardant clapoter la lagune. Eh bien non, elle s’était barrée avec des amies. Mais il était quoi pour elle ? C’est vrai qu’elle ne voulait pas vivre avec lui, elle gardait sa maison, elle venait, elle repartait… et là elle était partie en voyage ! Mais quelle plaie de vouloir autant de liberté, pensa-t-il furieux.

Jeudi, jour de vernissage

François Fin sentait monter la fatigue, il avait l’habitude. Par contre les démangeaisons qu’il ressentait étaient totalement inhabituelles. Mais les longues journées de travail au journal, les bouclages en fin de soirée, puis là comme ce soir, une invitation à un vernissage étaient son lot quotidien. Pas mal d’ailleurs, pour un Centre d’Art Contemporain de province, d’avoir fait venir l’expo « Game Of Thrones » même si la série était passée à la télévision depuis quelques années. On l’avait vue à Londres, Paris et maintenant Mont-de-Marsan. Faut avouer que ça avait de la gueule.

François se retourna, il était dans la deuxième salle, il n’y avait plus personne. Il entendait quelques amateurs qui traînaient dans l’entrée, il était tranquille. Il sortit un sachet de poudre, l’étala rapidement sur la vitre de son smartphone. Avec une paille métallique, il aspira la coke par une narine, puis par l’autre. La force de la came le surprit. C’était inhabituellement puissant. Il leva les yeux, vit son épouse qui le visait, un pistolet à la main depuis la mezzanine. Il ouvrit la bouche mais aucun son n’en sortit. Son regard bleu tourna vers sa droite, croisant celui encore plus bleu du Roi de la Nuit, chef des Marcheurs Blancs. Il trébucha et s’empala sur le couteau que tenait la petite Arya Stark. Voulant se dégager, il sentit qu’on le poussait en avant. Puis il ne sentit plus rien.

Hervé fut réveillé par son portable, il était dans son canapé, endormi devant une série policière remplie de trucs hallucinants, à croire que les scénaristes, comme les écrivains, ne mettaient jamais un pied ni le nez dans un commissariat, un palais de justice ou une prison ! Vingt-trois heures et il fallait partir au boulot. Un crime au Centre d’Art Contemporain Raymond-Farbos…

Plutôt un lieu où on assassine le bon goût, pensa-t-il en se marrant !

Il monta dans sa voiture, il n’allait pas y aller à vélo de nuit… quoique, il avait hésité. Il sortit du Tuco, passa en trombe au ras des arènes du Plumaçon et de l’école, déboucha sur le ralentisseur, content d’avoir évité les deux autres, contourna le Sablar, s’engagea dans la petite rue Léon-des-Landes, et laissa son véhicule près de l’entrée du marché sur le trottoir. Il finit à pied, la rue Saint-Vincent étant tout près et à contresens.

L’équipe technique venait d’arriver.

Sa collègue Agnès Castède était là.

— Ah bonsoir Agnès, on a quoi ?

— Un meurtre visiblement, un homme.

— On sait de qui il s’agit ?

— Oui, François Fin.

— Oh putain !!!! Le directeur du « Pignot » ???

— Oui oui, lui-même.

— Le directeur du journal local ? Le seul journal 100% landais ?

— Oui c’est lui.

— Le journal le plus lu dans notre département ?

— Chef, ça va ? Oui François Fin, le directeur du journal, le seul l’unique.

— Oui pardon Agnès, enfin je le connaissais un peu.

— Oui, j’imagine que de par votre statut vous l’aviez déjà rencontré.

— Il est mort comment ?

— C’est Arya qui l’a tué.

— Ah, on a donc un suspect ?

— Mais non Chef, c’est l’expo Game Of Thrones, et Arya c’est un personnage.

— Je ne comprends rien.

— Game Of Thrones, la série télé ?

— Jamais vue.

— Bon, c’est une expo dédiée à la série.

— Oui.

— On a retrouvé le corps empalé sur un couteau tenu par une statue représentant Arya, un des personnages importants de la série.

— Empalé ?

— Oui.

Un homme s’approcha, Hervé lui demanda qui il était :

— Waleran Bortholin, président de l’association du Centre d’Art Contemporain des Landes.

— Bonsoir, je suis le commissaire chargé de l’enquête. Je vous écoute.

— Eh bien j’étais ravi d’avoir pu programmer cette exposition exceptionnelle, je ne sais pas si vous vous rendez bien compte du rayonnement que cela va apporter à Mont-de-Marsan.

— Pas bien à vrai dire. Et un meurtre, ça apporte de la clientèle ?

— Heu…

— Bon, vous avez vu quoi, il s’est passé quoi ?

— Eh bien comme la soirée était finissante, j’étais à côté, au restaurant, à boire un verre avec quelques amis, en grignotant des tapas.

— Là à côté, à la Casa ?

— Oui, la préparation et l’installation ont été longues, alors ce soir, avec le vernissage, je décompressais un peu…

— Vous avez vu quoi ?

— Rien…

— Vous avez vu François Fin ?

— Oui, il est arrivé assez tard, il a parlé avec son photographe, enfin le photographe du Pignot, et puis une femme aussi, que je ne connaissais pas, et puis je suis sorti. Et quand je suis revenu, je ne pouvais plus accéder à la salle.

— Qui a prévenu la police ?

— Je ne sais pas !

— Moi, fit une voix.

Hervé regarda la nouvelle venue. Grande blonde, la fumée de sa cigarette électronique dansait devant ses yeux.

— Vous êtes ?

— Natalia Lopez, la secrétaire de l’association du CAC des Landes.

— Bien, avez-vous vu quelque chose ?

— Rien. François était visiblement seul dans la salle. Au bout d’un moment, j’ai voulu vérifier qu’il n’y avait plus personne pour que nous puissions fermer, et il était là, moitié couché sur Arya.

— Mais elle a été abîmée ? Demanda Waleran.

— On pourra sûrement la réparer, et il y a l’assurance, tempéra Natalia.

— Oui, heureusement, murmura Waleran.

— C’est sûr que ça va être autre chose pour la victime ! Bon, vous êtes sûre qu’il était seul ?

— Heu… Non, une personne aurait pu s’en aller par l’escalier, mais il grince horriblement, ou bien par la porte de la réserve, seulement il faut connaître.

— Mais si on monte l’escalier, à un moment il faut redescendre ?

— Oui, il y a un colimaçon au fond de la première salle, où il restait du monde.

— On va regarder tout ça.

Game of Thrones découverte

Le commissaire poussa la porte vitrée et la clochette accrochée tinta doucement. Il se trouva nez à nez avec un énorme trône constitué de plusieurs épées soudées entre elles.

— C’est quoi cette horreur ?

— Commissaire, c’est le fameux trône de Games Of Thrones !

— Ah oui, merci Agnès.

Ils prirent par la droite, Agnès continua la présentation de l’expo :

— Là vous avez la famille Lannister, leur bannière est le Lion sur fond rouge et leur devise « Hear me Roar », mais tout le monde croit que c’est « un Lannister paye toujours ses dettes ». Voici Jaime, sa sœur Cersei et leurs trois enfants…

— Stop là merci… Je vois bien Agnès que tout ceci vous passionne, mais pas moi. Allons dans la salle où a eu lieu le crime.

— Ok. Là au fond vous avez l’escalier en colimaçon.

— Ah oui, derrière cette aimable vieille dame.

— Oui c’est Olenna Tyrel, la doyenne de la maison Tyrel, dont la devise est…

— Agnès, stop.

— Oui chef. La deuxième salle, où le crime a été commis, à moins qu’il ne s’agisse d’un accident, on ne sait pas. Il y a la famille Stark, avec Arya qui tient un poignard, et la famille Barathéon.

— Agnès…

— Oui, je me tais.

— Bon, donc il est empalé sur le couteau que tient cette jeune femme. Il doit être lourd le socle, rien n’a l’air d’avoir bougé, bien que le corps du défunt y soit appuyé depuis quoi, une heure ?

— Environ.

— Chaque statue est posée sur un socle de cinquante kilos afin que rien ne bouge, précisa Waleran qui les avait suivis.

— Bon, on va le sortir de là pour l’allonger au sol. Les techniciens, vous avez fini prélèvements et photos ?

— Oui.

François Fin fut donc soulevé de son appui et couché à terre. On voyait encore du sang qui avait coulé de son nez. Et aussi un peu au niveau de son ventre. Ses yeux bleus qui avaient fait craquer tant de filles fixaient le plafond sans bouger. Hervé remarqua un portable aux pieds d’Arya, et son couteau qu’elle brandissait toujours. Il se pencha pour le regarder de plus près.

— Qu’elle en est la matière ? Demanda-t-il se tournant vers Waleran

— Certainement de la résine, c’est solide, et on peut reproduire toute sorte d’objets, avec des moulages, c’est très précis et peu onéreux, précisa le président de l’association. Vous pensez qu’on va pouvoir rouvrir le musée rapidement ?

— Oh ce n’est pas moi qui décide, il faudra voir ça avec le magistrat instructeur !

— Mais on a eu des frais, on comptait beaucoup sur cette expo !

— Oui je comprends, personnellement je dirai que nous n’avons plus besoin des lieux. Si vous m’autorisez à y passer en cas de besoin.

— Commissaire, vous serez ici comme chez vous.

— Oui commissaire, je pourrais vous présenter tous les personnages de la série, s’enthousiasma Agnès.

— Oui voilà, on fera ça, un jour !

— Dites Chef, il n’y a pas d’élu à ce vernissage ?

— Comment ça ?

— Généralement un élu vient pour représenter le Maire, faire un discours, tout ça…

— Oui c’est vrai.

Hervé Lafourcade s’enquit de savoir auprès de Waleran Bortholin si l’élu de service était toujours dans les parages. Oui, il était en train de raconter la généalogie de ses ancêtres à un parterre de dames passionnées de rencontrer un descendant quasi direct de Philippe Le Bel dont il portait le prénom : Philippe, mais de Hainaut.

— Bonjour Monsieur, je suis le commissaire Hervé Lafourcade, pourriez-vous me raconter la soirée ?

— Eh bien tout se déroulait à merveille, Waleran avait fait une présentation remarquable de la collection…

— La collection de quoi ?

— Enfin commissaire, l’exposition.

— Oui, pardon, poursuivez !

— Moi-même j’avais fait un fort beau discours, évoquant la parenté de ces personnages de fiction avec mes propres ancêtres ; les gens étaient fascinés !

— Un résumé des faits s’il vous plaît.

— Bien sûr ! Après les discours, le verre de l’amitié fut servi, soit dit entre nous ce vin n’était pas issu des bouteilles que j’ai l’habitude d’ouvrir, mais bon. Les gens circulaient, parlaient, toujours les mêmes têtes. Non, à un moment j’ai vu une femme que je n’avais jamais vue, une blonde. Elle n’a parlé à personne, elle s’intéressait de très près aux plaquettes. Certainement une passionnée de la série. Puis je ne l’ai plus vue, sauf quand elle est partie, marchant alors d’un pas vif.

— Vous étiez où à ce moment ?

— Je n’ai quasiment pas bougé de l’entrée, c’est l’endroit idéal. Et puis si j’étais un peu las, je pouvais toujours m’asseoir sur le trône ! Après tout mes ancêtres…

— Oui oui. Donc la blonde vous ne la voyez plus, et puis tout d’un coup elle sort rapidement ?

— C’est ça.

— Elle est arrivée d’où ?

— De par là, donc je pense qu’elle était à l’étage et qu’elle est descendue par le colimaçon.

— Merci monsieur de Hainaut.

Une fois dehors Agnès Castède demanda à son supérieur :

— Alors chef, le noble, quel effet vous a-t-il fait ?

— Pfff… Encore un qui s’écoute parler !

— Vous savez qu’il voulait porter plainte pour « défiguration d’un bâtiment historique » ?

— Non, pourquoi ? Des tags ?

— Non commissaire, des locataires qui avaient osé mettre un palmier en plastique sur leur balcon.

— Hein ?

— Oui c’est ça. Vous voyez la place Charles-de-Gaulle ?

— Oui, devant le théâtre.

— L’ancienne mairie, qui est aussi l’ancienne bibliothèque, a été transformée en appartements. Ils sont là, les coupables de mauvais goût qui mettent un palmier en plastique au balcon.

— C’est vrai que le bâtiment est beau, un des immeubles prestigieux du centre-ville. Nous n’avons pas donné suite ? Nous n’avons pas jeté au fond d’une geôle sans fond ces infâmes fauteurs de mauvais goût ? Demanda-t-il en riant.

— Eh non, on s’est contenté de dire qu’on allait réfléchir.