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Beschreibung

Ce recueil est le fruit de la rencontre de deux générations vulnérables pendant la pandémie de COVID-19. Il relate les entretiens téléphoniques hebdomadaires entre neuf jeunes de 18 ans et neuf aînés qui ne se connaissaient aucunement avant ce projet. Au fil de leurs échanges, ils ont su faire connaissance et voyager au travers des propos de l'autre. Ce livre est un billet d'entrée privilégié au théâtre de leurs vies.


*La vente du livre permet de financer la campagne de sensibilisation (@entretoi.et.moi) sur Instagram et Facebook visant à promouvoir la solidarité intergénérationnelle. Le reste des profits ira à un ou des organismes à but non lucratif qui cherchent à rassembler les générations. 

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Et si on se racontait?

Un dialogue intergénérationnel en temps de pandémie - Collectif de jeunes québécois en collaboration avec Contact Aînés

Collectif de jeunes québécois © 2021

CRÉDITS

Auteur(e)s

Maxine Joly-ChevrierYasmine Amar Caroline Skendo Élodie Latreille Leili Agharazi Virginie Arsenault Mathis Bourassa Sheila Razavi Lyna Bourezane

Instigation et gestion de projet

Maxine Joly-Chevrier

Coordination des participants aînés

Nathalie Guéchi Contact aînésRévision linguistique

Céline Marquis

Édition, graphisme et mise en pages

Zoé Primeau-Barey

Mise en pages de l'édition numérique

Michael Lesko-Krleza

Illustrations Couverture avantJessica Zhu Couverture arrièreVirginie Arsenault

Courriel

[email protected]

Dépôt légal

ISBN (Papier) 978-2-9819622-0-1ISBN (EPUB) 978-2-9819622-1-8Bibliothèque et Archives nationales du Québec - 2021Bibliothèque et Archives du Canada - 2021

Montréal (Québec) Canada, Janvier 2021

REMERCIEMENTS

Merci du fond du cœur à tous les jeunes et moins jeunes qui ont participé à ce projet. Un merci particulier à Nathalie Guéchi de Contact aînés qui a tout de suite cru en cette idée. Nous sommes reconnaissants de l’appui financier du gouvernement du Canada, de TakingITGlobal et de Service Jeunesse Canada pour l’impression de ce recueil. Sans votre généreuse participation à tous, ce projet n’aurait jamais vu le jour.

TABLE DES MATIÈRES

Préambule

Chapitre I – Maxine et Odette

Chapitre II – Yasmine et Marianne

Chapitre III – Caroline et Claudette

Chapitre IV – Élodie et Carole

Chapitre V – Leili et Nicole

Chapitre VI – Virginie et Nicole

Chapitre VII – Mathis et Fabien

Chapitre VIII – Sheila et Roselyne

Chapitre IX – Lyna et Hélène

Mot de la fin

PRÉAMBULE

Ce projet est né du chaos « covidien » qui s’est mis à sévir en mars 2020, par le biais d’un appel téléphonique de Maxine, représentante d’un groupe de jeunes de Montréal et ses environs, me témoignant de leur volonté de s’impliquer auprès de personnes aînées. Cet appel est un doux réconfort par rapport à la brutalité du monde qui nous entoure. C’est aussi, une reconnaissance de la jeunesse envers les aînés avec un profond désir d’être plus proche et de créer un dialogue intergénérationnel.

Cette initiative a permis de mesurer les écarts entre générations, de réaliser l’évolution sociétale, de parler du passé au présent tout en se projetant dans le futur ! Et à travers cette mosaïque intergénérationnelle, on y trouve des échanges inspirants, des récits captivants et des humains passionnants. Ce livre est une invitation au rapprochement entre générations pour bâtir des ponts afin que notre société soit plus inclusive et solidaire.

Merci à tous les participants d’avoir collaboré à cette aventure collective et à vous, les lecteurs, je vous souhaite du plaisir dans votre lecture.

Nathalie GuéchiDirectrice généraleContact aînés

Chapitre I

Maxine et Odette

Maxine

18 ans

Montréal

Adoptée par des parents québécois à l’âge d’un an, j’ai grandi à Montréal, ville hétéroclite pour sa culture. Passionnée par les arts, dont le théâtre et la musique, j’ai été très impliquée dans ces activités parascolaires à l’école primaire ainsi qu’au secondaire. Voyager est une passion qui m’anime depuis toute petite. Du camp de base de l’Everest à la Grande Muraille de Chine, je suis à la recherche de ­l’inconnu et de l’aventure. Maintenant âgée de 18 ans, j’entame ma deuxième année au ­Collège Jean-De-Brébeuf en Sciences de la nature. Avec la pandémie actuelle, soit la ­COVID-19, je voyage à travers les expériences enrichissantes de la vie d’Odette. Ce dialogue intergénérationnel m’a permis de m’ouvrir à un autre univers, qui est à la fois familier et lointain.

Odette

77 ans

Québec

Odette est une femme charmante dont le vécu pourrait remplir une dizaine de vies ! Dès nos premiers appels, j’ai été séduite par son honnêteté, son humour et son parcours de vie impressionnant. À travers nos échanges téléphoniques, j’ai découvert un Québec rudimentaire en termes de ressources, teinté aux goûts de la religion catholique, et j’ai aussi découvert une jeune femme au désir ardent d’explorer le monde. Odette apprécie les petits plaisirs de la vie, comme celui de déguster une bonne crêpe bretonne à l’Île d’Orléans, de chanter au sein d’une chorale et de peindre dans ses temps libres. Elle vit dans le moment présent et c’est tout à son honneur.

Enfance

Aînée d’une famille de six frères et sœurs, Odette est née à Natashquan dans les années 40. « Je suis née au Moyen Âge », dit-elle d’un ton rieur. Dépourvu du personnel médical nécessaire, le village devait se satisfaire de la présence occasionnelle d’une infirmière (une garde-malade). Ce manque de ressources obligeait les habitants « de faire avec les moyens du bord ». Lorsqu’elle était encore bébé, Odette a attrapé une pneumonie en plus d’une pleurésie. Au bord de la mort, un bienveillant citoyen lui a donné la seule pilule sur laquelle pouvait compter le village à titre de médicament. « C’était une pilule qu’il conservait pour son cheval en cas de maladie », explique-t-elle. Odette est heureusement aujourd’hui toujours en grande forme, à l’âge de 77 ans.

De mon côté, à mon arrivée au Québec alors que j’étais encore un bébé, j’ai eu, comme Odette, des problèmes de santé. Contrairement à elle, j’ai été soignée de façon plus traditionnelle, parce qu’à Montréal nous avions le personnel, la technologie et les médicaments nécessaires.

Odette se remémore les services postiers du village : « Puisqu’il n’y avait pas de grands magasins, on devait commander nos articles dans des catalogues. Je me rappelle qu’une de mes voisines avait commandé un set de vaisselle qu’elle attendait avec impatience. La poste venait normalement en bateau lorsqu’on commandait avant que les rigueurs de l’hiver figent le fleuve dans les glaces. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle a reçu le paquet lancé d’un avion ! Tout était en mille morceaux. »

Fille d’un père qui était absent l’année durant, car il accompagnait un groupe d’arpenteurs, Odette, étant l’aînée, a hérité de beaucoup de responsabilités dans la famille. Elle raconte que sa sœur cadette a dit « Odette » avant de dire « maman ». Elle se rappelle : « Pour passer le temps, avec mes frères et sœurs, on s’inventait des jeux. Mon plus beau souvenir d’enfance, c’est la musique. Peu importe ce qu’on faisait, on chantait. »

Pour ma part, lorsque j’étais au primaire, vers 2010, les iPod Touch d’Apple, les jeux en ligne comme Jeux.fr et Club Penguin ainsi que la Nintendo DS étaient au summum de leur popularité. Je me rappelle les après-midis et les journées passées à m’amuser, avec mes amis de l’époque, avec ces jeux précurseurs de la révolution technologique à venir.

Éducation

« J’adorais l’école et les livres », se rappelle Odette. À son époque, m’explique-t-elle, les femmes avaient deux choix de carrière : enseignante ou infirmière. Elle, qui a toujours eu une curiosité insatiable envers le monde, a donc opté pour le métier d’enseignante au primaire.

Jusqu’à l’âge de 14 ans, elle a étudié à Natashquan. Souvent, il manquait d’élèves pour composer les classes d’un même niveau. Il était alors courant d’enseigner à une classe formée d’élèves d’années différentes. Odette raconte : « Les plus vieux aimaient aider les petits et leur montrer comment faire. Ils étaient fiers. »

Ensuite, la famille a déménagé à Baie-Comeau, où elle a poursuivi son éducation. À l’époque, les niveaux scolaires étaient divisés en années. Le primaire se terminait autour de la septième année. Puis, de la huitième à la dixième année, c’étaient les années secondaires. Odette s’est éloignée du nid familial pour aller étudier pendant un court séjour de six mois à Moncton afin d’apprendre l’anglais. « Là-bas, on parlait plutôt franglais ! », me dit-elle en riant. « Tu crosseras la street quand la light sera green », s’exclame-t-elle au téléphone en guise d’exemple d’une phrase typiquement chiac, c’est-à-dire d’un mélange de français et d’anglais.

Le séjour d’Odette à Moncton m’a rappelé un souvenir d’enfance. Mon père, francophone, s’est démené corps et âme à m’apprendre l’anglais. Jusqu’à mes 10 ans, il m’a parlé en anglais tandis que ma mère me parlait en français ; ceci alors que mon environnement scolaire et social était très francophone. Pas toujours évident. Aujourd’hui, je suis extrêmement reconnaissante de son approche bilingue qui m’a ouvert les portes du monde !

Odette a poursuivi son parcours académique à Montréal. « À l’époque, il y avait trois brevets : A, B et C. J’ai commencé par le C et j’ai terminé le B en cours du soir à Sept-Îles et à Baie-Comeau. C’étaient des cours de culture générale et de techniques d’enseignement. Il y avait un livre du maître pour chaque niveau que l’on devait enseigner. », relate-t-elle.

À l’âge de 18 ans, Odette s’est retrouvée devant sa première class de 39 élèves âgées de cinq et six ans. Elle se rappelle la diversité des profils étudiants : « Certains venaient de bonnes familles et avaient beaucoup de ressources tandis que d’autres venaient à l’école avec rien. » C’était plus difficile d’avoir du matériel pédagogique à ce moment-là que ça l’est aujourd’hui.

Le métier d’enseignante a permis à Odette de voyager à travers le Québec et à travers les cultures. Au fil de sa carrière, elle a enseigné notamment dans une école musulmane, une réserve autochtone et dans des écoles catholiques. Je trouve incroyable la richesse du métier d’enseignante, qui va au-delà des cultures, qui est universel.

Odette se remémore que les religieuses étaient omniprésentes dans les écoles québécoises : « Elles étaient partout et faisaient la discipline. Le curé venait à l’occasion faire sa tournée auprès des classes. » Cette remarque me fait penser à mon école secondaire, où j’ai fréquenté un pensionnat sans y résider. Malgré l’absence des religieuses en tant qu’enseignantes, elles étaient encore impliquées au niveau administratif lorsque j’y ai étudié, de 2014 à 2019. Je me rappelle qu’elles ont permis de financer notre laboratoire informatique !

La dernière école où Odette a enseigné était de religion musulmane. Elle m’explique qu’il n’y avait pas de barrière entre elle et ses élèves, mais plutôt entre elle et ses collègues masculins et avec les parents de ses élèves : « Les parents ne pouvaient pas communiquer directement avec moi. Ils devaient passer par l’intermédiaire du directeur qui me transmettait alors leur message. » Cette dynamique m’a surprise. De mon côté, j’ai toujours grandi dans un univers où les professeurs communiquaient directement par email avec les parents.

Quant à moi, j’étudie au Collège Jean-de-Brébeuf, au niveau collégial, dans le programme Sciences de la nature. J’envisage une carrière dans un domaine qui me permettra d’être engagée socialement et d’être stimulée intellectuellement. J’admire beaucoup le parcours professionnel d’Odette qui lui a donné la possibilité de voyager à travers diverses cultures. J’espère pouvoir trouver un métier qui me permettra de voyager à l’international !

Comparaison entre générations

Ce que j’admire d’Odette, c’est sa sagesse. « Je ne vis pas dans le passé ni dans mes souvenirs. Le fameux bon vieux temps n’est pas à magnifier. Certes, il y avait de bons moments dans ce temps-là, tout comme il y en a de très bons dans le présent et il y en aura d’autres à vivre dans le futur. » dit-elle calmement. Je trouve intéressante cette réflexion, car cela montre sa lucidité face à la vie. « Je trouve triste que certaines personnes de mon âge soient complètement insensibilisées face à la réalité. Elles vivent dans leurs souvenirs et dans leur passé. Elles ont diabolisé toutes les nouvelles technologies. », dit-elle pensivement. Je peux confirmer, pour ma part, la validité du témoignage d’Odette. En effet, il me semble que c’est chose courante que d’entendre des adultes dire : « Ah les jeunes d’aujourd’hui ! Dans mon temps, nous étions plus travaillants. Nous ne passions pas notre temps à vacher sur le sofa. Non, ce n’est plus ce que c’était avant ! » Selon moi, ces phrases typiques sont à éviter puisqu’elles nourrissent les préjugés et des stéréotypes entre nos générations. Au lieu de célébrer le beau et le bon de chaque époque, il y a comparaison et ainsi, préférence et prise de position ; ce qui détruit automatiquement tout ce que l’autre génération a de positif.

Un des bons coups de l’époque d’Odette, c’est le savoir-faire requis pour construire les meubles et les électroménagers durables. De nos jours, avec l’obsolescence, les appareils brisent en général beaucoup plus rapidement. « Si je cherchais un marteau aujourd’hui, j’irais l’acheter au marché aux puces », me confie-t-elle. Cette phrase d’Odette me fait penser à ce que mon père me disait par rapport aux réfrigérateurs qui pouvaient durer trente ans comparativement à ceux d’aujourd’hui qui rendent l’âme après 10 ou 15 ans.

Odette me raconte une anecdote qui me fait sourire : « Le café ! Aujourd’hui, c’est difficile de trouver une vraie cafetière parce que la plupart du monde achète des machines Nespresso qui font tout le travail pour eux. Si bien que ces gens ne savent plus comment faire leur café par eux-mêmes ! » Dans cette simple remarque, je relève une différence entre nos deux générations. Certes, il est vrai qu’en 2020, la société recherche efficacité et optimisation du temps. Chaque minute est comptée. Chaque action posée est quasiment calculée. On peut conclure que le mode de vie accéléré, parfois effréné, en 2020 tend à nous faire oublier l’essentiel. Je n’ajouterai rien quant à la bonne façon de préparer un café. :)

Odette continue sur son exemple de café. Elle me fait remarquer qu’à son époque, ça n’existait pas un café avec « crème fouettée et pumpkin spice latté » ! Cette allusion me fait réfléchir aux besoins incessants de grandeur et de grandiose de la société de surconsommation dans laquelle je suis née. « Pour moi, la citrouille ne se mélange pas avec le café noir ! Ce sont deux bons aliments, mais pas mélangés ensemble ! » s’exclame-t-elle d’un ton assuré et franc. Ce que je retiens de notre entretien cette journée-là, c’est de ne pas perdre de vue la simplicité, la nature des éléments. « Trop, c’est comme pas assez ! » dirait l’expression québécoise.

Premiers emplois

Odette a fait son entrée dans le « monde des grands » à l’âge de 14 ans, lorsqu’elle a commencé à travailler au magasin général de Natashquan. Parmi ses tâches quotidiennes, figurent le tri des fruits et légumes, l’encaissement des achats ainsi que le remplissage des étagères. Odette me raconte que les fruits et légumes n’étaient pas des plus mûrs lors de leur réception au magasin, pour qu’ils ne périssent pas avant leur arrivée au village.

Un des plus beaux souvenirs d’Odette à son travail, c’est d’avoir pu croquer et ­savourer le tendre goût d’une banane bien mûre : « Je n’avais jamais goûté à une banane avant mes 14 ans », me confie-t-elle en riant.

En ce qui me concerne, j’ai eu mon premier emploi à 14 ans. J’étais aide-cuisinière dans un bistro à la campagne. Je m’occupais de préparer les dîners pour les clients tout en gérant la cuisine à l’arrière du restaurant. Comme Odette, ce premier emploi m’a fait entrer dans la cour des grands. Cet emploi m’a permis, entre autres, d’apprendre à réellement cuisiner puisque je n’avais même jamais fait bouillir de l’eau avant !

Odette côtoyait également les Montagnais au magasin général. Ceux-ci venaient de leur réserve se procurer des biens. Ma locutrice me confie que les Montagnais et les « Blancs » n’étaient pas très proches. Au contraire, il n’y avait pas, de part et d’autre, d’intérêt à vouloir davantage se connaître pour développer des liens. Il y avait une curiosité prudente.

Pour ma part, je n’ai jamais interagi avec la clientèle du bistro puisque je veillais aux chaudrons et aux repas. Je travaillais la majeure partie du temps seule. C’est d’ailleurs une des raisons pour laquelle j’ai décidé de devenir monitrice de ski l’année suivante.

Après le magasin général, Odette a travaillé dans un camp de jour pour enfants à Baie-Comeau et à Sept-Îles. Elle a bien aimé cet emploi : « On amusait les jeunes et on inventait des jeux », m’explique-t-elle. Ce plaisir d’être en compagnie des enfants est le même que j’avais lorsque j’étais monitrice de ski pour les enfants de trois à cinq ans, pour Ski Bromont, dans les Cantons-de-l‘Est. Cet emploi que j’ai occupé de l’âge de 15 à 17 ans a marqué mon adolescence. Tout comme Odette, j’inventais des comptines et des aventures pour amuser mes élèves. De plus, je me suis liée d’amitié avec certains moniteurs de ski. Je me souviendrai toujours de nos sorties de ski en soirée après une longue journée de travail.

Proches aidants

Odette a une âme extrêmement généreuse. Pendant 10 ans, elle a pris soin, à titre d’aidante naturelle, d’une amie sévèrement atteinte du cancer. Odette a alors été témoin du manque de soutien émotionnel et financier de la part du gouvernement envers les proches aidants, et ceci, bien avant la COVID-19. En faisant mes recherches sur le site Internet du Regroupement des aidants naturels du Québec (RANQ), voici quelques statistiques choquantes qui m’ont fait réaliser à quel point notre système de santé actuel repose sur la grandeur d’âme des bénévoles :

Sans proche aidant, le gouvernement devrait débourser de 4 à 10 milliards de dollars et embaucher 1,2 million de professionnels à temps complet.En raison du stress généré sur le corps, la durée de vie du proche aidant serait réduite de quatre à huit ans.

Avec la COVID-19 et la tragédie ayant eu lieu dans les CHSLD (centres d’hébergement et de soins de longue durée), plus que jamais, nous pouvons constater à quel point les proches aidants sont essentiels dans le réseau de la santé au Québec.

Odette me dit qu’il n’est pas rare qu’un proche aidant meure avant la personne aidée au quotidien. C’est d’ailleurs l’épuisement qui l’a poussée à confier son amie à une résidence avec services et soins. Odette me dit : « À la fin, j’étais tellement épuisée que j’en perdais conscience. » Pour rester proche d’elle et continuer à en prendre soin tous les jours, Odette a choisi d’habiter elle-même une résidence pour personnes autonomes, qui était située à proximité de celle de son amie.

Être proche aidant peut aussi, à la longue, coûter très cher. À titre d’exemple, Odette mentionne que pour une seule journée, les frais de stationnement ont déjà monté jusqu’à 38 $. Ces coûts s’additionnent de semaine en semaine. On imagine facilement le prix à payer lorsqu’il faut aller reconduire notre ami ou parent à l’hôpital tous les jours, ou encore, comme dans le cas d’Odette, son amie à des traitements de chimiothérapie quotidiens.

En tant que jeune, je ne peux m’imaginer l’ampleur du rôle d’un aidant naturel. J’ai toutefois pu voir, pendant la majeure partie de mon enfance, mon grand-père prendre soin de ma grand-mère. Il l’a fait pendant des dizaines d’années, soit jusqu’à sa mort. J’ai énormément d’admiration et de respect pour ces individus qui sacrifient leur vie pour les gens qu’ils aiment. Je remercie Odette d’avoir amorcé ce sujet délicat. Bien que je me sente actuellement impuissante, notre conversation m’a permis de réfléchir davantage à cette réalité. J’espère fortement que ces bénévoles auront plus de soutien dans un avenir rapproché.

Vie en résidence

Au fil de notre discussion, Odette me parle de son court passage de trois ans dans une résidence privée pour aînés. La vie en résidence n’était pas faite pour Odette. Les activités répétitives offertes ne la divertissaient point.