Éthique à Nicomaque d'Aristote - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Éthique à Nicomaque d'Aristote E-Book

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Le corpus aristotélicien comprend traditionnellement trois ensembles consacrés à la philosophie morale : l’ Éthique à Nicomaque, l’ Éthique à Eudème et la Grande Morale, ou Grands Livres d’Éthique, dont l’attribution à Aristote (385 env.-322 env. av. J.-C.) est aujourd’hui très contestée.

Une fiche de lecture spécialement conçue pour le numérique, pour tout savoir sur Éthique à Nicomaque d'Aristote

Chaque fiche de lecture présente une œuvre clé de la littérature ou de la pensée. Cette présentation est couplée avec un article de synthèse sur l’auteur de l’œuvre.

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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.

ISBN : 9782852295292

© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Dirk Ercken/Shutterstock

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Bienvenue dans la collection Les Fiches de lecture d’Encyclopædia Universalis.

Ce volume présente des notices sur des œuvres clés de la littérature ou de la pensée autour d’un thème, ici Éthique à Nicomaque, Aristote (Les Fiches de lecture d'Universalis).

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ÉTHIQUE À NICOMAQUE, Aristote (Fiche de lecture)

Le corpus aristotélicien comprend traditionnellement trois ensembles consacrés à la philosophie morale : l’Éthique à Nicomaque, l’Éthique à Eudème et la Grande Morale, ou Grands Livres d’Éthique, dont l’attribution à Aristote (385 env.-322 env. av. J.-C.) est aujourd’hui très contestée. Des deux premiers, les titres sont mystérieux, et certaines parties (comme celles portant sur les vertus intellectuelles) sont communes ; l’Éthique à Nicomaque, la plus tardive et la plus aboutie, avec son long développement sur l’amitié (livres VIII-IX), reste la plus commentée.

• La morale aristotélicienne

La morale ou l’éthique (les deux termes renvoyant à une même réalité, en latin mores, en grec éthos : celle qui concerne les « mœurs ») n’est pas constituée par Aristote en science particulière. Le philosophe distingue seulement entre le domaine des affaires humaines (ce que, avec le néo-aristotélisme, on peut appeler philosophie pratique), domaine de la praxis, et celui de la connaissance pure (theoria), des sciences « théorétiques ». Cette distinction suppose une critique profonde de Platon et de sa théorie des Idées. Pour Aristote le Souverain Bien, dont chacun s’accorde à faire l’objet de la morale (et ce que cherche à atteindre le philosophe, en tant qu’il est vertueux), n’est pas accessible par la voie de l’idée. Selon la définition célèbre du livre II, « la vertu est une disposition acquise de la volonté [habitude], consistant dans un juste milieu relatif à nous, lequel est déterminé par la droite règle et tel que le déterminerait un homme prudent » (1106 b 36). Ce réalisme aristotélicien, qui met l’accent sur l’exercice du bonheur, dans ses conditions concrètes, au détriment d’une science abstraite qui confine à l’absurde (c’est « parler pour ne rien dire » que de soutenir, avec Socrate et plus tard les stoïciens, que le sage est heureux sous la torture), ne nie pas la « règle » mais l’incarne dans des figures vertueuses – par exemple celle du « magnanime », au livre IV (et dont la reprise par Thomas d’Aquin constitue l’un des aspect les plus audacieux de l’amalgame chrétien entre philosophie et théologie) –, qui se transmettra, à travers notamment l’enseignement des jésuites (lequel influence directement le théâtre de Corneille), jusqu’à l’âge classique. Cette typologie morale est encore à l’origine de la tradition des moralistes, avec les Caractères de Théophraste, élève et successeur immédiat d’Aristote, et par la suite modèle de La Bruyère.

Le domaine pratique se distingue aussi du « poïétique », c’est-à-dire du domaine du « faire » (poïen, entendu comme fabrication et non comme action : les techniques, les arts, les métiers, à l’exception du domaine de l’action. Aussi l’éthique semble-t-elle se confondre avec la politique, et l’Éthique à Nicomaque se présente explicitement comme un « traité de politique » (livre I). Le livre V est ainsi consacré à une discussion du rapport entre justice et équité, ce qu’en termes modernes nous pouvons distinguer comme les ordres de la loi et de la moralité. Mais dans le livre X et dernier, Aristote n’en développe pas moins des arguments sur la félicité propre au philosophe : il existerait bien une vertu intellectuelle spéculative, étrangère à l’action et supérieure à elle. La sophia (« sagesse ») apparaît alors comme le but ultime de l’homme, le politique ne réalisant dans l’action, avec la vertu de prudence (phronèsis), qu’une forme inférieure de l’excellence humaine. Cet idéal contemplatif ne se confond pas pour autant avec celui, platonicien, de « divinisation de l’homme » : il vise au contraire à surmonter sa critique, à travers une conscience plus aiguë, comme l’a souligné Pierre Aubenque, du tragique de notre condition.

• Modernité d’Aristote

L’analyse des fins de l’homme, l’attention aux situations, le refus des facilités supposées de l’idéalisme n’ont cessé d’alimenter la pensée politique (par exemple le De Monarchia de Dante), puis les « sciences morales » et les sciences humaines (sociologie, anthropologie, psychologie...) qui en ont pris le relais. La morale d’Aristote nourrit encore la philosophie la plus contemporaine, et aussi bien – fait remarquable – les traditions « continentales » qu’« anglo-saxonnes ». Les cours consacrés par le jeune Heidegger, dans les années 1920, à l’Éthique à Nicomaque, suivis par Hans Georg Gadamer, Hannah Arendt, ou encore Leo Strauss, ont directement influencé l’herméneutique et ce qu’on appelle parfois l’anthropologie philosophique (en Allemagne, les travaux de Rieter, Itting, Riedel, voire Le Principe responsabilité de Hans Jonas ; en Italie, ceux surtout d’Enrico Berti). Émigrés aux États-Unis, Arendt et Strauss ont puissamment contribué au renouveau de la philosophie politique, faisant d’Aristote une référence obligée (MacIntyre, Nussbaum, Taylor, et parmi les Français Pierre Manent). De leur côté, Elisabeth Anscombe, Georg Henrik von Wright (tous deux disciples de Wittgenstein), Donald Davidson, suivis en France par Pascal Engel ou Ruwen Ogien, ont repris la description aristotélicienne de l’action humaine et le problème du syllogisme pratique, pierre d’achoppement de toute tentative de « naturaliser » la morale.

François TRÉMOLIÈRES

Bibliographie
ARISTOTE, Éthique à Nicomaque, introd., trad. et comm. par R.-A. Gauthier et J.-Y. Jolif, 2 tomes, 4 vol., Nauwelaerts, Louvain-Paris, 2e éd. 1970 ; Éthique à Nicomaque, trad., présent. et notes de J. Voilquin, Garnier-Flammarion no 43.
Études
G. .E.M. ANSCOMBE, L’Intention, trad. M. Maurice et C. Michon, Gallimard, 2000P. AUBENQUE, La Prudence chez Aristote, P.U.F., Paris, 1963 (rééd. Quadrige, 1997)R. BODÉÜS, Le Philosophe et la cité. Recherches sur les rapports entre morale et politique dans la pensée d’Aristote, Les Belles Lettres, Paris, 1982R.-A. GAUTHIER, La Morale d’Aristote, P.U.F., 1958 ; Magnanimité, Vrin, Paris, 1951R. OGIEN, La Faiblesse de la volonté, P.U.F., 1993.

ARISTOTE (385 env.-322 avant J.-C.)

Introduction

Aristote n’est sans doute pas le philosophe le plus séduisant de l’Antiquité, celui auquel on se reporte le plus volontiers quand on veut remonter aux sources de ce que les Grecs ont nommé la « sagesse ». Mais nul n’a marqué autant que lui la philosophie et la science des siècles suivants, peut-être même – et cela jusqu’à nos jours inclusivement – la civilisation qu’il est convenu d’appeler « occidentale ». Son principal titre de gloire a été de fonder la logique, c’est-à-dire cet ensemble de règles contraignantes qui permettent de faire du discours (logos) l’usage le plus cohérent et, par là, le plus efficace. Plus préoccupé que Platon de définir et d’administrer le langage, il a su en faire l’instrument (organon) d’une pensée capable de se dominer elle-même et, par là, d’imposer sa loi à la nature. Penseur encyclopédique, il a su à la fois reconnaître la spécificité des différents savoirs, au progrès desquels il a lui-même contribué, et l’unité proprement humaine du discours qu’ils mettent en œuvre. Esprit organisateur et classificateur, il a énoncé les catégories qui structurent le langage et la pensée de l’homme.

On pourra estimer, au cours des siècles, que le système aristotélicien, devenu au Moyen Âge l’armature de toutes les scolastiques chrétiennes et musulmanes, a figé le progrès de la pensée. Mais il reste que ce système, en dépit de ses imperfections, a été le modèle de toute systématisation future. Et l’on n’a pas assez remarqué que, dans un domaine essentiel et souvent mal compris de sa philosophie, la métaphysique, Aristote a lui-même démontré l’impossibilité dernière de ramener l’être à l’unité, reconnaissant ainsi les limites de tout système, le caractère inachevé de toute synthèse et l’irréductibilité de la pensée de l’être à la pure et simple administration, scientifique et technique de ce qu’il y a en lui d’objectivable.

1. Vie d’Aristote

Aristote est né en 385 ou 384 à Stagire, petite ville de Macédoine, non loin de l’actuel mont Athos. Son père Nicomaque était le médecin du roi Amyntas II de Macédoine (le père de Philippe) et descendait lui-même d’une famille de médecins. Cette origine explique peut-être l’intérêt d’Aristote pour la biologie et, en tout cas, ses relations avec la cour de Macédoine.

En 367 ou 366, Aristote va faire ses études à Athènes et devient à l’Académie l’un des plus brillants disciples de Platon. Sorte de répétiteur ou d’assistant, réputé pour sa passion de la lecture (Platon l’appelait, peut-être avec quelque condescendance, « le liseur »), il collabore un peu plus tard à l’enseignement et publie lui-même des dialogues comme le Gryllos ou De la rhétorique (dirigé contre l’école rivale d’Isocrate), qui développent, en les exagérant même parfois (comme dans Eudème ou De l’âme), des thèses platoniciennes.

En 348, Platon meurt. Il a désigné comme successeur à la tête de l’école son neveu Speusippe. Dès l’Antiquité, des biographes malveillants ont attribué à ce choix de Platon la véritable cause de la rupture d’Aristote avec l’Académie. Aristote en gardera du moins une rancune solide contre Speusippe. La même année, peut-être sur l’instigation de son maître, Aristote avait été envoyé avec Xénocrate et Théophraste à Assos, en Troade, où il devint le conseiller politique et l’ami du tyran Hermias d’Atarnée. Parallèlement, Aristote ouvre une école, où il affirme déjà son originalité. Il y entreprend, entre autres, des recherches biologiques. En 345-344, Aristote, peut-être sur l’invitation de Théophraste, se rend dans l’île voisine de Lesbos, à Mytilène.

En 343-342, il est appelé à Pella, à la cour du roi Philippe de Macédoine, qui lui confie l’éducation de son fils Alexandre. C’est là qu’Aristote apprend la fin tragique d’Hermias, tombé en 341 entre les mains des Perses, et lui consacre un hymne. Du préceptorat lui-même et du séjour à Pella, qui s’étendent sur huit années, on ne sait pratiquement rien.

À la mort de Philippe (335-334), Alexandre monte sur le trône. Aristote retourne à Athènes, où il fonde le Lycée, ou Peripatos (sorte de péristyle où l’on se promenait en discutant), école rivale de l’Académie. Il y enseigne pendant douze ans.

En 323, Alexandre meurt au cours d’une expédition en Asie. Une réaction antimacédonienne se produit à Athènes. Aristote, en réalité suspect de macédonisme, est menacé d’un procès d’impiété. On lui reproche officiellement d’avoir « immortalisé » un mortel, Hermias, en lui dédiant un hymne. Aristote aime mieux quitter Athènes que d’encourir le sort de Socrate : il ne veut pas, dit-il, donner aux Athéniens l’occasion de « commettre un nouveau crime contre la philosophie ». Il se réfugie à Chalcis, dans l’île d’Eubée, pays d’origine de sa mère. C’est là qu’il mourra l’année suivante, à l’âge de soixante-trois ans.

2. Les œuvres

Les écrits d’Aristote se divisent en deux groupes : d’une part, des œuvres publiées par Aristote, mais aujourd’hui perdues ; d’autre part, des œuvres qui n’ont pas été publiées par Aristote et n’étaient même pas destinées à la publication, mais qui ont été recueillies et conservées.

• « Aristote perdu »

Le premier groupe d’écrits fait partie des « œuvres exotériques », expression employée par Aristote lui-même pour désigner des œuvres destinées à un public plus large que celui du Lycée. Ces œuvres ont été perdues, comme beaucoup d’œuvres antiques, dans les premiers siècles de l’ère chrétienne. Nous en connaissons néanmoins les titres par les listes conservées des œuvres d’Aristote, et nous avons une idée de leur contenu par les citations ou les imitations qu’en font les auteurs anciens postérieurs.

Ces œuvres sont, par leur forme littéraire, comparables à celles de Platon, et plusieurs d’entre elles semblent avoir été des dialogues. C’est sans aucun doute à elles que faisait allusion Cicéron lorsqu’il célébrait la « suavité » du style d’Aristote et en comparait le cours à un « fleuve d’or » (Topiques, I, 3 ; Acad., II, 38, 119). Mais leur contenu, qu’on travaille à reconstituer depuis un siècle, n’est pas sans poser des problèmes aux historiens. Car cet « Aristote perdu » n’a rien d’« aristotélicien » au sens de l’aristotélisme des œuvres conservées ; il développe des thèmes platoniciens et renchérit même parfois sur son maître (ainsi, dans le dialogue Eudème ou De l’âme, il compare les rapports de l’âme et du corps à une union contre nature, semblable au supplice que les pirates tyrrhéniens infligeaient à leurs prisonniers en les enchaînant vivants à un cadavre). Constatant qu’Aristote, dans ses œuvres non destinées à la publication, critique ses anciens amis platoniciens, on a pu se demander s’il ne professait pas deux vérités : l’une « exotérique », destinée au grand public, l’autre « ésotérique », réservée aux étudiants du Lycée. Mais on pense généralement aujourd’hui que ces œuvres littéraires sont aussi des œuvres de jeunesse, écrites à une époque où Aristote était encore membre de l’Académie, donc encore sous l’influence platonicienne. On s’est même servi de ces fragments pour déterminer ce que l’on croit être le point de départ de l’évolution d’Aristote.

Les principales de ces œuvres perdues sont : Eudème ou De l’âme (dans la tradition du Phédon de Platon), De la philosophie (sorte d’écrit programmatique, où se laissent déjà reconnaître certains thèmes de la Métaphysique), le Protreptique (exhortation à la vie philosophique), Gryllos ou De la rhétorique (contre Isocrate), De la justice (où s’annoncent certains thèmes de la Politique), De la bonne naissance, un Banquet, etc.

• Œuvres conservées

Le second groupe est constitué par une masse de manuscrits d’Aristote, représentant pour la plus grande part, semble-t-il, les notes dont il se servait pour professer ses cours au Lycée. Ces œuvres sont dites ésotériques ou, mieux, acroamatiques (c’est-à-dire destinées à l’enseignement oral). Dès l’Antiquité se répandit un récit des plus romanesques sur la façon dont ces manuscrits sont parvenus à la postérité (Plutarque, Vie de Sylla, 26 ; Strabon, XIII, 1, 54). Les manuscrits d’Aristote et de Théophraste auraient été légués par ce dernier à son ancien condisciple Nélée ; les héritiers de Nélée, gens ignorants, les auraient enfouis dans une cave de Skepsis pour les soustraire à l’avidité bibliophilique des rois de Pergame ; longtemps après, au Ier