INITIALES M.M. ET LA PART DU LION - Laurent Montazeaud - E-Book

INITIALES M.M. ET LA PART DU LION E-Book

Laurent Montazeaud

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Beschreibung

Un printemps précoce qui s'annonce radieux. Des élections municipales qui bouleversent la tranquillité de Grandy-La-Colline. Plusieurs années après sa première enquête, Initiales M.M. enquête toujours à son compte pour les petites gens désargentées. Dans la vie, chacun veut sa part du lion. Le contraire ne serait-il pas vrai aussi ?

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Veröffentlichungsjahr: 2019

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Du même auteur

Initiales M.M. - Editions BOD -ISBN 9782322085699 septembre 2017

Sommaire

PROLOGUE

CHAPITRE 1

CHAPITRE 2

CHAPITRE 3

CHAPITRE 4

CHAPITRE 5

CHAPITRE 6

CHAPITRE 7

CHAPITRE 8

CHAPITRE 9

CHAPITRE 10

CHAPITRE 11

CHAPITRE 12

CHAPITRE 13

CHAPITRE 14

CHAPITRE 15

CHAPITRE 16

CHAPITRE 17

CHAPITRE 18

EPILOGUE

PROLOGUE :

J'aurais pu vous narrer le récit qui succédait à ma première enquête : INITIALES M.M. mais j'ai choisi celui-ci qui se déroule sept ans plus tard.

Les années passent et les êtres changent physiquement et moralement. Les amitiés et les rancœurs se mélangent. La vision de notre monde devient plus précise ou plus floue...

INITIALES M.M.

CHAPITRE 1

Les rayons de mon Solex électrique vrillaient sur cette route en pente douce vers la Seine, un fleuve lui aussi d'eau douce, qui avait fait le régal des Impressionnistes avec ses berges et l'architecture des habitations cossues environnantes.

Je me laissais porter par mon cyclo jusqu'aux quais. Le vélocipède aurait été grandement préférable pour ma santé atteinte de kilos superflus et de diabète mais je craignais que mes mollets de campeurs ne me menassent à bon port.

En ce début de mois de mars, le printemps était déjà précoce et l'éclosion des bourgeons faisait fi des prévisions météorologiques d'Évelyne Dhéliat, grande prêtresse télévisuelle et professionnelle en la matière.

Toutefois, certaines feuilles jonchaient sur le sol. C'était très étrange pour la saison. En fait, il s'agissait de la propagande des prochaines élections municipales prévue en fin de mois ! Les tracts tourbillonnaient sur la chaussée, chassés par le vent, en attendant la précieuse action des employés municipaux du service des espaces verts, qui selon certaines médisances, s'affaireraient à cette tâche, le 22 septembre prochain : premier jour de l'automne !

Quelques minutes plus tôt, j'étais passé devant les affiches des candidats susceptibles de devenir des édiles potentiels. Quelques-unes étaient lacérées ou déchirées dont celle du parti Une nouvelle commune française qui exaltait les passions.

Je sentais que les mistoufles allaient pleuvoir entre les prétendants. Grandy-La-Colline, une ville, notre ville était en plein développement urbain et donc le théâtre de beaucoup de convoitises.

Cette bécane électrique me satisfaisait hautement. Une broutille pour ma lasagne de millionnaire. Un millier d'euros pour acquérir le modèle standard, silencieux dans ses déplacements et écologique avec cela. Plus de Solexine par échappement mais juste quelques watts pour connaître la liberté.

J'étais assez fier que cet emblème national confectionné à Saint-Lo, en Normandie. Les habitants de la Manche avaient un élan certain dans la créativité et l'action d'entreprendre. Il fallait avoir osé miser sur le retour du Solex.

Mes racines paysannes et corréziennes m'avaient précocement aiguillé vers le respect de la nature et donc j'avais trouvé pédale à mon pied !

Les bords de Seine étaient des sources de joie et de plénitude et c'était pour cette raison que j'aimais m'y rendre.

Cette étendue d'eau m'inspirait encore davantage en automne. Ce cycle de l'année avait ma préférence pour les dégradés de couleurs qu'il glissait dans les paysages et le reflet de la vie dans les eaux mêlées.

Contrairement aux idées reçues et abrasives, une faune et une flore subsistaient face à la pollution de la Seine.

Pourtant, je n'aurais jamais osé préparer une fricassée avec des goujons et des gardons, pêchés dans cette flotte vaseuse à certains endroits, même pas pour mon pire ennemi !

Parfois, il m'arrivait de surprendre le saut d'une carpe au milieu du rivage. Des canards, des oies sauvages et des cygnes s'accaparaient également les lieux avec aisance.

Mon lieu favori, était un minuscule débarcadère becté par le temps dont il subsistait juste une plate-forme de bois et des poulies, rouillées et hors d'usage. Il était dissimulé par quelques saules et des trembles.

Les promeneurs d'occasion ou les rôdeurs vicelards passaient leurs chemins en y voyant que du feu. Depuis le début de mes escapades, j'y venais toujours avec un pliant et du pain.

Cette posture d'observation agreste me faisait songer à la Corrèze. Souvent, enfant, pendant les grandes vacances, il m'arrivait de m'accroupir sur le bord d'un étang et d'attendre l'improbable.

En fin de journée, lorsque c'était le moment le plus propice, Dame Nature se confiait sans retenue. Telle une amante fidèle !

Un foisonnement de métamorphoses visuelles s'activait, des variations de teintes et de lumières naissaient. Aussi, j'étais le témoin de ces phénomènes ancestraux, intemporels et naturels.

Alors, l'étang devenait l'autel du monde...

Ce jour-là, quelques mètres plus haut avant mon repère, sans antivol, j'avais placé comme à mon habitude mon Solex, entre deux saules.

Sous mon bonnet, j'avais coiffé un casque de musique, branché avec mon vieux baladeur dans lequel tournait une cassette audio de Mozart. Une compilation de mon cru datant de mes quinze ans.

D'aucuns apprécient le crépitement des vinyles et bien moi, je faisais partie des nostalgiques qui savouraient le souffle de la bande magnétique ! D'ailleurs, je prédisais un retour en force de ce support dans les années futures. J'aimais aussi cette planque au bord de la Seine, parce que j'y rejoignais un ami. Il était majestueux et drolatique.

De la famille des tuberculés (mais pas contagieux !), il fendait le fil de l'eau en laissant derrière lui, un écrémage.

Claudius était son nom. C'était un cygne blanc. A l'aise sur mon pliant, je lui balançais des bouts de pain façon puzzle.

Son dentrissement résonnait pour marquer son enthousiasme ou sa réprobation.

En réponse à cette gavée parcellaire, Claudius m'offrait un spectacle aquatique sensuel et loufoque.

Aujourd'hui, Claudius paraissait en pleine forme. Il était escorté par une femelle, peut-être sa régulière. J'avais lu quelque part que deux cygnes pouvaient vivre ensemble toute une vie. Une leçon de vie, juste pour nous autres, pauvres bipèdes dont je faisais partie.

A un moment, je fus surpris par un cri de mouette.

- Tu jubiles tellement de l'instant que ton audition te joue une autre partoche ! me fis-je remarquer intérieurement.

Certes, il ne manquait que le cycle des marées de la Manche, et l'air iodé, vivifiant et purificateur qui vous embrassait à pleine bouche et l'on s'y serait cru.

Mais non, il ne s'agissait pas d'une déficience de mes écoutilles à miel puisqu'une mouette apparut au-dessus de l'eau. Elle se laissa glisser avec nonchalance au gré du vent, et ôta bel et bien mes doutes de sénilité avancée qui planaient sur moi.

J'observais le volatile gris et blanc qui lâchait des cris aigus et perçants et l'enviai pour sa capacité à atteindre les nuages. Celui-ci semblait apprécier son nouvel environnement.

Après ce bain de soleil hivernal et rigoureux, et quelques méditations personnelles dont je vous épargnerai l'évocation, je pliai les gaules et allais récupérer mon Solex pour rentrer aux bercailles.

Surprise ! Aucune trace de mon guidon à roulettes ! Il avait disparu dans la nature. C'était le moment de le dire. D'ailleurs, je déflorai le lieu champêtre supposé de son stationnement mais restai bredouille.

Contrairement à l'apparition de la mouette, aucun miracle ne se produisit cette fois-ci. Conclusion : on m'avait bel et bien chouraver mon cyclo ; cet outil indispensable à mes déplacements dans la jungle urbaine, moi, le sans-papier rose...

Cette situation burlesque me fila des palpitations. Dans un panier en osier à l'arrière de l'engin, j'avais placé dans un sac isotherme, bien que la météo ne fût pas à la canicule, ma seringue d'insuline. En tant que diabétique, c'était plus prudent.

Par chance, quelques morceaux de sucre traînaient dans mes poches crevées.

Le diabète est un combat de tous les instants. Il rampe, se dissimule dans chaque geste insipide. Il frappe sans distinction d'âge ou de condition sociale. Son antidote : l'insuline.

TANT QU'ON A LA SANTE ! prévient le dicton populaire. On peut ricaner sous cape ou à gorge déployée, mais cela se révèle authentique.

A l'annonce de mon diabète, je crus recevoir un coup de poignard et je sus que je devrais le combattre à coups de seringues durant le reste de ma vie.

Je ne possédais pas de téléphone portable mais un émetteur/récepteur de poche conçu par Xavier Charbonnier, le fils de mon meilleur ami Robert, proprio du café-PMU, Le rouge est mis.

Ce type d'appareil que les moins de 30 ans ne peuvent connaître, avait eu un succès modeste auprès de la jeunesse française à la fin des années 90. Il fut commercialisé sous le nom de TATOO, TAM-TAM etc...

À l'époque, il fonctionnait avec le Minitel et abonnement.

Mais il fallait surtout avoir des amis, une tribu avec qui communiquer. Sinon, c'était sans issue. Juste de la frime.

Grâce à des fréquences spéciales, la version moderne de Xav était gratuite et permettait que l'on me contacte avec un simple ordinateur. Je pouvais également balancer un SMS sur une boîte Mail ou un téléphone portable. Deux numéros de GSM étaient mémorisés dans ma boite électronique : celui de Simon, mon fils et celui de Xavier donc Robert.

Hormis, ces deux-là, j'ignorai comment contacter d'autres gus.

Maniable, et surtout discret, je m'étais accoquiné de cette bestiole numérique comme je le surnommais, et qui vibrait pour m'avertir d'un message.

Il fallait l'admettre, je n'étais pas progressif pour un sou. Un euro, pardon ! J'étais un homme des cavernes de la communication.

Cependant, je n'employais pas de signaux de fumée par souci des dégâts occasionnés par le monoxyde de carbone dans l'atmosphère, je n'utilisais pas de tambours par respect pour les animaux dont la peau était tannée et eux massacrés et le vacarme occasionné, je n'envoyais pas de rouillarde à la baille parce que le verre et le plastique n'étaient pas biodégradables et n'expédiais pas de pigeons voyageurs à mes contacts parce que j'étais allergique à la plume !

Alors maladroitement, je m’escrimai à envoyer un message de détresse à Simon et Xavier. Un micro intégré à ma bestiole permettait d'enregistrer ma voix et de la retranscrire par écrit. Ah, oui, parce que j'ai deux mains gauches aussi !

Je dictais donc ma prose à ma bouée de sauvetage numérique à cristaux liquides.

URGENT ! Je suis sur les quais de Seine de Grandy-La-Colline, à mon endroit. On m'a piqué mon Solex. Très faible. Pas d'insuline. Venez vite. Marco.

Puis je balançais le SOS moderne en tremblant. Par précaution, je pris un sucre. Mon lecteur de glycémie avait pris le large avec mon insuline.

L'appréhension de tomber en rideau me faisait perdre les pédales. J'avais perdu celles de mon Solex, cela suffisait ! Je sortis de l'espace touffu, et tentai d'entreprendre quelques pas sur la pelouse tondue et entretenue des bords du fleuve. Elle était fendue en son centre par un chemin de béton où d'habitude des fanatiques de la course à pied venaient suer à gros bouillons, en étant persuadés des bienfaits de leurs démarches sur leur organisme.

Évidemment, cet après-midi-là, comme par hasard, je ne croisai aucun de ces prétendants à la forme olympique qui soufflait comme des locomotives à vapeur pour atteindre leur but.

J'étais bien seul tout à coup. Un couple d'amoureux batifolait sur un banc sous le soleil de mars mais c'était davantage leurs baisers qui les réchauffaient. Ils étaient de dos face à la Seine, emmitouflés dans leurs doudounes, et absorbés par leurs étreintes. Je n'avais aucune envie de les déranger.

À quelques mètres de là, un arrêt de bus était posté. C'était une destination plausible pour me sortir de cet engrenage infernal. Un marathon pour ma pomme qui zigzaguait sans ma canne, comme un pilier de bar sans son zinc.

Souvent, je me servais de mon Solex pour me soutenir en cas de coups de pompe !

Mon parcours fut ardu pour parvenir à ce satané Abribus, rempart contre le vent et la pluie. Chaque pas était malhabile. Surtout, ne pas se viander ! me martelais-je le crâne avec la confiance d'un sanglier sur les rotules, poursuivi par la meute juste avant l'hallali.

L’adrénaline se mêla à la partie. Des palpitations violentes et assommantes m'assaillirent. Une hypoglycémie complotait contre moi.

Quelques signes précurseurs, me faisaient redouter le pire :des gouttes de sueur perlaient en cascade sur mon front, des papillons multicolores polluaient mon champ de vision mais surtout une chape de fatigue lancinante s'accroissait ou rapetissait et faisait de moi son esclave.

Au détour de mon périple fastidieux, Pick apparut dans un chêne à demi dépenaillé sur lequel le printemps reprenait ses droits. Mon ami d'enfance imaginaire veillait sur moi davantage encore, depuis la découverte de mon diabète. Il s'était désintégré à la fin de mon adolescence et aujourd'hui il revenait en force.

Vous pouvez croire que je suis un dérangé mental - grand bien vous fasse -, cependant Pick était ancré dans le réel et possédait les réponses à mes interrogations les plus diverses et lisait dans l'avenir.

Aujourd'hui, il était en orange. Il portait un genre de survêtement.

- Ce n'est pas la grande forme ! railla-t-il aussitôt sans un bonjour. Il était comme cela Pick. Il persiflait à l'envie. Parfois. il était un peu lourdingue !

- Bon, je crois que le mot FIN sur mes aventures ne devrait pas tarder ! dis-je à moitié blagueur.

Une salve spasmodique me désarticula tel un pantin oublié par son manipulateur. Je faillis m'étaler.

- Reste confiant, elle arrive !

- Mais qui ?

Pick demeura silencieux et se volatilisa. Je pus constater à maintes reprises qu'un ange gardien de son niveau, avec lequel j'étais capable de converser et discerner l'enveloppe, ne me disait pas tout ce qu'il savait, et ne me livrait jamais de détails précis. Ordres des supérieurs, allez savoir !

- Elle arrive ! Mais de qui tu parles Pick ! La Faucheuse, la cavalerie..

Je lui en voulais si rageusement que je m'écroulai sur la pelouse comme un gardien de but entre ses cages, pour stopper la trajectoire d'un ballon bien calibré. Sauf que dans mon cas, c'était sans préméditation, et je m'étalai de tout mon corps sans aucune maîtrise. Ensuite, ce fut le black-out total.

CHAPITRE 2

Quelques soufflets énergiques furent nécessaires à mon réveil. Ils furent prodigués par elle. Elle, c'était Margot, ma pharmacienne. Celle qui m'avait affranchie des protocoles médicamenteux concernant le diabète.

A date régulière, et avec mon ordonnance, bien évidemment, je me rendais dans une officine à quelques pas de mon domicile.

Le jour de notre première rencontre, je ne la vis pas aussitôt. Elle m'affola pas mon attention. Discrète, elle conseillait un grand-père qui se triturait...les méninges pour acquérir une canne.

Avant de jeter son dévolu sur un crayon à pommeau d'or, il s'écoula un temps conséquent. Aussi, je pus passer en revue la garnison des articles disponibles dans la pharmacie.

Face à ce stock de produits qui s’étalait dans la boutique : cela allait de la Pulmol à la chaise roulante ! Tout bon hypocondriaque en serait ressorti malade à crever.

Margot, son prénom était inscrit sur un badge discret, épinglé au revers de sa blouse, était préparatrice en pharmacie, et déchiffrait les hiéroglyphes thérapeutiques, formés à la hâte par les toubibs. Avec bienveillance, elle jouait les Champollion.!

À chaque nouvelle visite, nous discutions de la vie en général et j'appréciais la vision singulière de celle-ci.

Elle avait pourtant une dizaine d'années de moins que moi.

Lorsque je repris mes esprits, mon premier coup de périscope tomba donc sur sa frimousse.

- Monsieur Montgibaud, ça va aller?

- Ouais. Je pense. Vous êtes ma sauveuse !

- J'ai cru que j'allais y passer.

- Vous avez oublié votre insuline ?

- Pas exactement. Disons que...

Alors je débutais la narration du vol de mon Solex et mon malaise grandissant. Une description lapidaire de l'événement. On allait pas y passer la journée.

Margot venait d'achever sa course à pied et l'entretien qu'elle accordait à son corps venait de me sauver la vie. C'était bien la première fois que le sport fût bénéfique pour mon blaze !

Ses lèvres chaudes sur les miennes me laissèrent un goût plaisant et inédit. Je ne fis aucune remarque déplaisante.

- Ne bougez pas, j'ai garé ma voiture quelques mètres plus haut m'apprit-elle. Venez, je vais vous accompagner jusqu'à l'abri de bus. Là-bas, vous m'y attendrez tranquillement et reprendrez votre souffle.

Sa voix était réchauffante et rassurante ; un genre de baume contre l'angoisse. Son expérience professionnelle transpirait sur les relations avec ses contemporains. Elle m'aida à relever mon quintal et je pus avancer en chancelant vers l'Abribus.

Tous mes pas étaient calculés et malhabiles. Toutefois ; nous parvînmes à notre but. Après ce parcours du combattant, je ne pus exprimer un ouf de soulagement à voix haute.

Margot me laissa émerger et partit récupérer sa guinde.

Le constat se confirmait. En cet après-midi de printemps précoce, l'habillage de la flore se parachevait et aucun curieux ne se massait aux abords de la Seine. La vie moderne nous faisait passer à côté de l'essentiel.

C'était le dimanche lors de la promenade digestive que de nombreuses familles et amis foulaient l'herbe des bords de la Seine.

Les rayons du soleil les encourageaient et les gouttes de pluie ne les effarouchaient pas. Un bon anorak et un large pépin pour protéger tout le monde et le froid n'avait qu'à bien se tenir !

Parfois le hasard faisait bien les choses et un couple de canards sauvages s'accouplait, deux colombes virevoltaient ensemble.

Les enfants ne savaient plus alors où donner de la tête.

Il arrivait même que des ragondins osaient exhiber leur long appendice dorsal sur le berges.

Lorsqu'elle arriva avec sa 205 Junior Peugeot, j'ai tout de suite compris qu'elle était vraiment la plus forte ! Non, en fait, je fus surpris par l'arrivée d'un véhicule aussi daté mais aussi impeccablement entretenu.

Je venais de reprendre mes esprits et l'un d'eux, Pick, pour ne pas le nommer pointa son museau. Il s'étendit de tout son long sur le capot de la Peugeot. Il était toujours fringué en

orange.

- Je te l'avais bien dit qu'elle arrivait.

- Ouais. Mais tu aurais pu rameuter Xavier ou Robert, cela aurait simplifié la donne !

- Jamais content ! Je ne peux pas tout me permettre. J'ai des ordres. Tu comprendras, un jour...

Un instant, plus tard, il avait disparu.

Margot fit le tour de la 205, et s'approcha de moi. Elle capta mon regard insistant sur le capot.

- Il y a un problème ? s 'inquiéta-t-elle.

- Non, j'étais dans la lune ! menti-je.

La jeune pharmacienne m'épaula physiquement jusqu'à sa voiture. En accrochant sa ceinture, elle se tourna vers moi et des effluves de déodorant naviguèrent dans l'habitacle. Elle avait eu le tact de se refaire une beauté.

- Je crois que j'ai une surprise pour vous ?

Margot était enveloppée d'un survêtement gris dont l'échancrure s'ouvrait avec une fermeture Eclair et laissait poindre le volume de ses seins sous un tee-shirt rose.

Malgré mon état léthargique, mes billes étaient magnétisées par ce splendide spectacle de la beauté féminine. J'en fus gêné et relevai la bourriche comme un garnement pris en flague à lire un magazine érotique.

L'adultère ne m'avait pas réussi, et je n'avais toujours pas pris mes marques face à une aventure extraconjugale. Un sentiment de culpabilité était toujours omniprésent en moi.

Je fus surpris que Margot fasse demi-tour en direction de mon endroit.

- Nous allons où ? Osai-je demander en prouvant que j'avais repris mes esprits.

- Vous allez voir ! Ne soyez pas si impatients !

Il y avait peu de probabilité pour qu'elle me mène de force dans un fourré pour passer du bon temps.

Certes, j'avais un certain charisme mais peut-être pas aussi concentré !

La jeune joggeuse me conduisit vers mon havre de paix. Sur l'instant, je crus à un mirage ; à une hallucination. Je pris une torgniole virtuelle mais très violente.

Mon Solex électrique rutilant me narguait de sa présence à l'endroit même où je l'avais déposé.

- C'est incompréhensible ! dis-je tout haut.m

Dès que je pus sortir de l'antiquité au diesel, j'accourus vers mon cyclo écologique. C'était bien lui ! Sans aucun doute. Ma paranoïa me glissa à l'oreille de vérifier les freins et autres petits détails pour m'assurer de son bon état.

- Les réjouissances ne font que débuter !

s'enorgueillit Pick. Fier de connaître l'avenir.

- Ta gueule !

- Pardon ! se retourna Margot à quelques mètres devant moi.

- Non, rien. Je divaguais à haute voix comme d'hab. Je suis un peu déboussolé.

Le moment de vérité allait sonner. Je plongeai mon tarin dans le sac Isotherme. Bingo !

J'aperçus ma dose orange d'insuline. Elle n'avait pas été utilisée. Aussi, je lui mis une seringue et me garantis une tranquillité de plusieurs heures.

J'étais sur le flanc à cause de cette obscure disparition.

- Vous êtes content, enfin, je le suppose monsieur Montgibaud ? me demanda Margot.

- Oui mais je suis dérouté. Je suis certain que mon Solex était stationné à cet endroit et que l'on me l'a piqué. A plus de quarante piges, ce serait rageant d'avoir des signes avant-coureurs d’Alzheimer.

- Mais, non ! Cela m'arrive également ! me rassura-t-elle poliment.

- Vous êtes aimable et bien élevée mais là, il est une énigme qu'il m'est primordial de résoudre.

- En attendant, je vous ramène chez vous.

- Non ! Au Le rouge est mis. On m'y attend et je ne veux pas gamberger seul dans mes quartiers.

Margot s'avança vers le Solex et entreprit de l'engouffrer dans le coffre.

- Ne vous embêtez pas, ce coup-ci, je vais le planquer dans un coin où nul ne pourra le dénicher, !

Pendant quelques minutes, je disparus dans les buissons clairsemés et déposai mon deux-roues dans un lieu uniquement connu par Simon et Xavier.

- Voilà, dis-je en réapparaissant. On est sûr de rien. De toute manière, ce n'est que du matériel.

En me reconduisant dans le haut de Grandy-La-Colline, Margot détecta mon trouble intérieur qui me rendait muet comme une carpe, moi, de nature si enjouée.

- Monsieur Montgibaud, vous vous faites du mal pour rien. Non, vous n’êtes pas sénile.

Enfin, voyons, quelqu'un a pu vous emprunter votre cyclo et le ramener par purs remords. Cela existe des voleurs mais pas trop !

A ses dernières paroles, je me tournais vers elle et esquissais un sourire enjôleur.

- Vous êtes à la fois pharmacienne de l'âme et philosophe, c'est impressionnant.

Maintenant, nous étions arrêtés à un feu rouge. Je sentis une attraction sexuelle se matérialiser en moi ! Une situation indéfinissable par le verbe mais tellement paralysante pour les sens.

J'avais du désir pour Margot. Une envie de lui faire l'amour. Le tempo de mon cœur s'emballait. Elle semblait hypnotiser par le feu tricolore. Elle était éteinte. Attendait-elle le vert de la délivrance ? Je n'en étais pas convaincu.

Pick me nargua derrière le pare-brise.

- Je vais te faire une confidence. Margot redoute comme toi, cet instant me souffla-t-il à l'oreille. Elle n'est pas insensible à ton charme mais vous êtes sur la même longueur concernant les remords que provoque l'adultère. A toi de juger en ton âme et conscience. Aah, aah !!!

Le vert me libéra de mes tracas zigomateux et le calvaire s'acheva.

En remontant la rue, nous croisâmes Xavier Charbonnier avec l'utilitaire de son père, un Scénic que ce dernier avait acquis pour distribuer des repas et autres produits de première nécessité lors de maraudes de clochards et de visites de personnes handicapées ou âgées.

Pour Robert, cette activité devient primordiale et obligatoire, et il s'y investissait avec toutes ses tripes de Catalan.

Ce fut la plastique de Margot qui dut être à l'origine du ralentissement du véhicule break dont Xavier tenait le cerceau.

Il se stabilisa à notre niveau mais ne m'aperçut pas. C'était un beau garçon : une copie conforme de son pater jeune, dont j'avais vu une photo sur des affiches de catch. Un air à la Lino Ventura depuis qu'il s'était ratiboisé la colline et des épaules de marin pécheur qui s'étaient développées avec l'âge.

Je le préférais comme cela plutôt qu'avec son look à la John Lennon et ses longs tifs bouclés.

- Je peux vous être utile ? questionna-t-il Margot avec une voix gracieuse et mielleuse.

- Oui, enfin, disons que c'est plutôt votre ami que vous pouvez dépanner ! dit-elle en se décalant pour que j'apparaisse dans son champ de vision.

- Oh, salut, Marco ! Je ne t'avais pas vu ! s'étonna-t-il tout penaud comme regrettant ma présence.

Il fallait avouer que Margot ne laissait pas indifférents ceux qui affectionnaient la gent féminine. Mais les rigolards et les amateurs de 5 à 7 avaient dû s'y casser les dents.

Elle ne s'en laissait pas conter fleurette, la Margot !