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Ludovic, trente-cinq ans, traverse une période de fragilité émotionnelle : il est en rupture familiale. Désireux d’aider ceux qui souffrent de discriminations, il rejoint une association LGBT+ de sa ville où il fait la connaissance de Max, un jeune homme charismatique qui va chercher à créer entre eux une relation fusionnelle et exclusive. Ludovic, un peu naïf, se laisse peu à peu séduire. Mais très vite, ce qui semblait être une belle histoire prend une tournure inquiétante. Max devient de plus en plus étrange. Ludovic réalise trop tard qu’il est la victime d’une emprise psychologique. À mesure que la pression monte, la situation devient de plus en plus dangereuse pour lui. Pourra-t-il échapper à ce piège avant qu’il ne soit trop tard ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Mickaël Burdin, dans cette histoire présentée comme une fiction, laisse subtilement entrevoir une part de vécu personnel. Toutefois, il s'abstient délibérément de clarifier ce qui est autobiographique et ce qui ne l’est pas, permettant ainsi à ses lecteurs de se faire leur propre opinion.
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Seitenzahl: 230
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Mickaël Burdin
L’emprise
Roman
© Le Lys Bleu Éditions, Paris, 2025
www.lysbleueditions.com
ISBN : 979-10-422-9091-7
Je tenais de nouveau à te dire à quel point je t’aime. Sache que l’amour que je te porte ne diminuera jamais.
C’est un des nombreux messages vocaux que Max a laissés sur le répondeur de Ludovic, une énième déclaration témoignant d’une grande et réelle affection, du moins en apparence.
Cependant, je vous propose de revenir quelques mois auparavant et de découvrir ce que cachent véritablement ces belles paroles.
Mickaël Burdin poursuit son activité d’écrivain et nous raconte dans ce nouveau livre l’histoire d’une rencontre qui est tout sauf banale.
Est-ce là une fiction ? Nous ne le saurons pas, mais qu’importe ! L’intrigue n’en est pas moins palpitante et instructive.
Tout commence un peu comme une belle histoire d’amour qui se déroule dans le nord de la France, où l’un des deux personnages principaux, Max, va tout faire pour être le « prince charmant » attendu par Ludovic.
Celui-ci est un homme romanesque qui croit en l’amour. Au tout début de leur rencontre, il est loin d’être subjugué, car Max ne correspond pas au stéréotype de l’homme idéal tel qu’il l’a toujours imaginé : grand, viril et doté par la nature d’une belle voix basse. C’est tout le contraire d’un godelureau qui ne va pas pour autant renoncer à conquérir celui pour qui il a ressenti, dès qu’il l’a vu, une attirance irrépressible. Bien que celle-ci trahisse une orientation sexuelle qu’il n’assume pas, il est prêt à tout pour occuper la place qu’il veut avoir dans la vie de Ludovic. S’il le pouvait, il irait lui décrocher la lune afin de s’attacher l’homme qu’il a décidé de séduire par tous les moyens. Alors, comment résister face à de tels témoignages d’affection, ou qui du moins se donnent comme tels, surtout lorsqu’on a un si grand besoin d’être aimé ?
Il y aura un temps où les deux garçons vont se trouver emportés dans une relation fusionnelle qui semblerait bien combler les manques de chacun. Cela pourrait s’apparenter à de l’amour, si Max lui aussi était sincère et ne jouait pas un rôle, en faisant tout ce qu’il peut pour rendre son ami totalement dépendant et pouvoir ainsi affirmer sa toute-puissance.
Aussi, à l’inverse de ce qui se passe dans « La Belle et la Bête », conte dans lequel la Bête retrouve au final son apparence de prince charmant, ici le « chevalier blanc » va se transformer petit à petit en un être malfaisant, désireux de ne pas laisser échapper sa proie, tel un loup-garou incontrôlable cédant à ses instincts animaux. Ludovic réussira-t-il à se sauver, dans tous les sens du terme ? Vous le saurez en lisant ce livre passionnant plein de rebondissements.
Jacques Pépin
Ludovic est un jeune homme de trente-cinq ans vivant dans une ville de taille moyenne du nord de la France, tout près de Lille. Grand, mince, châtain, il a le visage allongé, le teint pâle, les yeux marron. Il est homosexuel.
Bien qu’assez peu sûr de lui, il est sociable, souriant, et n’a pas de difficultés à engager la conversation lorsqu’il se sent à l’aise et que l’autre est réceptif. Il se passionne pour tout ce qui touche à l’Art : l’écriture, la musique, le dessin, la peinture. Appréciant également les jeux de société, il peut passer des journées entières à jouer avec ses amis. C’est un moyen pour lui de s’évader. Ayant gardé une part d’enfance, il regarde encore des dessins animés et aime feuilleter des illustrés qui ne sont plus de son âge, lire les contes de sa jeunesse qui le font replonger dans un monde imaginaire et féerique.
Dans son grand appartement, il partage son existence avec une charmante chatte rousse prénommée Nala, un animal affectueux et tendre auquel il porte un amour immense. Cet adorable félin se plaît à se pelotonner contre lui pour demander des caresses. Leurs deux nez se frôlent. La petite boule de poils lèche le front et les cheveux de son maître en signe d’attachement. Elle passe de longues heures à dormir dans un carton de livraison sur lequel elle a jeté son dévolu ou un couffin gris et blanc.
Ludovic est perçu comme un « gentil garçon », quelqu’un qui veut être aimé. Il est très attentif aux autres et se montre agréable vis-à-vis de son entourage.
En rupture familiale, il a coupé les ponts avec son père depuis des années et cela fait trois mois qu’il n’a plus de nouvelles de sa mère. Ses parents n’ont pas accepté son homosexualité, surtout son paternel qui a toujours été railleur et odieux sur le sujet. Aussi, pour se protéger, Ludovic a-t-il préféré mettre de la distance entre eux.
À ce stade de sa vie, il se sent un peu isolé. Ses amis ne lui donnent plus l’impression d’être très présents. Lorsqu’il les sollicite pour les voir, ils tardent à répondre et ne manifestent pas un grand entrain. Cette non-réciprocité a tendance à décevoir le jeune homme qui a du mal à comprendre pourquoi sa compagnie est si peu souhaitée. Ses copains et copines ont d’autres priorités et préfèrent se livrer à plusieurs activités de leur côté. Cela le peine beaucoup, le désole.
Agent administratif dans un lycée, il s’occupe du suivi des élèves, des demandes de bourses, des dossiers scolaires. Il échange avec les différents partenaires de l’établissement par mails, au téléphone ou en direct. Apprécié de ses collègues, ceux-ci sont fréquemment surpris par son calme lorsqu’il a affaire à une personne désagréable. Juste par une remarque pertinente ou un trait d’humour bien placé, tout en gardant une voix douce, Ludovic réussit à dédramatiser une situation conflictuelle. Il s’entend bien avec son proviseur qui lui fait confiance et qui reconnaît son sérieux.
En raison de soucis de santé, il ne travaille désormais plus qu’à mi-temps.
Les journées lui semblent longues et toutes semblables les unes aux autres.
Depuis peu, par le biais des réseaux sociaux, il a fait la connaissance de Pierre, un ancien professeur de français de soixante-dix ans. Père de trois grands enfants de l’âge de Ludovic, l’homme prend très vite son protégé sous son aile bienveillante. Tous deux aiment jouer au Scrabble autour d’un gâteau accompagnant une tasse de thé ou de café. Pierre a un vocabulaire riche et apprend régulièrement de nouveaux mots à son partenaire de jeux qui est fasciné par le langage précis et aisé de cet expert de la langue de Molière, ainsi que par la justesse dans l’utilisation de termes peu usités dont il n’hésite pas à demander la signification. Son ami prend plaisir à incarner de nouveau l’enseignant pour quelques minutes.
Pierre a un visage doux et bienveillant. Féru d’humour, il est aussi taquin, mais toujours avec gentillesse et bonté. Ayant peu de cheveux, il s’est rasé le crâne, trouvant que cela fait « plus propre ». C’est un homme qui est encore en bonne forme, même s’il a quelques difficultés à marcher et se déplace avec une canne, ce qui ne l’empêche pas de rester relativement autonome et vaillant. Vivant dans une maison sur deux étages, seul, il a tendance à amasser, entasser, cumuler. Une façon de s’approprier l’espace et de se créer un petit univers bien à lui. Il collectionne les cloches et en possède plus de quatre cents. Elles sont toutes disposées dans une grande pièce et agencées de telle sorte que chacune soit bien mise en valeur. L’endroit est « plein comme un œuf » pour reprendre une de ses expressions. Il a également besoin de combler chaque espace de mur inoccupé. C’est un amateur de cadres et d’objets décoratifs en tout genre.
Pierre est passionné de chant et membre d’une chorale. Pourvu d’une belle voix de baryton, il regrette que celle-ci soit devenue tremblotante et lui ait fait perdre son aisance vocale passée.
Ludovic, bien qu’entouré, souhaite connaître un partenaire pour vivre avec lui des moments de tendresse et de grande complicité. Non pas que le célibat lui pèse, mais la volonté de partager son existence avec quelqu’un le gagne, convaincu qu’à deux, la vie doit être plus douce. Il s’inscrit sur un site réputé sérieux promettant une rencontre avec l’être aimé.
Très vite, il découvre Jacques-Etienne, un dentiste, la petite cinquantaine, grand, musclé, les cheveux poivre et sel, un beau visage, de magnifiques yeux bleus et un sourire éclatant. Une centaine de kilomètres les séparant, leurs premiers échanges se font par téléphone. Rapidement, ils passent par la webcam. Ludovic est assis sur son canapé tandis que Jacques-Etienne se trouve dans une salle de sport qu’il a aménagée chez lui. Installé sur une machine, vêtu d’un débardeur, le biceps saillant, les pectoraux mis en valeur, le dentiste n’est pas peu fier de sa belle apparence. Les deux hommes parlent de tout, le quinquagénaire menant les discussions. Conscient de plaire, il se dégage de lui une certaine assurance, ce qui contraste avec le manque de confiance de Ludovic.
Afin d’avancer dans leur relation, l’idée de se rencontrer dans un parc à mi-parcours de leurs deux villes respectives est évoquée. Malheureusement, peu de temps après, le beau dentiste change d’avis et se désiste. Il avoue son manque d’enthousiasme pour cette entrevue et constate ne pas avoir été véritablement charmé par son interlocuteur. Déçu, le jeune homme accepte cette décision tout en espérant une belle rencontre dans l’avenir.
Pour se changer les idées et occuper ses journées de liberté, il décide de se renseigner pour savoir s’il existe des associations susceptibles de lui convenir. Il aimerait bien en intégrer une luttant pour les droits des personnes LGBT+. Une recherche sur Internet met à jour deux associations actives dans sa ville.
Dès le lendemain, il en joint une par téléphone et entre en contact avec Max, un membre actif qui est bénévole depuis plusieurs années. Les échanges sont sympathiques. Le tutoiement est de rigueur. Max a une voix amicale et parle facilement.
Après avoir raccroché, par curiosité, Ludovic effectue une recherche sur Internet pour voir à quoi ressemble son interlocuteur. En tapant son nom sur un moteur de recherches, il tombe sur plusieurs photos, il est insatisfait, car il ne le trouve « pas très beau », lui qui aurait tant voulu faire la connaissance d’un homme susceptible de lui plaire. Il lit ensuite une interview que Max a donnée à la presse locale. Face à une question du journaliste sur sa vie privée, celui-ci se défend d’être homosexuel. Cela interpelle Ludovic, qui s’étonne qu’un homme autant impliqué dans la cause LGBT+ revendique de n’être ni gay, ni bisexuel, ni transgenre.
Lorsqu’il l’a de nouveau au téléphone pour obtenir davantage de renseignements sur l’association, Ludovic ne résiste pas à l’envie de l’interroger sur ce sujet. Max reconnaît que l’interview a été biaisée et qu’il n’a pas voulu révéler son orientation au journaliste. Il confie être pansexuel, c’est-à-dire tout autant attiré par les hommes, les femmes que par les personnes intergenres et transgenres, sans distinction. Pour lui, ce qui importe c’est ce que dégage une personne. Ludovic est entièrement d’accord avec cette vision de l’amour.
Plus tard, il apprend que la deuxième association organise des groupes de paroles un samedi après-midi par mois et décide de se rendre à un des rendez-vous mensuels ouverts à tous. Les échanges ont lieu entre quatorze heures et seize heures et sont généralement suivis d’un « moment convivial », l’occasion pour les différents participants de discuter sur un mode plus privé et amical. Max propose de rejoindre Ludovic à la fin du groupe de paroles et de lui faire remplir les documents pour valider son adhésion.
En début d’après-midi, Ludovic arrive à l’accueil de la maison des associations de sa ville. Là, un homme lui indique : « le groupe d’échange pour les gays, bi et lesbiennes, c’est au premier étage, ici c’est pour les personnes trans ». Ludovic est un peu surpris de se sentir ainsi « catégorisé », mais acquiesce d’un hochement de tête et se rend dans la salle indiquée.
Cette démarche ne lui paraît pas simple. Il prie pour ne connaître personne dans le groupe afin d’oser s’exprimer. Lorsqu’il pousse la porte d’entrée, il constate avec gêne que l’animatrice est une dame qu’il connaît. C’est Stéphanie, une femme d’une cinquantaine d’années avec laquelle il a une amie en commun, Gentiane. Rencontrée lors d’un repas karaoké quelques mois auparavant, elle lui avait paru douce et affable. La dame en question s’approche de lui et se montre accueillante, l’invitant de suite à se joindre aux autres participants. Ils sont une vingtaine d’hommes et de femmes, de tous âges, assis sur des chaises disposées en cercle.
Avant toute chose, Stéphanie rappelle les règles d’un groupe de paroles. En premier lieu, la confidentialité : tout ce qui est dit au sein de cet espace reste entre ces quatre murs et ne doit en aucun cas être dévoilé à des personnes tierces. Il est également nécessaire de respecter la parole de chacun, sans jugement ni manque de respect. Troisièmement, il est indispensable de ne pas quitter la salle avant la fin des deux heures pour ne pas perturber le bon déroulement des échanges. Chacun est libre de prendre la parole quand il le souhaite, évidemment sans la couper aux autres. La possibilité de seulement écouter reste possible. Parler n’est pas une obligation.
La discussion se poursuit par un tour de table où chacun se présente. Ludovic se surprend à être particulièrement à l’aise, conforté par l’amabilité de tous. Il explique être gay et s’assumer depuis quelques années. Il souhaite échanger avec d’autres personnes de la communauté LGBT+ pour pouvoir partager leurs expériences et se soutenir dans les moments difficiles.
Le plus jeune du groupe, qui s’appelle Vittorio, est un garçon de dix-huit ans ; il est autiste, malentendant et de ce fait appareillé. Déscolarisé, il suit des cours par correspondance et passera son Baccalauréat en juin. Il surprend les membres du groupe lorsqu’il explique être venu ici « pour rencontrer des êtres humains », ce qui est révélateur du sentiment de solitude ressenti par l’adolescent.
Le plus âgé des participants a soixante-douze ans et se prénomme Lucien. Précédemment marié, père de deux grands fils, il a accepté de vivre son homosexualité seulement depuis cinq ans. À part quelques hommes de passage, il n’a pas réussi pour le moment à partager une histoire sentimentale durable et épanouissante. Il est bien triste et se sent seul. Pour les préserver, il a fait le choix de ne pas mettre ses enfants au courant de sa nouvelle vie.
Stéphanie révèle, quant à elle, être la mère d’un garçon transgenre, Stan, un jeune homme de vingt et un ans né femme, mais qui à l’intérieur de lui ne s’est jamais senti en harmonie avec le genre assigné à la naissance. C’est pourquoi il a décidé d’entamer une transition afin d’être en accord avec son ressenti intérieur. Sa mère a rejoint l’association afin d’accompagner son fils dans son parcours et de pouvoir échanger avec d’autres parents se trouvant dans la même situation.
Puis, tour à tour, chacun évoque un sujet qui lui tient à cœur et partage un peu de son quotidien.
À la fin de cette activité, tous applaudissent en signe de soutien. Ludovic rallume son téléphone, coupé momentanément pour ne pas perturber la discussion. Il a reçu un message de Max qui est derrière la porte, mais qui n’ose pas entrer de peur de déranger. Ludovic trouve cette attention charmante et l’invite à les rejoindre.
Âgé de vingt-deux ans, le nouveau venu est petit, mince et barbu. Les cheveux châtains, raides et courts, il a « une bonne tête », un regard malin et pétillant et un air sympathique. Sa voix douce, presque féminine, est assez proche de celle de Nilda Fernandez, le célèbre interprète de « Nos fiançailles », « Mes yeux dans ton regard » et « l’invitation à Venise ». Vêtu d’une chemisette bariolée à manches courtes qui laisse apparaître de nombreux tatouages sur les bras, d’un pantacourt et de baskets beiges, son look semble assez travaillé.
Lorsqu’il voit Ludovic pour la première fois, il paraît captivé et ne réussit pas à détacher son regard de lui. Ludovic s’en rend compte et en est un peu gêné. Durant l’heure et demie du moment convivial, Max lui parle beaucoup, se tient très proche physiquement de son interlocuteur, comme pour former une bulle qui ne laisserait pas la possibilité à d’autres personnes d’intégrer la discussion.
Ludovic le trouve sympathique et se hâte de remplir les documents d’inscription en lui donnant les dix euros de cotisation annuelle. Il sourit intérieurement, car l’attirance du jeune homme à son égard ne lui a pas échappé. Cependant, bien qu’il se sente flatté, il se rend compte qu’il ne partage pas ce coup de cœur. Max est trop jeune et trop fluet à son goût. Ludovic préfère les hommes grands et robustes avec une voix grave.
Par le biais d’une amie, Ludovic avait appris que l’association où Max est bénévole est essentiellement constituée de jeunes gens entre vingt et vingt-cinq ans. Ayant la crainte, avec sa trentaine d’années, de ne pas y trouver sa place, il fait part de ses doutes à Max qui le rassure très vite en lui confiant préférer, pour sa part, la compagnie d’hommes plus âgés.
Rentré chez lui, Ludovic est content de sa journée. Les échanges avec le groupe lui ont beaucoup apporté. Il a également apprécié le moment passé avec Max, mais pense ne plus avoir affaire à lui avant longtemps. Il ne sait pas encore la place omniprésente que va prendre ce nouveau venu dans sa vie.
Ludovic ne pensait pas revoir Max aussi vite. Or, celui-ci l’appelle une semaine après leur première rencontre pour lui proposer d’assister à une soirée caritative au profit des femmes battues. Cet événement se déroule dans un bar partenaire de l’association. Ceux et celles qui le veulent apportent des produits d’hygiène de première nécessité ainsi que des vêtements qu’ils ne mettent plus. Ceux-ci seront remis à un organisme chargé de les redistribuer aux femmes ayant dû quitter leur logement précipitamment à la suite de violences conjugales. Beaucoup d’entre elles, ayant des enfants, sont dans une grande précarité et en situation d’urgence. Bien que cette initiative n’ait finalement pas grand-chose à voir avec la défense des droits des personnes LGBT+, la cause soutenue est noble.
Ludovic se rend comme convenu à l’heure indiquée sur le lieu de rendez-vous, où il est accueilli à bras ouverts par Max qui affiche un large sourire. Ne s’étant pourtant vus qu’une fois, ils apparaissent déjà comme des amis de longue date. Max s’est acheté une nouvelle chemise aux couleurs orange et marron. Il aime porter des chemisettes à manches courtes de toutes les teintes. Ludovic se sent presque obligé de lui faire un compliment sur sa nouvelle tenue, car son ami lui a bien précisé qu’il s’agissait d’un nouveau vêtement acquis spécialement pour l’occasion.
Le bar est vide. Ils sont les premiers arrivés. Ludovic a apporté quelques produits d’hygiène qu’il dispose dans un petit carton où sont déjà rangés deux jeans et quelques tee-shirts apportés précédemment par des bénévoles.
Les deux jeunes gens s’asseyent et commencent à discuter. Max se montre toujours aussi charmant et veut tout savoir de son nouvel ami. Ils sont bientôt rejoints par un troisième homme, Yacine. Max a apporté des formulaires d’adhésion pour l’association, car le but de cette soirée est aussi de la faire connaître. Yacine est d’ailleurs venu à cette soirée pour y souscrire.
L’ambiance est bonne, mais la soirée n’est pas un succès : peu de personnes présentes et pas de dons supplémentaires venus compléter ceux de l’arrivée pour soutenir les femmes en détresse. Mise à part celle de Yacine, aucune nouvelle inscription n’est enregistrée. Max ne prend finalement pas la parole pour intervenir et parler de l’association comme il l’avait prévu initialement. Ce soir, son attention est ailleurs : paraissant totalement désintéressé de l’objectif de la soirée, il n’a d’yeux que pour Ludovic qui, lui, est un peu déçu que la récolte soit un échec. Max lui demande : « Tu passes une bonne soirée ? » Le jeune homme acquiesce d’un hochement de tête. Eh bien, c’est le principal », lui est-il répondu. Ludovic est flatté par cette prévenance. Il n’est en effet pas commun de rencontrer quelqu’un d’aussi gentil et soucieux du bien-être de l’autre.
Les garçons commandent ensuite des cocktails. Celui de Max est accompagné d’une petite sucette rose en forme de cœur qu’il prend et met en bouche en faisant des va-et-vient équivoques. Un regard coquin affiché, il lance à ses deux camarades : « Ben oui, j’ai l’habitude de sucer, sinon je ne serai pas pan [sexuel] ! » Ludovic rosit, gêné par cette révélation soudaine et intime.
La musique est entraînante, le bar diffuse des tubes des années quatre-vingt. Les trois hommes se lèvent et dansent. Assez extraverti, Max est à l’aise, sûr de lui, charmeur. Yacine est lui aussi dans son élément. Ludovic, quant à lui, tente de se donner une contenance en fermant les yeux tout en faisant quelques pas au rythme de la musique. Il reste beaucoup plus réservé que les deux autres. À un moment, il danse face à face avec une jeune femme métisse. Ils échangent quelques mots, mais ça ne va pas plus loin. Le regard de notre ami est très vite attiré par un beau brun présent sur le dancefloor qui le regarde avec un petit sourire accrocheur. Il s’agit d’un homme âgé d’environ une trentaine d’années. Son visage est doux et harmonieux. Il a les yeux noisette, un petit nez, un joli sourire. Du gel dans les cheveux lui permet d’arborer une coupe dynamique et moderne. Vêtu d’une chemise blanche légèrement déboutonnée et d’un pantalon en nylon noir, il est à la fois chic et décontracté. Ludovic aimerait aller vers lui, mais n’ose pas malgré le regard appuyé du danseur qui est comme une invitation à venir lui parler.
Ludovic est très vite arraché à son rêve par Max qui vient danser près de lui pour lui demander s’il apprécie les chansons diffusées.
Lorsque la soirée se termine, Max sollicite Ludovic pour l’aider à porter chez lui le carton contenant les vêtements et les quelques produits d’hygiène. Il habite à quelques centaines de mètres du bar où a eu lieu l’événement. Ludovic est assez surpris, car le carton à transporter est relativement léger et peut pratiquement se soulever d’une seule main. Néanmoins il accepte et suit Max vers la sortie. En partant, il ose engager la conversation avec le beau jeune homme croisé quelques minutes auparavant sur la piste de danse. Ils ont à peine le temps d’échanger leur prénom que Max l’appelle, lui signifiant l’heure tardive en lui rappelant qu’il travaille le lendemain.
C’est ainsi que nos deux compères se rendent chez Max. En chemin, celui-ci se laisse aller à quelques confidences et avoue à son nouvel ami être en relation suivie avec une jeune femme, Virginie, mais n’avoir rien contre le fait de partager des rapports intimes avec des partenaires masculins, à condition que cela ne se sache pas. Il avoue prendre plaisir à faire des fellations et préférer les hommes plus âgés, ceux qui ont aux alentours de trente-cinq ans. L’allusion est claire. Pourtant, Ludovic feint de ne pas comprendre. Max insiste sur le fait de ne jamais vouloir se mettre officiellement en couple avec un homme, mais précise que cela ne l’empêche pas de vivre avec certains d’entre eux des instants coquins le temps d’une soirée. Ludovic continue de se montrer hermétique à ces propositions déguisées.
Très vite, ils arrivent en bas de l’immeuble, entrent et restent devant l’ascenseur. Max multiplie les sujets de conversation comme pour retenir son accompagnateur. Il lui raconte sa passion pour le septième Art héritée de son père depuis sa plus tendre enfance. Il explique avoir acheté un écran télé grand format pour pouvoir mieux profiter des films et ajoute affectionner d’aller fréquemment au cinéma pour découvrir les dernières sorties. Il lui parle ensuite de son appartement. Ludovic comprend qu’il s’agit d’une invitation à monter, ce qui le rend mal à l’aise.
Une heure s’écoule. Il fait mine de vouloir rentrer chez lui : « Il se fait tard, je vais y aller ». Ce à quoi Max réplique : « Mais tu ne me déranges pas du tout ! ». Ludovic a beaucoup de mal à mettre fin à la conversation. Max ne semble pas vouloir le laisser partir. Pourtant, à un moment opportun, Ludovic réussit à s’extirper de la discussion et à regagner son domicile.
Assez content de sa soirée, il trouve Max adorable, même si son attitude a pu être quelque peu embarrassante. Ce qu’il ne sait pas, c’est que celui-ci, un tantinet vexé de son départ trop hâtif, ne compte pas en rester là.
***
Quelques jours plus tard, son association participant à la marche des fiertés de Lille, Max téléphone à Ludovic pour lui proposer de lui montrer le parcours choisi pour l’événement. L’occasion de passer une fois de plus l’après-midi ensemble et de mieux se connaître.
Ils se rejoignent au centre-ville vers midi. Max est toujours aussi enjoué, plein d’humour et à l’aise en toute circonstance. Il affiche un sourire assuré et son regard malicieux lui donne un air gracieux.
Ils s’asseyent à la terrasse d’une boulangerie et décident de commander des sandwichs accompagnés de desserts. Ludovic invite son ami qui le remercie avec chaleur. Ce dernier, dérangé par un coup de téléphone, décroche et paraît agacé. Il abrège rapidement la discussion. Il s’agit d’un adhérent qui l’appelle régulièrement dans l’espoir de lier amitié avec lui. Il rétorque : « Ce n’est pas parce que je suis membre que j’ai envie d’être ami avec tous les autres adhérents ! » Ludovic est assez surpris : si tel est le cas, que font-ils ici tous les deux ? Max s’en aperçoit et reprend « Enfin, avec toi, c’est différent, on s’entend bien ». Se voyant privilégié, Ludovic est une fois de plus satisfait de cette remarque, mais trouve malgré tout que conclure qu’ils s’entendent bien est un peu rapide, alors que c’est seulement la troisième fois qu’ils se rencontrent.
Après avoir mangé, les deux complices se rendent au point de départ de la Marche qui aura lieu au mois de septembre. Ludovic suit Max qui lui indique tous les endroits où le cortège passera et lui fait savoir qu’à l’approche de la Pride, il est convenu avec la mairie que les passages piétons soient repeints avec deux liserés aux couleurs de l’arc-en-ciel. Ludovic l’écoute et ressent une certaine admiration, impressionné par l’investissement de son ami pour la cause qu’il défend.
Une fois la balade terminée, Max décide de profiter d’être au centre-ville pour trouver de nouveaux commerces partenaires. Il propose alors à Ludovic de venir avec lui pour démarcher. Les deux jeunes gens se rendent dans un premier magasin, un vendeur de Donuts. Max entre, toujours très sûr de lui, se présente et explique être membre d’une association LGBT+. Il cherche des boutiques qui accepteraient de faire bénéficier les adhérents d’une réduction, généralement cinq pour cent de remise, sur présentation de leur carte de membre. En retour, l’association leur ferait de la publicité. Il s’exprime avec beaucoup d’aisance et se montre convaincant. La première vendeuse accepte. Elle remplit le formulaire de partenariat. Max et elle signent le document afin d’officialiser l’accord.
Nos compères se rendent ensuite dans quatre autres commerces. Tous acceptent le partenariat. Ludovic est de plus en plus émerveillé par les facilités de Max. Lorsque celui-ci lui propose d’essayer de démarcher à son tour, il décline l’invitation, reconnaissant ne pas se sentir encore prêt.
La fin de la journée survenant, chacun rentre chez soi. Ludovic a passé un excellent moment et apprécie de plus en plus la compagnie de son nouvel ami, qui, sans qu’il sache bien pourquoi, lui donne de l’énergie, de la motivation et l’apaise.
***
