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L'oeil bleu, le célèbre diamant, va sortir du Louvre à l'occasion d'un week-end exceptionnel. Les richissimes Léonard et Elisabeth Bardin vont l'exposer dans leur manoir d'Enghien-les-Bains et Laurène Hugues doit en assurer la protection. Six mois se sont écoulés depuis la mort de son associé, Romain Stern, et la détective s'est replongée dans le travail. Les clients affluent à l'agence S&H et sa réputation grandit. En acceptant de protéger l'oeil bleu, la détective s'expose à de nouveaux dangers. Elle devra redoubler de vigilance si elle ne veut pas être la prochaine victime de la terrible malédiction.
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Seitenzahl: 210
Veröffentlichungsjahr: 2018
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Après la découverte du cadavre de Romain Stern, un détective, flottant dans la Seine. Laurène Hugues, son associée, mène l’enquête parallèlement aux policiers Martin Mérier et Valentine Rano. La détective découvre ainsi que son partenaire n’était autre que le célèbre fantôme noir, un justicier des temps modernes. Cependant, Laurène se rapproche intimement du commandant Mérier, qui ne reste pas insensible à son charme. Elle décide de protéger le secret de feu son associé et ne dévoile rien aux policiers. Son enquête l’amène à rencontrer Simon Tailli, l’ami de Romain Stern et informaticien capable de tout. Aidé par celui-ci, elle découvre que son associé était victime d’un maître chanteur puis dévoile un trésor nazi caché dans le Pont Neuf parisien. Mais dans l’ombre quelqu’un tire les ficelles depuis le début : Mélanie, la secrétaire de Laurène et Romain. Son père, Laurent Vendrôme, est une victime du fantôme noir et elle est fermement décider à le venger. Voulant poursuivre les actions nocturnes de son ex-associé, la détective décide d’enfiler à son tour le costume du fantôme noir. Dans le même temps, aboutit son enquête pour retrouver la fille qu’elle a eue seize ans plus tôt lorsqu’elle a accouché sous X.
PROLOGUE
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
EPILOGUE
Il y a bien longtemps, au XVIIIème siècle
L’homme assis était penché sur sa loupe. Dans son sombre atelier, que seule la lumière présente sur son plan de travail éclairait, il apportait la touche finale à son œuvre. Adriaan Hals avait cinquante-huit ans, les rares cheveux qui lui restaient étaient blancs depuis longtemps. Son visage était marqué par le poids des ans, de gros cernes noircis soulignaient ses yeux. Derrière de petites lunettes ovales, son regard bleu perçant admirait le travail qu’il venait d’accomplir. Il le savait depuis qu’on lui avait apporté la gemme, ce serait la plus belle œuvre de sa vie. La pierre était la plus grosse qu’il n’avait jamais manipulée. Quelques mois auparavant, un esclave l’avait trouvée dans une mine de diamant près de Golkonda. Pour le remercier de cette belle découverte, le pauvre homme avait été abattu et jeté dans le Krishna. Habituellement, les pierres sont vendues lors du marché au diamant de Golkonda, mais pour cette pierre exceptionnelle, la procédure avait été différente. Celle-ci avait été vendue par le sultan lors d’une mise aux enchères extraordinaire. C’est le comte de Lally-Tollendal, gouverneur général de l’Inde française qui l’avait emporté. Il voulait faire un cadeau à la marquise de Pompadour grâce à qui il avait obtenu ce poste.
Adriaan Hals avait taillé ce diamant en double rose couronnée, respectant au maximum la forme primitive de la gemme. Après avoir soufflé dessus et s’être essuyé les mains sur son tablier, il porta la pierre devant ses yeux. Elle était resplendissante avec ses quarante-huit facettes irrégulières et son teint légèrement bleuté. Un minuscule défaut de la gemme apparaissait au centre, il s’agissait d’une petite tâche sombre. En regardant la pierre en face, on pouvait facilement imaginer un œil avec sa pupille. Le joaillier avait dans les mains la plus belle œuvre de sa vie. Il pensa à l’avenir de cette pierre. Elle allait assurément attiser les convoitises. Les femmes et hommes qui la porteraient allaient sûrement être des personnes influentes. On tuerait pour avoir ce joyau ! Et c’est lui, Adriaan Hals qui en était le créateur. Bien sûr, à ce moment là, il ne savait pas que ce diamant porterait malheur à ses propriétaires. A ce moment là, il ne pouvait pas imaginer que cette pierre allait laisser, derrière elle, des dizaines de cadavres. A ce moment là, il ne savait pas qu’il serait la première victime. Et pourtant, c’est à ce moment là, qu’il fût saisi d’une violente crise cardiaque. Il tomba de son tabouret en serrant le diamant de toutes ses forces. Il venait d’accomplir, à la fois, sa plus belle réussite, et sa pire création. On le découvrirait le lendemain allongé, ici, sur le sol de son atelier avec sa dernière œuvre dans la main droite. Adriaan Hals était la première victime. La malédiction de l’œil bleu débutait.
***
Il y a 16 ans, Hérouville-Saint-Clair
Joyeux anniversairrrre,
Joyeux anniversairrrre,
Joyeux anniversaire FX !
- Waouh ! A tes dix-huit ans, elle déchire ta soirée FX, criait Laurène.
- C’est de la balle, renchérit Noémie.
Les bougies à peine soufflées, le DJ remonta le son avec les Daft Punk et leur One more time, entraînant l’hystérie de la trentaine d’invités présents. Dans le sous-sol de la maison de FX, la fête battait son plein. Les trois quarts des invités étaient bien alcoolisés et ils étaient décidés à se faire entendre par tout Hérouville-Saint-Clair. Minuit était passé depuis une bonne demi-heure et le gâteau était à peine entamé, il avait juste servi de support pour les bougies quelques minutes plus tôt. Une bonne partie des jeunes dansait comme des furieux. Seuls quelques uns étaient restés près de la table qui servait de bar après qu’FX ait soufflé ses dix-huit bougies.
- Tu veux du gâteau Laurène ? demanda le roi de la soirée en élevant la voix pour qu’on l’entende.
- Non mais je veux bien que tu m’embrasses, répondit-elle enhardie par l’alcool.
- Ma copine est juste à côté, désolé, répondit-il en levant les deux mains.
- Bon, sers-moi un whisky-coca !
- Ok, je te prépare ça.
Le jeune majeur lui servit un grand verre avec trois quarts de whisky et le reste de coca. Laurène le remercia et avala la moitié du verre d’un seul coup. Elle était amoureuse de FX. Il était beau garçon avec ses cheveux châtains et ses yeux bleus, il lui faisait penser à Jude Law. Laurène était belle avec ses cheveux également châtains, ses yeux verts et ses tâches de rousseur. Ensemble, ils pouvaient faire un joli couple. Malheureusement pour elle, il avait déjà une copine. Aurélie Robert, la pétasse du lycée. Une fausse blonde, toujours perchée sur des talons et avec une tonne de fond de teint. Un genre de poupée Barbie humanisé. Mais avec un pois chiche à la place du cerveau. Poufiasse !
- Tu viens danser Laurène ? demanda Paul.
Le voilà qui recommence celui-là, se dit Laurène. Paul était plutôt Mr. Bean que Jude Law. Mais même avec sa drôle de tête, il avait un charme… surtout après avoir ingurgité plusieurs whisky-coca. Bon, comme son FX était pris, elle se résolut à danser avec lui.
- Pourquoi pas, mais je finis mon verre d’abord !
- Alors trinquons ensemble.
Ils levèrent leur verre d’un même mouvement et burent cul-sec ce qu’il leur restait. Ils se dirigèrent d’une démarche mal assurée vers le groupe qui dansait et se mirent à sauter dans tous les sens…au détriment du rythme.
- Tu sais que t’es mignon toi, cria Laurène dans l’oreille de Paul.
Ce dernier n’en revenait pas et il n’eut même pas le temps de répondre que sa partenaire l’embrassa, la langue tournant vigoureusement.
- Bah allez-y, ne vous gênez pas, leur dit une voix derrière eux.
- Il y a des hôtels pour ça, dit une autre voix.
Tous les deux s’en fichaient et continuaient à s’embrasser langoureusement, jusqu’à ce que Noémie arrive à les décoller.
Elle avait les cheveux longs, brun et un style légèrement gothique. Elle et Laurène étaient copines depuis la cinquième.
- Qu’est que tu fous avec Paul ?
- Je l’embrasse pourquoi, répondit Laurène avec un sourire béat.
- Je croyais que ta cible c’était FX…
- Impossible, il y a sa copine.
- Bon, allons prendre l’air.
- Attends, je reprends un verre.
- Tu ne crois pas que tu as assez bu ? demanda Noémie avec un air de reproche.
- Ça va, fiche moi la paix, je bois si je veux, répondit Laurène en s’écartant maladroitement.
Elle alla prendre un verre de vodka orange et retourna danser avec les autres devant une Noémie fâchée.
Il était près de deux heures du matin et la soirée était loin d’être finie. Dans une des chambres de l’étage, deux silhouettes s’embrassaient fougueusement sur un lit. L’adolescent glissa la main sous le t-shirt de la jeune femme et lui pelota les seins. Elle défit le bouton du pantalon de son partenaire et le lui retira. Mutuellement, ils continuèrent de se déshabiller aussi adroitement qu’ils le pouvaient car ils étaient fortement alcoolisés. Ils firent l’amour de manière assez bestiale. Cela ne dura que quelques instants et ils n’en éprouvèrent aucune jouissance. Une fois leur petite affaire accomplie, ils se rhabillèrent sans tarder et retournèrent à la fête.
Le lendemain, Laurène se réveillerait avec la gueule de bois.
Le lendemain, elle ne se souviendrait plus de cet instant.
Le lendemain, elle ne se douterait pas que cette nuit-là avait changé sa vie.
Et pourtant, neuf mois plus tard, elle accoucha d’une petite fille.
Une fille qu’elle n’était pas destinée à revoir.
Une fille qui vivrait dans une autre famille.
Une fille qui allait devenir celle d’une autre.
De nos jours, Le Vésinet
Océane Cansi discutait avec ses amies au parc du grand lac des Ibis. Il faisait très beau en ce début d’automne et elles s’étaient assises dans l’herbe, au bord de l’eau. Océane tirait une taffe sur sa clope entre deux rires. Vêtue d’un t-shirt blanc moulant et d’un jean, elle était belle et rayonnante. Elle avait une fine silhouette avec des cheveux châtains coupés au carré. Leur petit groupe venait dans ce parc après les cours dès qu’il faisait beau. Elles venaient critiquer les professeurs et parler mecs. Ce qu’elles ne savaient pas, c’est que de temps en temps quelqu’un les regardait.
Depuis l’autre rive, assise sur un banc, Laurène Hugues observait les adolescentes. Ou plutôt, elle observait une adolescente, Océane Cansi. Sa fille. Celle à qui elle avait donné naissance seize ans plus tôt. Depuis six mois, Laurène connaissait son identité. Depuis six mois, elle venait régulièrement ici, l’épier en secret. Le hasard avait voulu qu’Océane soit la fille adoptive d’Antoine Cansi, nom d’un des dossiers du fantôme noir. M. Cansi était entrepreneur et le propriétaire de la grande entreprise de nettoyage Cansi’net. Romain Stern n’avait pas eu le temps de s’attaquer à lui. Dans un sens, c’était une bonne chose, se disait Laurène toujours attristée par la disparition de son associé.
Depuis six mois, elle avait continué l’activité de l’agence de détective S&H, bien que Romain ne soit plus là. Après la trahison et le départ de sa secrétaire Mélanie, elle en avait recruté une autre : Margot Ravier. Les affaires marchaient très bien. Laurène avait également poursuivi les activités nocturnes de Romain : celles du fantôme noir. Les journaux en faisaient leurs choux gras. Que de scandales et d’affaires révélées grâce à ses actions. Les journalistes se frottaient les mains et les policiers étaient tournés en ridicule. D’ailleurs, Laurène n’avait pas beaucoup revu Martin Mérier, commandant de police de la brigade criminelle. Ils avaient dîné ensemble quatre fois en six mois, mais leur relation en était au statu quo, la détective ayant peu de temps à y consacrer, entre l’agence, le fantôme noir et la recherche de Mélanie. Cette dernière semblait avoir totalement disparu. Pourtant Laurène avait le pressentiment qu’elle n’était pas loin, qu’elle attendait quelque chose, une occasion d’assouvir sa vengeance bien que la détective ne soit pour rien dans les actions de Romain. En attendant, la jeune femme profitait de cette belle journée pour admirer sa fille. Elle semblait heureuse, et c’était cela l’essentiel.
Laurène aurait bien voulu lui parler. Mais comment faire ? Océane avait-elle envie de connaître sa mère biologique ? Devait-elle rencontrer les parents adoptifs avant ?
La détective était douée pour résoudre des énigmes et des affaires criminelles mais là, elle était totalement désarmée.
Le soleil commençait à décliner, le groupe d’adolescentes se leva pour rentrer chez elles. Océane habitait tout près dans une superbe villa. Elle allait y retrouver ses parents, ses parents adoptifs. Ses vrais parents ?
Laurène se leva également pour repartir et rejoindre son domicile à Puteaux. Elle marchait lentement. Elle aurait bien voulu observer sa fille quelques instants de plus. La voir rire. La voir heureuse. Que pouvait-elle lui apporter de plus ? Laurène n’avait pas sa place auprès de cette ado. Toutes ces réflexions rendaient la détective mélancolique. Soudain, plongée dans ses pensées, elle percuta une personne en passant sur le pont pour sortir du parc.
- Pardon, excusez-moi, dit Laurène en étouffant le dernier mot.
Devant elle se tenait Océane.
Elle faisait face à sa fille. Celle-ci était légèrement moins grande que sa mère biologique mais les traits du visage étaient semblables.
- Il faut regarder où vous mettez les pieds madame, lui répondit l’adolescente.
La détective était gênée et ne savait quoi répondre. Elle n’osait pas la regarder en face et pourtant elle avait une folle envie de la détailler, de la prendre dans ses bras.
Elle n’en fit rien et s’en alla sans dire un mot, pressant le pas.
- Drôle de femme, dit en rigolant Fanny, une des copines.
Les filles éclatèrent de rire sauf Océane qui marchait devant. La vision de cette dame la perturbait. Elle n’arrivait pas à savoir pourquoi. L’avait-elle déjà vue ? Etait-ce son comportement étrange qui l’avait dérangée ? La jeune Cansi essaya d’oublier cet incident et rentra chez elle après avoir quitté ses copines.
Laurène également était très déstabilisée par cette rencontre.
Elle était perdue sur la conduite à tenir désormais. Elle monta dans sa fiat 500 blanche qui était garée non loin et prit la route pour Puteaux.
A une dizaine de mètres derrière la place de parking vide, se tenait une silhouette qui avait suivie Laurène depuis son arrivée au Vésinet.
Elle avait tout vu.
Elle savait tout.
Mélanie pourrait bientôt passer à l’action.
L’agence S&H était située dans un bel immeuble avenue de Wagram, non loin de l’arc de Triomphe. Léonard Bardin y arriva en taxi depuis Enghien-les-Bains, où il résidait. Arrivé au deuxième étage, il poussa les portes vitrées et se trouva dans une pièce chaleureuse où les murs étaient contrastés de rouge et de gris. L’homme qui avait la soixantaine, avait de longs cheveux gris et portait un sobre manteau noir. Il s’adressa à la femme qui se tenait derrière un grand bureau à droite de la pièce. Il s’agissait de Margot Ravier, la nouvelle secrétaire. Elle était brune aux cheveux courts et portait de drôles de lunettes blanches en forme de trapèze qui lui donnaient un air étrange. Sa peau halée trahissait son métissage. Elle prit la parole :
- Bonjour, vous devez être monsieur Bardin. Vous avez rendez-vous à 10h avec madame Hugues, c’est bien cela ?
- Bonjour, oui c’est ça. Je suis un peu en avance, dit-il d’une voix légèrement rocailleuse.
- Ce n’est pas grave. Vous pouvez patienter dans un fauteuil, je vais prévenir de votre arrivée.
- Merci madame.
L’homme se dirigea vers un des fauteuils pendant que la secrétaire allait vers une des portes qui faisait face à l’entrée, celle de gauche. Elle revint quelques instants plus tard accompagnée de Laurène, vêtue de son habituel tailleur. Léonard Bardin n’avait même pas eu le temps de retirer son manteau.
- Bonjour monsieur, lança la détective.
- Bonjour madame Hugues.
- Vous pouvez me suivre.
Tous les deux allèrent dans le bureau de Laurène, laissant la secrétaire retourner au sien.
Le bureau de la détective n’était pas très spacieux. Il faut dire qu’une grande armoire remplie de dossiers prenait quasiment tout le côté gauche. Une porte à droite menait à l’autre pièce, vide depuis la mort de Romain. Un meuble blanc séparait l’espace en deux. D’un côté, un fauteuil gris foncé confortable pour Laurène et de l’autre deux chaises rouges pour les clients. Bardin retira son manteau et s’assit sur une des chaises pendant que la jeune femme prenait place sur son siège.
- Alors monsieur, qu’est-ce qui vous amène ici ?
- Je souhaite vous confier une mission importante.
- Expliquez-moi ? demanda la détective intriguée.
- Connaissez-vous l’œil bleu ?
- Non, de quoi s’agit-il ?
- Il s’agit d’un des plus beaux diamants au monde… et des plus dangereux aussi.
- Dangereux ?
- Il a causé la mort de presque tous ses propriétaires depuis son existence.
Laurène ricana.
- Une légende sûrement, dit-elle d’un ton moqueur.
- Ou une véritable malédiction. Ne riez pas madame.
- Oui, veuillez m’excuser, dit Laurène en reprenant son sérieux.
- Sa première victime était le tailleur de la pierre lui-même, Adriaan Hals. La deuxième victime fût le tout premier propriétaire, le comte de Lally-Tollendal. Il a commencé à enchainer des défaites lors de sa conquête de l’Inde quand il l’a eu en main. Le pauvre n’a même pas pu l’offrir à la marquise de Pompadour à qui il le destinait. Il a été décapité avant de l’avoir revue.
- Pas très joyeux comme histoire.
- La suite est du même acabit. Je vous en épargne les détails.
Sachez seulement, que ma famille l’a possédé au siècle dernier. Mon grand-père, ne voulant pas être une nouvelle victime de l’œil bleu l’a offert au musée du Louvre dans les années soixante.
- Et qu’attendez-vous de moi ?
- J’organise une soirée de charité dans deux semaines en faveur des familles de victime d’attentat. Pour l’occasion, je monte une exposition de ma collection de famille. J’ai obtenu l’accord du Louvre pour exposer l’œil bleu le temps d’un weekend dans mon manoir d’Enghien-les-Bains. Votre agence dispose d’une bonne réputation et je souhaite que vous assuriez la protection du diamant. De sa sortie du Louvre jusqu’à son retour au musée.
L’homme marqua une pause, puis reprit :
- Seriez-vous d’accord ?
Laurène prit le temps de la réflexion. Elle n’avait jamais eu ce type d’affaire auparavant et celle-ci allait, de toute évidence, être médiatisée. Ne risquait-elle pas d’être trop exposée ? Elle finit par dire :
- J’accepte mais compte-tenu de la réputation de cette pierre, vous pensez vraiment que quelqu’un voudrait la voler ?
- C’est la première fois depuis cinquante ans que le diamant va sortir du Louvre et une légende circule à son sujet… Cette pierre serait la clé vers un trésor inestimable.
- Comment ça ? demanda la jeune femme intriguée.
- Je n’en sais pas plus. C’est ce que j’ai pu entendre sur le sujet, dit Bardin. Mais bien sûr, personne n’a jamais trouvé de trésor. A mon avis, il s’agit de l’œil bleu lui-même.
- Bon, je vais m’occuper personnellement de la protection de la pierre. Cependant, pourriez-vous me communiquer les plans de votre propriété s’il vous plait ?
- Oui, je vous les ferai parvenir très vite. Auriez-vous besoin d’autre chose ?
- Oui, dit Laurène en réfléchissant. Je vais également avoir besoin de la liste et des CV de votre personnel. Combien sont-ils ?
- Quatre. Mais pourquoi cela ?
- Il me faut prendre toutes les précautions.
- Très bien, je vous enverrai leurs identités.
- D’autres personnes habitent votre manoir ?
- Ma femme, Elisabeth et c’est tout. Mes enfants n’y vivent plus.
- Très bien. J’attends de recevoir vos éléments et je m’occupe de tout ça.
L’entretien prit fin et Laurène raccompagna M. Bardin à l’accueil où Margot lui donna les coordonnées de l’agence pour l’envoi des éléments. La détective se dit que cette affaire allait nécessiter un peu d’aide extérieure. Elle devrait contacter Simon Tailli pour installer le système de sécurité. Depuis l’enterrement de Romain, l’informaticien l’avait déjà bien aidée sur quelques dossiers et surtout, il secondait le fantôme noir. Simon était un homme sur qui on pouvait compter, même si son fils de neuf mois l’occupait bien depuis que sa femme avait repris le boulot.
***
Ouiiiiin,
Ouiiiiin,
Ouiiiiin…
Difficile de se concentrer sur les plans du manoir avec tout ce vacarme. Laurène et Simon travaillaient depuis une heure. Mais ce soir, Gabriel ne voulait pas dormir… Au grand dam de son père.
- Je suis désolé, il faut que j’y retourne, dit l’informaticien.
- Vas-y, je continue sans toi.
La femme de Simon était infirmière et elle était de garde ce soir. Dans deux jours, l’œil bleu allait sortir du musée et Laurène n’était pas encore prête. Dans le salon, les plans de la propriété de Bardin occupaient toute la table basse. La détective était à genoux face à une grande télé sur laquelle était également affiché le plan en version numérique.
Avant d’être interrompus, ils étaient en train de peaufiner le placement des caméras. Celui des détecteurs de mouvement restait à faire. Ils devaient absolument clôturer ce travail ce soir car ils avaient accès au manoir dès le lendemain pour tout y installer.
- Bon, on va devoir continuer à trois, dit Simon en revenant avec Gabriel dans les bras.
- Petite terreur, dit Laurène en faisant une grimace au bébé.
Elle l’avait vu pour la première fois seulement quelques semaines auparavant, bien qu’elle côtoyât l’informaticien depuis la mort de Romain. Les premiers mois, Laure, la femme de Simon, avait souvent été chez ses parents avec Gabriel car elle reprochait à son mari d’être un mauvais père. Le pauvre n’ayant même pas eu un mot à dire. Depuis, l’informaticien avait fait ses preuves et il ne jouait presque plus aux jeux vidéos pour bien s’occuper de son garçon, qui lui ressemblait fortement. Il avait les mêmes cheveux bond et les mêmes yeux bleus. Seuls, lui manquaient les vêtements aux couleurs des super-héros. Son pyjama portait simplement le joli dessin d’un ours. Derrière sa tétine, Gabriel dessinait un grand sourire avec ses lèvres. Il était content de participer à cette réunion. Simon et Laurène se remirent donc au travail sous l’œil vif de l’enfant. Après seulement une demi-heure, le bébé s’était endormi dans le canapé usé mais la sonnerie du téléphone de la détective le réveilla soudainement. La jeune femme prit son portable sur la table et regarda le numéro, il s’agissait d’un inconnu. Elle décrocha pendant que Simon partait calmer son fils dans une autre pièce.
- Ça faisait longtemps, non ?
C’était Mélanie !
Laurène était sortie de l’appartement de Simon. Elle se trouvait dans un sombre couloir.
- Qu’est-ce que tu me veux ? demanda sèchement la détective.
- Tu m’as l’air agitée… dit Mélanie avec un air narquois.
- Romain est mort, ça ne te suffit pas ?
- Le fantôme noir n’est pas mort et c’est lui que je veux détruire.
Le ton était menaçant et Laurène n’aimait pas ça. Pourquoi l’appelait-elle bon dieu ?
- C’est moi qui vais te détruire Mélanie, répondit-elle méchamment.
- Il faudrait déjà que tu me trouves…
Un silence se fit, puis l’ancienne secrétaire reprit :
- Tu vois bien que j’ai une longueur d’avance sur toi.
- Que veux-tu ? demanda la détective agacée.
- Ça tient en deux mots : œil et bleu !
- Quoi ?
- Je veux que tu voles l’œil bleu.
- T’es complètement cinglée ! Et pourquoi je ferais ça ?
- Parce que tu aimes ta fille.
Le monde s’écroula autour de Laurène. Son teint devint livide, elle dût s’adosser au mur pour ne pas défaillir. Mélanie avait raccroché et seule une tonalité monocorde émanait du téléphone. Mais la dernière phrase retentissait inlassablement dans l’esprit de la jeune femme. Elle en aurait pleuré mais n’y réussit pas.
Parce que tu aimes ta fille.
Une phrase pleine de contradictions. La phrase elle-même évoquait l’amour, la tendresse. Mais dans de telles circonstances et sortant de la bouche de cette femme, elle était chargée de haine et de méchanceté. Amour et haine dans cette simple phrase.
Parce que tu aimes ta fille.
- Laurène ça va ?
Simon était arrivé dans le couloir. Elle ne l’avait pas vu car il faisait bien sombre. Elle reprit doucement ses esprits.
- Oui, ça va, mentit-elle. On peut y retourner.
- C’était qui ? Tu es toute pâle.
- C’est parce que j’ai faim, dit-elle avec un léger sourire.
- J’ai des pizzas dans le frigo, suis-moi.
***
Le lendemain matin, Laurène et Simon arrivèrent devant la grande grille du manoir. Derrière les barreaux, on voyait la belle bâtisse au fond d’une grande cour. Elle disposait de trois niveaux. Un large escalier pyramidal permettait d’accéder à la porte d’entrée située au-dessus d’un rez-de-jardin. Celui-ci était composé d’un garage à droite, on pouvait y voir la porte d’accès et à gauche, deux larges fenêtres donnaient sur les caves. De part et d’autre de la grande porte d’entrée à colonnades se trouvaient deux imposantes lanternes et de grandes baies vitrées. A l’étage supérieur, se voyaient quatre fenêtres de belle taille. Le toit était plat et semblait accessible via le dernier étage. Il était entouré d’une large rambarde. Ce qui impressionnait, outre la taille du manoir, c’était la blancheur de la pierre utilisée. Ce jeudi matin, le soleil donnait directement sur l’entrée et le reflet de la lumière sur la pierre éblouissait. Ayant le plan en tête, Simon et Laurène n’eurent aucun mal à savoir sur quelles pièces donnaient les fenêtres.