La Morgue - Léon Gozlan - E-Book

La Morgue E-Book

Léon Gozlan

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Beschreibung

Extrait : "On doit à l'esprit philosophique, plus encore qu'à la piété religieuse, la consécration de ce monument. C'est dire que La Morgue (bâtiment dont l'appellation est sans étymologie précise) date d'une époque peu éloignée. Il n'y a guère plus de vingt ans qu'elle existe telle qu'elle est aujourd'hui. Auparavant les corps des personnes, mortes de mort violente, ailleurs que chez elles, étaient déposés au petit Châtelet, dans un caveau aussi déplorable..."

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EAN : 9782335087239

©Ligaran 2015

La Morgue

On doit à l’esprit philosophique, plus encore qu’à la piété religieuse, la consécration de ce monument. C’est dire que la Morgue (bâtiment dont l’appellation est sans étymologie précise) date d’une époque peu éloignée. Il n’y a guère plus de vingt ans qu’elle existe telle qu’elle est aujourd’hui. Auparavant les corps des personnes, mortes de mort violente, ailleurs que chez elles, étaient déposés au petit Châtelet, dans un caveau aussi déplorable que sa destination ; et le plus souvent les grèves incisives roulaient en arrachant les chairs par lambeaux jusqu’à la concurrence du squelette, les cadavres des noyés, qui, maudits par les prêtres, mangés par les poissons et les corbeaux, devenaient ce qu’ils pouvaient. On se plaignait quelquefois d’influences meurtrières, d’exhalaisons fiévreuses ; on s’arrêtait là. La police municipale éteignit ces foyers d’infection. Il est vrai que nous devons presque toutes nos améliorations à la police municipale ; et son histoire manque ! Je ne sais trop ce que nous devons au clergé. Les prêtres continuèrent à excommunier les suicidés.

La Morgue, vue de Notre-Dame, est échouée, sur la rive gauche de la Seine, dans la Cité. Elle se cache, toute sombre et honteuse, entre le quai des Orfèvres, le quai de la Cité, le pont Saint-Michel, et le Petit-Pont. Pourquoi l’a-t-on encaissée là, au centre de Paris, à l’un des points les plus éloignés des lieux où l’on recueille ordinairement les noyés ? En l’isolant entre le Louvre et Passy, on eût épargné aux Parisiens qui se promènent sur les ponts, le triste spectacle de cadavres étendus sur leur dos au fond d’une barque, et ramenés à leur destination. C’est sans doute pour économiser aux parents et aux amis la fatigue d’une trop longue course ; dans la répartition des agréments de la capitale on aura voulu favoriser aussi les gens qui habitent la Cité : le quartier Saint-Honoré a les Tuileries et le roi ; le Marais, la Place-Royale et les Archives ; le faubourg Saint-Germain possède le Luxembourg et messieurs les Pairs ; la Cité, qui ne peut compter pour agréments le Palais de Justice, les cloches de Notre-Dame, et les cris de l’hôpital, à la Morgue.

La Morgue, c’est le Luxembourg, la Place-Royale de la Cité. On va là pour voir les noyés, comme ailleurs on va pour voir la mode nouvelle, les orangers en fleurs, les marronniers qui se rouillent au vent d’automne, le printemps et l’hiver. Je n’assurerais pas que certains propriétaires ne fissent valoir comme luxe et bénéfice de localité le voisinage de la Morgue. On sait que quatre croisées sur la Place de Grève rapportent proportionnellement dix fois plus qu’une maison au Marais : s’entend les bonnes années de Grève. Les gens du quartier causent du mort : – Il était bel homme, celui-ci. – Il était blond, celui-là. – Avez-vous remarqué cette grisette, ce matin ? pas fière ! les bas fils d’Écosse ! – Encore une ! – Croyez-vous ? – Elle l’était ; vous n’avez donc pas examiné son ventre ? pauvre enfant ! – Ils se sont fait ce plaisir, et il est grand, je le conçois, car s’il est de tous les jours, il est rare que les mêmes circonstances amènent toujours le même caractère de désespoir. Les commentaires qui se débitent au pied des exposés suivent l’échelle variée des probabilités en matière de suicide. L’œil sauvage qui vient se coller au carreau gras de ce cadre trop étroit pour la curiosité, fouille dans ces chairs inconnues, en interroge l’énigme, et explique hardiment le sujet de cette gravure avant la lettre.