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En quinze articles empruntés à l’Encyclopædia Universalis, cette histoire de la police française du Moyen Âge à nos jours alterne articles de fond (la police sous l’Ancien Régime, la Révolution et l’Empire, la République, l’Occupation, de la Libération à nos jours) et biographies des « grands » policiers qui ont écrit cette histoire (La Reynie, Fouché, Vidocq, les Bertillon…). Une synthèse brillante sur un sujet neuf et passionnant.
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Seitenzahl: 159
Veröffentlichungsjahr: 2015
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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.
ISBN : 9782341002318
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Historiquement, la fonction de « police » trouve ses origines dans les premières cités-États, qui ont très vite compris la nécessité d’avoir des règles organisant la vie de la cité et les rapports entre les citoyens. Étymologiquement, le mot rappelle cette origine et le lien entre police et cité (polis), mais avec une acception extrêmement large et ambitieuse. Du grec politeia, qui désignait dans la Grèce ancienne tout ce qui avait rapport à la cité et à son gouvernement, des règles d’hygiène à l’ordre public, des problèmes d’approvisionnement (eaux, marchés) aux mœurs (prostitution) et à la religion, le mot « police » a perdu beaucoup de son sens pour finir par désigner les seuls règlements et les institutions chargés d’assurer l’ordre et la sécurité publics. En France, c’est à l’État qu’il appartient d’exercer cette mission considérée comme régalienne. Le parallèle établi entre la construction d’un État centralisé et celle d’un appareil policier au service du pouvoir y a conduit à une perception de la police bien différente de celle des pays anglo-saxons, où la police est d’essence essentiellement locale.
Or l’histoire même de l’institution montre que ce modèle français centralisé et étatique, son évidence et sa prétendue permanence constituent autant d’idées reçues. Non seulement il n’y a jamais eu une police, mais toujours des polices, et ces dernières ont constitué durant des siècles un enjeu permanent entre pouvoir central et pouvoirs locaux, au point qu’on ne peut guère parler d’un instrument policier étatique avant 1941, et que l’unification mise en œuvre depuis cette date laisse subsister une diversité qui caractérise la situation policière française, dont il convient de retracer les principales étapes.
Profusion et confusion ont longtemps caractérisé la police. À partir du Moyen Âge, souverains, seigneurs laïcs et ecclésiastiques, mais aussi communes, paroisses, prévôtés, quartiers, métiers, corporations, Châtelet, universités exercent concurremment des prérogatives de police inextricablement mêlées à des pouvoirs que nous appellerions de justice. Ils le font à l’aide de tout un personnel administratif et d’officiers aux dénominations et statuts divers, dont les fonctions et les pouvoirs se chevauchent dans une confusion qui perturbe l’historien au moins autant qu’elle a perturbé les contemporains.
C’est pourquoi la création, par un édit de mars 1667, de la lieutenance de police à Paris – elle deviendra lieutenance générale de police en 1674 – est traditionnellement présentée comme un acte fondateur. Prenant prétexte du meurtre du « lieutenant criminel » Tardieu – un des nombreux magistrats en charge de la police de Paris –, en août 1665, en son hôtel situé à l’emplacement de l’actuel quai des Orfèvres, Colbert réunit une commission chargée de réfléchir au « rétablissement du bon ordre et de la discipline » d’une capitale plus dangereuse, si l’on en croit Boileau, que « le bois le plus funeste et le moins fréquenté ». Généralement considéré comme l’acte de naissance de la police moderne, cet édit, même s’il ne concerne que Paris, constitue un moment important de l’histoire policière. En créant un magistrat unique, en charge de tout ce qui touche à la sûreté de la ville, en définissant précisément ses tâches et ses fonctions, en indiquant avec minutie ses domaines d’intervention, en séparant clairement les fonctions de police et de justice jusqu’alors étroitement liées, en plaçant ce magistrat – propriétaire de sa charge, mais révocable –, directement sous l’autorité du secrétaire d’État de la Maison du roi, Colbert et Louis XIV démontrent la volonté du pouvoir royal de mettre la main sur la police de la ville-capitale et d’introduire quelque rationalité dans ce domaine. L’habileté du premier propriétaire de la charge, Gabriel Nicolas de La Reynie, ses réussites dans des domaines variés – éradication de la cour des Miracles, souci de l’éclairage et de la sécurité nocturnes –, sa proximité du souverain, son rôle dans des affaires criminelles comme celle « des poisons » ont fait le reste. Néanmoins, on se gardera d’accorder à l’édit de mars 1667 une portée qu’il n’avait pas.
Loin de constituer un modèle qui correspondrait au mythe d’une police française qui se serait construite parallèlement à l’État monarchique, absolu, centralisé incarné par Louis XIV, cet édit exprimerait plutôt une exception face à la règle qui prévaut sous l’Ancien Régime. En dépit d’un double mouvement d’autonomisation de la police par rapport aux autres fonctions administratives et judiciaires et d’une professionnalisation progressive de ses personnels, en dépit également de la tentative de centralisation que constitue l’édit d’octobre 1699 qui créait des lieutenants généraux de police dans toutes les villes possédant une juridiction royale, la police reste, sous l’Ancien Régime, une prérogative largement exercée par les instances municipales, lesquelles soldent des « guets » plus ou moins professionnels. L’édit de 1667 est surtout intéressant par la liste des tâches confiées au lieutenant de police, qui donne à voir ce que le mot « police » recouvre comme domaines d’application, et par la préfiguration qu’il constitue de l’exception parisienne. On ajoutera que les légendes complaisamment encouragées par les successeurs de La Reynie – d’Argenson, Berryer, Sartine, Lenoir... – sur leurs pouvoirs, l’étendue de leurs réseaux d’informateurs (les « mouches »), les réels abus commis par les « inspecteurs » en charge des enquêtes judiciaires n’ont pas peu concouru à forger une image noire de la police perçue comme un « instrument de l’arbitraire et de l’absolutisme ». Une réputation, pas toujours usurpée, qui vaudra à cette institution et à ses représentants d’être la cible de la colère populaire en juillet 1789.
Révolution, Consulat et Empire sont trois périodes essentielles dans l’histoire de la police. S’expriment alors l’idée proprement révolutionnaire d’une « force publique » au service des droits de l’homme (article 12 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, août 1789) et la confirmation aux corps municipaux élus de leurs prérogatives et du soin de faire « jouir leurs habitants des avantages d’une bonne police » (loi municipale de décembre 1789). Ces principes libéraux et décentralisateurs sont rapidement abandonnés : si les maires conservent leurs pouvoirs de police, ils seront, à partir de la loi du 28 pluviôse an VIII (17 février 1800) et jusqu’à la loi Goblet de mars 1882, nommés et révocables par le pouvoir exécutif, tandis que le principe de l’élection (décret des 21-29 septembre 1791) des commissaires de police – obligatoires pour les villes d’au moins cinq mille habitants – est abandonné dès vendémiaire an IV (1795). Ces commissaires sont soumis à l’autorité du ministère de la Police générale dès sa création en janvier 1796. On doit par ailleurs au Premier consul – méfiant à l’égard de la population parisienne qui, pendant dix ans, a pesé lourdement sur le cours de l’histoire de la France – la résurgence d’un statut particulier pour la capitale, avec la création, en pluviôse an VIII (février 1800), d’une préfecture de police dirigée par un fonctionnaire – successeur des lieutenants généraux de police dont il retrouve toutes les prérogatives – désigné par le pouvoir exécutif et responsable devant lui.
Cette création visait aussi à contrebalancer le pouvoir du ministre de la Police générale Joseph Fouché. On doit à Bonaparte le principe qui consiste à répartir un pouvoir considérable entre plusieurs administrations rivales : le ministère de la Police (supprimé en 1818 et dont le ministère de l’Intérieur, créé en 1791, héritera des missions), la préfecture de police, dont le premier titulaire fut, de 1800 à 1810, Louis Nicolas Dubois, et la gendarmerie (qui a succédé en 1791-1792 à la maréchaussée d’Ancien Régime), dont l’inspecteur général Moncey fut un adversaire constant de Fouché. Une division qui va caractériser le « modèle » français de police pendant plus de deux siècles et à laquelle une décision de janvier 2009 a mis un terme en rattachant la gendarmerie au ministère de l’Intérieur.
Le premier XIXe siècle est marqué par les nombreuses innovations mises en œuvre à Paris par la préfecture de police, et notamment la création, en 1829, d’un corps de sergents de ville dont l’uniforme doit signaler au public l’autorité et la fonction. Cette réforme est complétée en 1854 par la pratique systématique de l’îlotage, importée de Londres : les mêmes sergents de ville sont toujours affectés au même îlot. Cette volonté de visibilité de la police dans l’espace urbain s’accompagne, en 1832, de l’ambition de la rendre respectable et de la débarrasser de « fâcheuses préventions » qui tenaient à l’emploi de repris de justice, dont l’incarnation la plus célèbre est la Brigade de sûreté confiée à Vidocq, un bagnard en rupture de ban. En décidant en 1832 que le Service de sûreté n’emploierait « aucuns libérés de condamnations judiciaires », le préfet Henri Gisquet révolutionnait la police judiciaire et son image : on allait désormais faire la police des voleurs et des assassins avec d’honnêtes hommes.
Les flux migratoires et les déplacements de population des campagnes vers les nouveaux centres industriels urbains, facilités par l’apparition et le développement du chemin de fer, les formes inédites d’une criminalité exogène et mobile, la nécessité de contrôler les masses croissantes de population flottante, la fin d’une société d’interconnaissance qui assurait pour l’essentiel elle-même sa police et sa sécurité expliquent la volonté de contrôler des classes urbaines, assimilées aux « classes dangereuses » – ouvriers de l’industrie, étrangers, ruraux déracinés, marginaux discriminés : bohémiens, chemineaux, « apaches » –, à l’aide d’une « police de l’identité » dont les origines sont à chercher au XVIIIe siècle et qui va s’épanouir avec les techniques d’identification et de fichage mises en œuvre et développées à la fin du XIXe siècle.
Avec la IIIe République (1870-1940) – le premier régime démocratique de longue durée que la France a connu –, des conditions nouvelles se créent et des problèmes inédits se posent : ceux d’une démocratie parlementaire confrontée, sans grande préparation ni réflexion préalables, aux tensions et contradictions qui séparent les aspirations des Lumières mises en œuvre dans les textes et mesures des premières années de la Révolution, et la réalité policière des régimes ultérieurs. L’héritage policier que trouvent les républicains de 1870 est largement marqué par ses origines napoléoniennes et l’usage qu’en ont fait les deux Empires. Armés du seul bagage des principes de 1789, les républicains, qui arrivent aux affaires dans un contexte particulièrement difficile, ont tout à inventer du rôle, de la place, des missions, de l’organisation, du statut, des pratiques d’une police dans une démocratie, de ses rapports au politique, à la société, mais aussi du recrutement, de la formation de policiers au service des libertés. La démocratie représentative, des alternances politiques périodiques, l’affirmation des libertés fondamentales, l’alphabétisation générale, le poids et l’influence considérables d’une presse libre, l’embourgeoisement de la société et la « civilisation » des mœurs qui en résulte expliquent une demande sociale forte et contradictoire – plus de sécurité, mais moins de contraintes – et l’apparition d’une interrogation récurrente : « Que fait la police ? »
Une police dont les échecs, les bavures, les faiblesses deviennent – c’est une grande nouveauté – un enjeu politique. La République, « fille des barricades », systématiquement assimilée au désordre par une partie de ses adversaires, est alors mise en cause pour son inaptitude à garantir l’ordre et la sécurité – c’est l’argument de la droite antirépublicaine – ou à respecter l’égalité et la liberté – ce sera un argument récurrent de la gauche antiparlementaire. À cet enjeu politique de taille – dont témoignent les crises sévères que connaît une république en butte à l’hostilité d’adversaires bien décidés à renverser la « gueuse » ou la « république bourgeoise » –, il faut ajouter un souci électoral préoccupant pour des députés, des sénateurs, des gouvernants interpellés par leurs électeurs sur une criminalité qui fait quotidiennement la une des journaux et se trouve à l’origine d’une psychose d’insécurité inédite.
C’est pourquoi la période 1880-1914 correspond, pour l’histoire de l’institution, à l’abandon des utopies et de l’angélisme affichés en 1870. Confrontés aux réalités, les différents gouvernements, de droite ou de gauche, aidés de grands responsables policiers, entreprennent des réformes multiples et durables qui marquent une nouvelle étape dans la constitution d’une police moderne, illustrée par la naissance de la « police technique et scientifique », qui laisse un temps espérer une police infaillible et « propre » débarrassée des pratiques de force utilisées pour obtenir la « reine des preuves » que constituent les aveux. Parmi ces réformes, citons : la création d’une police judiciaire mobile (les brigades régionales mobiles, 1907-1908) ; la mise en marche timide d’une étatisation des polices municipales (Marseille, en 1908) ; une réflexion sur l’essence même d’une police « démocratique », ses pratiques et ses missions – une police judiciaire protectrice des citoyens, des Renseignements généraux (l’expression apparaît en 1907) protégeant la démocratie, un maintien de l’ordre défendant la liberté contre ses propres excès tout en respectant les libertés fondamentales et l’intégrité physique de citoyens « égarés par la colère » ; le tout posant les questions essentielles du recrutement et de la formation de policiers dont les métiers ne cessent de se « professionnaliser » et de se spécialiser.
En dépit de l’image noire que donnent les extrêmes politiques – de l’Action française et des ligues fascisantes au Parti communiste – d’une police « pourrie », au « service du capital » ou de la « démocrassouille », d’une « Tchéka occulte au service de la franc-maçonnerie », la IIIe République paraît avoir, du moins partiellement, réussi à construire une police républicaine dont les missions, les pratiques, les méthodes ne sont pas contradictoires avec les droits de l’homme et les principes démocratiques.
Si la police de la IIIe République a pu être considérée par l’extrême droite comme « le rempart de boue et de sang » du régime, la question se pose de comprendre le passage de policiers acculturés par la République au service de l’État français, né de l’effondrement militaire et moral de juin 1940 et fondé sur les ruines de la République qu’ils ont loyalement servie et dont ils passent pour des soutiens.
L’Occupation et l’État français, né à Vichy le 10 juillet 1940, représentent une étape essentielle dans l’histoire de la police française. Celle qui peut apporter le plus à une réflexion sur la nature, les usages, les contradictions des pouvoirs de police, les tâches, les pratiques et les responsabilités des hommes qui les mettent en œuvre et les exercent. « Serviteurs de la loi », les policiers ont été entraînés par une législation liberticide, discriminante et répressive dans une dérive des missions et des méthodes qu’ont connue tous les services. Ce véritable naufrage de la police républicaine et des principes édifiés depuis la fin du XIXe siècle est à l’origine d’une image noire dont les arrestations massives de juifs, comme celles de l’été de 1942, représentent une tache indélébile, renforcée par le trop long silence de l’institution sur ces épisodes. Cette période est également propice à une interrogation dont on ne saurait faire l’économie à propos du « devoir » : où était le devoir d’un policier face à des ordres imposés par un gouvernement légal et un cadre hiérarchique respecté, mais manifestement illégitimes sur le plan moral ? Une question dont les implications et conséquences expliquent des politiques mémorielles contradictoires, comme celle qui consiste à la fois à célébrer l’insurrection et la participation des policiers à la libération de Paris, à honorer les policiers « victimes du devoir », c’est-à-dire tombés au service du régime de Vichy, et les policiers résistants qui ont désobéi, trahi la confiance de leurs chefs. Comment honorer, sans remettre en cause tous les principes de l’institution et toute une culture professionnelle fondée sur la discipline et l’obéissance à la loi, des fonctionnaires qui ont choisi – et c’est leur honneur et celui de la police – le devoir de désobéissance ?
Enfin, la période de Vichy est fondamentale pour l’organisation de la police : étatisation des polices municipales, création d’une Direction générale de la Police nationale centralisée et de directions spécialisées, création d’écoles régionales et d’une École nationale supérieure de la police, de centres régionaux de police technique, entrée timide des femmes dans l’institution, création d’une force civile de maintien de l’ordre (les Groupes mobiles de réserve, transformés en Compagnies républicaines de sécurité en décembre 1944). Toutes ces réformes essentielles sont l’œuvre du gouvernement de Vichy et n’ont pas été remises en cause à la Libération. C’est le cas notamment de l’étatisation mise en place par le décret dit « loi » du 23 avril 1941.
Ne manquait plus à cette centralisation et à cette unification que la fin du statut particulier et de l’autonomie de la police parisienne que le gouvernement de Vichy ne réussit pas à remettre en cause. Ironie du sort, c’est le général de Gaulle – qui incarne le refus de Vichy – qui met fin à cette insularité en 1966 à la suite de l’affaire Ben Barka. Le rattachement symbolique au ministère de l’Intérieur (2009) d’une gendarmerie dont la militarité ne cesse de se dissoudre dans ses missions de police semble constituer une nouvelle étape sur la voie d’une unification, pourtant contredite par le retour des polices municipales, le développement de « polices » spécialisées (R.A.T.P., S.N.C.F...) et la place de plus en plus importante occupée par les sociétés de sécurité privées.
La période de l’après-guerre est également marquée par les dérives engendrées par la guerre d’Algérie, des dérives qui ne sont pas sans rappeler celles de l’Occupation, mais dans un contexte politique très différent. Ajoutons que l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, ses a priori idéologiques contre une police « réactionnaire », puis son apprentissage du réalisme et les alternances démocratiques depuis 1986 posent la question des rapports de la police au politique, au gouvernement et de sa nécessaire neutralité.
Enfin, la période contemporaine est caractérisée par l’apparition du terrorisme, l’explosion d’une violence urbaine inédite, les directives européennes et les réformes et adaptations parfois contradictoires mises en place par un pouvoir politique qui tend à faire de la sécurité, donc de l’efficacité et de la performance policières, des piliers essentiels du discours et du projet politiques.
Chaque époque doit gérer les problèmes, les déviances et les dangers qu’elle génère. La police – chargée d’assurer l’ordre, d’apporter et de garantir la sûreté considérée comme un des bienfaits de la civilisation – constitue l’instrument privilégié de cette gestion. Dans la longue durée, son histoire paraît caractérisée par une évolution qui a conduit à développer, centraliser, unifier, étatiser, adapter, diversifier, professionnaliser un appareil qu’on s’accorde, quelle que soit l’époque concernée, à trouver insuffisant, inadapté, inefficace, quand ce n’est pas dangereux et pour tout dire inquiétant. Les problèmes qui se posent aujourd’hui concernent l’image et les rapports avec la société d’une institution qui paie cher la réputation de ses pères tutélaires, le mystère dont elle aime à entourer ses pratiques, mais aussi les missions coercitives dont le pouvoir politique la charge avec plus ou moins de lucidité et d’habileté.
Jean-Marc BERLIÈRE