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Bienvenue dans la collection Les Fiches de lecture d’Universalis
Intitulé
Malaise dans la civilisation lors de sa première traduction française en 1934, cet ouvrage fut longtemps considéré comme appartenant à cette catégorie des œuvres freudiennes que l’on qualifiait d’anthropologiques non sans quelque mépris.
Une fiche de lecture spécialement conçue pour le numérique, pour tout savoir sur Le Malaise dans la culture de Sigmund Freud
Chaque fiche de lecture présente une œuvre clé de la littérature ou de la pensée. Cette présentation est couplée avec un article de synthèse sur l’auteur de l’œuvre.
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Seitenzahl: 85
Veröffentlichungsjahr: 2015
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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.
ISBN : 9782852295742
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Photo de couverture : © Karavai/Shutterstock
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Ce volume présente des notices sur des œuvres clés de la littérature ou de la pensée autour d’un thème, ici Le Malaise dans la culture, Sigmund Freud (Les Fiches de lecture d'Universalis).
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Intitulé Malaise dans la civilisation lors de sa première traduction française en 1934, cet ouvrage fut longtemps considéré comme appartenant à cette catégorie des œuvres freudiennes que l’on qualifiait d’anthropologiques non sans quelque mépris. Jacques Lacan, dans une perspective théorique, Peter Gay, sous un angle historique et biographique, ont contribué à redonner sa place essentielle à ce livre, celle d’une réflexion sur le tragique de la condition humaine, inséparable de ces autres travaux freudiens que sont L’Avenir d’une illusion (1927), Pourquoi la guerre ? (1933), Psychologie des masses et analyse du moi (1921) mais aussi Considérations actuelles sur la guerre et sur la mort (1915).
Aujourd’hui, répondant aux attentes d’un déchiffrage des ressorts cachés de l’actualité politique, les psychanalystes, mais aussi les philosophes se référent fréquemment au Malaise dans la culture pour en souligner la pertinence maintenue.
À Romain Rolland qui lui reprochait d’avoir négligé d’analyser, dans L’Avenir d’une illusion, l’essence du sentiment religieux voisin de cette plénitude dont l’homme est toujours en quête, Freud répond, entamant ainsi son analyse du Malaise, que cette plénitude est la répétition de celle éprouvée par le nourrisson et que le réconfort religieux ne fait que satisfaire le besoin initial de protection du petit d’homme. Il y a malaise dit Freud car l’homme est sans cesse contrecarré dans sa recherche du plaisir : son expérience du malheur s’origine dans « la surpuissance de la nature, la caducité de notre propre corps et la déficience des dispositifs qui règlent les relations des hommes entre eux dans la famille, l’État et la société ». C’est cette troisième cause du malaise, la culture, entendue comme la somme des institutions et des développements technologiques qui sont censés aider et protéger les hommes, que Freud choisit d’étudier car c’est celle qui leur donne l’illusion de pouvoir être toujours améliorée. Aides et protections ne vont pas, en effet, sans une contrepartie, l’existence de règles et de contraintes qui font obstacle à la jouissance recherchée et constituent les causes d’un malheur renouvelé. D’où l’oubli, par certains, du caractère protecteur de la culture et leur plaidoyer pour un retour à l’état de nature dont Freud souligne qu’il est tout aussi utopique que les solutions proposées par le christianisme d’un côté, par le communisme de l’autre pour tenter d’éviter à l’homme la souffrance du dilemme auquel il ne cesse de faire face, ne pas être satisfait de la civilisation mais ne pas pouvoir s’en passer.
Les échecs des utopies tiennent au fait qu’elles ont toujours refusé de prendre en compte ces dimensions essentielles du psychisme humain, la haine et l’agressivité, sources de plaisir au même titre que l’amour, figures de cette pulsion de mort que Freud a identifié en 1920 dans Au-delà du principe de plaisir. Les tentatives égalitaristes ignorent ces dimensions parce qu’elles se soutiennent de l’existence d’un extérieur, ennemi, impie, adversaire de classe, autant d’objets de cette agressivité et de cette haine, sources de plaisir. Freud retrouve là cette donnée, le « narcissisme des petites différences », qu’il avait identifiée dans sa Psychologie des masses et que Lacan reformulera en parlant de la « terreur conformiste » des collectifs.
Comment la culture, la civilisation peuvent-elles contrôler cette agressivité ? Elles y sont aidées par cette instance clé du développement psychologique de l’homme, le surmoi, partie du moi, qui s’est mise en opposition avec ce qui, dans le moi, reste le siège de cette agressivité ; le surmoi est donc cette « conscience morale » qui renvoie au moi l’agressivité que celui-ci entend projeter sur l’extérieur, sur les autres, et qui donne ainsi naissance au sentiment de culpabilité.
Ce sentiment de culpabilité existera, l’acte agressif réalisé ou non : extérieur, à l’origine, lié à l’autorité parentale, il a été intériorisé par le surmoi qui s’est lui-même constitué en absorbant un peu de l’agressivité que cette autorité suscitait. La culture et ses règles se sont substituées à l’autorité parentale initiale ; relayées par le surmoi, ces contraintes assurent la persistance de ce sentiment de culpabilité, fondement du malaise dont l’être cherche aveuglément la cause ailleurs.
Qu’adviendra-t-il ? Les formes nouvelles de la culture pourront-elles contrôler les manifestations de cette pulsion destructrice enracinée dans le moi ? Les temps contemporains ne se prêtent guère à répondre autrement que Freud à ces questions, c’est-à-dire sur le mode du scepticisme.
Michel PLON
Sigmund Freud est l’un des savants qui ont le plus marqué la pensée du XXe siècle. Parti d’une recherche sur l’étiologie des névroses, il a créé une œuvre qui déborde largement le domaine de la pathologie pour couvrir de nombreux secteurs du savoir, en particulier ceux qu’on groupe aujourd’hui sous le nom de sciences humaines. La théorie freudienne s’applique à l’homme normal comme au sujet malade ; elle décrit l’organisation de l’appareil psychique en s’appuyant principalement sur la notion d’inconscient, notion tout empirique, très différente de celle des philosophes, qui permet de définir la psyché dans ses rapports obscurs avec l’instinct (Trieb). Freud a dû lutter de longues années pour imposer cette idée d’un vaste espace mental soustrait à la conscience de l’individu, où cependant les souvenirs refoulés et les désirs interdits restent éternellement actifs. Longtemps seul pour affronter la résistance malveillante des milieux savants et du public, il comparait volontiers sa situation à celle de Copernic et de Darwin, qui, pour avoir humilié l’homme en lui montrant sa place dans l’ordre naturel des choses, s’étaient eux aussi attiré la haine et les sarcasmes des esprits conformistes. Il est vrai qu’après la publication de son livre majeur, Die Traumdeutung (La Science des rêves, Paris, 1926, ou, selon une version plus récente, L’Interprétation des rêves, Paris, 1967), il put peu à peu sortir de l’isolement, de sorte que, aidé de quelques disciples enthousiastes, il parvint à jeter les bases d’un véritable mouvement. Mais la paix ne lui fut pas accordée pour autant : il lui restait à se battre au-dehors comme au-dedans pour faire accepter chacune des conséquences de ses découvertes, puis pour préserver l’intégrité et le sens de sa doctrine. Admiré, aimé, raillé, trahi souvent par ceux-là mêmes qui s’étaient les premiers attachés à ses pas, il est demeuré intraitable sur cette portion de vérité qu’il avait conscience d’apporter à l’homme de son temps. Et c’est sans aucun doute à ce qu’il appelait lui-même son courage intellectuel qu’il doit d’avoir été l’un de ceux qui ont le plus fait pour abolir l’ancien régime de la pensée.
Né à Freiberg, en Moravie, d’une famille de commerçants juifs aisés dont la situation sociale s’était dégradée, Sigmund Freud avait cinq ans lorsque ses parents se fixèrent à Vienne, où il passa presque toute sa vie (il y serait sans doute resté jusqu’à sa mort, n’eût été l’arrivée du nazisme qui, en 1938, le contraignit à l’exil) Il a lui-même souligné les deux données de sa biographie qui lui paraissaient propres, sinon à expliquer l’extraordinaire aventure de ses découvertes, du moins à éclairer les dispositions particulières de son esprit : ses origines juives et la structure remarquable du milieu familial dans lequel il avait grandi. De son judaïsme, il pensait tenir un jugement critique libre d’idées préconçues et de préjugés, ainsi que l’habitude de faire front à l’hostilité de la « majorité compacte ». Quant à sa situation de famille, le remariage du père avec une femme à peine plus âgée que le fils aîné du premier lit accusait sans aucun doute pour Sigmund Freud enfant le schéma affectif fondamental qu’il a décrit plus tard sous le nom de complexe d’Œdipe. Quoi qu’il en soit, du reste, du rôle qu’a pu jouer dans la genèse de ses idées ce rapprochement inhabituel de deux générations – son frère aîné aurait pu être l’époux de sa mère, tandis que son père était isolé par l’âge dans une sphère anormalement reculée –, le fait est que Jakob et Amalia Freud, vus par le fils génial qui fit sur eux la plus périlleuse des expériences intérieures, sont devenus les personnages exemplaires du drame secret de la famille humaine, où, à chaque génération, l’homme engage son destin.