Léo découvre les humains - Livre 1 - Valérie de Donjy - E-Book

Léo découvre les humains - Livre 1 E-Book

Valérie de Donjy

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Beschreibung

"Léo découvre les humains – Livre I" présente l’histoire d’une entité en formation, incarnée pour la première fois, avec des traits de caractère distincts tels que la curiosité, l’impatience, la bonté et l’amour. Léo, ce protagoniste, est déterminé à passer de la théorie à la pratique en allant à la rencontre des êtres humains.

À PROPOS DE L'AUTRICE

Valérie de Donjy tire son inspiration de sa propre expérience pour partager ses connaissances à travers ses écrits. Dans "Léo découvre les humains – Livre I", elle vous invite à réfléchir sur la vie.

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Valérie de Donjy

Léo découvre les humains

Livre I

Nouvelles

© Lys Bleu Éditions – Valérie de Donjy

ISBN : 979-10-422-2004-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

I

Léo

Dans l’Univers, les âmes, guides et autres entités ou vous pouvez les appeler comme vous voulez, « vivent » en groupe.

Ils discutent, se forment et s’entraident les uns les autres avant que certains s’incarnent ou se réincarnent.

Une entité, que je nommerai Léo, est en formation avant de s’incarner pour la première fois. Son caractère est très prononcé en curiosité, impatience, bonté et amour.

Eh oui, le caractère n’est pas la spécificité des humains !

Léo en a marre de faire uniquement la formation « théorique », il veut comprendre en allant rencontrer des humains.

***

Il dit à ses guides :

— C’est bien beau cette formation, mais pour savoir dans quelles conditions je veux m’incarner, j’ai besoin de rencontrer des êtres humains, de les comprendre pour voir pourquoi ils ont choisi cette personnalité.

Un guide lui répond :

— Mais Léo, ce n’est pas comme ça que tu dois choisir.
— Oui, peut-être, mais les autres ont déjà vécu des incarnations donc ils ont de l’expérience. Moi, c’est ma première et je veux être guide après. Donc je veux essayer avant.
— Un essai ? reprend le guide stupéfait, mais tu n’y penses pas ! Si tu t’incarnes, c’est pour vivre avec les autres. Et pour être guide, tu dois avoir vécu plusieurs incarnations.

Léo prend un air triste. Il ne veut pas se résigner :

— Alors ça va être long et je suis tellement curieux, mais je ne connais rien parce que vous refusez de me donner accès aux pensées humaines.

Un autre guide réfléchit et dit :

— Il y a peut-être une solution. Je veux en parler d’abord avec les autres guides avant de te la proposer. Ce serait une exception, mais une expérience intéressante.

Léo le regarde d’un air suppliant et lumineux.

— Éloigne-toi un peu, lui demande le guide, et nous te rappellerons dès que nous serons d’accord.

***

Léo s’éloigne et regarde le soleil qui l’éblouit par sa luminosité et le fascine par ce mouvement de filaments lumineux comme un ballet fluide d’étincelles qui virevoltent et changent de couleurs.

Il soupire et attend tout en espérant vivre enfin une expérience.

Il ne sait pas ce qui l’attend.

***

Après un certain temps (le temps n’existe pas dans l’univers, mais c’est pour la compréhension), les guides le rappellent.

— Léo, dit l’un des guides, nous avons compris ton désir de vivre une expérience auprès d’humains avant de t’incarner. Tu es le premier à la faire de cette façon. Cela peut t’apporter beaucoup, mais il y a des conditions très strictes que tu devras respecter.
— Je vous écoute, répond Léo impatient et trépignant.
— Nous te proposons de partir pour la terre en étant un esprit.
— C’est-à-dire ? demande Léo étonné.
— Cela veut dire que tu n’auras pas de corps, mais tu vas te lier avec un humain et tu pourras voir et entendre ce qu’il vit.
— Me lier, ça veut dire quoi ? demande Léo.
— Tu pourras lui parler, discuter avec lui et seulement avec lui. En aucun cas, tu ne pourras parler avec les autres.
— Ah, chouette ! Je comprends, dit Léo, enthousiaste.
— Attends, je n’ai pas fini, reprend le guide. Tu dois le laisser libre de ses faits et gestes, quels qu’ils soient. Tu vas découvrir la bonté et la méchanceté soit la notion de bien et de mal que tu as appris.
— Oui, mais le bien et le mal sont relatifs, dit Léo.
— C’est vrai, il peut y avoir des situations où c’est plus ou moins tranché. Cela peut être plus ou moins dangereux et violent. Mais tu ne dois pas intervenir et ne pourras pas t’interposer.
— Pourquoi ? Si je veux l’aider, il doit m’écouter, dit Léo sûr de lui.

***

Les guides se regardent et sourient puis l’un reprend :

— Léo, dans ta formation, tu as appris que l’humain a son libre arbitre et il est important qu’il prenne ses responsabilités, vive des expériences et en tire les leçons.
— Oui, je me souviens, mais je pourrais le conseiller ?
— Tu pourras, mais après il est libre. Et n’oublie pas que tu ne t’es jamais incarné et que tu seras là pour apprendre.
— OK, quand est-ce que je pars ? demande Léo avec empressement.
— Quand tu auras intégré toutes les conditions que nous te donnons, répond le guide. Les situations que tu verras seront plus ou moins dangereuses et violentes.
— Ah, ce n’est pas fini, dit Léo, un peu déçu.
— Non, la période de ton voyage par expérience est de six mois maximum avant que tu reviennes vers nous. Nous allons t’observer pendant ce temps. Tu pourras faire plusieurs stages.
— Super ! Comme ça, je pourrai avoir le choix après, dit Léo tout joyeux.
— Le but de cette expérience est que tu apprennes, reprend le guide, que tu mettes en pratique ce que tu as appris et que tu réfléchisses au rôle que nous avons, nous les guides auprès d’eux, tout en les laissant libres.

Le guide regarde les autres pour avoir leur approbation.

— Ah, une chose importante, tu auras les mêmes ressentis que l’humain.
— C’est-à-dire ? demande Léo en réfléchissant. Ah oui, la joie, la tristesse, c’est ça ?
— Oui, mais ça peut être aussi la peur, la colère ou autres, répond le guide. Cela sera selon le comportement de l’humain avec qui tu seras.
— En fait, c’est comme si j’étais un peu sa conscience, reprend Léo.
— Oui et non, car il a la sienne et je te rappelle, c’est lui qui décide de ses actions.
— D’accord, j’ai compris, dit Léo, impatient. C’est pour quand ?
— Prépare-toi, c’est pour bientôt.
— Je suis prêt, répond Léo, sûr de lui.
— D’accord, voici ta première aventure, tu vas la découvrir par toi-même. Bon voyage Léo.

Léo se sent transporté comme dans un courant d’air vers un tunnel. Tout est noir jusqu’à ce qu’il arrive…

II

Laurent

Léo ouvre les yeux et observe son environnement.

Il est dans une pièce où un homme d’une vingtaine d’années est en train d’observer une carte. Il est très concentré sur les différentes lignes. Léo ne connaît pas ces dessins et il a envie de l’interroger.

Il attend quelques instants et lui demande :

— Qu’est-ce que tu regardes avec tant d’attention ?

L’homme sursaute. Il sait qu’il est seul dans la pièce et regarde partout, en se demandant d’où vient cette question. Il ne voit personne, jusqu’à ce qu’il aperçoive comme un haut de visage avec des yeux qui le regardent. Il est interloqué.

— Mais qu’est-ce que c’est que ça ? Je deviens fou !
— Non, répond aussitôt Léo, je suis un esprit qui ne peut être vu que par toi.
— Quoi ? Mais je ne crois pas aux esprits, répond l’homme.
— Je suis Léo et je viens passer un peu de temps avec toi pour comprendre les humains. Comment t’appelles-tu ?
— Laurent, répond l’homme en se prenant la tête dans ses mains. Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
— Ne cherche pas, d’autant qu’il n’y a que toi qui peux me voir et me parler. C’est comme si tu avais une voix dans ta tête. Es-tu d’accord pour que je reste quelque temps avec toi ?
— Si tu veux, répond Laurent qui a l’impression de rêver.
— Chouette, reprit Léo. Alors qu’est-ce que tu regardais quand je suis arrivé ?
— Je regardais une carte des Pyrénées. Je compte partir marcher dans cette région et découvrir certains villages.
— Ces lignes, ce sont des montagnes ? demande Léo.
— Oui, cela montre le relief.

Et Laurent explique à Léo les significations des différentes couleurs et des lignes.

Puis il se tourne vers Léo qui s’est rapproché.

— Tu es vraiment un esprit ? dit-il en étant encore sous le choc. Alors c’est bien, je ne vais pas partir tout seul, j’aurai une voix dans ma tête qui vient d’ailleurs.
— Super, je vais pouvoir partager avec toi cette aventure, quand pars-tu ?
— Demain, je dois terminer de préparer mon sac et ne rien oublier. C’est important, c’est ma première fois.

Léo le regarde s’affairer et prendre des vêtements, des chaussures, mais aussi un gros paquet rond.

— Qu’est-ce que ce paquet de tissu ? demande Léo.
— Ça, c’est une tente pour les nuits où je serai en pleine nature. Ah, tu veux vraiment être seul ! Je vais tout faire pour ne pas te déranger quand tu auras besoin de silence. Mais tu acceptes que je discute avec toi sur ta démarche ?
— Non, je vais être seul à certains moments et je veux aussi rencontrer des personnes qui vivent là-bas. Mais, il est important que je puisse être seul.
— Pourquoi veux-tu être seul ?
— Parce que c’est un moyen de me ressourcer, de reprendre des forces, de me retrouver face à moi-même dans la nature.
— Et pourquoi as-tu ce besoin ?
— D’abord parce que la nature nous parle. En fait, quand tu es seul, si tu es attentif, ce n’est pas le silence, mais des bruits que tu n’entends pas autrement.
— Comme quoi ?
— Le chant des oiseaux, l’herbe qui se froisse par le vent.
— Ah, j’ai hâte que tu me fasses découvrir tout ça.
— En attendant, je vais me coucher, car j’ai de la route à faire demain.
— Bonne nuit, dit Léo. Moi je vais réfléchir à ce que tu m’as dit.

***

Le lendemain, Léo attend avec impatience que Laurent se réveille.

Quand Laurent ouvre les yeux, il a oublié qu’il n’est plus seul et sursaute de voir Léo qui l’observe.

— Ah, tu es toujours là !
— Oui, on dirait que cela t’étonne !
— Excuse-moi, mais c’est une expérience pas banale, je dois m’y habituer.

Laurent se lève, se prépare, prend ses affaires, ferme la porte et se dirige vers sa voiture.

Il roule sans penser à Léo.

Et, dès qu’il arrive dans les montagnes, son regard admire le paysage qui défile, ce relief si différent de celui qu’il connaît. Ces montagnes sont hautes, avec une alternance entre de la roche et de la verdure. Il a hâte d’arriver. La route est sinueuse, il doit faire attention.

Il arrive sur un plateau où il se gare, descend de sa voiture et prend ses affaires.

Il va au bord de la route et contemple le paysage.

— C’est beau, dit Léo. C’est là que tu t’arrêtes ?
— Oui et je continue à pied, c’est le début de mon aventure, répond Laurent avec un sourire.

Et il prend un chemin de terre qui monte le long d’un champ.

Au bout d’un moment, il arrive devant un espace verdoyant, d’où il peut voir les vallées les unes derrière les autres. Il s’assoit par terre et ferme les yeux.

Léo observe Laurent, il ne comprend pas qu’avec ce paysage majestueux, il ferme les yeux, mais il n’ose pas le déranger.

Quand il les ouvre, Laurent regarde au loin comme s’il était absent, puis il se détend et regarde si Léo est là.

Il lui dit :

— Apprécies-tu ce moment ?
— Je t’ai regardé et je n’ai pas compris pourquoi tu as fermé les yeux devant ce beau paysage, tu peux m’expliquer ?
— En fermant les yeux, je me connecte à moi-même et à l’environnement et je privilégie les odeurs et les bruits.
— C’est quoi pour toi te reconnecter à toi-même ?
— Pour bien apprécier les choses, j’ai besoin de me recentrer, de m’ouvrir dans tous les pores de mon corps et de mon esprit à mes sens. Après je suis plus attentif aux petites choses, les couleurs, les fleurs, les sons, le chant des oiseaux, l’eau qui coule, par exemple.
— Ah, je comprends.
— Cela me permet de me nourrir de ce qui m’entoure et cela me redonne de l’énergie. D’ailleurs, je vais continuer ma marche pour rejoindre le village à quelques kilomètres.

***

Laurent reprend sa marche d’un pas sûr. Il s’arrête souvent pour regarder la vue magnifique d’autant que le soleil est aussi au rendez-vous.

Au bout d’un moment, il aperçoit quelques maisons.

— Tu vois Léo, c’est là.
— Tu connais des gens dans ce village ?
— Non, mais c’est l’occasion, répond Laurent. Tu restes avec moi ?
— Oui, mais je te rappelle qu’il n’y a que toi qui me vois et m’entends.
— C’est vrai, donc il ne vaut mieux pas que je te réponde en parlant sinon, les personnes vont penser que je suis fou, c’est ça ?
— Oui, c’est ça ! répond Léo.

Et ils rigolent ensemble en imaginant la situation.

Arrivé dans le village, il admire les maisons en pierre grise, les chalets en bois clair qui font vraiment partie intégrante du paysage.

Il y a peu de gens dans les rues et les personnes le regardent d’un air suspicieux, comme un intrus. Cela surprend Laurent qui s’attendait plutôt à une certaine curiosité. Il avait entendu dire que les habitants étaient un peu sauvages, mais là ce n’est pas qu’un peu !

Laurent cherche soit un bar, soit un restaurant où il pourrait se reposer.

Il aperçoit enfin une vitrine crasseuse, il s’approche et voit des personnes adossées au comptoir qui rigolent et d’autres qui jouent aux cartes sur les tables.

Il ouvre la porte et constate que le silence se fait et tout le monde se tourne vers lui d’un regard mêlé de curiosité et de suspicion.

Il entre :

— Bonjour messieurs, dames, dit-il.

Un murmure comme un bougonnement lui répond.

Laurent s’approche du comptoir et demande s’il peut boire quelque chose.

— Bien sûr, répond la personne derrière le comptoir. Assoyez-vous où vous voulez.

Laurent se dirige vers une table dans un coin et prend place. Il n’est pas à l’aise, car le silence continue, les gens l’observent avec curiosité. Il constate que même la partie de cartes s’est arrêtée.

« Où suis-je tombé ? », se demande Laurent.

Il s’assoit et se laisse observer. Il n’a pas le choix.

Le serveur s’approche et lui demande ce qu’il veut boire.

— Je voudrais un grand verre d’eau et un jus d’orange, répond-il.
— Ici, il n’y a que de la vinasse, dit un des clients du comptoir et tout le monde rit.

Laurent rougit de surprise et de gêne et sourit timidement.

L’homme qui lui a fait la remarque s’approche de la table de Laurent et dit tout fort :

— Vous n’êtes pas d’ici ça se voit, vous êtes de la ville, qu’est-ce que vous venez faire ?
— Je viens marcher dans les montagnes et profiter de la nature.
— Et vous êtes seul ? vous n’avez pas de guide ?
— Oui, je suis seul. Pourquoi ? J’ai une carte avec les chemins de randonnée, je compte les suivre, je ne vois pas de risque.
— Vous n’avez pas peur des ours ?
— Des ours ! Pourquoi ? Il y a des ours par ici ?

Laurent est surpris, il ne s’attendait pas à ça.

Léo écoute la conversation avec attention et constate que Laurent n’a pas dû se renseigner sur les risques. Il le sent très sûr de lui.

— Ben oui, il y a des ours, certes petits, mais ours quand même.
— Je vais faire attention, répond Laurent sans vraiment y croire.
— C’est ça, faites attention, reprend l’homme et il retourne au comptoir et demande un autre verre.

Après s’être désaltéré, Laurent prend ses affaires, paie sa consommation et se dirige vers la porte.

Le silence est pesant et tout le monde le regarde partir.

— J’espère qu’on n’aura pas à aller vous chercher, lui dit l’homme parce que moi, à votre place, je prendrais plus de précautions.
— Ne vous inquiétez pas, répond Laurent. Il ne m’arrivera rien. Je repasserai à mon retour dans deux jours.

Et il sort du bar, pour reprendre sa marche.

Quand il est dehors, Léo l’interroge :

— Tu n’as pas peur, après ce que t’a dit cet homme ?
— Peur de quoi ? De la nature, les chemins sont normalement bien balisés.
— Et les ours ?
— Les ours, pas de risque, ils doivent être peu nombreux et très en altitude.
— Et s’il t’arrive quelque chose ?
— Que veux-tu qu’il m’arrive ? Eh, n’essaie pas de me faire peur toi aussi sinon je ne vais pas profiter de mon séjour.
— OK, répond Léo. Mais je te trouve trop confiant.
— Il faut avoir confiance dans la vie, sinon on ne ferait rien, reprend Laurent.

Et Laurent se mure dans le silence, faisant comprendre à Léo qu’il ne veut plus réfléchir, mais profiter en reprenant son chemin. Léo respecte son silence.

En fin d’après-midi, le ciel commence à changer de couleur.

Laurent s’arrête et s’assoit sur un piton rocheux. Il contemple cette magnificence, le soleil qui descend et se rapproche des sommets en se transformant en une boule de feu accompagnée par quelques nuages roses de toutes les formes. Il se plaît à imaginer la signification des formes et cela le fait sourire. Il reste en admiration jusqu’à ce que le soleil soit passé derrière les montagnes.

Et, il profite du reste de clarté pour chercher un endroit où il va pouvoir dormir et monte sa tente.

Puis, il prend un sandwich dans son sac et se met à manger.

Léo, qui l’avait laissé dans sa contemplation, reprend la parole.

— Tu n’as pas peur d’avoir de la visite ?
— Pourquoi avoir peur ? Avoir peur c’est ne pas profiter de la vue, des paysages, d’avancer, et cela n’empêche pas le danger. C’est s’interdire l’aventure. C’est comme dans la vie, si tu as peur tu ne fais pas même si tu en as envie.
— Tu ne crois pas qu’il faille une certaine prudence ?
— La prudence, oui, mais il faut parfois prendre des risques et là encore je n’en vois pas.
— L’avenir nous le dira.
— Léo, tu es un trouillard ?
— Non, mais je suis là pour comprendre ta façon d’agir.
— OK, alors laisse-moi agir comme je le veux et ne cherche pas à me faire peur.
— Je ne cherche pas à te faire peur, je veux juste te mettre en garde.
— Alors, tout va bien, dit Laurent en se levant. Maintenant, je vais dormir pour me lever tôt et admirer le lever de soleil.
— Bonne nuit !

***

Le lendemain, Laurent se lève tôt, il veut voir le soleil apparaître, il ouvre la fermeture de sa tente et quelle n’est pas sa surprise de se retrouver nez à nez avec un ourson.

Il croit qu’il n’est pas encore réveillé et pourtant il sent bien son souffle. Il n’en croit pas ses yeux. L’ourson a la bouche ouverte, il voit ses dents pointues.

« Il va me mordre ! » pense-t-il.

L’ourson, aussi surpris que lui, le regarde avec de grands yeux joueurs et commence à lever sa patte pour le toucher. Laurent a juste le temps de reculer son visage pour éviter les griffes longues et affûtées.

« Je ne rêve donc pas », se dit-il. Et il commence à sentir son cœur qui accélère.

Il cherche à maîtriser sa peur.

L’ourson fait un pas vers lui lentement, avec curiosité. Laurent recule jusqu’au fond de la tente.

— Léo, qu’est-ce que je dois faire ? Je suis coincé.
— Maîtrise ta peur, sa mère n’est pas loin, répond Léo. Je ne peux rien faire pour toi.

L’ourson reste à le regarder jusqu’à ce que sa mère l’appelle. Il regarde Laurent fixement et repart en courant.

Laurent se met à trembler de tous ses membres et ne peut plus retenir ses larmes.

— Du calme, Laurent, c’est fini ! dit Léo.
— Mais tu te rends compte, Léo, j’ai failli me faire attaquer par un ours !
— Un ourson, temporise Léo. Et puis, le client du bar t’a prévenu et tu ne l’as pas cru et n’as pris aucune précaution, même pas un couteau pour te protéger.
— Ah, si, j’ai un couteau dans mon sac.
— Oui, il est bien dans ton sac, il aurait été mieux à côté de toi.
— Mais je ne pensais pas que les ours soient si bas dans la montagne, tente de se justifier Laurent.
— Et tu ne penses pas que les gens du pays peuvent avoir raison et qu’ils connaissent leur montagne.
— Oui, c’est vrai, j’ai eu tort, je vais me méfier, dit Laurent qui commence à se sentir jugé.
— Parce que tu continues ? dit Léo avec surprise.
— Pourquoi pas, c’est une expérience dangereuse, mais je m’en suis sorti, non ?

Léo se tait, parce qu’il sent que Laurent ne l’écoutera pas et ne veut pas être prudent. Il se rappelle l’ordre des guides :

Tu peux conseiller, mais tu ne dois pas décider pour lui.

Laurent range ses affaires et reprend son chemin en râlant :

— Et je n’ai pas pu voir le lever de soleil, tant pis, ce sera pour demain.
— Tu ne crois pas que tu avais plus urgent à faire ! lui dit Léo avec un regard compatissant.

Laurent ne répond pas et continue de marcher vers le sommet.

Léo en profite pour essayer de le faire réfléchir, mais il se heurte à un mur.

Toute la journée, Laurent avance en peinant dans la côte raide. Il recherche le symbole du chemin de Grande Randonnée, cela fait longtemps qu’il ne l’a pas vu. Il se demande s’il n’a pas raté un croisement. Mais il continue, confiant.

Au bout d’un certain temps, il s’arrête et regarde sa carte.

« Comment se repérer, je n’ai pas été assez attentif », se dit-il.

Léo entend ses pensées et lui dit :

— Tu ne penses pas que c’est un peu tard pour t’en rendre compte.
— Léo, tais-toi ou donne-moi une solution. Regarde, nous arrivons près d’une forêt et le chemin que je devais suivre ne traverse pas de forêt !

Léo lui dit :

— Tu devrais faire demi-tour, ce serait plus prudent. Traverser la forêt sans savoir où tu vas n’est pas prudent.
— Je sais, mais je n’ai pas le choix, je n’ai pas fait ce chemin pour rien. Je continue, qu’est-ce que je crains ?
— L’ours ne t’a pas servi de leçon ?
— Tais-toi ! D’ailleurs, il ne m’est rien arrivé, regarde, je n’ai aucune égratignure !

Léo est surpris par la mauvaise foi de Laurent et son jusqu’auboutisme, alors il se tait.

Laisse l’être humain faire son expérience, s’il ne décide pas de changer de chemin, tu ne peux rien pour lui.

Laurent voit le jour qui commence à décliner, il décide de planter sa tente au bord de la forêt.

***

Quand il se réveille, il admire la clarté du ciel.

— Ça va être une belle journée !
— Oui, répond Léo. Si tu arrives à retrouver ton chemin !
— Mais je vais le retrouver, il n’y a pas de raison, dit Laurent sûr de lui. D’ailleurs, je vais vite me préparer, car je dois être rentré ce soir.
— Ah bon, dit Léo, étonné. Et tu comptes courir dans la montagne ?
— Ne te moque pas de moi, j’en ai vu d’autres !

Laurent range ses affaires, défait la tente et part vers la forêt d’un pas sûr.

Léo le regarde partir un peu inquiet, mais rien ne sert de le lui dire, il n’écoutera pas.

En entrant dans la forêt, Laurent est étonné par la densité des arbres et le peu de clarté qui traverse. Mais il continue quand même.

Au bout d’un moment, il fait presque sombre, comme s’il faisait nuit, et il ne voit plus le chemin.

Il s’arrête pour prendre sa lampe de poche, mais il s’aperçoit que celle-ci émet peu de lumière.

— Zut, je n’ai pas de pile de rechange. Bon, je vais faire demi-tour, décide-t-il.
— Tu n’as pas pris tes précautions ? demande Léo.
— Non, je pensais que les piles tiendraient, je ne partais pas longtemps.
— Décidément, tu n’as peur de rien, dit Léo.

Laurent reprend le chemin inverse avec le peu de lumière qui lui reste. Il accélère son pas et aperçoit enfin la lumière.

Il soupire. Il est rassuré, car il a eu un peu peur, mais ne voulait pas l’admettre.

Léo a bien senti sa peur, mais n’a rien dit. Laurent est trop fier.

En sortant de la forêt, Laurent reprend sa carte. Il a perdu beaucoup de temps et il voudrait prendre un raccourci.

Il voit une possibilité plus directe, même s’il n’y a pas de chemin.

— Tu es sûr de toi ? demande Léo. La montagne peut réserver des surprises.
— Qu’est-ce que je crains à essayer ? De toute façon, je n’ai rien à perdre. Je ne vais pas prendre de risque en étant prudent, répond Laurent.
— OK, dit Léo. Vas-y, mais fais attention.
— Ne t’inquiète pas.

Et Laurent prend à travers les broussailles et les rochers. Il enjambe les obstacles jusqu’à ce qu’il arrive à une pente un peu abrupte dont il ne voit pas la profondeur.

— Chouette, je vais faire une descente en escalade sans rappel, dit-il en souriant, content de son jeu de mots.
— Mais tu n’es pas équipé, dit Léo.
— Oh regarde, ça n’a pas l’air haut !
— Oui, mais assez pour que tu tombes.
— Ne me porte pas la poisse, Léo, dit Laurent avec agacement.

Et Laurent, sans hésitation, commence à descendre sur ce piton rocheux. Il pose ses pieds prudemment. Mais la pente est raide, il n’a pas une bonne visibilité. Si bien que, à un moment, il pose son pied sur une pierre et bouge l’autre pied sans s’apercevoir que la première était mal accrochée. Il perd l’équilibre et tombe dans le vide.

Il n’a pas le temps d’avoir peur. Il atterrit sur une plateforme rocheuse, se tord le pied en voulant arriver debout et termine sur les fesses accueilli par une pointe affûtée qui s’enfonce dans sa chair.

Léo a assisté à la chute avec effroi. Il ne pouvait pas intervenir et cela le désolait.

Il voit Laurent assommé par la chute et lui demande tout de suite :

— Ça va, Laurent ?
— Attends, je reprends mes esprits, dit-il après quelques instants. Comment veux-tu que ça aille ? J’ai mal partout, je pense que j’ai une entorse et j’ai un « crochet » planté dans les fesses !

Laurent respire et réalise qu’il s’est coincé tout seul, loin de tout, sans possibilité d’appeler à l’aide.

— Tu peux bouger ? demande Léo.

Laurent essaie de bouger. Il s’aperçoit que la pointe ne s’est pas enfoncée très profondément, ça saigne un peu, mais c’est surtout douloureux.

Il tente de bouger, puis de s’appuyer sur sa cheville et n’arrive pas à se lever, ça fait trop mal, il se masse la cheville pour essayer de se soulager.

— Tu vas faire comment ? lui demande Léo.
— Je vais attendre un peu et il va bien falloir que je trouve une solution.
— As-tu le moyen d’appeler quelqu’un, pour demander de l’aide ?
— Non, je n’ai pas pris mon téléphone. D’ailleurs, je pense qu’il n’y a pas de réseau.
— Crois-tu que tu as été prudent de partir seul ? Le client du bar avait raison, tu aurais dû au moins te renseigner ou prendre un guide. Je te rappelle que, en plus, tu ne sais pas exactement où tu es sur la carte.
— Ça va, tu as fini de me faire des reproches. Tu crois que je n’ai pas déjà ma dose avec mes douleurs ?
— Je ne te fais pas de reproche ! D’ailleurs, tu es maître de tes décisions et je n’ai aucun moyen de t’aider. Je peux juste t’accompagner par ma présence.
— Donc, je dois me débrouiller tout seul, dit Laurent en essayant de s’accrocher à la paroi d’où il est tombé pour se relever.

Il arrive à s’agenouiller avec difficulté, mais cela l’a épuisé. Puis, il essaie de se redresser en laissant échapper un cri de rage et de douleur. Il s’appuie sur un pied, ne pouvant pas poser l’autre. Il reste comme ça un moment et commence à avancer à cloche-pied en se tenant à la roche.

— Je n’arriverai jamais à retourner au village dans cet état, dit Laurent abattu et les larmes aux yeux. Oui, Léo, j’ai eu tort de ne pas écouter les conseils du villageois et ne pas prendre plus de précautions. Mais maintenant comment puis-je faire ?
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