Léo découvre les humains - Livre 2 - Valérie de Donjy - E-Book

Léo découvre les humains - Livre 2 E-Book

Valérie de Donjy

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Beschreibung

Léo poursuit son rôle de guide spirituel dans "Léo découvre les humains – Livre II", rencontrant des individus en quête de sens et d’évolution. À travers des dialogues profonds, il aide chacun à surmonter ses peurs et à affronter les défis de la vie quotidienne. Entre réflexions sur le passé et espoirs pour l’avenir, chaque rencontre devient un chemin vers la transformation personnelle. Ce récit allie sagesse, introspection et découverte de soi, offrant un regard sensible et éclairant sur les luttes humaines. Une invitation à se reconnecter à soi et à l’autre pour évoluer ensemble.

À PROPOS DE L'AUTRICE 

Valérie de Donjy a passé 30 ans dans la finance, où elle s’est passionnée pour la communication et le partage de connaissances. Après une thérapie en Communication Profonde Accompagnée (CPA), elle a réorienté sa carrière vers l’aide aux autres, découvrant son don de magnétisme et de médiumnité. Grande lectrice, elle a écrit "Le cycle de Léo", un ouvrage qui traite de l’évolution personnelle et de l’importance du dialogue pour grandir

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Seitenzahl: 228

Veröffentlichungsjahr: 2025

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Valérie de Donjy

Léo découvre les humains

Livre II

Nouvelles

© Lys Bleu Éditions – Valérie de Donjy

ISBN : 979-10-422-7173-2

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Sommaire

I – Léo4

II – François6

III – Kevin21

IV – Rémi35

V – Lionel45

VI – Lilas64

VII – Véronique78

VIII – Nelly92

IX – Alice105

X – Cathy119

XI – Noah135

XII – Clémence148

I

Léo

Après ses premiers accompagnements auprès de personnes qui acceptent de se remettre en question, Léo retrouve les guides qui lui ont proposé ces stages.

— Léo, comment se sont passées ces différentes rencontres ?
— Ce sont de belles découvertes.
— Pourtant, les personnes étaient en difficulté, négatives et surtout ne savaient pas comment sortir de leurs problèmes.
— Oui, mais la première chose que je constate est que, quels que soient leurs problèmes, ce sont de belles personnes qui sont embourbées et qui ont besoin d’être mises devant leur réalité. Surtout, chacune est unique.
— Tu es bien mystérieux. Elle est humaine, ce sont leurs points communs.
— Certes, c’est bien sur terre que je suis allé. Mais un humain a une personnalité, un caractère, un milieu dans lequel il évolue. Ces êtres pensent qu’ils ne peuvent pas sortir des limites qui ont été établies par leur éducation, leur environnement.
— Pourtant, ils sont là pour vivre une expérience d’évolution.
— Sauf qu’ils ne le savent pas et ont l’impression de se trouver devant un mur ou entourés de frontières.
— C’est dommage, parce que ce n’est pas le but de leur incarnation.
— D’où mon rôle de leur proposer un accompagnement. Ces personnes sont souvent seules devant leur problématique et ne savent pas ou ne veulent pas prendre le temps de réfléchir.
— Si elles ne veulent pas prendre ce temps, pourquoi acceptent-elles avec toi ?
— Elles se rendent compte que cette pause et cette mise à plat sont indispensables.
— Et tu te présentes comme guide et tu leur imposes ta vision ?
— Ce n’est pas ce pour quoi j’ai été formé. Une personne doit être libre et responsable de son chemin de vie. Je suis leur ami, leur confident, leur moi intérieur. Peu importe la représentation de qui je suis. Le principal c’est le résultat, c’est-à-dire ouvrir les possibilités de changer positivement.
— Et tu aimes cet accompagnement ?
— Je me sens utile et je souhaite continuer. J’apprends beaucoup de ces rencontres.
— Bon voyage.

II

François

Léo arrive dans une pièce avec une table où sont empilés des dossiers, un ordinateur et des chaises de chaque côté. Sur la table il y a un carton ouvert. Un homme est en train de décoller des feuilles sur un tableau blanc. Puis il efface les mots qui y sont écrits, les schémas, lentement, en prenant le temps de les relire. Il a l’air nostalgique.

— Bonjour, tu as l’air bien pensif, dit Léo.

François sort de sa torpeur et regarde dans le coin de la pièce d’où vient la voix.

— J’entends des voix. Qu’est-ce que c’est ?
— Je suis Léo, un esprit qui vient passer un peu de temps avec toi, si tu le veux bien.
— Un esprit, mais ça n’existe que dans les films de science-fiction.
— Tu ne crois pas à un esprit ou une énergie qui peut t’accompagner. Ou ton âme qui te fait réfléchir ?
— Je ne sais pas trop. Mais peu importe. Discuter avec toi ne peut pas me faire de mal.
— Alors tu acceptes ?
— Oui, d’autant que je suis dans une période de ma vie où je fais un changement radical.
— Ah bon, explique-moi.
— Après toutes mes années de travail, je vais enfin pouvoir me reposer et vivre cool. Je vais prendre ma retraite.
— Cela veut-il dire que tu ne vas plus venir travailler ?
— Oui, c’est ça. Je n’aurai plus l’obligation de me lever tôt le matin. Je vais buller. L’entreprise m’a organisé une petite fête. Cela me permet de saluer tout le monde.
— Alors, je vais te laisser, je te retrouve plus tard.
— Si tu veux.

Et Léo regarde François sortir de son bureau et se diriger vers une grande salle où sont regroupées des personnes qui l’accueillent en l’applaudissant. Toutes sont debout autour d’une grande table où sont posés des paquets cadeaux, des verres et un assortiment de viennoiseries.

Quand il entre dans la salle, un tonnerre d’applaudissements l’accueille. François est très ému. Il se rend compte que ces personnes sont là pour lui. Ce sont des gens avec qui il a partagé du temps, des discussions, des partages. Cela représente plus que le travail qu’il a accompli pendant toutes ces années.

Il s’avance comme envahi d’une torpeur agréable. Puis il se reprend et sourit de fierté. Il se dirige vers son supérieur qui lui tend la main avec chaleur et l’invite à se mettre à côté de lui.

Son supérieur prend la parole. Il fait la revue de son parcours dans l’entreprise et le remercie. Puis il l’invite à dire quelques mots.

François est touché par autant de compliments, il se dit en lui-même, qu’il n’en a jamais autant reçu et qu’il est bien temps de le faire. Cela le fait sourire.

Il prend la parole à son tour. Il remercie tous ceux qui sont là, donne des exemples de bons moments et surtout il insiste sur son envie de buller, de prendre son temps, de ne pas faire de projet trop vite et de profiter de ne pas avoir d’obligation.

Puis ses collègues viennent vers lui pour lui dire au revoir, voire partager certains souvenirs. Mais surtout lui transmettent différents souhaits ou conseils : que ce sont de longues vacances et qu’il en profite bien, qu’il ne se repose pas trop sinon il va devenir flasque, qu’il peut prendre son temps mais qu’il s’organise un planning, qu’il va pouvoir faire des choses qu’il n’avait pas le temps de faire avant.

François écoute et les remercie, mais surtout déguste ce moment de partage avec ces personnes qu’il ne reverra pas pour la plupart.

« Je le laisse à son plaisir. Je suis curieux de voir à quel point il est conscient du changement qui arrive et s’il est prêt », pense Léo.

***

Le lendemain, François est dans son bureau pour prendre ses dernières affaires et les cadeaux qu’il a reçus.

Il ferme la porte de son bureau. Il s’assoit dans son fauteuil et ferme les yeux, le sourire aux lèvres. Puis il ouvre les yeux en regardant l’espace qui l’entoure comme s’il cherchait quelque chose.

— Cherches-tu quelque chose ou quelqu’un ? lui demande Léo d’un ton moqueur.
— Non, je prends le temps de déguster cette fin de période qui a duré une bonne quarantaine d’années. Je n’arrive pas à réaliser que je vais pouvoir faire ce que je veux, organiser mon temps. Ça me paraît fou, une illusion.
— C’est bien. Mais pourquoi ça te paraît fou ? Tu dois t’y préparer depuis longtemps.
— C’est surtout que j’en entends parler depuis un certain temps par ma femme, qui est déjà en retraite et qui m’a mis en garde.
— Pourquoi et en quoi t’a-t-elle mis en garde ?
— Pour elle, il faut s’y préparer, prévoir déjà ce que tu feras, t’organiser pour ne pas tourner en rond, pour ne pas te laisser aller.
— Et ne lui donnes-tu pas raison ?
— Oui et non. Depuis que je le sais, je n’ai pas eu le temps de me préparer à quoi que ce soit.
— Comment ça ?
— J’ai voulu transmettre à la personne qui me remplace, pour que mes connaissances ne se perdent pas. Et je me suis dit que j’aurai bien le temps.
— Tu n’as donc pas pris le temps. Pour toi n’est-ce pas une priorité ?
— Je ne vois pas les choses de cette manière. Dès ma fin de contrat, je vais avoir du temps. Au début ce sera comme des vacances et après je verrai.
— Ah ! Vois-tu ça comme des vacances définitives ?
— Non, bien sûr. Après je verrai.
— Je ne comprends pas ta réaction.
— Pourquoi ?
— Quand tu pars en vacances, tu les prépares, alors qu’il s’agit de quelques jours. Et là, tu as plusieurs années à occuper et tu n’as rien fait.
— Justement parce que je vais y aller par étape. Les vacances, si je pars, il faut réserver, organiser pour en profiter. Là, je reste sur place.
— Ah ça, tu peux le dire ! Comptes-tu végéter ?
— Non, simplement prendre mon temps et me reposer. Bon, ça suffit, cela crée déjà des problèmes avec ma femme, tu ne vas pas t’y mettre.
— OK, comme tu veux. Je reviendrai plus tard.

Léo constate que cette question met François en colère. C’est peut-être qu’il n’est pas à l’aise avec ce changement.

Le soir, Léo écoute la conversation entre François et sa femme.

— Alors, ça y est, c’était ton dernier jour ! dit Dominique à François. Tu vas pouvoir enfin faire quelque chose pour t’organiser. Il n’est pas question que tu passes ton temps devant la télévision.
— Comme je te l’ai dit, les premiers temps j’ai besoin de buller. Je vais faire ce que je veux, lui répond François.
— Je te connais, tu vas t’abrutir de films ou d’émissions idiotes.
— Si c’est ce dont j’ai besoin, je ne vois pas le problème.
— Moi, je vois que le premier temps va durer et que tu vas vite déprimer. Dois-je te rappeler tes dernières vacances où tu n’as rien fait et tu t’es ennuyé ? Tu veux passer le reste de ta vie en état végétatif ? Moi, je ne veux pas un dépressif à la maison.

Léo constate que l’ambiance est tendue. Il attend l’occasion pour en discuter avec François.

***

Léo guette le départ de Dominique pour discuter avec François qui vient juste de s’installer en s’allongeant sur le canapé pour regarder la télévision.

— Tu as une émission intéressante à voir pour te mettre de bon matin devant l’écran.
— Non, mais je vais zapper. Je n’ai envie de rien faire.
— Pourquoi ?
— Ah, tu es comme ma femme, à vouloir que je m’occupe à tout prix !
— Je n’ai rien à vouloir. C’est ta vie, pas la mienne. Mais je remarque que tu fuis ton avenir.
— Je fuis mon avenir ! Comment ça ?
— Tu te refuses à regarder vers l’avant, à prendre du temps pour t’écouter sur ce que tu veux réaliser, créer dans et pour ton avenir. Tu préfères t’abrutir devant l’écran pour éviter de te poser des questions. C’est plus facile.
— Ce n’est qu’un temps…
— Ah bon ! Mais tu comptes attendre que tu ne sois plus capable de rien faire. Ce sera trop tard. Je peux te poser une question directe ?
— Pose toujours.
— N’aurais-tu pas peur de t’ennuyer ?
— Non, puisque je ne pense à rien, comme tu dis.
— Alors, je te laisse quelques jours, et je reviendrais voir où tu en es.
— Si tu veux.

***

Pendant les jours qui suivent, Léo observe François. Il ne constate aucune évolution dans ses occupations, juste la télé et les querelles avec sa femme qui lui reproche de ne pas faire le minimum dans la maison quand elle n’est pas là. François lui répond de manière agressive et claque la porte en sortant de la maison.

Il marche d’un bon pas en grognant, il a les larmes aux yeux.

Il arrive au stade, la porte est ouverte, il n’y a personne. Il monte dans les tribunes du terrain de foot et s’assoit dans un coin. Il ferme les yeux.

— Ça va ? lui demande Léo. J’étais avec toi ces derniers jours et j’ai entendu vos querelles. Tu en penses quoi ?
— Comment veux-tu que ça aille ? Je ne vaux plus rien. Je ne suis plus bon à rien.
— Pourquoi tu te dévalorises ainsi ? Explique-moi ?
— Plus personne n’a besoin de moi, je n’existe plus.
— Si tu parles de ton travail, oui tu as arrêté, mais ce n’était pas une surprise. Ce n’est pas pour ça que tu n’es plus capable de rien.
— Je me sens mis à l’écart de tout, c’est pour ça que je me mets devant la télé.
— Et tu crois qu’elle va te dire que tu es utile ? Tu crois qu’elle va te dire ce que tu peux faire ?
— Non, mais je ne sais pas comment faire et je n’ai aucune envie. Même ma femme ne veut plus de moi.
— Oh, mais tu te positionnes en victime de ta femme. Ou peut-être il serait plus juste de dire que tu es victime de toi-même.
— Peut-être. Mais une fois qu’on a dit ça, je fais quoi ?
— Est-ce que tu veux rester à pleurer sur ton sort parce que tu n’as pas fait ce qu’il fallait, ou enfin t’occuper de toi ? Je peux t’aider si tu le souhaites, mais je ne peux pas faire à ta place.
— Je veux bien essayer. Ai-je vraiment le choix ? Je n’ai pas envie de me retrouver à la rue à attendre ma mort.
— C’est déjà bien. D’ailleurs, j’ai vu que Dominique faisait presque tout chez vous, alors qu’elle travaille encore.
— Non, elle est déjà à la retraite, mais elle a beaucoup d’activités.
— Et tu trouves normal qu’elle fasse tout en rentrant ?
— Quand je travaillais, on était habitué comme ça. Elle ne supporte pas la façon dont je fais les choses, c’est toujours mal fait ou pas comme elle veut.
— Vous en avez rediscuté depuis que tu ne travailles plus ? Tu as essayé de faire des choses pour que ce soit fait quand elle arrive ?
— Non, c’est vrai. J’aurais pu. Mais…
— Mais quoi ? Tu attends qu’elle te le demande ? Tu attends qu’elle te dise ce que tu dois faire et comment ?
— C’est vrai que c’est toujours elle qui s’est occupée de tout. Je ne me suis pas posé la question.
— Lorsque je vous ai entendu discuter, ou plutôt quand elle t’a parlé, elle n’a pas essayé de te faire bouger ?
— Si.
— Et ?
— Mais, je pensais qu’après quelques jours de repos, je pourrais retrouver un rythme.
— Comment ? Si tu ne l’inities pas, il ne viendra pas tout seul.
— C’est ce que je découvre. Quand je travaillais, je ne me posais pas de question, et maintenant c’est comme si je me retrouvais devant un vide.
— Oui, mais si tu avais préparé comme je crois que beaucoup de gens te l’ont dit, tu n’aurais pas ce vide.
— Oui, mais on ne refait pas le passé, et voilà où j’en suis.
— Mais tu peux changer le présent et le futur, justement tu as la liberté de faire ce que tu veux.
— Mais je n’ai envie de rien.
— Donc tu vas attendre devant ta télé que ça vienne sans chercher ?
— Ben… Je ne sais pas par quoi commencer et j’ai peur.
— Ah, nous y voilà et c’est bien de le reconnaître. Tu as peur de cette liberté qui s’ouvre à toi. Je peux t’aider et te donner des pistes pour changer les choses, si tu le veux, mais je te l’ai déjà dit, je ne peux rien faire à ta place, juste t’accompagner.
— De toute façon, il va falloir que je fasse quelque chose, alors je veux bien.
— La première chose serait peut-être de faire un effort chez toi en ne laissant pas ta compagne tout faire, qu’est-ce que tu en dis ?
— Tu as raison. Je vais en discuter avec elle. Quoique je vais lui faire la surprise de lui préparer un apéritif pour quand elle rentrera, car pour le reste je ne suis pas sûr qu’elle soit d’accord, donc il vaut mieux que nous en parlions d’abord.
— Ouah, et respectueux en plus ! Bravo ! Tu permets que je sois là ?
— Bien sûr ! Cela va même me donner du courage.
— Je te rappelle que tu es le seul à me voir et m’entendre. Si tu me parles, fais-le par la pensée.
— Merci, Léo. Je crois que je commençais à perdre pied et à me laisser aller de découragement.
— Je crois surtout que tu as besoin que quelqu’un te prenne en charge. Maintenant, c’est à toi et tu peux être aidé.

***

François fait la liste de courses et il part au supermarché. N’ayant pas l’habitude, il perd beaucoup de temps à chercher les aliments nécessaires et il a peur de décevoir Dominique ou qu’elle lui fasse des remarques.

Quand il arrive avec ses courses, il commence à vider son sac. Et il ouvre tous les placards pour trouver les assiettes et plats utiles pour présenter. Il s’aperçoit qu’il ne connaît même pas comment est organisée la cuisine. Il se sent dans une pièce qui lui est étrangère, alors qu’il est chez lui.

Il finit par tout organiser sur la petite table du salon.

Quand Dominique rentre de son activité, elle s’arrête sur le pas de la porte. La pièce est vide mais elle est surprise de voir la table du salon décorée et pleine de petits biscuits apéritifs disposés sur des coupelles.

François observe de derrière la porte de la cuisine. Il est heureux de la voir étonnée. Dominique est inquiète. Elle se demande ce qui se passe.

François entre avec un plat de toasts chauds.

— Tu as quelque chose à te faire pardonner, quelque chose à fêter ? C’est bien la première fois, depuis que nous nous connaissons que tu me fais ce genre de surprise, dit Dominique, ça me perturbe.
— Il y a un début à tout, ne crois-tu pas ? Je veux me faire pardonner mon comportement de ces derniers jours.

Puis il prend Dominique dans ses bras quand il constate qu’elle a les larmes aux yeux. Elle le regarde avec un regard aimant.

— J’ai besoin que tu m’aides à trouver comment participer à ce qu’il y a à faire dans la maison, lui dit François.

Elle se tourne vers lui avec un sourire moqueur.

— Tu veux faire les tâches ménagères avec moi. Je ne m’attendais pas à ça. Tu es sûr que tu vas bien ?
— Tant que je travaillais, c’est vrai que je t’ai laissé tout faire. Je sais que tu ne veux pas m’avoir dans tes pattes, mais je voudrais t’aider. Je peux peut-être apprendre à faire le ménage ou la lessive. Je sais que tu as tes habitudes et tes manières, c’est pourquoi je ne veux pas le faire sans ton accord.
— Et en plus tu y mets les formes. Décidément tu me surprends, mais je suis d’accord. Je vais gagner du temps. En effet, c’est à célébrer.

François ouvre une bouteille de champagne.

— Et tu as même fait les courses pour ce moment. Je te félicite !
— Merci de m’avoir bousculé et supporté pendant ces derniers jours. J’étais un peu déboussolé.
— Et tu ne voulais pas écouter mes mises en garde. J’y suis pourtant passé avant, donc je connais ce changement de vie. Mais c’était à toi de décider de changer.
— Ça y est, je suis décidé même si je ne sais pas comment m’occuper.
— Ça, c’est ton problème.

Et la discussion s’arrête là. Dominique change de sujet tant elle est émue et surprise et ne veut pas lui montrer.

***

Le lendemain, alors que François et Dominique sont dans la cuisine, Léo sent une tension. François voit des légumes à éplucher, il cherche un couteau dans les tiroirs. Dominique trouve le couteau avant lui et se met à le faire à sa place. François se retient de faire une remarque et la regarde faire. Puis il remarque que le lave-vaisselle est à vider. Il commence à prendre les assiettes et cherche où les ranger. Dominique lui ouvre le placard. Il veut mettre le couvert, elle lui prépare tout. François la regarde, puis sort de la cuisine en criant :

— Tu vois, j’essaye de faire des choses mais tu me repousses et les fais à ma place, ce n’est jamais comme il faut. Je me remets devant ma télé, là je ne t’embêterai pas.
— Tu as l’air en colère, dit Léo.
— Oui. Je veux bien faire des efforts mais si c’est pour me faire réprimander tout le temps, ce n’est pas la peine.
— C’est le début, soit un peu tolérant avec ta femme. Je sens qu’elle est déconcertée par ton changement, tu ne crois pas ?
— Peut-être, mais qu’elle ne me reproche pas de ne pas l’aider !
— C’est nouveau pour elle que tu participes, tu lui changes ses habitudes. Tu as essayé, c’est bien. À elle d’accepter, si elle le souhaite. Jusqu’à maintenant c’était « son domaine ». Tu peux peut-être faire autre chose : la laisser te montrer. Si c’est elle qui faisait tout, laissez-vous le temps de prendre vos marques. Et vous n’êtes pas obligés de maintenant tout faire ensemble.
— C’est vrai, tu as raison.
— Cherche plutôt ce que tu veux faire dans la maison. Tu lui proposes ou vous en discutez ensemble. J’ai l’impression qu’avec toi c’est un peu tout ou rien, je me trompe ?
— Non, c’est vrai. Mais je voulais bien faire.
— Sois patient, tu vas y arriver. Cherche ce que tu veux partager : de l’aide, de la détente, un sport ou autre.
— Ça me donne des pistes, merci.

***

François se met devant son ordinateur et cherche les associations. Il découvre qu’il y a une distribution de repas dans sa ville et postule pour y participer. Il en parle à Dominique pour savoir ce qu’elle en pense et lui montrer qu’il a trouvé une activité.

— C’est bien, mais toi qui te laisses facilement servir, tu veux servir les repas, se moque-t-elle. Ça, c’est la meilleure. Fais attention de ne pas te faire utiliser par les autres membres.
— Merci de ton conseil.

François sent bien qu’elle essaie de le décourager, mais il veut essayer.

***

Quelques jours plus tard, Léo voit François derrière une colonne de tables où sont étalées des assiettes avec de la nourriture. Il le sent fébrile, attendant les personnes qui viennent se servir.

— Je vois que tu as trouvé une occupation.
— Oui, j’ai envie d’aider, mais je ne sais pas si je suis à ma place.
— Qu’est-ce qui te fait hésiter ?
— J’ai peur de ma réaction vis-à-vis des personnes qui vont venir.
— C’est-à-dire ?
— J’ai peur de montrer de la pitié alors que je veux juste les servir, leur permettre de manger.
— Essaie et tu verras leur réaction et ton ressenti.

À ce moment-là des personnes commencent à arriver. Léo laisse François faire ce qui lui a été demandé, et l’observe. Il remarque qu’il est attentionné, poli jusqu’à ce que son visage montre de la surprise en voyant une personne qu’il connaît. Il s’immobilise et lui demande :

— Tu me reconnais.

C’est un homme grand, assez mince, d’une quarantaine d’années, avec une barbe mal entretenue et des vêtements usagés.

— François, mais qu’est-ce que tu fais là ?
— Je fais un essai dans cette association pour faire le service des repas.
— C’est bien.

L’homme s’éloigne sans en dire plus. François n’ose pas lui demander pourquoi il vient se nourrir ici. Il continue de s’occuper des personnes qui arrivent. Mais son esprit est pris par cet ancien copain qu’il a connu dans d’autres conditions. Il ne veut pas le mettre mal à l’aise. L’homme s’assoit à une table et mange en regardant fixement le mur. Puis il part sans se retourner.

François est surpris par Lucas, cet homme qui donnait l’impression de tout réussir, comment en est-il arrivé à venir chercher un repas avec les plus pauvres ? Est-il à la rue ? Pourtant il me semblait avoir tout pour être heureux.

***

— Alors, comment tu t’es senti pendant cette journée ? demande Léo.
— Je me suis senti utile, presque joyeux, de pouvoir transmettre un peu à d’autres qui en ont besoin.
— Tu vas continuer ?
— Oui, pendant quelques jours. Après je réfléchirai si je reste ou si je fais autre chose.
— Tu as d’autres idées ?
— Oui et non.
— C’est-à-dire ?
— J’avais peur, comme je te l’ai dit, d’avoir de la pitié et ça n’a pas été le cas, sauf pour cet homme, Lucas, que je connais.
— Et ?
— Je me demande comment il en est arrivé là et si je pouvais l’aider.
— Pourquoi pas, en effet ? Mais souviens-toi d’une chose, tu ne peux aider que quelqu’un qui le désire.
— Mais pour moi c’est insupportable de le voir comme ça.
— Je comprends ton ressenti, mais c’est peut-être son chemin.
— Tu parles d’un chemin d’évolution. Ce n’est pas possible.
— Pour les autres personnes à qui tu as servi à manger, tu crois que c’est plus plausible ou qu’ils ont tous choisi d’être dans cette précarité par plaisir, ou tu penses qu’ils l’ont bien cherché ?
— Je ne sais pas, mais j’ai envie d’aider Lucas.
— Tu crois qu’il se serait tourné vers le mur, s’il avait voulu te parler « du bon vieux temps ».
— C’est peut-être de la honte. En tout cas, je veux lui proposer de discuter.
— Ça, c’est une bonne idée. Mais respecte sa réponse, quelle qu’elle soit. Je vois que tu sors de ta zone de confort, tu veux t’engager, tu peux être fier.
— Je ne sais pas si je peux être fier, mais j’ai envie d’être actif par l’entraide, même si c’est un domaine que je ne connais pas trop.
— C’est le moment d’apprendre et de voir la chance que tu as. Tu as bien changé.

***

Quelques jours plus tard, François est à nouveau de service pour la distribution des plats. Il continue de sourire et dire un petit mot gentil à chaque personne. En même temps, il guette Lucas.

Celui-ci arrive, il sourit, gêné, à François et baisse le regard signifiant qu’il ne veut pas lui parler, et comme la fois précédente va s’asseoir seul face au mur.

François repense à la parole de Léo de « respecter son choix », mais il se sent mal à l’aise et malheureux. Puis il a l’idée de lui apporter un café, juste pour lui montrer qu’il est là s’il a envie de parler et qu’il pense à lui.

Lucas le remercie, étonné en le regardant avec reconnaissance. François est gêné, il lui sourit et retourne à sa place derrière le buffet sans se retourner. Lucas part sans le regarder.

Le soir, Léo le trouve pensif et triste :

— Léo, qu’est-ce que je peux faire ?
— Tu as fait ce qu’il fallait. Tu respectes sa liberté.
— Oui, et ça me donne envie d’accompagner des personnes en difficulté.
— Je vois que tu as trouvé ton chemin, ton occupation pour ce temps de retraite. Je vais pouvoir te laisser continuer ta vie et ton évolution.
— Merci, Léo. J’avais besoin de cet accompagnement pour arrêter de gâcher mon temps.

***