Les Cadavres Racontent de Belles Histoires - Doug Lamoreux - E-Book

Les Cadavres Racontent de Belles Histoires E-Book

Doug Lamoreux

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Beschreibung

C’était un boulot facile: surveiller la femme du paster jusqu’elle ait au lit en sécurité. Ensuite, tout bascula.

La mort de la femme du télévangéliste le plus aimé de Chicago n’est que le début: quelqu’un tue son chemin à travers la congrégation de l’Église du Temple de Majesté. Grâce à sa jeune secrétaire motivée, le détective privé Nod Blake, un retour en arrière vieillissant vers une époque révolue des détectives dans le monde des rues, un dinosaure qui n’a jamais reçu le message qu’il était exterminé, qui se prend parfois pour Bogart, George Raft et Lee Marvin en même temps, a été jeté dans le milieu de tout cela, sur sa tête.

Les blessures résultantes semblent avoir ouvert une porte vers l’au-delà. Blake croit que les morts lui parlent. Est-ce que les victimes supplient vraiment le dernier détective de les aider d’outre-tombe? Ou a-t-il perdu la raison? Quand son némésis, le lieutenant-détective Wenders trouve une preuve que Blake est le meurtrier, la vie du detective privée deviant un gros sandwich à la soupe.

Les Cadavres Racontent de Belles Histoires est un meurtre et mystères avec un sens de l’humour rusé situé dans le Chicago de 1970 où le tueur maniaque en fuite dans la Ville des Vents…est la bonne nouvelle.

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LES CADAVRES RACONTENT DE BELLES HISTOIRES

LES MYSTÈRES DE NOD BLAKE LIVRE 1

DOUG LAMOREUX

TRADUCTION PARPATRICK MERCIER

© Doug Lamoreux, 2013

Conception de la mise en page © Next Chapter, 2022

Publié en 2022 par Next Chapter

Couverture illustrée par CoverMint

Ceci est une œuvre de fiction. Les noms, personnages, lieux et situations décrits dans ce livre sont purement imaginaires : toute ressemblance avec des personnages ou des événements existant ou ayant existé n’est que pure coïncidence.

Tous droits réservés. Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite ou transmise sous quelque forme ou par quelque moyen que ce soit, électronique ou mécanique, y compris la photocopie, l’enregistrement, ou par tout système de stockage et de récupération d’informations, sans la permission de l’auteur.

TABLE DES MATIÈRES

Remerciements

Chapitre 1

Chapitre 2

Chapitre 3

Chapitre 4

Chapitre 5

Chapitre 6

Chapitre 7

Chapitre 8

Chapitre 9

Chapitre 10

Chapitre 11

Chapitre 12

Chapitre 13

Chapitre 14

Chapitre 15

Chapitre 16

Chapitre 17

Chapitre 18

Chapitre 19

Chapitre 20

Chapitre 21

Chapitre 22

Chapitre 23

Chapitre 24

Chapitre 25

Chapitre 26

Chapitre 27

Chapitre 28

Chapitre 29

Chapitre 30

Chapitre 31

Cher lecteur

À propos de l’auteur

Dédié à -

Edwin Lamoreux,

et le clan Lamoreux, avec amour.

REMERCIEMENTS

Jenny McDonnell - Mon ancre, mon refuge dans la tempête

Carole Gill –Pour avoir posé la question menant à La Fin.

Les gens qui achètent et vendent des géraniums au kiosque de fleur de Post & Kearny.

UN

Imaginez, si vous le voulez, un détective privé fini poursuivant un policier en uniforme dans la rue le plus vite que nous pouvions tous les deux courir. Ouais, tout un spectacle.

Pas que cela importait à quelqu’un. Dans la Ville des Vents comme dans toute autre métropole, avec un million de personnes passant à tout moment, peu daignaient regarder et personne n’aidait. Non, frères et sœurs, j’étais seul et le poursuivais à fond. Je suis le détective privé. Je pouvais décrire les sons, les odeurs. Je pouvais nommer les rues, les détours, les gens que nous avions presque renversés, les choses que nous avions contournés, sautés par-dessus, les véhicules nous ayant presque happés. À quoi bon? Nous avons couru jusqu’à ce que je puisse à peine respirer et j’espérais la même chose pour lui et plus encore. Nous avons couru jusqu’à ce qu’il commette une erreur.

Il passait devant deux prostituées, une blonde mince dont les racines étaient assortis avec ces bottes de vinyle aux genoux et une grande fille au beau derrière la couleur du riche chocolat noir portant du spandex zébré vert flânant près d’un édifice désert sur North Avenue, quand il cria et tourna dans une ruelle que je savais être un cul-de-sac. L’idiot. Tel qu’une grenouille a des cuisses délicieuses, je le tenais. Je passai moi-même devant les prostituées, trop vite pour remarquer, tournai le coin et entrai presqu’en collision avec une benne à ordures qui sentait le poisson pourri à marée basse. D’une des fenêtres ouvertes plus haut, comme pour plaider en sa faveur, l’Electric Light Orchestra jouait Don’t Bring Me Down. J’adore. Essoufflé, mon cœur prêt à exploser, j’ai bondi et atterri sur son dos.

Bien sûr, il ne pouvait pas juste se coucher par terre. Parce que la chance est inexistante dans ma vie, et la bonne fortune seulement une fantaisie, le flic se prit un coup de tête. J’ai carrément valdingué sur lui sur le pavé et comme j’avais encore de la poigne, il m’a retourné le coup. Déchets, papier journal, carton et j’en suis désolé, gravier volèrent dans les airs. Je me suis sonné sur un bloc de béton bien mal placé utilisant l’arrière de mon crâne comme clapet. Un cri conjoint, notre douleur, ma colère, sa peur, se leva tel un champignon atomique. Avant que le bruit et la poussière ne retombent, et en dépit de ma vision embrouillée et mes égratignures, je me suis relevé.

Il fit de même. Puis, il tenta de dégainer son fusil, rangé dans son étui sur sa hanche.

“Willie,” criais-je. Il n’y avait pas de temps pour penser, juste assez pour lui donner un solide coup de pied à l’aine. Il s’écroula telle une marionnette aux cordons coupés et croula au sol en position fétale. « Pas de fusils, Willie, jamais, » hurlais-je. « Je déteste les fusils. »

À ce moment, et seulement à ce moment, ils se montrèrent.

Par ils, je parle du lieutenant-détective Frank Wenders et son acolyte détective Dave Mason, deux escrocs de plus se faisant passer pour de vrais flics; ceux payés par la ville. Wenders, à quelques années de la retraite mais dont sa date d’expiration ayant passé depuis belle lurette, appartenait plus à la Nouvelle-Orléans que Chicago. Il était pour Mardi Gras. Pour lui, chaque jour était Mardi Gras et il pouvait engloutir une galette des rois en entier et ne jamais goûter Jésus. Son ombre pesait plus lourd que son partenaire. En parlant de lui, Mason, qui était trop jeune pour sa promotion de la patrouille, n’avait pas manqué de se couvrir de ridicule. En un rien de temps il était devenu tout aussi salaud que Wenders ne l’était, mais en plus stupide. Ensemble, c’était trop peu, trop tard; deux ordures me harcelant constamment.

“Tu….vas bien, Blake?” demanda Wenders. Je croyais avoir perdu le souffle. Il haletait tel un accroc à la peinture. J’ai hoché la tête. (Bon, j’étais aussi essoufflé.). Entre deux inspirations, je pointais au petit homme en bleu, toujours souffrant dans la ruelle et dis aux flics, “Pour un billet de dix, je peux vous dire où il a pris l’uniforme. Il parait mieux que tes gars. »

Wenders regardait le faux flic bouche-bée, en boule comme un bébé, agrippant son paquet à deux mains et pleurnichant tel un chien battu et semblait décider qu’ (hormis les bas blanc de Willie) il ne pouvait pas être en désaccord avec mon affirmation. Le reste du costume avait l’air authentique. Il fronça tout de même les sourcils. Apparemment, il n’avait pas besoin qu’un petit malin comme moi le lui fasse remarquer.

Puisque que je l’avais déjà ennuyé, j’ai continue. « Frank, » dis-je parce que lieutenant adorait quand je devenais familier, « voici Willie Banks. Willie, » dis-je à la limace pleurnicharde sur le pavé, « voici le lieutenant-détective Wenders. Il sera l’agent responsable de ton arrestation ce matin. » La fumée sortait des oreilles de Wenders. Apparemment, il n’avait pas besoin que je le présente aux criminels de bas étage tel des invités à une fête champêtre. Il me lança des poignards du regard et dit ensuite à Mason, « Ramasse-le. »

Le faux flic quitta sans résistance et pleurant à peine. Le détective à peine junior suivait derrière, tirant sur les menottes et le poussant comme s’il était moins qu’un humain. Alors qu’ils franchirent l’antre de la ruelle, dans une voix aiguë et nasillarde, Willie lança par-dessus son épaule, « Blake, occupe-toi de ma voiture, tu veux bien? »

Cela n’aida pas. Wenders me regardait comme si j’étais un insecte. Il secoua sa tête en désespoir (mais pas en surprise). Jadis, quand j’étais un flic, le pré-lieutenant Wenders, avec le reste des gars dans le commissariat, me faisait la vie dure de par mon habitude de recueillir les animaux errants. Mon cœur, pour les entendre parler, saignait pour chaque pourriture qui s’ensuivait. Je ne pouvais pas dire qu’ils avaient tort et je ne prétends pas que les choses ont changé. Les choses ne changent jamais.

Wenders remarqua le fusil sur le pavé et grogna en le ramassant. Il ne savait pas grand-chose mais il savait que ce n’était pas le sien. Sans penser, il me tendit l’arme. « Le tien? » Ma vision s’éclaircissait à peine, ma tête vibrait encore tel un tambour et je n’étais pas d’humeur. J’ai grommelé et me retournai comme si l’arme sentait mauvais. Je ne pouvais pas m’en empêcher. C’était automatique tel le coup de pied après qu’un médecin te tape le genou avec le petit marteau de caoutchouc. Sachant ce qu’il savait, Wenders ne pouvait pas me blâmer. « Désolé », dit-il. « Ce doit être le sien, hein? » Il rangea le fusil dans sa ceinture (un truc avec sa bedaine). Puis il lança un autre coup, « Tu sais, Blake, tu n’es pas Broderick Crawford. Arrête d’agir comme un flic. »

Je me suis allumé une cigarette (ce qui, en vérité, n’aida pas mes étourdissements) et lui soufflai au visage. « Tu pourrais dire merci, » dis-je « pour nous avoir aidé à attraper ce type. »

“Tu n’es plus un flic,” dit-il, prétendant ne pas m’avoir entendu. « Tu es un sale gumshoe »

Ce n’était pas gentil mais encore là, Wenders ne l’était pas non plus. Il bougea son gros bassin et suivant Mason et leur faux flic prisonnier, s’éloigna tel le bovin qu’il était. Toujours positif, je notais avec soulagement qu’il n’avait pas levé sa queue. « Il n’y a pas de quoi, » dis-je à son dos.

Il y a trois théories selon lesquelles le mot gumshoe devint le remplaçant pour détective privé. La première suggère que le terme était en hommage à l’adhérence imperturbable du détective. Comme la gomme, vous ne pouvez pas nous décoller. La deuxième dit que les détectives privés passent tellement de temps à fouiner dans les mauvais quartiers qu’ils finissent avec de la gomme sur leurs souliers. Bien qu’aucune d’elles ne soient absolument fausses, l’origine du terme est hautement suspecte et probablement boiteuse. La troisième théorie, celle qui tient la route si vous voulez mon avis, dit que le nom vient des semelles de caoutchouc gommé sur les souliers portés à la fin des années 1800. Ils marchaient calmement et un détective pouvait facilement se faufiler. Pratique si vous voulez éviter d’être repéré ou prendre la poudre d’escampette avec les biens de quelqu’un parce que, oui, un gumshoe était un voleur. Vers environ 1910, et ne me demandez pas comment, je ne suis pas du tout un historien, le terme est passé de l’autre côté de la loi et référait dorénavant à ceux qui enquêtaient avec discrétion les crimes.

70 ans plus tard (nous sommes en 1979 au moment où je vous parle), la force du soulier pratiquement remplacée par les firmes de sécurité haute technologie, les ordinateurs personnels, un photomaton dans tous les stationnements, des nouvelles 18 heures par jour et une demi-douzaine d’agences de l’ordre ayant juridiction dans chaque pouce des États-Unis, le détective privé travaillant (et ses semelles) avaient, tels les effets spéciaux pré-Star Wars et les parieurs de coulisses, pris la même voie que le dodo. À l’exception de moi, bien sûr.

Mon nom, comme vous l’avez déjà entendu, est Blake. Ne demandez pas mon prénom. Ouais, j’en ai un. Non, je ne l’utilise pas; et ce n’est pas pour garder le mystère. Ce nom en soi prouve que mes parents étaient des abuseurs d’enfants. Mon vieux a payé pour son crime il y a longtemps et purge sa sentence dans le cimetière de la ville sans possibilité de libération. Ma mère, de l’autre côté, avec ce monde rempli de salle de bingos et de gens qu’elle n’a pas encore ennuyé, a jusqu’à maintenant réussi à repousser la date de son procès. Un jour, justice sera faite; assez discuté. Dans un Chicago moderne, remplie d’agents, de policiers et de louez-un-policiers, je suis juste un détective privé. Je l’admets, j’ai dépassé mon espérance de vie. À l’aube des années 80 et que le nouvel âge pousse le vieux par-dessus la colline, je fume toujours, je bois avant, durant et après les heures de bureau, je réfère toujours les femmes comme des dames, bien que je le clame rarement haut et fort. (Bien que je trouve souvent les problèmes, je ne le cherche pas en règle générale.) Et je porte toujours des espadrilles. Ils sont silencieux, aussi confortables qu’un travail où le seul moment où vos pieds ne touchent pas le sol est quand vous vous retrouvez sur votre derrière vous le demande, et ils sont pratiques pour ces occasions quand il est nécessaire qu’un rappel vers une époque révolue d’enquête dans les rues sombres d’âge moyen et en mauvaise forme physique demande à bouger rapidement, comme ce matin.

Je me dirigeai, lentement et douloureusement, hors de la ruelle mais fus stoppé avant que je n’atteigne le trottoir par la petite prostituée blonde. « Hé, Blake, » s’exclama-t-elle. « Je pensais que c’était toi que j’avais vu courir. » Elle tressaillait comme Howdy Doddy, des spasmes musculaires affirmant sa dépendance. Sale déchet. Soudainement, j’ai réalisé et je m’en voulais. Je connaissais la fille, la connaissais bien mais je ne l’avais pas reconnu de par tout l’enfer que la rue lui avait fait subir. Elle était encore dans sa jeune vingtaine, mais n’aurait pas pu passer pour en avoir 40.

“Tu as une sale tête,” lui dis-je.

Elle me regardait avec ses immenses yeux de biche et je ne pouvais qu’imaginer ce qu’elle voyait de son côté; un ventre bedonnant, une chevelure poivre et sel amincissante, un ensemble de vêtements passé, pleine de sueur et imprégné de saleté et de sang tenant sur un ancien flic ébouriffé et tête de nœud qui était maintenant….qu’est-ce que j’étais au juste? « Tu crois être Gregory Peck? » demanda-t-elle. « T’es-tu regardé dans un miroir dernièrement? »

J’ai noté son point et changeai de sujet. « As-tu mangé? »

“Je me débrouille,”, dit-elle avec un spasme.

J’ai sorti un billet de vingt de ma poche et le poussai dans sa main tremblante. “Ne le fume pas,” lui dis-je. “Achète-toi de la nourriture.” Elle hocha la tête sans me regarder dans les yeux.

“Hé, Charisma!” Le cri venait de l’autre fille, sa collègue plus enveloppée et plus voyante, qui avait déménagé son commerce de prostituée à l’autre coin de rue. « Qui est le petit ami? »

J’ai regardé la bruyante au loin jusqu’à la colombe souillée à côté de moi. « Charisma? »

“J’ai trouvé un livre de prénoms à la bibliothèque,” dit-elle en haussant les épaules. « Je l’essaie. »

“D’accord. Mais je t’appelle encore Connie.”

Elle me donna un baiser sur la joue, se tourna et zigua pendant que le trafic zaguait, se dirigeant vers son amie criant “Je t’aime” par-dessus son épaule en s’en allant.

Alors que je la regardais, maigre et épuisée, retournant vers l’enfer constituant son existence, je secouais la tête et me demandais à quel point la vie pouvait être si moche. Cela mena aux pensées de la semaine merdique que j’avais eu jusqu’à date et au matin épatant qui fut. Comme la plupart des ruminations du passé, ces pensées n’avaient nullement altéré le présent et ne m’avait nullement mis au courant de deux choses vitales : de un, bien que je n’avais pas été blessé mortellement, le coup que je venais de recevoir était le premier de plusieurs que je recevrais dans les 11 prochains jours qui endommageraient mon cerveau de manière permanente et altèreraient mon futur à jamais. Et de deux, une semaine auparavant, presqu’à la minute près, un portail lourdement surveillé à la prison de Statesville près de Joliet s’était écarté et avait dégorgé mon pire cauchemar.

DEUX

La fumée ondulait dans de grands tourbillons gris du tuyau d’échappement de la vieille Ford de Willie Banks alors que je la garais dans le stationnement à l’extérieur de mon bureau. Je suppose que j’aurais dû être reconnaissant avec les pneus usés, le phare avant gauche éclaté, le panneau latéral gauche vert indenté et le panneau latéral droit bleu rouillé qui mettaient en évidence l’Orange Madagascar de la carrosserie originale de la Mustang, j’aurais simplement pu la pousser dedans. Avec les choses dans lesquelles je me laissais embarquer, un nigaud comme moi aurait bien pu avoir un hameçon dans la bouche. Peu importe, en quelque part derrière la fumée se trouvait le petit édifice de brique rouge de 2 étages que je louais, et dont je payais parfois le loyer à temps, dans le quartier sud-ouest; l’ancien quartier général d’un candidat à quelque chose. Il contenait un vestibule trop étroit pour y changer votre idée, un bureau de réception pour ma secrétaire, un cabinet où je pouvais formuler de grandes pensées, rencontrer des clients et me cacher des créanciers et un deuxième étage d’une pièce remplie de déchets oubliés depuis longtemps. Un jour, j’engagerai un détective pour trouver ce qu’il y a là. Bien que je l’aie arrêté, la voiture de Willie continuait de tousser. Finalement, le moteur lâcha un dernier grand soupir et tressaillit pour s’arrêter. J’ai soupiré, pris l’enveloppe sur le siège à côté de moi et usé tel la moquette de mamie, j’entrai à l’intérieur.

Lisa était à son bureau. C’est Lisa Solomon, ma secrétaire. Quand elle se levait, elle était un grand verre d’eau brunette. Assise ou debout, elle était aussi brillante que la lumière, efficace telle une machine bien huilée et presqu’aussi maladroite qu’elle était jolie. Comme d’habitude, une longue main osseuse gribouillait frénétiquement sur une des feuilles empilées sur son bureau pendant que l’autre fouillait aussi frénétiquement dans un sac à bonbons bon marché. J’ai regardé Lisa une fois pendant qu’elle ne mangeait pas; une fois. Comment pouvait-elle rester aussi mince demeurera un de ces grands mystères. Elle leva les yeux lorsque je suis entré, offrant aucune expression perceptible derrière ses grosses lunettes de hibou, mais me dit : « Tu as l’air d’un morceau de bœuf haché catégorie A .»

J’ai donné au commentaire la considération qu’il méritait, autrement dit, je l’ai ignoré. « Willie Banks est en taule, » lui dis-je. « Si sa mère veut le sortir de là, et je présume que c’est un gros si, nous devrions l’avertir. » Je lui tendis l’enveloppe. « Ajoute cela à la facture et rappelle-lui que je n’accepte pas les chèques. » J’ai lancé les clés sur le bureau. « Ce sont celles de Willie, de ce tas de ferraille faisant baisser la valeur des propriétés dehors. »

“C’était donc ça?” Elle jeta un coup d’œil à la fenêtre. « Je croyais que le train fantôme de Sydney était réapparu. »

J’ai aussi ignoré cela. “Demande-lui ce qu’elle veut faire avec. Je m’en vais à la maison et…”

Tout un détective que je faisais. C’était seulement à ce moment, du coin de l’œil, j’ai vu la blonde assise les jambes croisées dans une des deux chaises de ma salle d’attente. La chaise n’aurait pas pu mieux paraître et mes yeux appréciaient encore plus cette journée également. Si Lisa était superbe mais maladroite, cette dame était juste superbe. Elle sourit et que pouvais-je faire d’autre à part sourire aussi. Son blouson et sa jupe, telle une femme d’affaires, d’un jaune canari doux, méritait l’attention mais je ne pouvais le fournir puisque ses jambes volaient le spectacle. Puis, elle se leva et comme si elles n’avaient pas déjà causés assez de problème, les jambes firent des folles d’elles. À l’extérieur de mon crâne souffrant, j’entendis Lisa marmonner. « Hein? »

« J’ai dit, “ dit Lisa, “voici Gina Bridges »

“Blake,” dis-je, prenant sa main. J’indiquai la porte de mon bureau avec ma main libre. « S’il-vous-plaît. » Elle suivit les instructions comme une championne et je m’empressai de la suivre. Derrière moi, sous son souffle, j’aurais pu jurer entendre Lisa demander, « Tu te prends pour qui, William Holden? » J’ignorai également ceci.

Pour les non-initiés, entrer dans mon bureau devait être quelque chose semblable à entrer sur le plateau de la version Skid Row de The Front Page. Le bureau de chêne massif, sans aucun doute superbe dans les 3 ou 4 premiers bureaux dans lesquels il a servi, était tellement enterré de piles de papier qu’il aurait pu passer pour l’aire de travail d’un éditeur de journal hagard. Je ne suis bien sûr pas un éditeur, je suis à peine désorganisé. Et bien que je ne sois pas vraiment un écrivain, du moins ce jour-là, j’étais assurément hagard. Une étagère derrière comptait des dossiers empilés, des bottins téléphoniques, des atlas et des registres de ville désuets. Rien n’avait été touché depuis que nous avions installé le nouvel ordinateur et une fine couche de poussière s’était installée. Sous une autre pile de dossiers, un coffre-fort ignifuge se tenait tel un roc dans le coin le plus éloigné protégeant des papiers d’importance, un brownie gelé que j’avais caché de Lisa puis oublié et un fusil. (Juste parce que je hais ces foutus trucs ne veut pas dire que je n’en ai pas. Après tout, cela fait partie du métier.) Un petit réfrigérateur, d’un motel ayant fait banqueroute, était à côté du coffre-fort, refroidissant des breuvages et des limes et ayant sa propre pile de dossiers. Mis à part cela, prêt à passer à l’action, l’armoire de liqueurs, dont le dessus était la seule surface plate dégagée dans la pièce. Il y avait deux photos encadrées sur mon mur : une d’un chalet où j’avais habité à l’extérieur de Mammoth Hot Springs et une d’une femme que je ne connaissais pas. La première me rappelle d’une des seules semaines de ma vie dont je veux me rappeler. L’autre venait avec le cadre et tentait en vain de me rappeler de la remplacer avec mon permis de détective. Les deux amènent une phrase à mon esprit : un jour…Mademoiselle Bridges ne m’indiquait pas qu’elle était renversée par l’opulence mais elle ne paraissait pas prête à s’enfuir non plus. J’ai pris cela comme un signe qu’elle voulait faire ce dont elle était venue ici pour faire, fermé la porte et l’invitai à s’asseoir.

“Je suis désolée,” dit-elle, comme si elle l’était, d’une voix ayant pu faire flotter un yacht. « Je n’ai pas saisi votre prénom. »

La voix pouvait rester, la question devait partir et je l’ai rejeté du revers de la main. « Ne vous en faites pas pour ça; je ne l’utilise pas. Appelez-moi Blake, tout le monde le fait. » J’ai souri afin qu’elle ne s’offusque pas (mes parents n’étaient pas de sa faute) et trouvai ma chaise derrière le bureau. Souffrant, me sentant comme la balle d’une figurine à tête branlante en céramique, et par respect pour le boulot de première classe que la ruelle avait fait aux autres parties de mon corps, je m’assieds prudemment. « Que puis-je maintenant faire pour vous? »

“Et bien,” dit-elle, “Je suis la secrétaire exécutive pour le Révérend Conrad Delp.” Elle s’arrêta, attendant ma réaction. Quand je ne la lui offris pas, elle continua. « Le Révérend fait un discours ce soir à Atlanta. » Elle regarda sa montre stylisée sur son mince poignet blanc. « L’équipe de reconnaissance est déjà là et prête, nous partons bientôt. Habituellement, la femme du Révérend, Katherine, nous accompagne mais elle ne se sent pas bien ce soir. »

Une toute autre journée, une magnifique femme comme elle pouvait s’asseoir dans mon bureau et me parler jusqu’à la saint-glinglin et je l’écouterais sans l’interrompre, en essayant à peine d’avaler ma salive avant qu’elle n’atteigne ma chemise. Mais, pour être franc, juste à ce moment, cela faisait mal de s’asseoir et concentrer mes yeux n’était pas aussi facile non plus.

“Mademoiselle Bridges,” dis-je, souriant mais me tordant devant ma chaise. « Je suis désolé si je parais abrupte, » je mordis ma lèvre inférieure, m’ajustant, « mais j’ai eu un matin inhabituel. » J’ai trouvé une position m’offrant un peu de soulagement et soupirai pour le prouver (ce qui me rendit plus étourdi.) « Comment puis-je spécialement vous aider? »

“Je suis désolée. Le Révérend voudrait qu’on prenne soin de sa femme.”

Il n’y avait pas de croquets mais il aurait dû y en avoir. “Maintenant, c’est moi qui est désolé. Il veut quoi?”

“Il veut vous engager pour s’assurer que sa femme est en sécurité….pendant son absence.”

“Oh, je vois.” J’avais besoin du boulot, j’avais besoin de l’argent et j’étais prêt à renifler son parfum jusqu’à ce que mon Medicare fasse effet, mais sans le savoir, elle me donna une porte de sortie et de la manière dont je me sentais, je la prenais avec reconnaissance. « Je ne fais pas ce genre de trucs, » lui dis-je. « Certains détectives privés le font; de plus grosses firmes avec plus d’effectifs. Je travaille seul. Ce que vous cherchez, c’est une firme de sécurité ou un garde du corps privé. »

« Vous ne comprenez pas, M. Blake. »

“Blake. Juste….Blake, s’il-vous-plaît. Mon père était Monsieur et il amena ceci avec lui.”

Elle sourit. Elle me comprenait. Elle aurait tout fait pour me plaire. « Blake. » Vous voyez, je vous l’avais dit. « Je sais que c’est à la dernière minute mais ce n’est pas n’importe qui dont nous voulons la sécurité. C’est la femme du Révérend Delp. Il a besoin de quelqu’un en qui il peut avoir confiance. On m’a dit qu’il pouvait vous faire confiance. Vous êtes salué sans réserve. »

“Vraiment?” Il me fallut un effort pour ne pas rire mais j’ai réussi. “Par qui?”

“M. Blake…Blake…Je ne sais pas.” Je me serais senti mal, mais elle semblait elle-même si résignée que j’ai laissé tomber. Elle prit une respiration assez profonde pour tester les deux boutons extrêmement serrés sur sa blouse et continua. « Je suis les ordres et vous dis ce qu’on m’a dit de faire. Parmi les choses que l’on ma dites est qu’on vous recommande fortement. »

J’ai hoché la tête pour démontrer à quel point le compliment m’importait. Puis, je me suis levé, retourné et j’ai ouvert mon petit réfrigérateur. Avec difficulté, j’ai ignoré tout en moi qui aurait contribué à un grog d’avant-midi bien mérité et j’ai plutôt attrapé un peu de glace de l’armoire frigorifique. « Voudriez-vous m’excuser pour un instant? » J’ai jeté un dernier coup d’œil pour me rappeler d’elle, savouré une pensée coquine passagère à propos de la fille qui ressemblait à Bo Derek mais agissait comme la bergère, et quitta le bureau, fermant la porte derrière moi.

Lisa pivota sa chaise. “La première règle du détective,” dit-elle, me tendant fièrement une feuille de papier. “Enquêter d’abord sur le client.”

Tenant la glace derrière ma tête, j’ai pris le papier avec ma main sèche. « Elle n’est pas le client. Le client est Conrad Delp. »

“Reverend Delp?”

J’ai hoché la tête et étudié la feuille. L’eau glacée coulait le long de mon cou. Cela ne me dérangeait pas. « Tu le connais? »

“Tout le monde qui n’ira pas en enfer le connait, » dit Lisa. Elle mordilla quelques pouces d’une réglisse noire pour mettre l’emphase sur son dégoût vis-à-vis mon ignorance. Vous devez être méprisant et méchant pour manger de la réglisse noire. Puis elle parla tout en mâchant. « C’est un gros bonnet dans l’industrie des télévangélistes – et pas juste à Chicago. Il est connu à travers tout le pays; spéciaux télé, émission de radio hebdomadaire, livres, bulletin d’information. Il est sa propre industrie familiale et vous devriez voir la maison de marbre que Dieu lui a donné pour le remercier. Ma mère est gaga de lui. En fait, le magnétoscope avec lequel tu as tenté de la soudoyer lui sert vraiment; elle enregistre toutes ses croisades, et ne manque jamais un reportage radio. » Elle s’arrêta pour aspirer du crachat confit.

J’étudiais le portrait minimaliste de Mademoiselle Bridges mais je me suis plutôt tourné pour reluquer ma secrétaire. J’ai plusieurs préjudices comme tout le monde, mais je suis beaucoup trop paresseux pour être un –iste et trop méprisant de la société en général pour former des –ismes spécifiques, et pourtant je n’ai pu m’empêcher de lui demander dans un moment de sincère confusion, « N’es-tu pas juive? »

“Oy,” répondit-elle. “Mais le Révérend Delp est spécial. Il fait pleurer maman. Et, pour un homme plus mûr, il est plutôt séduisant. » Parfois, mes sourcils arqués et mes mouvements de tête incrédules (même les étourdissements douloureux) viennent d’eux-mêmes, comme à ce moment. « C’est un truc de fille, » expliqua-t-elle.

J’ai levé une main en abandon pendant que je jetais le dernier morceau de glace dans la corbeille avec l’autre. « Cela n’a pas d’importance, » dis-je, essuyant ma main sur mes pantalons. « C’est du gardiennage, tu sais que… »

“Je sais que vous ne faites pas cela,” coupa-t-elle rapidement, m’atteignant presque avec la réglisse dans son excitation. « Mais cela semblait simple et vous pourriez prendre cet argent. Après tout… » Lisa avait cette effrayante lueur dans son œil et croyez-moi, si vous ne l’avez jamais vu, vous ne pouvez pas savoir. Pire encore, sous cette lueur, elle parlait encore. « J’ai pensé que si vous ne vouliez pas le faire, ce serait une belle affaire pour me tremper les pieds. »

Je hais cette lueur. Ai-je mentionné que Lisa voulait être une détective? Ouais et bien, elle le voulait. Comme Achab voulait du poisson pour souper, Lisa voulait être une détective. « Nous avons déjà eu cette discussion, » dis-je avec un soupir. « Tu n’es pas une détective. Tu es à peine une secrétaire. »

« Alors, que suis-je? »

« Le mot épine vient à l’esprit. Ou fléau, fardeau, irritant. Nuisance, peste, plaie. Oh, et mal, bien sûr, tu es définitivement un mal. » Je lui redonnai le papier. « Je vais prendre un taxi pour récupérer ma voiture, si ce n’est pas déjà, ‘S’il vous plait, mon Dieu’, sur des blocs. Puis je vais à la maison pour me tremper dans l’eau chaude; de l’eau très chaude pendant très longtemps. Explique mon départ à Mademoiselle Bridges, offre-lui nos plus sincères excuses que nous ne puissions pas l’aider et fais-la sortir. »

Fini avec ma secrétaire, en ayant assez de ma journée, l’arrière de ma tête m’élançant, je me suis retourné pur sortir. Alors que j’ouvris la porte extérieure, Lisa dit, « Ne pensez-vous pas, puisque le Révérend Delp est qui il est? »

“Lisa Solomon,” dis-je, l’interrompant tel un enfant impoli. “Je refuse ce boulot.”

“Même,”, demanda-t-elle, “au risque de votre âme immortelle? »

“Je ferme la porte maintenant,” dis-je. Et je l’ai fait alors que je quittais.

TROIS

Je trouvai ma Jaguar exactement là où je l’avais laissé, et à ma plus grande surprise, intouchée. Non, je ne suis pas riche. Je suis un travailleur moyen (à ce moment là, un moyen travailleur moyen) comme le reste d’entre vous, j’imagine. Une des seules choses que je voulais dans ce monde était une Jag et, comme le légendaire détaillant et sa perle de grand prix, j’aurais donné la majorité de ce que j’avais pour l’acheter, usagé. Imaginez la super-voiture la plus sexy de 150 m/h, une érection sur roues et vous avez la Jaguar 1961. Ajoutez maintenant le contrôle d’émissions Federal qui sape la force, discontinuez l’élégante coupe à tête fixe pour un long empattement, la perfection étirée sur un rack médiéval. Remplacez le fiable six 4.2 L par un monstrueux V12 5.3 qui est difficile d’entretien et qui alourdit l’avant comme une ancre. Gâchez les douces lignes et les contours élancés avec des ailes dodues. Puis, enfoncez le dernier clou dans le cercueil avec d’horribles coussins en caoutchouc pour rencontrer les standards insensés des pare-chocs à 5 m/h. Et voilà, vous avez ma Jaguar 1974 bleu profond. Elle passera à l’histoire comme une des pires voitures de tous les temps mais c’était quand même une Jag et c’était à moi. Vous comprenez maintenant mon soulagement de la retrouver intacte. Sans plus attendre, je la démarrai et rendis nos deux carcasses à la maison.

Beaucoup plus tard ce soir-là, apaisé si non adouci par un bain chaud et partiellement rechargé avec quelques heures de yeux fermés mais ma tête faisant toujours mal et mes sens particulièrement à vif comme quoi quelque chose n’allait pas, j’ai passé un coup de fil à Lisa. Non, je ne recevais pas de messages psychiques, j’avais simplement un pressentiment. Je suis tombé sur sa boîte vocale, considérant le fait qu’elle n’allait jamais nulle part, j’ai ensuite eu des frissons. Me détestant pour ça, je me suis rhabillé et j’ai pris la voiture, non pas pour aller chez elle mais du côté nord de la ville ou, financièrement parlant, de l’autre côté de la voie. J’ai tourné vers la route sinueuse devant la résidence du cadeau à Chicago (probablement même du Tout-Puissant) des disciples télévisuels de partout, le Révérend Conrad Delp. Du peu du manoir à colonnes que nous pouvions voir du côté paysan de la grille ornée en fer forgé et de la clôture fortifiée, au-delà de la courbe de la route considérable à travers la myriade d’arbres était, je dois l’admettre, impressionnante et j’ai sifflé pour démontrer mon respect alors que je passais par là. Puis, je suis arrivé côte-à-côte avec un brin de voiture, une Volkswagen Cabriolet des années 1970, un patin à roulettes jaune électrique alimenté par de l’essence sans plomb et la prétention. J’ai sauté sur les freins.

“Fils de pute.” C’était la voiture de Lisa.

Je pensais simplement que j’avais un mal de tête auparavant. Maintenant, ça cognait fort. Par-dessus cela, j’étais profondément ennuyé mais pas du tout surpris. La raison que j’étais ici, en voyant sa voiture, était parce que j’avais su d’une manière ou d’une autre que ma dynamique secrétaire allait ignorer mon ordre direct. Et, aussi certain que l’ayatollah Khomeiny était en Iran, la voici. Mâchant ma lèvre inférieure en frustration, j’ai continué et me suis stationné à l’ombre dans la rue.

J’ai marché jusqu’au manoir de Delp, escaladé le mur et glissé dans la cour. Je me suis retrouvé parmi les arbres et buissons, jouant au commando d’une ombre à l’autre jusqu’à distance criante du manoir, j’ai reconnu la silhouette mince mais sans grâce de Lisa se tenant près d’un arbre. Elle était habillée en noire comme un ninja, sans aucune raison, puisqu’elle se tenait directement dans un bassin de lumière ambré d’une des fenêtres de la maison. Elle suçait un suçon bleu et blanc tourbillonnant (vanille framboise?) lequel, lorsqu’elle le sortait de sa gueule, était aussi gros qu’un sous-verre de bar. Elle tenait une lime de métal, faisant ses ongles entre deux lichettes de son bonbon et, j’imagine, se disant qu’elle surveillait la maison.

Poursuivez-moi. Je me suis faufilé derrière elle.

“Qu’est-ce que tu fais?”

Lisa sursauta. Elle entra la lime sous son ongle et eut un moment. Puis, elle me reconnut, se choqua, aperçut la blessure qu’elle s’était infligée, ressentit la douleur, reconnut qu’elle fut prise là où elle ne devait pas être et passa de l’embarras à la défensive plus vite qu’une adolescente boutonneuse atteint son premier orgasme. « Mon Dieu! », cria-t-elle en chuchotant. « Tu te prends pour qui, Chuck Norris? Tu m’as foutu une de ces peurs!”

“Oui,” dis-je sans un brin de compassion. “Qu’est-ce que tu fais ici?”

“Que fais-tu ici?” répliqua-t-elle, indignée.

“Je suis un détective privé officiel. Je suis entraîné à savoir quand quelqu’un fait quelque chose de vraiment stupide. Maintenant, je répète, qu’est-ce…? »

“Tu es ici.” Elle était fâchée mais chuchotait toujours. “Alors vous savez pourquoi je suis ici. J’ai pris le boulot.

“Tu ne peux pas prendre le boulot. Tu n’es pas…”

“Un détective, je sais. J’ai pris le boulot à votre place.”

« Sans me le dire? »

“Vous ne vouliez pas le prendre.” Elle roula son front. Je la dévisageai si durement que si j’avais eu quelques mentons de plus et 40 rouleaux de graisse, elle aurait cru que j’étais Frank Wenders. Elle baissa la tête, une coquette chouette embarrassée derrière les lunettes et souleva un coin de sa bouche pour sourire. « J’ai pensé que ce serait une très belle affaire, » dit Lisa. « Pas très difficile mais très intéressante. »

“Qu’est-ce qu’il y a d’intéressant à ce sujet?” demandais-je avec doute.

“Vous êtes parti trop vite.”, s’exclama-t-elle. “Il y avait plus à l’histoire de Gina.”

“Gina? La dernière fois que nous nous sommes parlés, c’était Mademoiselle Bridges.”

Elle ignora ceci. “Le Révérend Delp reçoit des lettres de menace, alors il ne voulait pas laisser sa femme seule.”

“Quelle sorte de menaces? De qui?”

“Gina ne savait pas. Juste des menaces, on dirait.”

“Elle ne te les a pas montrées?” Lisa avait une habitude de gagner de la vitesse en parlant. Mes questions étaient plus pour la ralentir que d’amasser de l’information.

“Elle ne pouvait pas me les montrer, elle ne les a pas vues. Elle les a seulement entendues. »

“Des rumeurs? Du potinage?”

Elle claqua sa langue parce que je ne jouais pas juste; lui demander des questions à lesquelles elle ne connaissait pas les réponses. « Gina a dit que ce n’était pas le genre de chose dont le Révérend Delp parlerait. » Pour mettre de l’emphase, elle ajouta, « Il est un homme puissant et influent. »

“Oui, ça, tu l’as répété à plusieurs reprises. Mais tu ne sais rien de ces menaces? Si elles ont été postées ou de où? Des coupures de journaux? Écrites avec du sang? »

Lisa secoua la tête. Je la vaporisais avec mes questions sur des détails non-importants et elle essayait de garder le pare-brise assez dégagé pour aller de l’avant. « Tout ce que je sais, c’est que Katherine, euh…Madame Delp, n’était pas au courant des menaces et que le révérend voulait qu’il en reste ainsi à cause de sa nature délicate. »

“Sa nature délicate?”

“C’est la manière que Gina, euh…Mademoiselle Bridges, l’a dit. À cause de sa nature délicate. C’est pourquoi je suis ici. Il ne veut pas qu’elle soit seule mais il ne veut pas qu’elle sache qu’elle est surveillée non plus. Je suis supposée m’assurer qu’elle soit en sécurité. Une fois qu’elle est endormie, c’est terminé et je m’en vais. Je veux dire…vous avez fini et vous pouvez partir. »

“Est-ce que le Révérend Delp sait que tu es ici? »

“Non, rappelez-vous, il est en Atlanta, “ dit Lisa. Puis sous son souffle, elle ajouta, « Il comprend que…vous….êtes ici. »

J’ai soupiré et regardai au ciel. Il y avait quelques étoiles là-haut au-dessus des feuilles et beaucoup de nuages mais rien qui ressemblait à de l’aide. « Rentre chez toi, Lisa. » Elle commença à dire quelque chose mais je l’ai interrompu. « Je m’assurerai que Mme Delp soit bordée. Rentre chez toi. »

Elle fit une dernière offre pour rester et aider, joua une dernière fois avez mes nerfs, puis décida qu’elle avait poussé sa chance aussi loin qu’elle n’avait pu. Elle me dit bonsoir et se dirigea vers la rue. Il était tout juste après 23h. Je l’ai regardé disparaître dans la noirceur, résigné à la soirée que ma secrétaire avait choisie pour moi et me déplaçai dans les ombres près de la maison.

J’ai regardé à travers une fenêtre et vis pour la première fois Katherine Delp. Plus précisément, j’ai vu la femme qui était vraisemblablement Mme Delp. (Je ne l’avais jamais vu et ne l’aurais pas su même si elle m’avait mordu). Elle valait bien le coup d’œil (et pouvait me mordre n’importe quand). Elle était svelte et grande du tapis à poil blanc à ses cheveux courts blonds. Entre les deux, bien que sa silhouette ne soit pas exactement un sablier, on connaissait l’heure. Mis à part ses attractions personnelles évidentes, deux choses à propos de Katherine Delp sautaient aux yeux. D’abord, pour une pantouflarde à ce stade de la soirée, la dame était exceptionnellement bien habillée dans un drap rouge moulant qui indiquait beaucoup plus que les contours fermes dessous. Deuxièmement, elle était visiblement à vif, faisant les cent pas telle une panthère en cage, et lançant d’incalculables regards vers l’horloge murale Brocato que j’aurais pu mettre en gage pour mon loyer. Elle faisait les cent pas le long d’un divan non-invitant de la même non-couleur que la moquette, lança un cube de glace dans un verre droit en cristal taillé et se versa du Tanqueray et tonic. Elle but un coup, examina à nouveau l’horloge et retourna à ses cent pas. Elle poursuivit son manège, les cent pas et l’alcool durant un bout de temps, comme si elle attendait un train en retard. Quelque chose tombait sur ses nerfs et elle tapait sur les miens. Puis le téléphone sonna et nous avons tous les deux sursauté.

La femme du révérend agrippa l’instrument de la table au loin si vite qu’elle en a presque renversé son breuvage. Elle déposa le verre et oubliant son gin du même coup, souleva le récepteur pour répondre. Suivant le fil, Mme Delp et son téléphone disparurent de la pièce et de ma vue.

Elle fut partie durant plusieurs minutes durant lesquelles, de ce que je pouvais voir, il ne se passa rien. Je m’emmerdais profondément. J’étais loin de me douter que ces moments seraient les derniers tranquilles que j’aurais pour la prochaine semaine et demie et que ma vie était sur le point de devenir un sandwich à la soupe.

J’entendis un moteur de voiture au devant de la propriété et j’ai vu des doigts de lumières, des phares avant divisés par les barres de fer du portail avant, filtrant à travers les arbres. Je ne pouvais pas voir la voiture même mais elle était là. S’ensuivit un cliquetis de métal à peine audible et l’ouverture grinçante du portail. Le moteur démarra et la voiture débuta la montée du croissant de la route pavée. J’avais dû m’avancer à une nouvelle position pour clairement voir le visiteur sans être vu. Il m’a facilité la tâche quand les phares avant se sont soudainement éteints. Le moteur continua de ronronner doucement et s’avançant lentement dans la noirceur, le véhicule, un sedan foncé, était à portée de vue. Il s’arrêta près du palier avant à large colonnes et s’éteint. Le seul occupant, le conducteur, un grand homme athlétique dans la fin vingtaine en sortit. Il enjamba les marches avant en deux sauts dynamiques et le palier en trois longues enjambées; un zélé. Mais s’il était impatient, ce n’était rien comparativement à Mme Delp. Avant même qu’il ne s’enligne sur la sonnette, la femme du révérend ouvrit la porte, l’attrapa tel un chien s’agrippant à un os plein de viande, le tira à l’intérieur et referma la porte.