Les portes sombres - Tome 2 - Pierre Jacquet - E-Book

Les portes sombres - Tome 2 E-Book

Pierre Jacquet

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Beschreibung

Sept longues années se sont écoulées depuis la Dernière Guerre. Je pensais que mes ennemis avaient été éradiqués, mais je me trompais ! Mes enfants sont accusés lorsque certains proches sont pris pour cible. Ainsi, fuyant les forces de l’ordre, ils devront affronter la colère de mes anciens ennemis et contrer de soudaines attaques de créatures de l’Ancien Monde, tout en prouvant leur innocence. Ils auraient toutefois entendu parler d’un Monde oublié appelé Le Néant. Voici comment débute leur histoire…


À PROPOS DE L'AUTEUR


Pierre Jacquet est l’auteur de plusieurs ouvrages édités par Le Lys Bleu Éditions, dont "Les nouvelles de Pierre", paru en 2023. Après le succès de son premier roman, "Les portes sombres – Tome I – The God Of war", il revient avec le "Tome II – The justice hunters", promettant une suite aussi captivante que les nombreuses à venir.

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Pierre Jacquet

Les portes sombres

Tome II

The justice hunters

Roman

© Lys Bleu Éditions – Pierre Jacquet

ISBN : 979-10-422-2342-7

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Du même auteur

Les Portes Sombres – Tome I – The God Of War,(Roman Collector), Vérone Éditions, 2016.

Les Portes Sombres – Tome I – The God Of War,(Revisite du Roman), Le Lys Bleu Éditions, 2021.

Les Portes Sombres – Tome I – The God Of War,(Réédition du Roman), Le Lys Bleu Éditions, 2022.

Les nouvelles de Pierre – Volume I – Émeraude (Recueil de nouvelles),Le Lys Bleu Éditions, 2023.

À Mélanie…

Chapitre 1

Introduction

Sept longues années s’étaient écoulées depuis la fin de la Troisième Guerre mondiale contre le soulèvement des Black Hawks.

Malheureusement, cette Dernière Guerre, comme le monde la nomma, fut bien trop vite oubliée, tout comme mon ami Matt et les autres héros qui avaient donné leurs vies durant ce conflit pour que nous soyons libres aujourd’hui. Moi-même qui, sept ans plus tôt, avais remporté cette bataille décisive qui nous avait menés jusqu’à la victoire finale, le fut également. Pourtant, à la fin de la guerre, le monde entier nous avait fait honneur et nous avait rendu hommage. Bien qu’au départ je fus surnommé The God Of War par de nombreux soldats pour mon courage et ma vaillance, mon souvenir s’effaçait des mémoires en même temps que les autres, à regret !

Seule une poignée de personnes ne nous oublia jamais. Nos familles, nos proches, certains soldats ayant combattu à nos côtés ou encore des civils à qui nous avions sauvé la vie. Eux comblaient notre absence par de profonds souvenirs et de fortes pensées. Les plus robustes se rendaient dans les cimetières, pour se recueillir sur les centaines de milliers de tombes que nous étions. Les autres décidèrent donc d’avancer et de faire table rase du passé.

À la fin de la guerre, les membres du gouvernement qui avaient survécu interdirent formellement à mes enfants de se réunir en un même lieu au même moment. Les quadruplés, ayant été conçus à partir de gènes humains et surnaturels, pouvaient se montrer dangereux et incontrôlables s’ils se découvraient des pouvoirs hors du commun comme je l’avais fait durant la Dernière Guerre.

Lyghter, une entité bienveillante et fidèle ami, qui autrefois vivait prisonnier des talismans magiques présents sur Terre, leur avait administré un sérum afin qu’ils oublient leurs liens de parenté les uns avec les autres. Durant ces sept longues années, mes enfants se crurent donc tous les quatre, enfants uniques.

Amandine, ma petite-amie et mère de mes quatre enfants, était l’unique personne autorisée à les voir à tour de rôle. Sans qu’aucun d’eux ne le sache, celle-ci devait minutieusement programmer leurs arrivées et leurs départs pour qu’ils ne se croisent jamais. Pour ne pas prendre de risques inutiles en cas de visites impromptues, Lyghter leur avait jeté un sortilège, quelques années plus tard, les empêchant de se souvenir des uns et des autres tant que leur mère ne le désirait pas sincèrement.

Au cours des premières années, nos enfants étaient dispersés aux quatre coins du monde avec leurs mentors respectifs. Mais au fil du temps, chacun d’eux revint en France pour se rapprocher de leur mère. Le destin sans doute ! pensait Amandine en ne croyant pas au hasard.

Après la guerre, l’État fut si reconnaissant pour mes exploits militaires et mon sacrifice, qu’il offrit un immense manoir, ainsi que le coût des travaux pour le réaménager, à Amandine. Ma petite-amie parvint donc à le retaper en seulement quelques mois et sans l’aide de quiconque. Elle en fit alors une luxueuse et magnifique demeure ! Nos quatre enfants possédaient chacun leur chambre dans une aile et un étage différent du manoir pour que la curiosité ne les incite pas à visiter une chambre voisine.

Lorsque les fêtes de fin d’année arrivaient, chacun d’eux avait pris l’habitude de ne plus proposer à leur mère de venir les passer avec elle. Ils connaissaient déjà la réponse. Non !

Amandine leur mentait à contrecœur en disant que j’avais été tué durant cette période et ajoutait qu’elle ne fêterait donc plus de réveillon. Pourtant elle aurait donné n’importe quoi pour passer ne serait-ce qu’un Noël avec ses enfants. Elle les redirigeait donc vers leurs mentors qui, eux, se donnaient la peine de festoyer.

Seules quelques personnes connaissaient le secret de l’existence des quadruplés, toutes firent vœu de silence, sous peine d’être châtiées sur-le-champ par le gouvernement.

Romane, l’aînée d’une poignée de secondes, vivait désormais au calme dans une petite maison de campagne avec mon père biologique qu’elle prénomma Ryan. Il est vrai qu’après toutes ces années de service dans l’armée où il ne fut uniquement appelé que par son grade militaire, ce dernier avait volontairement oublié son prénom afin de prendre un nouveau départ après les événements tragiques de mon enfance. C’est sa petite-fille de seize ans qui lui trouva ce surnom après avoir regardé le film : Il faut sauver le soldat Ryan.

Ma fille était fascinée par l’Histoire et particulièrement par les trois Guerres mondiales. La vaillance de ces soldats, vivants ou morts, avait gagné son plus franc respect. Elle était reconnaissante et consciente que la vie paisible qu’elle menait avec son grand-père avait été possible grâce à eux.

Romane était en totale admiration devant Ryan, car ce dernier avait combattu durant la Dernière Guerre. Pour elle, il était un héros. Son héros !

Elle lui quémandait souvent des détails sur la Dernière Guerre mais Ryan s’y refusait catégoriquement. Il lui répondait chaque fois que c’était encore trop douloureux pour lui, ce qui n’était pas totalement faux. De plus, il ne voulait surtout pas mentionner l’existence de ses frères et de sa sœur accidentellement. Il avait aussi tellement peur que sa petite-fille le renie, si elle venait à connaître les événements passés concernant l’assassinat de sa grand-mère ou de mon enfance chaotique, qu’il n’abordait jamais le sujet.

Romane était devenue aussi belle que sa mère. Elle était de taille et de corpulence moyennes et ses formes légèrement prononcées pour son âge la rendaient désirable. Ses yeux étaient d’un bleu océan et ses cheveux blonds rayonnaient comme le soleil. Sa peau était plutôt bronzée et elle portait depuis peu un piercing au nombril qu’elle ne retirait que durant le sport. Sa mère n’en savait évidemment rien.

Son caractère calme et réfléchi pouvait toutefois devenir explosif lors de ces cours d’arts martiaux. Elle faisait de la compétition depuis deux ans. Ses efforts et son implication sans faille lui avaient déjà fait remporter plusieurs trophées.

Bien qu’elle soit parfois fortement amochée au cours de ses tournois, ma fille parvenait toujours à cicatriser sans garder aucune trace, ce qui émerveillait sans cesse les médecins. Romane trouvait même cela étrange parfois.

Son aventure commença, un samedi aux alentours de midi. Son cours d’arts martiaux venait de se terminer, elle allait bientôt rentrer chez elle. Ryan était en chemin pour venir la chercher.

Valentin, le cadet, fut adopté par mon ami Lyghter, une entité surnaturelle qui avait combattu à mes côtés durant la Dernière Guerre. Mon fils le considérait comme son oncle. Ceci ne le dérangeait pas, bien au contraire ! Pour Lyghter, le fait d’avoir un semblant de famille le rendait plus humain à l’intérieur.

Pendant sept ans, Valentin répandit le Bien partout où il se rendait avec son oncle. Lyghter étant l’exemple même de la bonté et de la générosité, il ne put en être autrement ! Il enseigna à mon fils toutes ses connaissances et ses facultés magiques, malgré les réticences du gouvernement. L’entité ne voulait pas nier ses origines avec lesquelles il avait toujours vécu. Sa mère, ayant donné sa vie des siècles auparavant pour les mettre au monde, lui et son frère Shadows, ceci aurait été contraire à ses principes fondamentaux.

Valentin avait donc toujours grandi entouré de magie. Il avait d’ailleurs acquis certains pouvoirs, lui aussi.

La curiosité de mon fils le poussa à demander innocemment à son oncle : Pourquoi ne sommes-nous pas comme les autres ? D’où viennent tous nos pouvoirs ? Ce à quoi Lyghter répondait :

« Nos pouvoirs sont des dons du ciel qui nous ont été transmis pour faire régner la paix sur Terre, il ne faut nous en servir que pour d’excellentes raisons ! »

Lyghter s’amusait parfois à lui dire qu’ils étaient une sorte de super-héros au service des humains.

À ce jour, Valentin n’était encore pas suffisamment puissant pour créer un bouclier comme son oncle l’avait fait pour préserver la vie des soldats alliés lors de l’explosion qui me coûta la vie. Il savait cependant faire apparaître son sceptre magique dont la taille grandissait en même temps que lui. Il le maniait à la perfection ! Il avait également acquis la création et la parfaite maîtrise des boules de plasma bien qu’il ne s’en serve quasiment jamais. Il parvenait aussi à faire sortir ses ailes, mais sa croissance n’étant pas encore tout à fait terminée, il avait encore du mal à les faire battre pour voler. Lyghter lui apprit donc à utiliser les différents courants d’air pour planer et ainsi prendre de la hauteur.

Son plumage était d’un blanc immaculé. Contrairement à moi, mon fils possédait une paire d’ailes supplémentaires, plus petites, au niveau des hanches pour lui servir de gouvernail.

Valentin est une créature magique de naissance. C’est certainement pour cette raison qu’il possède deux ailes de plus ! devina Lyghter à force de réflexion à ce sujet.

Mon fils était un jeune homme musclé, à la peau bronzée comme sa sœur. Ses yeux verts et ses cheveux noirs coiffés d’une mèche rebelle le faisaient ressembler à un ange lorsqu’il étendait ses quatre ailes.

Une fois l’âge requis, mon fils trouva une voie digne du héros qu’il était au quotidien : il aidait les pompiers de sa ville dans toutes sortes de tâches. Toutefois, en dehors des heures de services comme pompier volontaire, il n’avait pas le droit d’utiliser ses pouvoirs. Son oncle était catégorique et il n’était d’ailleurs pas le seul !

Après avoir cédé, le gouvernement stipula alors à son mentor : « L’enfant devra utiliser ses capacités surnaturelles uniquement lors des interventions de secourisme ou au cours de ses exercices d’entraînements. Toute infraction se verra contrainte à des sanctions pénales sévères. »

Inutile d’avouer que Lyghter, ne cherchant qu’à faire le Bien, suivait cet ordre à la lettre.

Partout où ils se rendaient, le garçon aux ailes d’ange et le mage bienfaisant faisaient le buzz. Le monde tout entier parlait d’eux et de leurs valeurs bienfaisantes. Car depuis la Dernière Guerre, la population s’était habituée aux phénomènes paranormaux.

Lyghter faisait pourtant tout son possible pour que mon fils ne soit pas considéré comme une bête de foire. Selon lui c’était une célébrité surnaturelle qui devait grandir normalement.

Comme Ryan, Lyghter évitait de parler de la DernièreGuerre. Lorsque Valentin voulait en apprendre davantage sur son enfance mystérieuse et oubliée, Lyghter lui répondait simplement qu’il en était ainsi depuis la guerre. Il continuait en indiquant que celle-ci l’avait obligée à s’éloigner de son frère et qu’il en gardait de trop mauvais souvenirs. Ainsi, mon fils ne discutait pas davantage.

Ils habitaient en ville, à seulement quelques kilomètres du manoir d’Amandine. De par cette proximité, sa mère lui avait toujours interdit de passer au manoir à l’improviste, au cas où un autre membre de la fratrie s’y trouverait.

Les terribles mésaventures de Valentin et de Lyghter commencèrent le samedi soir, tandis qu’ils s’étaient rendus à la caserne pour aider les pompiers à nettoyer leurs véhicules. Ils venaient de terminer leur besogne et buvaient un verre dans le hangar avec leurs amis pompiers. Ils ne se doutaient pas un seul instant qu’un terrible danger approchait…

Carolane, ma seconde fille, avait été confiée au Colonel qui m’avait adopté bien des années plus tôt. Tout comme moi, elle entra dès son plus jeune âge dans le programme des Death's Guardians dont il avait l’entraînement à charge.

Mon père adoptif, pour qui elle avait un immense respect, lui refusa le droit de se renseigner à mon sujet une seule fois et cela lui suffit pour ne plus s’y intéresser ouvertement. Les autres membres du programme militaire avaient été forcés au vœu de silence.

Carolane était plutôt petite et avait un physique de mannequin. Avec ses cheveux châtains, sa coupe de cheveux undercut, sa peau saumon et ses yeux noisette, elle parvenait à faire chavirer le cœur des hommes d’un simple regard. Mais le Colonel veillait au grain ! Pas un seul n’eut le courage de lui faire face pour aborder sa petite protégée.

Une après-midi, sans avoir concerté le Colonel, Carolane se fit tatouer le mot Hope derrière l’oreille gauche, ce qui signifiait le mot Espoir. Son plus grand rêve étant de devenir la meilleure guerrière du programme dont elle faisait partie, ce symbole tatoué lui redonnait courage quand elle en ressentait le besoin.

Carolane apprit le tir avec toutes les sortes d’armes à feu existantes. Personne ne l’égalait ! Elle parvenait à atteindre une pièce de deux euros à plus de trois cents mètres avec un fusil à lunette. C’était incroyable !

Le Colonel lui apprit aussi à être discrète comme un fauve, agile comme un chat et silencieuse comme la Mort.

Les six premières années, suite à son intense apprentissage au sein des Death'sGuardians, ma fille parcourut le Monde entier à la recherche de nouvelles connaissances pour devenir toujours plus performante. Le Colonel avait évidemment été autorisé à la suivre dans son cursus en compagnie des autres membres du programme. La septième année, Carolane décida de revenir en France pour se rapprocher de sa mère tout en améliorant elle-même ses propres techniques de combats.

Elle n’apprit cependant que très peu le combat rapproché suite à un insuffisant contrôle de soi. Elle avait la fâcheuse manie de s’emporter et avait bien failli tuer certains de ses camarades lors de simples entraînements, même malgré leur expérience.

Ne désirant pas que son côté sombre ne se développe davantage chez elle et redoutant la venue de pouvoirs démoniaques ingérables, le Colonel lui supprima ce cours en particulier. Tout comme sa sœur Romane, elle ne possédait donc encore aucun pouvoir magique. Pourtant, elle ressentait parfois d’étranges sensations intérieures lorsqu’elle était en colère ou que ses sentiments étaient exacerbés.

Depuis ma disparition, sept ans auparavant, le Colonel devint beaucoup plus protecteur et attentionné envers les personnes qu’il aimait.

La bouleversante épopée de Carolane débuta le samedi après-midi lors d’une sortie dans un immense Laser Game, accompagnée par ses amis de caserne et du Colonel qui tint à s’assurer qu’elle ne s’emporte pas durant le jeu. Ils étaient tous en chemin et n’allaient pas tarder à arriver sur le site du jeu…

Anthony, le benjamin, avait été confié à Shadows, mon adversaire de fortune, entité démoniaque et frère de Lyghter. Sans surprise, mon fils devint très vite aussi sournois et maléfique que celui qui avait aussi été désigné comme son oncle.

Lors de la séparation de mes enfants, le gouvernement avait longuement hésité à confier sa garde au démon puisqu’il avait déjà du mal à se tenir lui-même sur le droit chemin. Shadows ayant toutefois prouvé sa loyauté en protégeant son frère lors du cataclysme qui nous éradiqua Maximus et moi sept années auparavant, le gouvernement lui accorda donc une chance.

Oncle et neveu étaient pourtant si heureux de faire ce que bon leur semblait que les deux rebelles eurent tout de suite de graves ennuis avec la justice.

Malgré l’interdiction de l’usage de leurs pouvoirs, Anthony et son oncle s’en servaient constamment et pour tout. Ce non-respect des règles les envoya tout droit en prison malgré le jeune âge de mon fils. Lyghter n’étant plus là pour être la voie de la raison, cela se ressentit de jour en jour sur leurs comportements imbéciles.

« Ils veulent nous brider parce que nous sommes des êtres exceptionnels. Nous ne renoncerons pas à nos pouvoirs pour le petit confort de l’État ! » avait lancé Shadows à la presse juste avant d’être inculpé pour truanderie.

Bien que Shadows ait été l’un des piliers principaux ayant permis au monde de remporter la Dernière Guerre, il fut jugé au même titre que n’importe quel autre malfrat. Lorsque les juges décidèrent de les séparer, le gouvernement refusa secrètement de le faire, car aucun de mes enfants ne devait être délaissé de leur mentor. Selon eux, la sécurité du monde en dépendait. De plus, les antécédents comportementaux de mon fils les avaient contraints à ne plus être en mesure de les séparer. Le lien entre Shadows et Anthony était devenu trop fusionnel. À tel point que l’État crut, durant une période, que Shadows avait pris possession de mon fils grâce à sa capacité surnaturelle le lui permettant.

Shadows avait appris à mon fils à faire apparaître son épée des ténèbres et à la manier à la perfection. Il ne parvenait cependant pas encore à contrôler le feu comme le faisait son oncle. Ce dernier lui interdisait de prendre possession des objets comme lui savait le faire. Pour ta propre sécurité ! lui disait-il chaque fois qu’ils se fâchaient sur le sujet.

Anthony s’y entraînait pourtant en cachette et parvenait à prendre le contrôle de petits objets pour ainsi rendre la vie de son oncle… mouvementée !

Mon fils avait les cheveux blanc nacré, les yeux noirs et sombres comme son âme. Il savait se métamorphoser en démon et restait conscient de ses faits et gestes. Il possédait la même apparence que Shadows, en moins imposant, avec toutefois une queue longue de deux mètres se terminant en pointe de flèche aiguisée. C’est sûrement dû à ses gênes de naissance magiques qu’il possède cette queue ! se disait Shadows chaque fois qu’il le jalousait pour ce membre supplémentaire.

En prison, Anthony développa peu à peu une sorte de paranoïa : il devait sans cesse avoir un plan de secours, une façon de se défendre et un moyen de reprendre le dessus en cas d’attaque ennemi à tout moment et peu importe où il se trouvait. Son épée des ténèbres étant longue à apparaître, il devait trouver chaque fois une autre solution pour nuire à ses ennemis potentiels.

Depuis quelque temps, Anthony ressentait un mauvais présage et s’était secrètement mis à gratter l’arête frontale de sa chaise en bois, dans la salle de cinéma de la prison, avec les ongles.

Y étant autrefois emprisonné au bon vouloir du Porteur, Shadows n’avait peur que de deux choses bien précises : perdre son neveu et retourner dans le talisman !

Lui et son neveu furent les premières victimes de l’une des plus grandes menaces connue depuis la Dernière Guerre. Tout commença dans cette prison…

Quand Amandine n’était pas avec l’un de ses enfants, elle se rendait dans une salle de sport. Chaque séance, elle se tuait à la tâche jusqu’à l’épuisement. C’était ainsi une façon pour elle de venger ma mort. Elle tentait de s’endurcir pour la meilleure des raisons, l’Amour !

Durant ces sept longues années, ma famille avait tracé son chemin et s’était plus ou moins adaptée à sa nouvelle vie. Une vie sans moi !

Qui est donc notre père et que lui est-il arrivé ? se demandait parfois les quadruplés sans jamais avoir de réponse.

Ils découvrirent ce sujet épineux au cours de leur toute première aventure, suite à une menace trop vite oubliée !

Un danger plus redoutable que jamais les attendait. Un danger qui pouvait engendrer la destruction du monde. Un danger pour lequel personne n’était encore préparé !

C’est ainsi que commença la suite de mon histoire et celle de mes enfants. Notre histoire !

Chapitre 2

Le fugitif

Notre histoire débuta donc avec Anthony, un samedi en début de journée. Il ne le savait pas encore, mais sa vie allait être bouleversée à tout jamais.

Ce matin-là, il se trouvait en plein cœur de la prison à sécurité minimale où il avait été incarcéré depuis deux mois en compagnie de son oncle, Shadows.

Suite à une conduite suffisamment raisonnable de mon fils durant une courte période, la Justice décida de les transférer tous les deux dans une geôle plus adaptée, même si l’attitude de Shadows n’avait, quant à elle, pas évoluée. Les juges savaient que mes enfants ne devaient pas être séparés de leur mentor. C’était impératif !

Malgré leurs forts caractères, Shadows et son petit protégé s’entendaient bien, la plupart du temps. Ils arrivèrent même à trouver une once de bonheur en prison.

Toutefois, la paranoïa qu’avait développée Anthony, du fait de vivre entouré de personnes dangereuses en permanence, lui avait causé un dérèglement de la perception de la réalité. Son cerveau lui ordonnait constamment de trouver le moyen le plus rapide pour éliminer un ennemi en cas d’attaque. Peu importe le lieu. Peu importe l’heure. Ce fut d’ailleurs à cause de cela que mon fils et son oncle se retrouvèrent tous deux derrière les barreaux.

Un jour, tout un groupe de racailles avait tenté de s’en prendre à Shadows pour son physique différent. La situation dégénéra et les loubards, bien que beaucoup plus nombreux, furent massacrés jusqu’aux derniers. Anthony et son oncle plaidèrent la légitime défense suite à une discrimination, mais les nombreux litiges déjà à leur encontre leur coûtèrent la liberté.

Avant qu’ils ne soient transférés en zone de sécurité minimale et après des mois de thérapie, les psychiatres de la prison réussirent à raisonner Shadows.

Pour la première fois, il parvint à avoir mauvaise conscience de ses actes. Il s’était rendu compte que mon fils, encore mineur, suivait déjà un chemin de débauche. Il fit donc la promesse suivante le jour du transfert :

« Peu importe ce que l’avenir nous réserve, je ne tuerai plus. La prison n’est pas un lieu convenable pour un adolescent de ton âge ! Je te promets de rester toujours auprès de toi et je te promets qu’un jour nous sortirons d’ici en hommes libres ! » ce à quoi mon fils répondit :

« Tu sais Shadows ! Je me fous de savoir si nous vivons en prison ou non. J’aime notre vie ! Tant que tu me fais la promesse de toujours rester auprès de moi. Le reste n’a pas d’importance ! »

Ce jour-là, Shadows comprit la mauvaise influence qu’il avait sur Anthony et fut déçu de lui-même. Il décida de continuer le suivi psychiatrique pour améliorer son train de vie et celui de son neveu.

Le jour même de leur arrivée dans cette nouvelle prison, Anthony avait senti un mauvais présage. Il était persuadé qu’un jour quelque chose de terrible leur arriverait en ces lieux. Pourtant, plusieurs semaines passèrent et rien ! Pour se rassurer, il s’était donc mis à gratter avec les ongles la ceinture de sa chaise en bois dans la salle de cinéma. Il parvint dès lors à créer un angle aigu sur les deux tiers de l’arête, juste assez pour que les gardes ne le remarquent pas.

D’ordinaire, les détenus vivaient à quatre par chambrée, mais Shadows ne mit pas longtemps avant de dégager les deux autres dans la cellule voisine pour qu’il puisse vivre uniquement avec son neveu. Ainsi, ils obligèrent six bagnards à s’entasser dans une seule chambrée pour quatre.

Ce samedi matin là, mon fils était le seul spectateur dans la salle de projection, surveillée par pas moins de trois gardiens. Shadows était resté dans sa cellule, le sujet du film ne l’intéressait pas. Son neveu en revanche avait hâte. Il s’agissait d’un petit garçon orphelin de onze ans avec une cicatrice en forme d’éclair sur le front qui se découvrait des dons de sorcier dans une école de magie.

Anthony rejoignit sa chaise affûtée et laissa donc son oncle, seul dans leur chambrée.

Peu avant que le film ne commence, les six détenus entassés dans la cellule voisine s’avancèrent au seuil de la grille où se trouvait Shadows. Il était allongé sur une couchette et s’amusait à lancer un jeu de cartes dans le trou d’un mur réalisé avec la tête d’un détenu qui l’avait préalablement énervé. Les six taulards voulaient regagner leurs places respectives. L’un d’eux glissa discrètement un pot-de-vin aux gardes pour qu’ils ferment les yeux sur ce qui allait suivre. Un autre, le regard malsain, ordonna au démon d’un ton naturellement autoritaire :

« Eh ! Mocheté ! Tu vas laisser mes potes revenir dans cette chambre si tu ne veux pas avoir de problèmes ! »

Shadows sourit, mais ne répondit rien, il continua de lancer ses cartes dans le trou du mur.

« Les gardiens vont te ramasser à la petite cuillère mon gars ! »

Shadows comprit alors ce qui allait suivre. Sans dire le moindre mot, il posa délicatement son jeu de cartes à côté de lui, sur la couchette et se leva lentement en grognant. Il semblait avoir été dérangé.

Quelques secondes plus tard, Anthony put alors entendre les sifflets des geôliers s’affoler depuis la salle où il se trouvait. Il s’approcha de la porte et regarda à travers le hublot pour connaître la raison de toute cette agitation. Des gardiens se précipitaient dans la chambre de son oncle pour stopper la bagarre. Mon fils voulut intervenir, mais lorsqu’il saisit la poignée de la porte, l’un des trois mâtons posa sa matraque sur sa main et dit en gonflant le torse :

« Le film ne va pas tarder à commencer ! Tu ne sortiras d’ici que lorsqu’il sera terminé ! Retourne t’asseoir ! »

Anthony le fixa le regard mauvais, retira sa main et se contenta de regarder par le hublot. Shadows n’avait finalement fait qu’une bouchée de ses agresseurs, les geôliers étaient en train de les rassembler dans l’autre chambrée avant de refermer la grille pour qu’aucun autre incident ne se produise.

Sereinement, Shadows se rallongea sur son lit et se remit à lancer son jeu de cartes dans le mur, l’air de rien.

Finalement rassuré pour son mentor, Anthony retourna s’asseoir sur sa chaise en continuant à la gratter discrètement. Un maton plongea la pièce dans le noir et conseilla au jeune homme, d’un ton sec, de ne plus se lever avant la fin de la séance. Mon fils ne répondit rien une fois encore. Le film commença.

La projection devint alors la seule source de lumière dans la pièce. Anthony jeta un œil sur les geôliers au fond de la salle, près de la porte. Ils étaient installés dans de confortables fauteuils en mousse leur étant réservés et ne comptaient plus bouger avant la fin du film. Mon fils commença alors discrètement à dévisser les deux pieds avant de sa chaise à l’aide d’un couteau de self. Il fallait que sa contre-attaque soit prête. Selon lui, le mauvais présage approchait.

Une heure s’écoula. Les six prisonniers se réveillaient doucement de leur combat lamentable contre Shadows. Ils se résignèrent à demeurer à six dans cette chambrée quelques nuits supplémentaires, en attendant de trouver un autre plan pour forcer le démon à accueillir deux des leurs dans la cellule voisine.

Soudain, un vrombissement se fit entendre dans les conduits d’aération. Quelque chose se déplaçait à l’intérieur. Shadows s’étonna : Je ne suis pas bien sûr que ce soit normal ! pensa-t-il en cessant de jeter ses cartes.

Une épaisse fumée noire entra subitement par la ventilation et se dirigea directement vers les six détenus avant de s’étendre dans toute la cellule. Suffoquant, les taulards quémandèrent de l’aide, mais les gardes préférèrent s’écarter par prudence. Après quelques secondes, le nuage s’imprégna totalement dans leurs corps.

Les prisonniers se redressèrent lentement tandis que deux gardes se rapprochaient de la grille. Les yeux des bagnards devinrent noirs et un symbole étrange apparut sur leurs avant-bras, comme s’il s’agissait d’un tatouage.

L’un d’eux se mit face à la grille et dans un boucan terrible, la fit voltiger à l’autre bout de la pièce, au même titre que les deux geôliers qui s’en étaient approchés. Ils sortirent de leur cellule et revinrent au seuil de la chambre de Shadows. Celui-ci ayant vu la grille voler à travers le couloir comprit que quelque chose en eux n’était pas comme d’habitude.

Il s’inquiéta plus sérieusement pour son neveu puis se leva pour tenter de comprendre. Les six taulards se dirigeaient vers la salle de cinéma. Ils viennent pour lui ! pensa Shadows, inquiet.

L’entité envoya alors une boule de feu sur l’arrière du crâne de l’un d’eux sans réfléchir, sa peau brûlée se mit à cloquer. Le prisonnier se retourna sans exprimer la moindre douleur. Ses cinq camarades se tournèrent à leur tour vers le démon qui comprit que ses ennemis n’avaient plus rien d’humain. Il s’exclama alors peu confiant :

« Je vois… On passe aux choses sérieuses ! »

Après un instant, un cri bestial résonna dans les couloirs de la prison. Anthony reconnut immédiatement son oncle. Il décida de quitter son siège pour lui venir en aide mais les gardiens dans la salle de projection lui ordonnèrent de rester assis. Déçus de ne pas pouvoir profiter du film, les geôliers se levèrent, dégainant leurs matraques. Mon fils se rassit. Il ne bougeait plus, une certaine angoisse commençait à monter en lui. Il savait que quelque chose était arrivé à son oncle, mais décida cependant de ne pas prendre le risque de se faire tabasser inutilement par les geôliers. Si Shadows n’a pas réussi à vaincre son ennemi, personne d’autre ici à part moi ne sera en mesure de le faire ! pensa-t-il, inquiet.

Il savait que le danger viendrait de lui-même jusqu’à lui. Son stress augmentait au fur et à mesure que les sifflets des gardiens se multipliaient.

De légères cicatrices luisantes comme de l’or apparurent progressivement sur son visage. Il tentait de canaliser sa colère pour ne pas se transformer en démon. Il n’en avait pas le droit. Il saisit alors les flancs de sa chaise et les serra de toutes ses forces afin de se contenir.

Malheureusement, les sifflets dans la pièce voisine lui martelaient le crâne, à tel point que des larmes de stress lui montèrent aux yeux. Il ne devait pas céder à la tentation de se transformer sous peine d’être renvoyé dans une prison à sécurité maximale.

Les sifflets finirent par cesser. D’un coup, un garde percuta violemment les portes de la salle de cinéma qui cédèrent sous la violence du choc et glissèrent jusqu’aux pieds de mon fils qui comprit alors qu’il allait devoir riposter. Il se concentra puis ferma les yeux. Les six détenus entrèrent dans la pièce sans perdre de temps puis se débarrassèrent des matons en une poignée de seconde : le premier policier fut projeté contre une colonne de pierre qui lui broya la colonne vertébrale. Le deuxième se fit arracher la trachée et le dernier fut séparé de son cœur avec une facilité déconcertante.

Anthony entendit ensuite les six hommes se rassembler à l’entrée de la pièce, les regards tournés vers lui.

Au moment même où l’un d’eux fit un pas dans sa direction, il rouvrit subitement les yeux. Ceux-ci étaient devenus rouge sang ! La peau de ses paupières prit une couleur sombre et sa transformation se fit en quelques secondes !

Anthony se leva d’un bon et frappa brutalement sa chaise du talon. Celle-ci se détacha du sol et l’arête de la chaise en bois, qu’il avait grattée durant des semaines, vint percuter le crâne de l’un d’eux, se brisant sous le choc. L’homme tomba raide mort.

Anthony fit une roulade dans l’allée voisine puis se tourna vers ses ennemis. Il avait finalement pris son apparence de démon, malgré lui. Sa peau ressemblait à de la cendre parsemée de nombreuses cicatrices dorées, ses cheveux devinrent noirs et se coiffèrent en pics, ressemblant à un charbon ardent. Ses habits se consumèrent pour laisser place à un pagne de guerrier qu’il portait toujours en cas d’urgence. Il ressemblait énormément à son oncle, bien qu’il soit plus petit et qu’il possédait une queue.

Il ne perdit pas un instant, se saisit d’une chaise devant lui et, avec une force incroyable, l’arracha du sol avant de la faire exploser sur un autre prisonnier qui recula de quelques pas. Un autre vint entre temps et prit mon fils de vitesse, lui envoyant un coup de poing dans le thorax. Anthony fut projeté contre une colonne de pierre quelques mètres plus loin. Il retomba lourdement sur le sol. L’un de ses ennemis fit un bond démesuré dans sa direction, espérant lui écrabouiller la tête à l’atterrissage. Mon fils se décala juste à temps, lui fit un croche-pied et lui planta ses griffes dans la gorge. Ses doigts entrèrent dans la chair de son cou, attrapèrent sa mâchoire inférieure en la lui arrachant de la tête. Le jeune homme sous les traits d’un démon se releva ensuite, lâcha la mâchoire de son ennemi à côté de lui dans un bain de sang et posa le regard sur les autres. Plus que quatre ! pensa-t-il à peine essoufflé.

Soudain, le prisonnier le plus proche ouvrit la bouche. Une longue langue en sortit et attrapa mon fils par le cou. Ce dernier ne se laissa pas débiner, il saisit la langue en l’entourant autour de son biceps puis tira de toutes ses forces avant de coller un uppercut monumental dans le menton du taulard qui tomba en arrière en crachant ses dents, qui avaient préalablement sectionné sa langue immense.

Après quelques pas de lutte, mon fils parvint à se saisir de l’un des prisonniers au niveau des hanches, le lança le plus fort possible derrière lui contre un fauteuil de maton pour lui briser la colonne vertébrale. Encore deux et je pourrai porter secours à mon oncle ! Il faut que je fasse vite ! pensa-t-il à nouveau.

Anthony se releva avec une impulsion abdominale. Il reçut toutefois un puissant coup de poing au niveau du nez, ce qui le fit retomber au sol. Sans se laisser étourdir, il fit une magnifique roulade arrière et se remit debout tout de même. Une goutte de sang dorée sortit de son nez avant de disparaître et de revenir à la normale.

Je suis loin d’eux ! pensa-t-il ensuite innocemment.

Sans même le vouloir, le jeune démon se téléporta juste devant ses deux derniers agresseurs. Il n’eut pas le temps de réagir et reçut un coup de pied dans le ventre, ce qui l’envoya à travers un des piliers en béton de la salle de projection. Il s’écroula sur le sol, essayant de recouvrer ses esprits. Il fut étonné par ce qu’il venait de faire et tenta de le reproduire. Il se concentra un instant, ressentit comme un frisson le parcourir puis son corps se mit à vaciller comme un réverbère défaillant. Il se téléporta à nouveau.

Il finit malheureusement sa course à l’intérieur de l’un des deux prisonniers qui explosa de manière identique à une grenade dans le ventre. Anthony tomba sur les fesses, recouvert de sang, d’organes et de chair. Dégueu ! pensa-t-il sur l’instant.

Pourtant, il était fier ! Il avait réussi là où il avait échoué par le passé : Je ne saigne pas du nez cette fois-ci ? Formidable ! Il faudra que je m’entraîne davantage ! pensa-t-il le temps d’une seconde.

Il est vrai que la dernière fois qu’il était parvenu à se téléporter il avait saigné du nez tout un après-midi. Il revint au cœur du combat, se releva et se positionna face au bagnard qui avait perdu sa langue et ses dents mais qui vivait toujours. Il remarqua alors le mystérieux symbole tatoué sur son avant-bras. Que peut-il bien pouvoir signifier ? se demanda-t-il curieux.

Le prisonnier blessé à la mâchoire avait beaucoup de mal à tenir debout, il vacillait. Anthony n’eut aucun mal à lui rompre la nuque à l’aide d’un puissant coup de pied dans les cervicales.

Le dernier détenu accourut dans sa direction en espérant le prendre par surprise mais s’arrêta net, après un léger sifflement. Anthony ne prit même pas la peine de s’en soucier. Pour lui le combat était d’ores et déjà terminé. Son ennemi resta immobile un instant puis une ligne de sang se forma de son pectoral gauche à sa hanche droite. Le haut de son corps glissa le long de son bassin et tomba sur le sol en laissant un amont de tripes et de boyaux s’éparpiller sur le sol bétonné. Le bas de son corps tomba à son tour. Anthony l’avait simplement coupé en deux d’un puissant coup de queue.

L’affrontement était bel et bien terminé !

Mon fils se précipita dans la cellule de son oncle tout en retrouvant son apparence humaine.

Il arriva en hâte au seuil de la chambrée et découvrit Shadows avec effroi, allongé sur la couchette, la gorge sectionnée et le cœur arraché ! Un sang de couleur dorée coulait en abondance sur l’armature du lit, dégoulinant ensuite sur le sol où une flaque d’or s’était formée.

Anthony se tint au mur pour ne pas tomber tant il était terrassé de chagrin en l’apercevant ainsi. Il ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortit.

Qu’allait-il bien pouvoir faire dorénavant ? Il venait de perdre la seule personne qui avait toujours compté à ses yeux. Shadows lui avait tout appris. Bien qu’il ne soit que son oncle, il était comme un père pour lui ! Leur lien était si fort !

Une seule personne lui vint à l’esprit. Une personne qui pouvait lui venir en aide dans ce moment difficile. Amandine ! Sa mère !

Peu avant l’arrivée d’une nouvelle vague de renforts, un détenu enfermé dans sa cellule face à la chambre de Shadows cria à Anthony :

« Petit ! Tire-toi vite ! Ces abrutis vont tout te mettre sur le dos si tu restes ici. Grouille-toi ! »

Anthony entendait déjà les sifflets des matons arriver au loin mais ne pensa qu’à retrouver sa mère malgré leurs différends. Maman saura quoi faire ! Il faut que je sache si elle est en danger ! pensa-t-il le cœur lourd, les yeux larmoyants.

Il reprit alors son apparence de démon, ses larmes s’évaporèrent sur ses joues de cendres. Il fit pousser de longues griffes en l’espace d’une seconde puis grimpa habilement au mur, avant de défoncer la paroi métallique d’un ventilateur à la force de ses poings à cinq mètres de hauteur. Il s’enfuit à travers la ventilation sans porter une attention particulière aux alarmes qui se déclenchèrent. Il sortit de la prison et s’enfuit en courant comme un animal sur ses quatre pattes à la vitesse d’un léopard.

Mon fils partit en courant pour rejoindre le manoir de sa mère. Il pleurait en repensant au corps de son oncle sans vie. Shadows venait de mourir presque sous ses yeux !

Les renforts arrivèrent enfin dans la prison et entrèrent dans la salle de projection, certains eurent des haut-le-cœur et ne purent se retenir de partir vomir face à la violence de la scène de crimes.

Au moment même où les gardes se penchèrent pour observer la couleur sombre des yeux des détenus en charpies, la fumée noire se retira des corps et sortit à travers une fenêtre à barreaux dans un courant d’air terrible. Tous s’étonnèrent face au phénomène paranormal. Les yeux des prisonniers redevinrent ordinaires sous la plus grande stupéfaction de tous.

Comme le taulard enfermé dans sa cellule voisine l’avait prédit, les renforts prirent Anthony pour unique responsable et lancèrent un avis de recherche international. Un geôlier demanda à son supérieur :

« Puisqu’il s’agit d’Anthony O’Connor… Pensez-vous que nous devrions l’appeler pour l’en informer ?

— Oui ! Il sera sans doute le seul à savoir comment s’y prendre avec le gamin. Je vais l’appeler sans perdre plus de temps… »

Chapitre 3

Un entraînement inhabituel

À de nombreux kilomètres de la prison d’où Anthony s’était évadé, lors des douze coups de midi, Romane terminait sa leçon de combat par un salut général.

Elle apprenait les arts martiaux via des cours de Jeet Kune Do pour savoir se défendre en toutes circonstances. Ma fille était vraiment bien entraînée ! Elle mettait tant de bonne volonté à devenir la meilleure qu’elle y parvint avec le temps. En seulement deux ans de compétition, elle avait déjà atteint le sommet, pour la plus grande fierté de son grand-père. Ce dernier s’investissait à deux cents pour cent dans son hobby. Toutefois, il ne voulait plus voyager. Selon lui, une autre guerre était sur le point d’éclater, il ne restait plus qu’à mettre le feu aux poudres… Pour cette raison, Romane ne put aller plus loin que le championnat de France dont elle en était sortie vainqueur.

Malgré la violence de ces compétitions, Romane cicatrisait en seulement quelques heures et ses blessures ne lui laissaient pas la moindre trace. D’ailleurs, elle ne ressentait que très peu la douleur dans sa généralité, à la limite de la maladie de l’hypoesthésie, bien qu’il n’en fût rien. Ryan savait parfaitement que cette guérison hors norme était due aux gènes surnaturels de sa naissance, mais pour ne pas aborder ce sujet interdit, il lui faisait croire qu’elle avait simplement beaucoup de chance de guérir très vite.

Romane était aussi belle que sa mère. Elle adorait sortir en compagnie de sa mère lors de ses séjours au manoir, car Ryan, lui, sortait peu. Il était casanier et cela lui plaisait. D’ailleurs, depuis qu’il avait acheté sa maison, ils n’avaient plus voulu quitter la France. Ma fille rêvait pourtant de voyages et d’aventures à travers le monde, mais en vain. Les murs de sa chambre étaient ainsi recouverts de cartes postales du monde entier, envoyées par son meilleur ami qui ne manquait jamais de lui écrire chaque été quand il partait.

Ce midi-là, Ryan arriva pile à l’heure sur le parking du gymnase pour venir chercher sa petite protégée. Il roulait au volant d’un imposant Hummer de couleur noire qui lui avait été offert par le gouvernement en guise de remerciements pour service rendu durant la guerre. Il se gara à quelques mètres de l’entrée du dojo et coupa son moteur le temps d’attendre sa petite-fille.

Il aperçut alors une bande de loubards assis sur leurs motos à l’autre bout du parking devant un City-stade. Tous avec des coiffures déjantées, ils étaient habillés de jeans déchirés et de vestes à l’apparence très négligées. Ils étaient en train de fumer un joint et buvaient de grandes gorgées de whisky entre deux canettes de bière.

Ryan ne les quittait pas du regard. Lorsque deux jolies jeunes femmes passèrent à côté d’eux, ils ne purent s’empêcher de les siffler irrespectueusement, de les rabaisser. Bande de losers ! pensa mon père écœuré.

Au moment même où le vieil homme voulut descendre de son véhicule pour les corriger, les vagabonds retournèrent s’asseoir sur leurs motos et reprirent leur beuverie. Sales racailles ! C’est contre eux qu’il aurait fallu faire la guerre ! pensa-t-ilà nouveau, toujours en les observant avec dégoût.

Il avait une envie folle de les claquer, mais à quoi bon ? Il aurait certainement eu plus de problèmes qu’en les laissant faire.

Soudain, Ryan aperçut cette fameuse fumée noire arriver au loin tel un essaim d’abeilles. Devinant que cette chose surnaturelle venait semer le désordre, il sortit de son Hummer puis cria aux loubards de venir se réfugier dans son véhicule. Ceux-ci n’en comprenant pas la raison ne lui répondirent que par des doigts d’honneur. Le nuage s’écrasa sur eux sans qu’ils aient le temps de réagir. Les voyous tentèrent de se protéger de la fumée en se couvrant le visage, mais en vain. Cette dernière s’imprégna en eux en quelques secondes et les posséda. Elle s’étendit ensuite tel un poison sur tout le parking comme si elle recherchait d’autres victimes. Ryan agrippa une petite fille à quelques mètres de lui et s’allongea sous le moteur de la voiture voisine avec la mère de l’enfant pour ne pas être vus par le maléfice. La jeune femme était terrorisée et sa fille, tout autant. Elles semblaient toutefois plus rassurées avec la présence de Ryan qui garda son sang-froid et posa le doigt sur la bouche pour leur faire comprendre de ne faire aucun bruit. La maman acquiesça et tenta de se contenir.

La fumée polluante disparut soudainement. Ryan sortit de sa planque, remarquant immédiatement que tous ceux qui n’avaient pas pu lui échapper avaient les yeux noirs et le teint pâle. L’ensemble des racailles, les deux femmes de passage ainsi que trois hommes à proximité du parking furent envoûtés et se dirigèrent d’instinct vers le dojo. Ryan comprit immédiatement que le maléfice était là pour sa petite-fille. Il remit sur pieds la jeune mère et son enfant avant de leur conseiller de se réfugier en hâte dans le gymnase et de fermer toutes les portes à clé jusqu’à l’arrivée de la police.

Mon père retourna ensuite jusqu’à son Hummer, s’assit grossièrement sur le siège et entra un code sur son ordinateur de bord. La banquette arrière pivota, laissant percevoir toutes sortes d’armes. Sans perdre plus de temps, il s’équipa d’une mitrailleuse, sortit de sa voiture puis se mit en joue face aux nouvelles créatures des ténèbres qui se rapprochaient de lui et du gymnase.

Romane, ne se doutant de rien, décida de rester un peu pour se battre contre son ami Alex après leur cour de combat.

Alex était un élégant jeune homme un an plus vieux qu’elle et habitait dans le même quartier. Sa musculature était dessinée, sans être trop prononcée. Il avait les yeux argentés, les cheveux courts et colorés en blond et une peau hâlée due à ses origines tahitiennes. Il était, la plupart du temps, d’humeur joviale, souriant malgré la mort de ses parents au cours de la Dernière Guerre. Alex vivait chez un ivrogne qui n’avait pris sa garde que pour obtenir une allocation de l’État et en profitait pour passer ses journées à boire de grands verres d’alcool devant sa télévision.

Ryan avait donc aimablement pris la responsabilité de l’emmener et de le ramener à ses cours, son tuteur refusait de consommer de l’essence pour un sport qu’il jugeait barbare et sans intérêt.

Alex était ouvertement amoureux de Romane, mais ne voulait pas forcer les choses. Le premier pas devait venir d’elle selon lui au risque qu’elle ne le fasse jamais. Ma fille quant à elle n’était pas prête à sauter le pas. J’ai tellement peur de perdre notre complicité si l’amour venait à nous séparer un jour… pensait-elle chaque fois.

Ryan aussi était au courant des sentiments d’Alex envers sa petite-fille. Il avait d’ailleurs conseillé plusieurs fois à Romane de ne pas laisser s’envoler un jeune homme aussi gentil, généreux et respectueux. Pour lui, Alex faisait déjà partie de leur famille puisqu’il passait la majeure partie de son temps chez eux. Bref, les deux jeunes ne se quittaient jamais !

Malgré son jeune âge, Alex était déjà un expert en mécanique. Il savait réparer et conduire la plupart des engins à moteur. C’était un passionné de voitures. Il avait d’ailleurs la fâcheuse manie d’arrêter toutes ses occupations au passage d’un véhicule rare pour l’admirer en listant chaque particularité à Romane qui n’en avait rien à faire !

Lorsque le professeur de Jeet Kune Do aperçut les deux amis en train de se chamailler pour tenter de faire capituler l’autre, il leur conseilla de se rendre aux vestiaires s’ils ne voulaient pas que Ryan ne les attende indéfiniment. Romane et son ami étaient dans une position farfelue essayant des clés de bras, puis des clés de jambes pour ensuite recommencer sans jamais capituler. Après le conseil de leur professeur, ils décidèrent de se lâcher en même temps pour faire un match nul. Alex se releva, tendit la main à son amie qui la saisit et se leva à son tour. Ils se regardèrent puis sourirent en se dirigeant vers les vestiaires, se poussant gentiment à coup de bassin.

Avant même qu’ils ne quittent le tatami, ils entendirent subitement les plaintes de la jeune maman et de sa fille dans l’autre pièce où se trouvait l’accueil. Quelques secondes plus tard, des coups de feu retentirent sur le parking. Alex et Romane devinèrent immédiatement qu’il s’agissait de leur chauffeur.

« Pourquoi mon grand-père serait-il en danger ?

— Je ne sais pas ! Il vaudrait mieux passer par-derrière. Viens, suis-moi et ne fais pas de bruit ! » termina Alex en la prenant par la main pour qu’elle le suive.

Les deux jeunes récupérèrent leurs affaires sans attendre puis sortirent discrètement par la porte arrière du gymnase. Ils le contournèrent pour rejoindre l’autre bout du parking. Là, ils aperçurent l’imposant véhicule de Ryan dont la portière côté conducteur était restée ouverte. Les trois hommes, les deux femmes et l’un des voyous avaient été abattus ici et là autour du Hummer. Leurs corps inanimés étaient criblés de balles, leur sang se répandait sur le sol goudronné.

Une autre personne était adossée contre le véhicule sans que Romane et son ami ne puissent l’identifier d’où ils se trouvaient. Ils ne distinguaient qu’une jambe ensanglantée recouverte de griffures.

Alex et sa partenaire de combat se rapprochèrent discrètement en priant pour qu’il ne s’agisse pas de leur chauffeur. Leurs craintes étaient malheureusement fondées ! Ryan se trouvait étendu là, contre la roue arrière de son véhicule, mortellement blessé et respirant avec une grande difficulté. Il avait été roué de coups et possédait d’importantes marques de griffures sur l’ensemble du corps. Romane s’agenouilla à ses côtés, attrapa sa veste dans son sac pour essuyer le sang qui recouvrait le visage de son grand-père. L’homme mourant lui saisit lentement la main, murmurant avec inquiétude :

« Sauve-toi, ma chérie… C’est pour toi qu’ils sont ici !

— Non ! Je ne t’abandonnerai pas. Lève-toi ! »

Alex monta dans le véhicule de Ryan et remarqua qu’une partie de ses armes à feu avaient été dérobées. Bientôt, ils entendirent des cris accompagnés de coups de feu provenant du gymnase. Les racailles encore en vie fouillaient le dojo à la recherche de Romane, assassinant tout ceux qu’ils trouvaient sur leur passage. Alex ouvrit alors la portière arrière de la voiture en implorant à son amie de partir avec lui :

« Romane ! Il ne faut pas qu’ils nous repèrent ! »

Ma fille essaya de relever Ryan mais celui-ci ne fit aucun effort, il savait qu’il allait mourir ou qu’il ne serait qu’un poids inutile pour les deux jeunes. L’un des voyous retourna soudainement vers l’entrée du dojo et les aperçut sur le parking. Le loubard, prisonnier du maléfice, brandit son arme avant d’ouvrir le feu sans la moindre hésitation. Romane n’avait plus le choix, elle devait s’enfuir pour rester en vie :

« Sauve-toi, ma chérie… Je vais tenter de les retenir…

— Je suis désolée, grand-père ! » avoua la jeune femme les yeux pleins de larmes en lui confiant une arme de poing que lui tendit Alex.

Elle sauta ensuite dans le Hummer avant de refermer la portière. Ryan se décolla de la roue de son véhicule avant qu’Alex ne parte en trombe.

Mon père se laissa glisser sur le côté, tendit le bras et parvint à éliminer une autre racaille possédée. Avant qu’il ne tire à nouveau, l’un d’eux arriva à sa hauteur et lui envoya un coup de pied magistral dans le ventre. Le maléfice avait de toute évidence décuplé leur force. Le corps de Ryan voltigea contre la façade du gymnase, le percuta, retomba inanimé sur le sol goudronné et mourut après quelques secondes, le thorax écrasé par le coup.

Les trois autres voyous sortirent à leur tour du dojo et, tous les quatre, aperçurent Romane et son ami s’éloigner dans l’imposant véhicule. Les vagabonds se précipitèrent alors vers leurs motos, les enfourchèrent et partirent à leur poursuite pour terminer le travail.

Après leur départ, tout redevint soudainement calme, mais la mort régnait, sur le parking et dans le gymnase ! Les quelques survivants parvenus à se cacher contactèrent les autorités avant de venir en aide aux victimes de ce massacre.

C’était la première fois que Romane perdait quelqu’un. Elle essayait de ne pas pleurer, mais en vain. Prise d’angoisses, elle ne cessait de répéter à son ami qu’elle était responsable de la mort de son grand-père et qu’elle venait de tout perdre subitement. Alex tenta de la rassurer :

« Calme-toi Romane ! Je suis avec toi ! Je ne t’abandonnerai pas ! Nous allons nous réfugier chez ta mère. Elle saura quoi faire ! »

Mais lorsqu’il jeta un coup d’œil dans son rétroviseur, il aperçut les quatre motards, envoûtés, gagner du terrain. Alex prévint alors son amie que le danger n’était pas encore écarté. Celle-ci se tourna sur son siège, sa tristesse se changea en colère. Elle se saisit d’une lance métallique dépliable ainsi que d’une corde de piano qu’elle accrocha à son ceinturon. Son regard avait changé. Romane criait vengeance !

La racaille en tête de groupe décida de doubler le Hummer, mais un véhicule arrivant en face de lui l’en empêcha. Celui-ci se rabattit au dernier moment pour ne pas le heurter. Ma fille cria à son ami de freiner, ce qu’il fit sans la moindre hésitation. Le motard percuta de plein fouet l’arrière de leur voiture avant de tomber en roulé-boulé sur le goudron juste devant elle. Le Hummer repartit, le motard passa sous les roues après que sa tête eut explosé contre le pare-chocs dans une giclée de sang et de cervelle.

Les trois autres loubards réussirent à esquiver la moto accidentée, à doubler leurs adversaires et à tirer sur eux sans retenue. Fort heureusement, la voiture de Ryan était à l’épreuve des balles. Alex accéléra subitement et heurta l’une des motos devant lui. Pris de court, son conducteur perdit le contrôle et n’eut d’autre choix que de sauter sur le capot du Hummer avant que son engin ne passe sous les roues à son tour.

À ce moment précis, Romane distingua la marque tatouée sur l’avant-bras de son ennemi. Sans qu’elle le sache, ce symbole était identique à celui que portaient les prisonniers qui avaient attaqué Anthony un peu plus tôt dans la journée. Un tatouage de crapule sans doute ! pensa-t-elle sans y faire plus attention.

Alex baissa sa vitre et pulvérisa la tête du motard à coup de fusil à pompe. Il donna ensuite un coup de volant pour que le reste du corps glisse sur la carrosserie et tombe sur la route afin de s’en débarrasser.

« Il n’en reste plus que deux ! On va s’en sortir ! » cria le jeune homme à son amie pour la rassurer.

L’un des deux derniers voyous s’approcha par le côté gauche et tira à travers la vitre baissée. Alex ne s’en aperçut que trop tard. Juste avant qu’il ne percute violemment la moto, une balle l’atteignit au bras droit, du sang éclaboussa l’intérieur du pare-brise.

Alex grimaça sur le coup, mais s’efforça ensuite de ne plus s’en soucier jusqu’à la fin de l’affrontement. Il prévint son amie que leur second adversaire allait imiter le premier. Au moment même où celui-ci arriva à leur niveau, Romane sauta sur la banquette arrière, ouvrit la portière, déplia sa lance et l’envoya dans le dos du motard. L’arme blanche lui traversa le corps de part en part et partit se coincer dans les rayons de la roue avant de sa moto. Celle-ci se bloqua net, le corps du voyou s’ouvrit en deux, de l’abdomen jusqu’à la tête avant de tomber sur le bitume et s’éparpillant dans un mélange de pièces mécaniques et d’organes humains.

Le dernier loubard se voyant en mauvaise posture décida de prendre la fuite et mit la poignée dans l’angle pour tenter de les semer. Romane, tenant à venger son grand-père, demanda à son ami de ne pas le laisser filer. Le fuyard prit une rue au hasard. Ma fille avertit Alex avec malice :

« Cette rue est barrée depuis la DernièreGuerre ! Il ne pourra pas passer. S’il veut réellement s’enfuir, il va devoir faire demi-tour. Je veux que tu le laisses passer ! Quand il croira qu’il nous a échappé, je serai là ! »

Alex acquiesça, ralentit pour que ma fille descende avant de repartir aussitôt. Effectivement piégée par l’effondrement d’une maison sur la route, la moto fit rapidement demi-tour et se mit face au Hummer. Le deux roues l’esquiva avec habileté. Le voyou se crut effectivement sorti d’affaire, regardant le Hummer derrière lui en souriant. Mais lorsqu’il posa à nouveau les yeux sur la route, il fut surpris de trouver Romane face à lui et n’eut pas le temps de réagir. Ma fille saisit sa corde de piano d’une main, laissant l’autre côté accroché à son ceinturon. Elle bondit au-dessus de la moto avant de retomber. Le fil de métal se rembobina dans son boîtier en laissant tomber quelques gouttes de sang sur le goudron. La moto continua sa route. Après quelques secondes, une ligne de sang apparut sur ses deux biceps et ses bras se séparèrent de son corps. Le bras gauche tomba par terre et le droit resta accroché à la poignée de gaz. Le reste du corps, de la hanche droite jusqu’au pectoral gauche, se décolla lui aussi, tombant le long de la route près d’un tas d’ordures. Ses jambes toujours sur la moto firent quelques mètres avant de s’encastrer dans une poubelle. Alex fit demi-tour entre temps, s’arrêta à la hauteur de son amie qui remonta à bord en lui disant avec une profonde peine :

« Je dois me rendre chez ma mère, j’ai peur qu’elle ne soit, elle aussi, en danger ! Je prie pour arriver avant qu’il ne lui arrive malheur…

— Plus rien ne me retient ici ! Je t’accompagne ! »

Alex entra l’adresse d’Amandine dans le GPS du Hummer puis ils prirent l’itinéraire en silence.

La majeure partie des routes ayant été décimées par la Dernière Guerre, Alex décida de prendre la voie rapide qui avait été restaurée depuis.

En chemin, il constata que Romane ne faisait que regarder le paysage, pensive, sans le moindre mot. Ses pensées étaient tournées vers son grand-père qui avait péri en essayant de la protéger. Alex tenta de la consoler en lui prenant la main. De par ce geste, ma fille comprit alors qu’elle n’était pas seule à porter ce fardeau.

Ainsi, au même titre qu’Anthony, Romane et son ami avaient pris la direction du manoir d’Amandine.

Chapitre 4

Fin de partie

Cela faisait déjà cinq ans que Carolane avait intégré le programme spécial des Death's Guardians. Elle suivait mes pas, sans même le savoir, pour l’immense fierté du Colonel.

Ce n’était que pour se remémorer certains souvenirs ou comparer mes performances au sein du programme, mais le militaire ne pouvait s’empêcher de lui parler de moi. Il fut toutefois recadré par le gouvernement à maintes reprises mais sans succès. Ma cadette était donc la seule à me connaître un peu.

Elle savait que je faisais autrefois partie des Death's Guardians et que mon sacrifice avait mis un terme à la DernièreGuerre. À la grande surprise du Colonel, Carolane n’aimait pas quand il parlait de moi. Toujours ces comparaisons ! se disait-elle à chaque fois.