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Âme en quête de réconfort, Mélanie bascule dans un tourbillon de découvertes troublantes lorsqu’elle rencontre Léon, un vieil homme hospitalisé, et tombe sur son journal d’adolescent de l’après-guerre. Une mission vitale s’impose alors à elle…
À PROPOS DE L'AUTEUR
Avec un long parcours enrichissant dans le secteur médico-social,
Nicolas Richit révèle enfin ses histoires bien gardées. Ces récits, mélange d’expériences et d’une imagination débordante, sont prêts à captiver l’esprit de chaque lecteur.
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Seitenzahl: 96
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Nicolas Richit
Libellule
Roman
© Lys Bleu Éditions – Nicolas Richit
ISBN : 979-10-422-2020-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Mélanie regarde étonnée, avec un léger dégoût, ce morceau de viande bien rouge qui semble encore animé… Étonnée que ses parents puissent, sans se trouver dans les mêmes émotions qu’elle, s’acharner à ce point sur cette matière qui provient d’un être vivant… Mélanie a 16 ans et ses parents tiennent une boucherie-charcuterie. Mélanie est leur seule fille, et enfant, et par conséquent celle qui, pour eux, reprendra le couteau pour ne pas dire le flambeau. Elle pense qu’elle n’aura pas le choix, que « c’est la vie et que c’est comme ça ma chérie » comme dit son père. Alors elle se met à imaginer des histoires, qui la font s’évader de cet absurde quotidien qui l’attend. Des histoires qui finissent toujours bien et dans lesquelles les protagonistes, à la recherche d’un idéal, s’en trouvent heureux. Son imagination est fertile, mais ses illusions cassées par ses parents qui n’ont de cesse de lui répéter d’arrêter de rêver…
Et puis les années passent, mais Mélanie ne s’est jamais faite à l’idée de devoir reprendre l’affaire familiale parce que tout simplement elle n’a pas l’âme d’une commerçante et encore moins d’une bouchère ! Elle a vingt ans et la relation qu’elle a avec ses parents est conflictuelle au point qu’elle a décidé de mettre entre parenthèses cette vie de « famille » ; ses parents ne la comprennent pas et Mélanie est complètement perdue. Elle sait qu’elle n’est pas faite pour ça ; ils sont, pour des raisons pratiques et surtout traditionnelles, persuadés du contraire. Mélanie quitte ainsi le foyer pour essayer de trouver son propre chemin. Mais à vingt ans, avec peu de bagages si ce n’est ce martèlement parental de faire croire qu’elle ne saura rien faire d’autre de bien, Mélanie ne sait pas vraiment quoi entreprendre dans sa vie. Alors elle continue à rêver d’histoires qui l’évadent et la sauvent de ce quotidien.
Mélanie s’est trouvée un sordide, mais suffisant, petit appartement de type studio qu’elle a pu obtenir grâce à quelques missions intérim effectuées. En effet, malgré une place plus qu’honorable dans la Boucherie, qu’elle a préféré décliner, Mélanie est allée s’inscrire comme jeune demandeuse d’emploi chez qui vous savez. Vu son peu d’expérience professionnelle, peu de postes lui sont proposés, voire accessibles, mais elle ne lâche rien par peur de devoir finalement retourner chez ses parents et ainsi, par dépit, reprendre le métier de ces derniers. Jusqu’à présent, on ne lui a proposé que des missions dans le secteur du nettoyage industriel, missions peu rémunérées et qui finalement ne demandent que de la ponctualité et de la rigueur, mais pas d’expérience au préalable. Petit à petit, Mélanie s’aigrit, coincée entre une vie professionnelle qu’elle ignore et un studio miteux.
Un jour, elle se voit lui proposer une mission de quelques semaines au sein d’un EHPAD pour un remplacement d’agent de service. Mélanie hésite. Après mûre réflexion, et une check-list du réfrigérateur, elle se dit qu’elle n’a pas trop le choix. Mais cette hésitation est due au fait qu’après ne pas se considérer comme bouchère ou éventuellement commerçante, Mélanie ne considère pas non plus les métiers de soignants en structure comme valorisants pour elle. Il semblerait qu’elle fasse des raccourcis assez carnassiers entre ces métiers et celui qui lui était destiné… une boucherie ! Elle accepte donc la mission en se permettant une condition ultime, celle de n’avoir aucun contact tactile avec les « vieillards » en prétextant n’avoir absolument aucune notion de soins, ce qui n’est effectivement pas faux. Ainsi sa requête est validée, car faute de manque cruel et récurrent de personnel dans ces structures, Mélanie n’effectuera que les tâches ménagères imposées par sa fiche de poste.
Arrivée devant la structure, Mélanie soupire. Elle va découvrir un monde jusque-là méconnu pour elle, mais surtout avec beaucoup d’a priori. Elle n’a aucune expérience dans le domaine du soin et c’est une chose paradoxalement qui la rassure, car elle sait que ses tâches ne se résumeront qu’à l’entretien des locaux. Elle a vaguement entendu, un peu comme tout un chacun, que ce genre d’établissement éprouvait un manque de moyen humain. Mais la check-list du réfrigérateur lui revient à l’esprit et c’est d’un pas résigné qu’elle franchit le seuil de la porte de l’EHPAD. Sur place, et une fois accueillie presque comme un messie, mais surtout avec les formalités d’usage, elle va se rendre compte objectivement de ce manque cruel de personnel et, indéniablement, des dérives qu’il en coûte : les « vieillards » attendent, dans la grande salle à manger, dans les chambres, parfois en gémissant ; les soignantes, le peu qu’il y a, semblent courir de chambre en chambre, de tâche en tâche, avec dans leurs voix une tonalité aiguë et désabusée peignant leurs états de fatigabilité…
Mélanie n’est pas très à l’aise, mais elle pousse son petit chariot complet qui lui permettra d’effectuer le travail qui lui est demandé. Elle le pousse et s’arrête parfois devant une chambre. Elle est aussi gênée que lorsqu’elle regardait ses parents préparer un morceau de viande ! Heureusement pour elle, elle n’a que le balai, les gazes, les franges et lavettes imprégnées de produit à manipuler. Et la mission ne durera que quelques semaines.
Mais assez rapidement, Mélanie va se trouver bousculée par des cris de « vieillard » ; des cris provenant toujours de la même chambre. Dans cette chambre, elle y découvre un très vieil homme, recroquevillé dans son lit. Lorsqu’une soignante entre dans sa chambre pour s’occuper de lui ou pour l’aider à s’alimenter, elle ferme la porte et Mélanie ne sait pas ce qu’il s’y passe derrière. Elle est juste effrayée par les cris qu’elle entend à ces moments-là. Des instants qui lui semblent une éternité. Interpellée par cette situation, Mélanie écoute d’une oreille discrète ce qu’en disent les soignantes. Elle a compris que ce « vieillard » s’oppose à tout soin de « nursing », refusant de s’alimenter et ne s’exprimant que par des cris. Est-ce de la douleur ? De la folie ? De la méchanceté ? Quoiqu’il en soit, Mélanie est le témoin impuissant de la lente agonie de ces pauvres soignantes, manquant de temps, forçant certains soins, n’ayant plus l’énergie de comprendre. Comprendre pourquoi cette violence à leur égard, comprendre cette opposition, comprendre ces cris.
Les jours passent et malheureusement se ressemblent. Mélanie reste encore très touchée par l’ambiance qui règne dans cette maison de « vieillards », mais elle sait que pour elle ça ne durera pas longtemps et que cette mission fera partie des mauvais souvenirs, et peut-être d’autres à venir, de sa vie professionnelle. Le sourire, elle le retrouve auprès de certaines et certains collègues avec qui elle commence gentiment à bavarder, histoire d’échanger un peu sur les vies, pas toujours très roses, de chacun, mais qui permet de se sentir un tantinet moins seul à supporter cette lourdeur. Au milieu de ce petit monde qui court, il y a un jeune homme qui donne plutôt l’impression de brasser du vent. Il fait partie de l’équipe « technique et entretien ». Enzo a 22 ans. Mélanie l’avait un peu repéré au début, mais elle va s’apercevoir qu’Enzo est un jeune homme maladroit. Pas dans son travail, tant est qu’il décide de s’y mettre sérieusement, mais plutôt auprès des filles. Il a une fâcheuse tendance à se montrer machiste et quelque peu désobligeant. Ou alors il s’y prend absolument très mal pour tenter une approche. Bref, Enzo est un dragueur sans romantisme. Du moins, c’est ce qu’il laisse transparaître.
Les jours se suivent… mais ne se ressemblent finalement pas réellement. Mélanie va en avoir la preuve. C’est un jour de « grand ménage » et Mélanie est à mille lieues de découvrir ce qui pourrait éclairer sa vie. Cette fois-ci, elle n’a pas trop le choix. Un jour de grand ménage, ça veut bien dire ce que ça veut dire : il n’y aura pas que les parties communes à nettoyer… mais il faut, au moins deux à trois fois dans l’année, ce qui n’est point un luxe, s’attarder aux chambres ! Mélanie devra franchir cette frontière imaginaire qu’elle s’était inventée : s’approcher davantage des « vieillards ». Il s’agit surtout de dépoussiérer, trier et désinfecter leurs placards qui se trouvent en entrée de chambre et faire la même chose au niveau de leurs sanitaires respectifs. Mélanie bougonne discrètement et c’est sans gaieté de cœur qu’elle s’attaque à cet ouvrage.
Sa plus grande crainte est de devoir s’occuper de la chambre de ce vieil homme hurlant, qu’elle considérerait presque comme un animal. Elle avance donc de chambre en chambre. Finalement, elle s’apaise doucement puisque très souvent certaines chambres sont vides de résident, certainement en train de patienter en salle à manger (Mélanie dirait plutôt qu’ils attendent que la mort vienne les cueillir…) ou en activité auprès de l’équipe d’animation. Mais elles ne sont pas toutes vides. Voilà, on y est. Mélanie se trouve devant la chambre tant redoutée. À travers la porte elle peut entendre quelques gémissements plaintifs. Devoir toquer à cette porte lui glace le sang. Elle pourrait directement passer à la chambre suivante, mais elle n’est pas complètement seule dans le couloir. D’un coup, elle se persuade d’accomplir cette tâche en espérant s’y activer très rapidement pour ne pas avoir le temps de réaliser quelle chambre est-ce. Ainsi elle toque et entre sans dire un mot. Une odeur particulière la stoppe dans son élan. Une odeur même quelque peu désagréable, parce qu’inhabituelle pour Mélanie. Est-ce que la mort a cette odeur-là, se demande-t-elle ? Elle se ressaisit, évite de regarder en direction du lit. Elle ne devine qu’une espèce de masse enroulée dans des draps, qui semble quelque peu bouger. Mais à son étonnement, plus de cris ni de gémissements. Elle s’attarde donc en premier au placard qui se trouve à l’entrée. Qu’elle ne fut pas sa surprise, une fois le placard ouvert, de s’apercevoir qu’il n’y a vraiment pas grand-chose. Donc un tri et un nettoyage s’annoncent rapides ! Mélanie se sentirait presque soulagée. Elle commence par enlever le peu d’habits qu’il reste : deux pantalons, un pyjama, trois maillots de corps et trois paires de chaussettes. Et toute cette petite vêture semble complètement aussi vieille que son propriétaire, délavée, usée… Puis Mélanie s’empare d’une petite valise qui a bien vécu, se trouvant seule sur l’étagère du haut. Mais en la déplaçant, elle a l’impression qu’il y a quelque chose à l’intérieur. Sa curiosité l’empare et Mélanie ouvre la valisette. Bizarrement il n’y a rien, mais en la secouant un peu elle se rend compte qu’il doit y avoir un objet, peut-être un portefeuille, des photos ou un livre, caché dans la doublure de la valise. Mélanie inspire un grand coup et sans vraiment comprendre pourquoi glisse sa main dans une fente longeant la doublure et y sort un carnet gris qui semble bien usé aussi celui-ci. S’agirait-il d’un carnet de bord ? D’un journal intime ? Sa curiosité est encore plus forte d’autant qu’un silence presque apaisant lui fait oublier ou elle se trouve, le vieil homme étant étrangement silencieux. N’y tenant plus, Mélanie ouvre le carnet…