Qu'est-ce que les Lumières ? d'Emmanuel Kant - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Qu'est-ce que les Lumières ? d'Emmanuel Kant E-Book

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Publié en 1784 dans la Berlinische Monatsschrift, soit trois ans après la Critique de la raison pure (1781) et quatre ans avant la Critique de la raison pratique (1788), Qu’est-ce que les Lumières ? peut être considéré comme le bouquet du feu d’artifice de cette période qualifiée d’ « Aufklärung » en Allemagne et de « philosophie des Lumières » en France. Emmanuel Kant (1724-1804) y établit le bilan d’un siècle d’émancipation, bilan qu’on aurait pu attendre de l’un des grands philosophes français de l’époque mais qui nous est venu de Prusse.


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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.

ISBN : 9782341012959

© Encyclopædia Universalis France, 2023. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Dirk Ercken/ Shutterstock

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Bienvenue dans la collection Les Fiches de lecture d’Encyclopædia Universalis.

Ce volume présente des notices sur des œuvres clés de la littérature ou de la pensée autour d’un thème, ici Qu'est-ce que les Lumières ?, Emmanuel Kant (Les Fiches de lecture d'Universalis).

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QU’EST-CE QUE LES LUMIÈRES ?, Emmanuel Kant (Fiche de lecture)

Publié en 1784 dans la BerlinischeMonatsschrift, soit trois ans après la Critique de la raison pure (1781) et quatre ans avant la Critique de la raison pratique (1788), Qu’est-ce que les Lumières ? peut être considéré comme le bouquet du feu d’artifice de cette période qualifiée d’ « Aufklärung » en Allemagne et de « philosophie des Lumières » en France. Emmanuel Kant (1724-1804) y établit le bilan d’un siècle d’émancipation, bilan qu’on aurait pu attendre de l’un des grands philosophes français de l’époque mais qui nous est venu de Prusse.

Dans cet opuscule, Kant pose le problème de la domination intellectuelle d’une élite sur le commun des mortels, analyse le rapport dominant-dominé sur le plan du jugement et démontre la capacité universelle de rechercher par soi-même la vérité.

Au siècle précédent, René Descartes, en affirmant, dès la première phrase de son Discours de la méthode (1637), que « le bon sens est la chose du monde la mieux partagée », avait ouvert la voie à de profondes évolutions en rejetant l’idée qu’une élite d’individus compétents puisse imposer ses opinions à une masse ignorante.

Tout le XVIIIe siècle a décliné de mille manières cette thèse révolutionnaire, préparant les bouleversements politiques de la fin du siècle. Le texte de Kant y apporte la touche finale : « Sapere aude ! » (« Aie le courage de te servir de ton propre entendement ! »), voilà la devise des Lumières.

1. Les prédécesseurs de Kant

Chaque fois qu’ils ont abordé la question de la domination, les philosophes des siècles précédents ont adopté soit le point de vue du dominant, soit celui du dominé. Tantôt ils se sont apitoyés sur le sort des victimes de manipulateurs habiles, tantôt ils ont défendu l’idée que la masse incapable de juger devait suivre aveuglément les directives d’une élite éclairée. Deux philosophes ont fait exception : Platon (428 env.-env. 347 av. J.C.) et Étienne de La Boétie (1530-1563).

Platon, au livre VI de sa République, utilise une métaphore qui sera reprise par bon nombre de ses successeurs : il compare la foule à un « gros animal », et le despote à un dompteur. Mais, du même coup, le mystère s’amplifie : pour diriger l’animal, le dompteur doit apprendre à le connaître, à se plier à ses goûts et à ses émotions, et il en va de même pour le chef manipulateur. S’il en est ainsi, qui manipule qui ? Qui domine, et qui est dominé ? Et si c’était en définitive le dompteur qui était dompté ?

Au XVIe siècle, dans un ouvrage énigmatique et inclassable, le Discours de la servitude volontaire, Étienne de La Boétie refuse à son tour de rejeter toute la faute sur le dominant. Comment peut-on admettre aussi aisément que la masse des hommes soit réduite en esclavage par une infime minorité, voire par un seul homme – le tyran – supposé s’imposer à tous ? En vérité, « c’est le peuple qui s’assujettit et se coupe la gorge ».

2. Sortir de l’état de minorité

« Qu’est-ce que les Lumières ? La sortie de l’homme de sa Minorité, dont il est lui-même responsable [...] puisque la cause ne réside pas dans un défaut de l’entendement ». Kant rejoint Descartes dans l’idée que les tutelles que les individus « mineurs » acceptent ne s’expliquent nullement par une incapacité à bien juger. Se dispenser d’un travail qui peut s’avérer long et pénible est une tentation chez tout homme qui économise ses forces et surtout son temps.

« Il est si aisé d’être mineur ! », remarque Kant, dans la mesure où, pour être éclairé, le jugement doit reposer sur des connaissances bien assimilées. Inégaux sur le plan du savoir, nous avons la même capacité de distinguer le vrai du faux lorsque nous nous trouvons en présence des éléments sur lesquels appuyer notre jugement. Aucune culture encyclopédique n’est nécessaire, mais seulement la recherche d’informations, qu’il suffit de se donner la peine de rassembler.

Encore faut-il que cette information soit disponible, ce qui suppose la liberté de la presse et de l’édition. À la question : « Vivons-nous actuellement dans un siècle éclairé ? », Kant répond : « Non, mais bien dans un siècle en marche vers les lumières ». Le pouvoir politique continue à considérer comme sa chasse gardée un certain nombre de domaines, en particulier la religion. Mais Kant croit au progrès de la civilisation. En cette même année 1784, il publie Idée d’une histoire universelle au point de vue cosmopolitique, essai que les spécialistes considèrent comme étant la véritable source de la philosophie de l’histoire de Hegel. C’est en marchant qu’on apprend à marcher, répète Kant, et les peuples européens sont en marche vers la liberté.

3. Les raisons de la lâcheté

Mais les peuples ne pourront réellement progresser que s’ils parviennent à surmonter une lâcheté régissant encore trop souvent les comportements. « La paresse et la lâcheté sont les causes qui expliquent qu’un si grand nombre d’hommes [...] restent cependant volontiers, leur vie durant, mineurs ». Juger par soi-même, c’est devenir responsable des actes qui découleront logiquement de mon jugement. Tandis que si je prétends n’avoir agi qu’en fonction d’un verdict qui n’est pas le mien, je me décharge de ma responsabilité. Devient seul coupable celui qui a jugé à ma place, déclenchant des comportements qui devront lui être imputés. La période nazie nous fournit un exemple privilégié de cette lâcheté : les Allemands des années 1930 ont-ils été les pauvres marionnettes d’un redoutable manipulateur, ou doit-on les considérer comme « les bourreaux volontaires de Hitler », pour reprendre le titre de l’ouvrage de l’historien Daniel J. Goldhagen, publié en 1996 ?

N’y a-t-il pas cependant un risque d’anarchie si chacun se prétend en capacité de juger ? Non, répond Kant, en distinguant usage privé et usage public de la raison. Reprenant les arguments développés par Spinoza, qui défendait au chapitre XX de sonTraité théologico-politique la thèse selon laquelle un citoyen doit renoncer « au droit d’agir suivant son propre décret, non au droit de raisonner et de juger », Kant affirme qu’ « un officier doit obéir » à sa hiérarchie mais conserve la possibilité de présenter au pouvoir et au public lettré ses réserves sur les lois qu’il fait appliquer, et de suggérer les modifications que sa raison lui présente comme souhaitables.

Philippe GRANAROLO

KANT EMMANUEL (1724-1804)

Introduction

La meilleure image que l’on puisse proposer de la nouveauté que Kant introduit dans l’histoire de la pensée et qui le promeut au rang du petit nombre des très grands philosophes de tous les temps, c’est peut-être celle à laquelle il songea lui-même pour qualifier le changement de méthode dont il faisait l’essai en philosophie : celle de la révolution opérée par Copernic en astronomie lorsqu’il supposa que le centre immobile privilégié pour l’observateur pourrait ne plus être la Terre mais le Soleil. Car dans les deux cas on peut bien dire que la modeste hypothèse d’un changement de point de vue destiné à tirer la connaissance d’embarras et à procurer une conception plus satisfaisante des choses dans le domaine limité d’une activité particulière de la pensée s’est trouvée dépassée de très loin par le nombre et l’importance des conséquences qu’elle mit au jour, puisque c’est toute la façon de penser des hommes qui s’en trouva finalement elle-même changée.

Emmanuel Kant. Avec ses trois «Critiques» («Critique de la raison pure», 1781, «de la faculté de juger», 1788 et «de la raison pratique», 1790), Emmanuel Kant (1724-1804) fonde les conditions d'une connaissance et d'une morale universelles de possibles. Portrait d'Emmanuel Kant, vers 1790. (AKG-images)

Qu’une transformation aussi profonde ait été apportée par un penseur qui se sentait lui-même appartenir pleinement à son temps, à ce siècle des Lumières auxquelles il ne cessa de vouloir contribuer, peut s’expliquer par le fait qu’il le comprit radicalement comme « siècle de la Critique à laquelle il faut que tout