Rendez-vous dans 20 ans - Sylvie Valence - E-Book

Rendez-vous dans 20 ans E-Book

Sylvie Valence

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Beschreibung

Lorsqu'un secret bien gardé finit par bouleverser trois vies. Il y a dix-neuf ans, Morgane et Thomas se sont aimés avec la passion de leurs 20 ans, avant de se perdre de vue. Enceinte, Morgane a choisi de partir au Pérou chez son meilleur ami, pour élever seule son enfant. Thomas a vécu toutes ces années sans la moindre idée de l'existence de sa fille, en fondant une autre famille. Angèle, quant à elle, rêve depuis toujours de rencontrer son père biologique. Lorsque leurs chemins se croisent de nouveau dix-huit ans plus tard, au hasard d'un salon du livre parisien, c'est le destin de trois personnes qui est sur le point de changer. Mais Morgane laissera-t-elle une seconde chance à Thomas ?

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Seitenzahl: 127

Veröffentlichungsjahr: 2022

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Ähnliche


Rendez-vous

dans 20 ans

Sylvie Valence

romance

Chapitre Un

En cette année 2002, Morgane pouvait être fière de son parcours de vie personnelle et professionnelle. Elle était devenue un écrivain reconnu après avoir fait le tour de la planète avec une association humanitaire pour essayer de venir en aide aux populations les plus pauvres et, surtout, aux enfants dont elle avait observé, à la télévision, alors qu’elle n’était encore qu’adolescente, les visages et les corps décharnés par la malnutrition.

À quarante ans, elle se sentait bien dans sa peau de femme et de mère des deux adolescents qu’elle avait, pour la première, mise au monde dix-huit ans plus tôt et, pour le second, adopté au Pérou, ce pays où elle avait élu domicile seize ans auparavant. Dans ses premiers livres, elle avait choisi de raconter ce dont elle avait été témoin, pendant ses missions, puis elle s’était tournée vers la fiction. Ses lecteurs l’avaient suivie, sans hésitation, et elle aimait cela. Elle adorait écrire des histoires.

Elle avait l’impression d’avoir réussi sa vie. À vrai dire, il ne lui manquait plus qu’un père pour ses enfants qu’elle avait élevés seule.

Alors qu’elle n’était encore qu’au lycée, elle souhaitait devenir puéricultrice et partir dans les pays «sous-développés» (comme on disait alors), comme l’Afrique, pour venir en aide aux populations pauvres. Et, comme ses copines, elle avait aussi, bien sûr, envie de partager sa vie avec un homme et de fonder avec lui une famille unie. Après le bac, elle était donc entrée à l’école d’infirmières, avait réussi ses examens haut la main, puis s’était spécialisée dans la puériculture, tout en élevant sa fille.

C’est au collège qu’elle avait connu le père d’Angèle. Quatre ans plus tard, ils s’étaient retrouvés, mais leur relation n’avait pas duré et, juste après leur séparation, Morgane avait découvert qu’elle était enceinte. Elle avait alors décidé de garder l’enfant et de n’en rien dire à celui qui ne serait plus, désormais, que son ex-compagnon. Elle s’était résolue à vivre libre de toute attache sentimentale et, dès son diplôme de puéricultrice obtenu, Morgane s’était envolée pour le Pérou avec Angèle qui avait tout juste un an. Elle avait toujours été comme aimantée par ce pays lointain, riche de son passé inca. Pour elle, sur ce continent, tout suscitait le rêve : ses couleurs, ses habitants semblant encore vivre comme au temps de leurs célèbres et énigmatiques ancêtres, sa musique qui chantait les cimes des Andes ainsi que ses animaux, du condor au lama et, surtout, les mystères de l’origine de ces empereurs indiens qui avaient dominé le monde sud-américain pendant des siècles, avant que les Européens ne viennent détruire civilisation et sanctuaires.

Au Pérou, elle avait été accueillie, avec sa petite fille, par Juan, le correspondant avec lequel elle échangeait de nombreuses lettres depuis plus de cinq ans déjà. Il lui avait envoyé un nombre incalculable de cartes postales de son pays et appris quelques mots de langue indigène, le quechua. Lorsqu’on lui avait proposé cette opportunité de partir vivre là-bas, elle avait contacté Juan pour lui demander s’il les hébergerait, Angèle et elle. Sans hésiter une seconde le jeune homme avait immédiatement accepté.

Lorsqu’elles avaient débarqué à l’aéroport de Lima, Juan s’était contenté d’être là, heureux de découvrir Morgane autrement que par le truchement d’une feuille de papier glacé, et il avait littéralement craqué pour elles deux, dès cet instant. Mais il avait également immédiatement compris qu’une partie du cœur de Morgane était restée en France.

Le pays ressemblait en tout point aux cartes postales que Juan avait envoyées. Le jeune homme était d’une gentillesse et d’une serviabilité à toute épreuve, comme l’avait aussi laissé présager leur correspondance. Au Pérou, tout n’était que chaleur et couleur, des costumes des paysannes indiennes aux lamas en passant par les monuments imposants et coloniaux, les plats épicés, mais aussi la musique qui lui rappelait ses cours d’espagnol au collège et au lycée. En posant le pied sur le sol péruvien, la jeune femme avait eu cette étrange impression d’être chez elle et que, là, elle ne souffrirait plus d’aucune sorte de déconvenue.

Morgane et sa fille s’étaient installées chez Juan, dans une maison, petite mais chaleureuse, située au centre de la capitale. Elle aspirait à tout connaître de son nouveau pays d’adoption que Juan se fit une joie de lui faire découvrir. Il les escorta toutes les deux jusqu’aux sites les plus typiques comme Cuzco ou le Machu Picchu, la mystérieuse Nazca et les étranges dessins qui fascinent l’être humain depuis leur découverte inopinée. Comme elle s’y attendait, Morgane était complètement tombée sous le charme du pays des Incas, tout simplement, tout naturellement. Qui plus est, aux côtés de cet ami si fidèle, elle avait la délicieuse sensation de réaliser un rêve d’adolescente.

Après avoir profité d’une semaine de «vacances» avec Juan et Angèle, elle avait commencé son travail à l’hôpital de Lima, au sein de l’antenne péruvienne de «Médecins de la Terre», l’association dont elle faisait partie. Elle s’y occupait d’enfants des rues, abandonnés, ou tout simplement livrés à eux-mêmes du fait de leurs conditions de vie misérables. Sa tâche était souvent difficile, mais elle l’effectuait avec plaisir. Elle se sentait utile dans ce pays. Elle était puéricultrice, mais, ici, son rôle consistait également à prendre soin d’enfants plus âgés. Elle aimait son métier et, surtout, elle s’y sentait tout à fait à son aise. Parfois, elle repensait à Thomas, le père d’Angèle, avec qui elle aurait voulu partager ces instants, mais le temps faisant son ouvrage, elle ne doutait pas qu’elle finirait par l’oublier ou, du moins, par le ranger dans un coin perdu de son cœur.

Juan était là, à ses côtés, et même s’il n’était qu’un ami, il était toujours présent, lui, pour sa fille et pour elle.

Un matin, ils furent surpris d’entendre Angèle appeler Juan «papa». Ils se regardèrent, lui un brin gêné et elle, déjà en train d’essayer d’expliquer à sa fille, avec des mots adaptés, que Juan n’était pas son père, mais un ami. Cependant Angèle, qui vivait avec eux deux, avait continué à le considérer comme tel et à l’interpeller «papa» si bien que Morgane et Juan avaient renoncé à lui faire entendre raison. Ils avaient trop peur de la perturber et ils auraient bien le temps de lui reparler plus tard, quand elle serait en âge de comprendre.

Après avoir réfléchi et parce qu’elle avait réalisé qu’en cas de problème, Angèle pourrait se retrouver seule, Morgane avait demandé à Juan s’il accepterait de devenir le son parrain, ainsi que son cotuteur légal. Il avait donné son accord. Ainsi fut-il fait. Dès lors, Juan s’occupa d’Angèle comme si elle avait été sa propre fille. C’est seulement lorsqu’elle commença à poser des questions que Morgane lui parla de son père biologique, lui assurant qu’elle avait été conçue par amour et que son père était quelqu’un de bien. Angèle gardait d’ailleurs, sur sa table de chevet, un cadre contenant la photo que Morgane lui avait confiée en espérant qu’un jour elle pourrait enfin le voir «en vrai». À côté de ce portrait, elle avait également disposé une photo d’eux trois, image du nouveau foyer dans lequel elle grandissait sereinement.

Dans son pays d’adoption, Angèle n’avait pas tardé à se lier d’amitié avec les enfants dont sa mère s’occupait, mais aussi avec ceux qu’elle fréquentait à l’école française de Lima. Ses amis étaient fils de diplomates ou de coopérants, tandis que ceux que soignait sa mère étaient issus de la rue. Elle connaissait donc les deux côtés du miroir et se sentait aussi bien avec les uns qu’avec les autres.

En 1990, tandis que Juan leur avait fait découvrir l’Amérique centrale durant quinze jours de vacances «en famille», ils avaient fait la connaissance d’une jeune Française, prénommée Annabelle, venue rejoindre son amoureux coopérant au Nicaragua. Les deux jeunes femmes avaient tout de suite sympathisé et Annabelle avait conquis le cœur d’Angèle qu’elle avait tendance à gâter un peu trop n’ayant pas encore d’enfant elle-même.

C’est à cette époque qu’Angèle avait commencé à réclamer un frère à sa mère. Morgane était sceptique. Elle aussi avait envie d’agrandir sa famille et, du fait de leur relation particulière, Morgane avait un temps pensé à Juan pour devenir le père de ce second enfant. Puis, ne voulant pas lui imposer une paternité qui le lierait définitivement à elle, elle avait finalement songé à adopter. La procédure était alors bien moins compliquée qu’aujourd’hui et, après quelques entretiens avec des spécialistes exerçant à l’ambassade de France, Morgane avait obtenu l’autorisation tant espérée et s’était lancée dans l’aventure avec sa fille et Juan qui deviendrait, une fois de plus, parrain et cotuteur légal de ce second enfant. Sa situation professionnelle et sociale était stable, Juan était présent dans sa vie et dans celle de sa fille, les responsables de l’aide sociale à l’enfance de l’ambassade de France ne virent donc aucune raison de lui refuser son agrément. Vint ensuite le temps de contacter tous les orphelinats du pays et d’y envoyer sa candidature. Puis un matin de novembre 1991, Morgane reçut un appel de la directrice de l’orphelinat Santa Maria d’Ayacucho. Elle lui annonça qu’un petit garçon d’un an allait lui être confié. Morgane fut au comble de la joie…

— Angèle, ma chérie, tu vas avoir un petit frère!

— Quoi?

— L’orphelinat a appelé, ils ont un petit garçon pour nous!

— Ouiiiiiiiiii! Super! Maman, il faut appeler Juan!

— Oui, ma puce, on y va. Viens!

Elles s’étaient habillées pour aller chercher Juan qui, en les voyant débouler chez lui, avait compris qu’il s’était passé quelque chose :

— Holà, les filles! Alors, quoi de neuf?

— Juan, je vais avoir un petit frère!

— Comment ça, un petit frère?

— La directrice de Santa Maria a appelé, ils ont un petit garçon d’un an pour nous. Ça y est, la famille s’agrandit enfin!

— Morgane! C’est génial! Alors, je vais avoir un nouveau filleul?

— Oui, c’est super, non?

Il se rapprocha de Morgane et Angèle et les prit dans ses bras.

— Juan, tu sais quoi? J’ai l’impression de vivre un rêve.

— Un rêve? Pourquoi dis-tu cela?

— Un petit garçon va entrer dans notre vie, Angèle va enfin avoir son petit frère et toi, tu pourras lui parler de son pays et de ses racines, c’est important pour moi, pour nous tous. Juan, je te remercie pour ton amitié et pour ta présence près d’Angèle. Tu sais que tu comptes beaucoup pour elle?

— Houlà, que de compliments! Tu vas me faire rougir! Ne t’inquiète pas pour le petit ni pour Angèle d’ailleurs, je serai toujours là pour eux, comme pour toi. Je t’aime beaucoup ma belle, tu es ma meilleure amie et tu pourras toujours compter sur moi.

— Merci, Juan. Donc, tu viendras avec nous à l’orphelinat lundi prochain pour faire connaissance avec Hugo?

— « Hugo »?

— Oui, je trouve ce prénom très joli et il a la particularité d’être bilingue. Ainsi, il lui permettra de consolider son appartenance à deux cultures : sud-américaine et européenne.

— Je trouve aussi que c’est un beau prénom. Eh oui, je viens avec vous pour faire sa connaissance.

À la minute où ils l’avaient aperçu, à l’orphelinat, tous trois étaient tombés sous le charme de ce petit garçon qui, même s’il avait été bien traité par le personnel de l’institution, restait de constitution un peu fragile. La première rencontre entre Hugo, Morgane, Juan et Angèle fut décisive et pleine d’émotions. C’était lui, le petit garçon qu’elle avait toujours espéré et attendu, et le frère qu’Angèle avait tant désiré. Au bout d’un mois, après les formalités d’usage et les examens médicaux réalisés par l’association, le jugement d’adoption fut enfin rendu. Morgane était très attachée au fait que Juan soit le cotuteur d’Hugo, car elle savait que, plus tard, il pourrait aider son fils à retrouver ses racines dans son pays d’origine et lui parler de celui-ci, même si elle choisissait un jour de retourner en France. Pour l’heure, l’ambassade de France légalisa l’adoption d’Hugo, le parrainage et la cotutelle de Juan, qui était fier des deux enfants qu’il considérait non seulement comme ses filleuls, mais, surtout, comme s’ils étaient les siens.

Lorsque Morgane leur avait appris la nouvelle, ses proches, bien qu’un peu inquiets, avaient accueilli l’idée et l’arrivée de ce nouveau venu comme il se devait, le principal pour eux étant qu’elle réussisse sa vie et se réalise comme elle le souhaitait…

Tous les ans, pour Noël, la petite famille avait pris l’habitude de rentrer en France pour passer du temps avec celle de Morgane. Chaque fois, elle avait l’impression de se retrouver en pays étranger tant les différences de mentalité avec le Pérou étaient importantes. Là-bas, les habitants prenaient la vie comme elle venait, tandis qu’en France, les gens étaient toujours pressés. Sa grande famille se réunissait à chacun de ses retours, ses enfants profitaient ainsi de tous et racontaient leur vie péruvienne. Puis ils repartaient, les bras chargés de cadeaux, après avoir fait une halte en Picardie où habitait Annabelle, la marraine d’Angèle et, désormais, la meilleure amie de Morgane. Dès qu’ils rentraient au pays, ils retrouvaient Juan toujours fidèle au rendez-vous.

Morgane, Angèle et Hugo continuèrent ainsi leur vie péruvienne, dans une petite maison proche de celle de Juan, pour qu’il garde le plus de contacts possibles avec les enfants. Angèle et Hugo effectuèrent leur scolarité à l’école puis au lycée français de Lima et devinrent des adolescents comme les autres, avec les mêmes préoccupations. Ils étaient bien dans leur peau et avaient su s’intégrer parfaitement dans ce pays qu’ils aimaient, aux côtés de leur mère et de Juan, leur ami de toujours et seule référence masculine.

Chapitre Deux

Au printemps 2002, Morgane était de retour en France. Elle était rentrée dans sa ville natale pour rejoindre sa grande famille, une sorte de tribu vue de l’extérieur, et pour signer quelques dédicaces au salon Livre Paris en compagnie de ses enfants.

Angèle avait maintenant dix-huit ans et Hugo douze. Sur leurs conseils, Morgane s’était également inscrite sur un site Internet pour essayer de retrouver ses amis de lycée. Cette idée la taraudait depuis quelque temps et elle s’en était ouverte à ses enfants.

— Maman, lui avait dit un soir Angèle, tu sais, tu devrais aller sur ce site d’anciens amis de lycée. Ça ne te ferait pas plaisir?

— Oui, peut-être, je vais y réfléchir.

— Tu retrouverais sans doute des personnes qui ont compté dans ta vie, c’est important, tu sais!

— À qui penses-tu exactement?

— Je ne sais pas… À mon père par exemple… Tu n’aimerais pas le revoir, savoir ce qu’il est devenu?