Storey - Keith Dixon - E-Book

Storey E-Book

Keith Dixon

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  • Herausgeber: Tektime
  • Kategorie: Krimi
  • Sprache: Französisch
  • Veröffentlichungsjahr: 2017
Beschreibung

« J’aime beaucoup Lee Child, Robert Crais, Tess Gerritson. Je pense que Keith Dixon fait partie des grands auteurs. » - Critique d’Amazon. « L’un des écrivains les plus agréable à lire dans le genre de nos jours. » - Critique d’Amazon. Lorsque Paul Storey revient de Londres, c’est pour échapper à un événement qui a ruiné sa vie professionnelle. Il se remet alors lentement à lier contact avec les gens… mais les gens qu’il finit par rencontrer sont voyous, des voleurs et des escrocs…
Lorsque Paul Storey revient de Londres, c’est pour échapper à un événement qui a ruiné sa vie professionnelle. Il se remet alors lentement à lier contact avec les gens… mais les gens qu’il finit par rencontrer sont des voyous, des voleurs et des escrocs. Exactement le genre de personnes à qui il voulait échapper. Pire encore, l’une d’entre elles est une femme escroc qu’il, pour une raison ou une autre, n’arrive pas à oublier et une femme dont l’habitude était de manipuler les hommes… Lorsqu’il fut impliqué dans une escroquerie en contrebande de vente d’antiquités de Syrie, il réalisa qu’il ne pouvait pas échapper à sa profession – un homme possédant des compétences spécialisées et le rendant encore plus fascinant aux yeux de ses nouveaux collègues. Essayer de trouver un but à sa vie tout en gardant la tête sur les épaules était son entière préoccupation, jusqu’à ce qu’un Syrien voulant récupérer l’une des antiquités volées se manifeste… et il n’avait pas l’intention de faire de prisonniers.

PUBLISHER: TEKTIME

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EPUB

Seitenzahl: 450

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Keith Dixon est né au Yorkshire et a grandi aux Midlands (les comtés du centre de l’Angleterre). Il a commencé à écrire à l’âge de 13 ans. Keith Dixon a rédigé différents genres littéraires : romans policiers, romans d’espionnage, œuvres de science-fiction et œuvres littéraires. Il est l’auteur de sept romans dans la série d’Enquêtes policières de Sam Dyke et deux autres œuvres non-policières, ainsi que l’auteur de deux recueilsd’articles de blogs sur l’art de l’écriture.

Mis à part l’écriture, ses hobbies sont la lecture, apprendre à jouer à la guitare et regarder des films et des séries télévisées. Son pays de résidence actuel est laFrance,ce qui est probablement mieux pour lui.

Pour plus d’informations sur l’auteur, veuillez le suivre sur Twitter @keithyd6, lire son blog à cwconfidential.blogspot.com ou communiquer avec lui sur facebook.com/SamDykeInvestigations

STOREY

Roman policier

KEITH DIXON

Traduit de l’anglais par

Lamia L. Ishak

Semiologic Ltd

Copyright Keith Dixon 2016

Première édition par Semiologic Ltd

Traduction française : Lamia L. Ishak

Keith Dixon a fait valoir son droit en vertu de la Loi sur le droit d’auteur, dessins, modèles et brevets de 1988, comme l’auteur de cet ouvrage.

Tous droits réservés

Cet ouvrage ne pourrait en tout ou partie être reproduit, stocké dans ou intégré à un système informatique, ou transmis sous quelque forme et par quelque moyen que ce soit (électronique, mécanique, photocopie, enregistrement ou autre) sans l’autorisation écrite préalable de l’auteur.

Toute ressemblance àdes personnes vivantes ou décédées est purement fortuite.

Pour plus d’informations, contactez : [email protected]

Photo de couverture © David Holt sous licence de Creative Commons License

Design de Keith Dixon

Rejoignez le groupe de lecture surwww.keithdixonnovels.comou le Blog www.cwconfidential.blogspot.compour recevoir gratuitementles deux premiers livres de lacollection Enquêtes policières de Sam Dyke !

To Elmore

Il migliorfabbro

CHAPITRE UN

Paul Storey se souvenait très bien du jour où il l’avait vue pour la troisième fois, lorsque tout avaitcommencé.

Elle ne l’avait ni regardé, ni parlé, du moins pas dans un premier temps. Mais il savait qu’elle l’avait remarqué,dès qu’elle avait franchi la porte. Même dans une salle bondée de monde, il y avait un je ne sais quoi dans sa façon de l’ignorer – une prise de conscience réfléchie.

Il se demandait s’il devait se lancer dans une introduction décontractée, s’asseoir en face d’elle à l’une des tables carrées noires et entamer une conversation. Vous venez ici tous les jours, n’est-ce pas ? … Non, trop flagrant. Ce n’était pas l’effet qu’il recherchait. Peut-être devrait-il ne rien dire, juste tirer une chaise, ouvrir un journal, lui faire un signe de tête et faire les mots croisés.

Dans ce cas, elle pourrait croire qu’il la traquait. Ce qui n’était pas du tout le cas. C’était une femme attirante et il venait juste de la remarquer…

Elle venait à Starbucks tous les matins à la même heure, juste avant le déjeuner. Des vêtements différents chaque jour mais élégants, une jupe bien taillée juste en dessous des genoux, une chemise moulantsa poitrine. Elle avait l’allure d’une femme d’affaires, mais qui voulait tout de même exhiber un peu de sensualité. Elle tenait une petite mallette à fermoirs dorés. Elle portait des talons un peu hauts, mais sans être vulgaire. Cheveux blonds biens peignés, raides, coincés derrière les oreilles… non, une oreille : l’oreille qu’elle utilisait pour parler au téléphone.

Elle arrivait toujours à trouver une table près de la fenêtre, donnant sur Broadgate,derrière la statue de Lady Godiva en face de Wagamama et du café à côté. Elle avait un petit ordinateur qu’elle ouvrait et sur lequel elle se mettait à tapoter, puis s’arrêtait et regardait par la fenêtre. Mordait sa lèvre inférieure, prenait une gorgée de son gobelet blanc Starbucks. Elle avait une bonne ossature, un grand front et des sourcils arqués qui semblaient avoir été dessinés au crayon, une touche de couleur sur les paupières. Un nez court et droit, mais des lèvres qui auraient pu être légèrement plus pulpeuses. Sa peau était impeccable.

Cette fois-ci, après s’être assise seulement cinq minutes, elle se releva etse mit à ranger ses affaires dans son sac – clés, portefeuille, paquet de Kleenex, la monnaie de sa boisson. Elle remit son ordinateur dans sa mallette. Elle avait l’air irritée, nerveuse.Elle se tintdebout et immobile à regarder par la fenêtre les gens qui passaient.

Puis elle se retourna et le regarda droit dans les yeux.

Elle se dirigea vers lui. Il resta figé. Il était coincé, assis sur l’une des chaises hautes près de l’autre fenêtre, à proximité d’un haut-parleur jouant du Dylan.

Elle s’arrêta à un mètre de lui.Une femme blonde et mince, aux yeux noirs, de taille moyenne, un peu plus jeune que lui, le visage un peu sévère.

- Si vous avez l’intention de me dévisager ainsi tous les jours, vous pourriez au moins vous présenter ! dit-elle.

- J’attendais que le bon momentse présente.

-Que voulez-vous ? 

- Vivre au jour le jour, sans histoires. C’est gentil de me le demander. 

- De moi. Que voulez-vous de moi ? 

Elle allait droit au but. Il aimait ça. C’était l’une des choses qu’il admirait chez les femmes de Londres – elles étaient pressées. Il devait soit suivre leur rythme ou ralentir. Ce n’était pas toujours à lui de réglerle pendule, essayer de déterminer la vitesse à laquelle il devait avancer. C’est agréable de trouver une personne comme ça, dans sa vieille ville natale.

- Je me demandais pourquoi vous veniez ici,dit-il.

-Et pourquoi pas ? 

- Vous portez une tenue de bureau. Vous êtes maquillée. Vous avez un minuscule petit ordinateur portable et un smartphone, et vous vous asseyez dans un coin pour jouer à la femme d’affaires. Je me demandais : les personnes à qui vous parlez au téléphone,savent-elles où vous vous trouvez ? Quelle est donc l’adresse professionnelleimprimée sur votre carte de visite ? Je n’arrive pas à m’empêcher deme poser toutes ces questions. 

- Êtes-vous flic ? 

- Ai-je l’air d’un flic ? 

Elle l’examina de haut en bas, comme si elle n’avait jamaissongé à l’examiner auparavant.

- Vous pourriez l’être, dit-elle. Derrière cette ombre louche. 

- Assurances. 

- Ventes ? 

-Évaluateur. Votre maison brûle ou vous avez une inondation, je vous dirai le montant des dédommagements que vous pourriez recevoir. 

- Mais vous êtes à Starbucks tous les jours. A regarder des femmes bizarres et à les effrayer. 

- Vous n’avez pas peur. 

- Non ? Comment le savez-vous ? Comment sauriez-vous ce que l’on ressent lorsqu’on va dans un lieu public et que l’on y trouve une personne qui vous fixe du regard tous les jours ? 

- Je ne pensais pas que c’était aussi flagrant. J’ai essayé d’être discret, dit Paul en haussant les épaules

-J’aimerai venir ici prendre mon café sans que l’on me dévisage. Cela vous pose-t-il un problème ?

Elle commençait à céder, la menace se dissipait de son regard. Il essaya de reconnaître son accent – un faible accent écossais, plus de la côte est que de la côte ouest. Il était si léger qu’il se demandait si elle ne l’avait pas perdu après avoir trop longtemps vécu dans le sud. C’était séduisant, ça vous donnait envie de l’écouter parler juste pour suivre les nuances.

Elle resserra son poing sur la poignée de la mallette et se dodelina. Elle portait son habituelle chemise blanche sous sa veste foncée, il crut apercevoir son soutien-gorge noir en dessous. Pas aussi sérieuse que ça, en fin de compte.

- Comment vous appelez-vous ? demanda-t-elle.

- Paul Storey. 

- Avec ou sans ‘e’ ? 

- Avec. Peu de gens se le demandent. Avez-vous l’intention de chercher mon nom sur Google ? 

- Devrais-je le faire ? 

-Moi, je ne le ferai pas. Comment vous appelez-vous ? 

-C’n’est pas vrai. Croyiez-vousqu’en me fixant assez longtemps, je finirai par vous donner un rendez-vous ? 

-Çam’a traversé l’esprit !

-Ça n’arrivera pas. 

- J’ai bien reçu le message,dit-il tout bas. Qu’est-ce qu’il y a ? De quoi avez-vous peur ? 

- De la vie, dit-elle, l’univers et tout. Presque tout. Et en réponse à votre première question, je viens ici pour travailler parce que le bruit m’aide à me concentrer. C’est trop calme au bureau. 

- Qu’est-ce que vous faites ?

- Journaliste, gazette locale. Bien que cela ne vous regarde pas. Satisfait ? 

-Bien sûr. Pourquoi ne le serais-je pas ? 

Elle semblait être sur le point d’ajouter une chose, lorsqu’elle se retourna et s’éloigna. Il regarda son profil,alors qu’elle ouvrait la porte et se dirigeait à gauche vers Primark. Il remarqua un sourire sur ses lèvres.Il tourna sa chaise pour se mettre face au mur et prit son café.

Il savait qu’elle n’était pas journaliste. Elle était trop bien habillée et plus nerveuse que tous les journalistes auxquels il avait eu affaire.

Mais cela ne le dérangeait pas. Après tout, lui non plus ne travaillait pas dans les assurances.

CHAPITRE DEUX

-M. Storey, si vous voulez mon avis professionnel, le prix que vous avez fixé est trop élevé pour la maison de votre père. Les logements dans la, euh, région de Coventry ont prisun sacré coup ces deux dernières années. Vous vous adressez à des acheteurs inexpérimentésqui essayentde démarrer dans la vie, et le prix que vous demandez les dissuadera même de jeter un coup d’œil à l’intérieur. 

-Dissuader ? Nom de Dieu, dit-il. Ce n’est pas mon problème, je crois ? C’est votre boulotde vendre. 

- Bien sûr…

- Je vais vous dire une chose… je baisserai le prix de 5% s’ils sont intéressés. 

- Les acheteurs sont beaucoup plus persévérants de nos jours. Il y a de grandes chances qu’ils offrent quinze à vingt pour cent en dessous du prix demandé, en particulier dans votre quartier. L’école locale n’a pas une grande réputation et, comme vous le savez, de nombreux crimes y ont été signalés au cours de la dernière année. Des faits mineurs, des choses insignifiantes, mais ça instaure une atmosphère, pour ainsi dire, malsaine. 

- Je comprends très bience que vous voulez dire, mais je m’en fous. Je dois vendre. 

L’agent immobilier s’appelait Jeremy Frost et Paul ne l’aimait pas. Il y avait trop de bluff dans son attitude :donnant l’impression d’être réaliste tout en agissant en tant qu’ami. Peut-être était-ce la façon dont ils travaillaient de nos jours.

Frost s’adossa sur sa luisante chaise en cuir, en lui décrivant ce qu’ils allaient faire :mettre des photos en ligne pour qu’elles soient diffusées par leurs différents partenaires nationaux, mettre des vidéos sur l’écran de leur vitrine d’agence, en ajoutant que s’il était prêt à investir un peu plus d’argent, ils pourraient même lui offrir un créneau de première sur le site Web, qui affichera une plus grande photo et une hausse de visionnement garantie de trente pour cent…

S’occuper de la vente de la maison de son père avait fait ressurgir ses instincts les plus bas. C’était la maison où il avait grandi et il était maintenant contraint de la vendre. C’était comme si on lui demandait de s’arracher un membrede son corpspour levendre aux enchères sur eBay.

- Avez-vous une date limite que vous devez respecter ? Avant de repartir à Londres ? dit Frost

- Je n’y retournerai pas. 

- Oh, mais je croyais que… 

- Vous ne vous débarrasserai pas de moi,sourit-il. Votre client favori. 

- Tous nos clients sont nos favoris,dit Frost en lui retournant son sourire. 

- Bien sûr. Mais certains le sont plus que d’autres, c’est ça ? Certains sont touchés par vos mains magiques et vendent plus vite,pendant que d’autres sont laissésà l’abandon. Je ne serai pas parmi ces derniers, n’est-ce pas, Jeremy ? 

L’expression de l’agent se figea.Il se mit à parler des questionnaires de satisfaction des clients, en ajoutant le fait que nombreux de leurs clients sont restés fidèles à leur agence pour plusieurs ventes…

Paul détacha son attentionet songea : Et lui ? Que s’est-il vendu ? Il savait que la situation le rongeait – rentrer tous les soirs dans une maison vide qui sentait encore le désodorisant que son père portait. Il avait décidé de vendre avant de se mettre à chercher quelque chose d’autre…peut-être, un bel appartement à proximité ducentre-ville ou quelque chose de plus luxueux en banlieues, Styvechale ou Cheylesmore. En attendant, il passait le moins de temps possible dans la maison.Prenait son petit-déjeuner, puis sortait pour la journée pour ne rentrer que le soir,se préparer quelque chose pour le dîner dans les cocottes et les casseroles que son père avait utilisé pendant trente ans. Se mettait ensuite au lit, dans la chambre où il avait dormi jusqu’au jour où il avait quitté la maison pour le lycée. Les souvenirs… le calme… faisaient partiedes excuses qu’il s’était données pour vendre : c’était un endroit provisoire pour retrouver un nouvel équilibre. Après tousle raffut qu’il avait vécudans le sud.

- Qu’en pensez-vous ? dit Frost

Paul n’avait presque rien entendu, mais il s’en foutait. Les détails ne l’intéressaient pas autant que Frost. Soit le stylede la maison et son prix plaisaient aux acheteurs, soitnon. Il y vivraaussi longtemps qu’il le faudra. Il était hors question qu’il reparte à Londres et reprenne son travail. Une fois que vous quittez la police, les ponts sont coupés. On tourne le dos et on cherche autre chose pour passer le temps.

- Faites ce que vous avez à faire. Vendez-la mais n’abandonnez pas,dit-il.

- Je n’abandonnerai pas. 

- Je sais que vous ne le feriez pas, Jeremy. Je compte sur vous pour ventre la maison.Vous devez savoir quefinancièrement, je n’en ai pas besoin. Vous me comprenez ? Je veux donc que vous m’obteniez la meilleure offre sans faire fuir les gens. Si je n’ai aucunaboutissement dans les trois prochaines semaines, je me mettrai à la recherched’un nouvel agent. Si je ne veux pas le faire, c’est uniquement pour éviter les prises de tête.Jene veux pas avoir àsubir à nouveau ces conversations bizarres. Vendez la maison pour un bon prix et vous aurez votre part. C’est très simple. Ne restezpas assis là à compterles mouches. Je sortirai de la maison,si vous venez pour une visite et je n’interviendrai pas. Mais il faudra que vous soyez au sommet de votre forme, vous et moi savons cela. 

Il remarqua que Frost était devenu pâle, sa fiertéécrasée.

-Rassurez-vous, je ne suis pas un mauvais gars. Je suis tout juste impatient de temps en temps. Aidez-moi et tout ira bien. D’accord ? dit Paul.

Il était debout à dévisager de haut le visage pétrifié de Frost. Il pensa que l’embarra et la peur qu’il percevait sur son visage reflétaient sûrement les siennes, bien qu’il ne l’ait jamais admis, ni à lui-même ni à personne d’autre.

-Vous avez mes numéros. N’hésitez pas à les utiliser,dit-il.

Il rentra en prenant des rues qui semblaient plus bondées que dans ses souvenirs, se gara enfin devant la maison de son père. Il y avait bien un garage à l’arrière, mais son accès était difficile, et d’ailleurs, il était rempli de choses que son père n’avait jamais voulu jeter : une vieille machine à laver Hotpoint, une table avec un pied cassé, un fauteuil. Il avait dit à son père de se débarrasser de tout cet encombrement, mais apparemment il n’avait jamais eu le temps de le faire. Trop occupé au pub ou dans son jardin potager,à faire pousser des choses qu’il n’a jamais mangées.

Alors qu’il chauffait un repas au micro-onde, le téléphone sonna.

- Milly. 

- Storey. Tu n’appelles pas, tu n’écris pas… 

- Lorsque ton père décède, tu as beaucoupde choses à faire. Papotern’en fait pas partie. 

- N’essayes pas de meculpabiliser. La dernière fois que je me sentieculpabilisée, était en 2004 lorsque j’ai heurté un vieil homme en déambulateur. 

- Tu conduisais ? 

-Non, je marchais trop vite sansregarder où j’allais. Mais ce n’est pas pour cela que je t’appelle. 

- Pourquoi tu appelles ? 

Elle laissa échapper un souffle rauque et Paul se l’imagina allongéesur son canapé dans l’appartement qu’elle louait à côté du sien à Battersea. Elle portait sûrement un juste-au-corps noir et transpirait de ses exercices quotidiens de danse en face de la télévision, ses trophées brillants entasséssur l’étagère au-dessus. Elle allait au bal chaque week-end danser avec un type de Fulham, et répétait ses foulées en solo du mieux qu’elle pouvait.

Storey était un plan pour elle. Ilsauraient pu avoir une liaison depuis longtemps, mais le moment était mal choisi.Ils avaient arrêté de se parler pendant trois mois,puis recommencèrent mais sur denouvellesbases. Il aimait le fait qu’elle acceptetoujours de lui parler, bien qu’il ne lui ait donné que deux jours de préavis avant son départ etqu’illui avait laissée la responsabilité de vendre ses meubles avant que le propriétaire ne s’en débarrasse. Elle était débrouillarde – elle assumera.

- Un type est venu te voir hier soir,dit-elle. Je l’ai entendu frapper à ta porte etje suis sortie. Il a dit qu’il travaillait avec toi et qu’il voulaitte parler. 

-À quoi ressemblait-il ? 

- Un peu plus grand que toi, cheveux blonds, grosses lèvres rouges écarlates.On aurait cru qu’il portait du rouge à lèvres.

- Rick. Je savais qu’il allait passer. 

- Merci de m’en avoir averti. 

- Que lui as-tu dis ? 

-Écoutes bien, c’est là que la conversation devient intéressante. Je suis une fille assez calme pour la plupart du temps, mais tu me fais vraiment chier, Storey. Je n’ai pas besoin que ton passé vienne se déverser devant ma porte. J’ai ma propre vie, tu sais ? Ça me vaque tu ais été obligé de partir pour t’occuper des funéraires et tout ce qui s’en suit, mais ce n’est pas une raison pour disparaitre. Je m’en fou de ton stress, je m’en fou de ton travail. Je m’en fou de tes étagères. Tu n’as pas le droit de me tout balancer sur le dos et de te casser aux Midlands. 

- Je suis tout-à-fait d’accord avec toi. J’ai mal agit. Alors qu’est-ce Rick t’as dit ? 

Il se l’imaginait fixer le plafond en essayant de se rappeler de ce que son conseiller lui avait dit : ne pas laisser la colère prendre le dessus. Elle était peut-être en train de compter jusqu’à dix ou de s’imaginait des anges. Il n’avait aucune idée de ce qu’elle faisait pour arriver à se calmer.

- Je lui ai dit que tu étais parti. Je ne lui ai pas dit où, ni pourquoi. J’ai fait semblant de ne pas le savoir. C’est ce que tu voulais, non ? dit-elle.

- Tu n’as pas mentionné mon père, j’espère ? Ni Coventry ? 

- J’ai suivi tes instructions à la lettre,dit-elle d’un ton familier lui donnant l’impression d’être calme mais un peu contrariée.

-Bref, qu’est-ce que Rick voulait? Je croyais que tu avais démissionné. 

- Je l’ai fait. Il pense sûrementarriver à me faire changer d’avis. Il s’est toujours un peu pris pour un psy. Il est convaincu de me connaître mieux que moi-même. 

- Merde, Storey, tu ne te connais pas du tout. Tuavances dans le noir. 

- Je m’incline devant ton grand savoir. 

-Repenses un peu à ton passé. Tu en apprendras beaucoup sur ta personne. 

- Je dois y aller. Mon micro-onde vient de bipper. 

- Ouais, c’est ça, ne laisse pas ton hamburger refroidir. 

- C’est une tourte à la viande. 

- Tu as déjà retrouvé tes origines. Je m’inquiète vraiment pour toi, sincèrement !

- Je t’appellerai quand je me sentirai mieux. 

- Comme si ça allait arriver un jour, dit-elle en raccrochant.

CHAPITRE TROIS

Avant d’entrer, Janice l’aperçut à travers la vitre. Le culot -prendre sa chaise préférée et se délasser dessus comme si c’était la sienne. Elle pensait qu’il était beau gosse du type basané, comme Pierce Brosnande parents grecs, une barbe mal rasée et des cheveux noirs secs. Les vêtements semblaient être faits pour lui, dévoilantune poitrine large et des hanches fines,la physionomie d’un homme quise maintenait en forme et non celui d’un garçon disproportionné. Il n’avait pas debourrelets, il était soigné et élégant, son regard était si vif qu’on avait l’impression que ses yeux vous transperçaient.

Ce pourrait être intéressant. Ce serait bien de connaître un homme qui prendrait le contrôle, pour une fois. Elle voyait en lui cette envie de dominer, d’imposer sa volonté. Elle aurait aimé vivre le défi, si elle n’avait pas eu d’autres plans en tête.

Le voilà donc,levant les yeux de son livre en la voyant et lui souriant, sachant qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’entrer dans le café. Son sourire ne frappe pas à l’œil, pensa-t-elle, c’était quelque chose qu’il faisait avec sa bouche, une impulsion sociale pour signaler que le jeu était sur le point de commencer.

- Je croyais que vous ne reviendriez plus à cause de ma grossièreté. J’avais cru avoir rompu le charme,dit-il.

Elle l’observa : il portaitune chemise à col ouvert laissant passer quelques poils bouclés sous une veste bleu marine sûrement de Next, achetée dans une boutique de charité.Il avait posé son livre ouvertà l’envers sur la table – Les raisins de la colère. Elle se demandait ce qu’il faisait pour gagner sa vie.Expert d’assurances :elle ne le croyait pas. Il agissait comme s’il était en mission, quelque chose qu’il allait fairedans sa vie, partir quelque part. Il n’était pas un gratte-papier, ni une personne qui étudiait des chiffres et faisait des calculs. Son regardrévélait que beaucoup de choses se passaient dans sa vie. Quelque chose d’effrayant, mais intrigant.

- Offrez-moi un café,dit-elle.

Il la fixa un instant, puis soupira et se leva pour se diriger vers le comptoir en lui faisant un signe désinvolte de la main avant de rejoindre la queue. Il ne lui avait même pas demandé ce qu’elle voulait. Probablement qu’il le savait déjà, depuis le temps qu’il la regardait !

Ne joues pas à ce jeu, se dit-elle. Ne sois pas intriguée.

Elle s’assit et sortit son ordinateur portable Microsoft Surface Pro 3, ouvrit le clavier velouté et glissa l’écran pour ouvrir son document en cours. Elle posa son téléphone Moto G Android sur la table. Elle aimait ses gadgets et connaissait leurs noms et toutes leurs caractéristiques. Pour une raison ou une autre, elle voulait convaincre ce Storey qu’elle était sincère, qu’elle était vraiment journaliste, que son travail était important. D’habitude lorsqu’elle était à Starbucks, elle écrivait son journal ou, de temps en temps, travaillait sur l’une de ses légendes. C’est le nom donné par les espions – les fausses identités qu’ils se créent pour eux-mêmes. Elle avait environ dix en cours et tous les jours elle essayait d’ajouter un nouveau détail, une nouvelle caractéristique ou un événement, à au moins deux des identités. Créant son personnage au fur et à mesure.

Avoir quelque chose à faire en attendant que David réponde.

Storey revint avec deux gobelets de café.

-Cela fait deux jours qu’on ne vous a pas vu, dit-elle.

- Je vous manque ? 

- Une personne que je ne connais pas ne peut pas me manquer. 

- Je vous dois mes excuses. 

Elle mit du sucre dans son café et fit une pause.

- Je ne vous traquais pas, dit-il. Je ne veux pas que vous pensiez cela. Il se trouvait que je me trouvais ici, lorsque vous êtes entrée. Je vous ai trouvé intéressante. Vous voyez ce que je veux dire ? Vous apercevez une personne et vous vous dites que vous seriez enchantée de la connaître, de découvrir sa façon de parler et ce qu’elle a à dire.

Il se rassit et l’observa comme s’il venait de lui faire une faveur.

-Ça vous dérange si je travaille ? Bien que j’aurai bien aimé bavarder,dit-elle calmement.

Elle aimait son sourire.Illui fit un signe de tête d’admiration, comme pour lui dire que le défiauquel ils concourraientvenait de passer à un plus haut niveau. Il savait qu’il devait redoubler d’efforts. Ne joues pas à ce jeu,ne sois pas intrigué.

En ouvrant son ordinateur portable, elle le tourna de sorte à ce qu’il ne voit pas l’écran. A l’exception du titre, le document était vierge – Etapes suivantes–elle fixa un moment la page blanche, tapota sur le clavierpour saisir son nom et rôle, uniquement pour avoir quelque chose à faire. Araminta Smith, journaliste. Elle avait entendu ce nom dans une pièce de théâtre qu’ils avaient joué à l’école et qu’elle avait toujours aimé. Araminta avait une assonance chic.

Storey ignora sa contestation, reprit son livre et continua à lire.

- C’est bien, Steinbeck ? demanda-t-ellecontrariée malgré elle.

Il baissa son livre.

- Il a gagné le Prix Nobel pour son plus mauvais roman. C’est pour vous dire à quel point il était bon. Avez-vous vu Les raisins de la colère, le film ?

- Peut-être. 

- Coriace pour un film de Hollywood, mais paisible comparé au livre. 

Elle fit un signe de la tête et se replongea dans son écran. Elle ne savait rien en littérature et paniquait à chaque fois qu’on lui parlait de livres. Elle avait peur qu’on lui pose des questions et qu’elle ne sache quoi répondre. Le maximum qu’elle arrivait à lire était un article de journal avant de s’endormir. Un jour, elle essayera de corriger ce défaut. Des cours en ligne feront sûrement l’affaire.

- Alors vous travaillez sur un article, c’est ça ? Ou est-ce un sujet sans intérêt – des naissances, des décès, des mariages ? dit-il pour saisirl’occasion qu’elle ait repris la conversation.

- Vous ne comprendrez pas,dit-elle.

… puis se demanda pourquoi avait-elle répondu ainsi. Sa rancune l’étonnait parfois. Il semblait être assez intelligent, pourquoi essayait-elle donc de le contrarier ?

- Je ne peux pas vous en dire beaucoup, car c’est en stade de développement. Je fais seulement des recherches, je parle aux gens, dit-elle en rabattant son écran.

- Donnez-moi un indice pour ne pas me vexer. 

- C’est sur la corruption dans le gouvernement local. Je ne peux pas vous en dire plus, lui répondit-elle après une hésitation.

- Y en en-t-il beaucoup à Coventry ? 

- Je ne le sais pas encore. C’est pour cela que je fais des recherches. 

- Vous connaissez des personnes à qui en parler, des personnes qui peuvent cracher le morceau ? C’est ça que vous faites ? 

Elle pensa que sa curiosité était réelle, mais il valait mieux ne pas le laisser aller trop loin. Elle ne savait rien de lui, ni de ce qu’il voulait. C’était bien qu’il l’ait trouvée intéressante pour parler, mais elle avait trop de choses à faire et beaucoup trop d’histoires avec lesquelles elle jonglait.

- Comme je vous l’ai dit, dit-elle, je ne peux pas en parler. Je ne vous le dirais pas, même si je le savais. Je ne vous connais pas.

- Que vouliez-vous dire quand vous m’aviez dit vouloir vivre au jour le jour ? continua-t-elle après une pause.

- Ne prenez pas ça au sérieux. Je suis comédien. Je dis beaucoup de choses que je ne pense pas,dit-il en haussant les épaules.

- Je ne vous crois pas. Je pense que vous êtes, au contraire, très sérieux,dit-elle énervée qu’il ne l’ait pas prise au sérieux et ajouta :Ok, vous commencez à m’énerver. Pouvez-vous me laisser tranquille maintenant ? 

- J’étais ici le premier,dit-il en refusant de céder.

- J’ai besoin de la table pour travailler. D’ailleurs, vous avez presque fini votre café. 

Son expression devint monotone, il repoussa sa chaise et se leva. Elle l’avait finalement convaincu.

- Je serai dans les parages, dit-il.

- Ne traînez pas pour moi. 

- Traîner ? 

- Attendre. Vous attarder. Rester là où on ne veut pas de vous. 

- Ah, oui, vous êtesrédactrice. J’ai compris. 

Il prit sa tasse de café, jeta un coup d’œil dans la salle et se dirigea vers un tabouret vide dans un coin près des toilettes. Elle remarqua à nouveau ses larges épaules et ses hanches fines, bonne forme physique. Peut-être qu’elle le draguerait un autre jour, lorsqu’elle sera moins occupée.

Ou peut-être bien que non.

Paul se demandait ce qu’il faisait avec cette femme. Elle lui avait posé une question simple il y a quelques jours et il avait laissé échapper ses pensées : que devait-il faire maintenant, reprendre tout depuis le départ ? Il n’était pas d’humeurà sortir avec qui que ce soit, mais elle lui a donné le béguin et il avait du mal à se retenir. Assise là, à tapoter sur le clavier età regarder par la fenêtre, refusant de regarder dans sa direction, les chevilles croisées au niveau des chevilles sous la table.

Il remarqua d’autres hommes qui la regardaient, également – surtout des étudiants qui avaient infesté l’endroit, assis enveloppés dans des doudounes, regardant fixement leurs téléphones ou parlant à d’autres habillés exactement pareil à l’exception d’écharpes de couleur différentes. Elle était différente. Elle se créait une sorte d’aura autour d’elle, une autosuffisance qu’une partie de lui-même voulait ébranler.

Elle était intéressante… et fausse.

Il n’arrivait pas à expliquer comment il le savait, mais il avait compris qu’elle prétendait être une personne qu’elle n’était pas. Elle vous regarde de côté, comme si elle ne voulait pas prendre le risque de vous regarder en face, comme si elle avait peur que son regard ne la trahisse. Lorsqu’elle parlait, elle vous attaquait en vous tenant à distance, empêchant tout espoir d’amitié.

Cependant, il l’a regardait fixement. Peut-être qu’elle avait vraiment peur de lui, de ce qu’il pouvait faire.

Réfléchis un peu, se dit-il. Qu’est-ce que tupeux faire pour effrayer les gens, à part leur faire sauter la cervelle ?

Voilà maintenant qu’un homme se dirige vers elle. Il l’avait remarquée dès son entrée par la porte vitrée. Un homme pas très grand, mais l’air imposant. Il portait une grosse barbe presque entièrement rousse, bien que ses cheveux couvrant entièrement ses oreillesfussent noirs. Il portait une veste en cuir noire coupée sport avec des boutons sur le devant et un jean bleu délavé. Sa veste révélait sa musculature.Il se déplaçait à un rythme révélant qu’il faisait des exercices, pensa Paul. La manière dont il regardait autour de lui en se dirigeant vers la table de la jeune femme, attira l’attention de Paul. Paul avait l’impression qu’il avait les nerfs en boule d’une personne sur ses gardesde peur d’être attaquée, sûrementune personne pas claire, préoccupée par son statut.

Il aimait croire qu’il avait du flair à analyser les personnes et leur comportement. Mais, pensa-t-il, qui ne croit pas cela ?

Arrivé à sa hauteur, elle s’arrêta de taper et leva la tête, se pencha en arrière l’air décontractée même si elle ne souriait pas. Elle le connaissait, mais semblait ne pas vouloir le voir.

Elle parla et l’homme à la veste en cuir se pencha sur la table, posant sespoints de chaque côté de son ordinateur portable. Elle allongea son bras et ferma le couvercle. Paul remarqua qu’elle fut offensée par la réponse de l’homme – elle se redressa sur sa chaise et décroisa ses chevilles en-dessous de la table.

L’homme pointait maintenant un doigt vers elle, le grondement faible dans sa voix – que Paul avait entendu mais sans comprendre –s’était adoucit. La femme détourna son regard. L’homme à la veste en cuir passa son bras au-dessus de la table et lui toucha le bout du nez du bout du doigt en le poussant. Elle recula et débita des insultes.

Paul se leva de son tabouret et se dirigea vers eux, en se rapprochant de l’homme sur le côté. Il pouvait sentir l’odeur du cuir de sa veste et l’odeur d’un fort déodorant. La femme le regarda et fronça les sourcils, qui donna un signal à La veste en cuirde jeter un coup d’œil rapide.

-Tu veux ma putain de photo ?

- Je suis plus grand que toi. Ne cherche pas la bagarre. 

L’homme se retourna pour le confronter de face. Paul aperçut un regard féroce, des yeux sombres et blancs en profondeur. Il étaitprobablementdu même âge que Paul, mais les traits de son visage le vieillissaient de dix ans.

- Va t’asseoir dans un coin et on va prétendre que je ne t’ai jamais vu, dit l’homme à la veste en cuir.

-Tu déranges la dame et j’aimerai bien que tu partes.

-Comment tu t’appelles ? 

- Paul Storey. Et toi ? 

- Je m’appelle Dégage-de-ma-putain-de-gueule. 

- Tes parents t’ont donné un bon départ dans la vie, à ce que je vois ? 

- C’est un de tes amis, Minty ?se retournant vers la femme, toujours assise, fronçant les sourcils d’une manière devenue familière à Paul.

-Va-t’en Cliff. Je te parlerai plus tard, dit-elle.

Cliff. C’est un prénom que l’on entend rarement de nos jours, pensa Paul, un prénom des années 60, mais il était content d’avoir enfin un nom à utiliser.

- Ne me dis pas ce que je dois faire – toi non plus. Si je veux venir ici et te parler, je le ferai, dit Cliff.

- Rentres chez toi, je t’appellerai. 

Cliff se retourna pour regarder Storey, captant sa taille et son allure. Paul pensait que Cliff n’était pas du tout intimidé, mais juste prudent. Il se déplaçait sûrement partout avec une bande, des personnes qui l’aideraient et feraient ce qu’il leur dit de faire. Cela lui donnait de la confiance,tout comme s’ilétait armé. Paul avait déjà eu affaire à ce genre de type et n’aimait pas cela. Les gens qui contrôlaient les autres ainsi, avaient souvent du mal à se tenir tranquille.

Cliff se redressa et alla de l’autre côté de la table, se mit debout à côté de la femme et regarda Paul.

- Tu ne me plais pas. Mais tu as des tripes. T’ai-je déjà vu quelque part ?demanda-t-il

- Je ne crois pas. 

- Ouais, moi aussi. Mais il y a quelque chose en toi que je reconnais. Ça me reviendra. 

- N’en perds pas le sommeil, beauté. 

- Oh, sûrement pas,dit-il en se retournant et sortant du café, sans regarder derrière lui, toujours confiant.

-Tune vas pas t’asseoir. Je n’ai pas besoin de chevalier blanc, dit la femme à Paul.

- Je sais.

- Alors pourquoi tu t’es mêlé ? 

- C’est dans ma nature. 

Elle le fixait avec un premier signe de curiosité qu’il n’avait jamais remarqué en elle, comme s’il venait enfin d’attirer son attention.

- J’ai senti que tu ne voulais pas lui parler, dit-il.

- Je l’ai énervé. 

- Quelque chose que tu as écrit ? 

- Pas exactement. Tu peux me laisser maintenant, s’il-te-plaît ? 

Il hocha la tête. Il était sur le point de partir lorsqu’il se rappela de quelque chose.

- Minty ? dit-il.

- Araminta. Ne t’inquiètes pas, tu n’auras jamais l’occasion de l’utiliser, en levant la tête pour le regarder.

- Un nom peu commun pour une écossaise. 

- Pas celui-ci. 

-Es-tu toujours aussi agressive ? 

-Es-tu toujours aussi stupide ? 

Il resta silencieux, se regardant mutuellement dans les yeux. Le regardfixe, il savait qu’elle essayait de le déchiffrer. Il essayait de faire la même chose avec elle. Même si ça ne l’amusait pas vraiment,ça lui changeait les idées. Comme essayer de réfléchir à ce qu’il devait faire dans la vie.

- Rejoins-moi plus tard. Pour un verre, dit-elle sans changer d’expression. 

-Ok. Où ? 

Elle lui donna le nom d’un pub ainsi que les directives – il ne connaissait pas l’endroit, mais connaissait le quartier de lorsqu’il était enfant.

- Je tedonne mon numéro, dit-il et se mit à le lui dicter.Il fit une pause pour lui laisser le temps de prendre son téléphone et de le taper.

Elle le fixa à nouveau du regard, prit son téléphone et tapa le numéro. Une fois terminé, elle lui dit :

-Ce n’est pas un rendez-vous. Nete mets pas sur ton 41. Je ne sais même pas pourquoi je fais ça.

- N’y réfléchis pas trop, ça gâchera un moment magnifique. 

- J’y serai à partir de huit heures. 

- Comment je te reconnaîtrai ? 

- Je serai celle qui aura des regrets. Je te l’ai dit, ne t’emballe pas. 

CHAPITRE QUATRE

Le pub se trouvait à Ball Hill, à dix minutes de marche de l’ancien terrain de football à Highfield Road. Dans ses souvenirs, c’étaità l’époque un quartier commercial très fréquenté, avec des banques, un bureau de poste et toutes sortes de magasins. Une bibliothèque. Maintenant la moitié des commerces étaient barricadés et la majorité des magasins, encore ouverts, étaient des boutiques de bienfaisance. Le quartier était à l’abandon, comme le reste de la ville qu’il avait vu jusqu’ici.

A son entrée au pub, il aperçut immédiatement Cliff, assis à une table ronde avec trois autres hommes. Araminta était assise un peu plus loinà envoyer des SMS d’un grand téléphone noir.

Cliff lui fit signe de la main, un grand sourire au visage.

- Minty a dit que tu venais. Elle a dit que tu croyais que vous aviez un rancard. Eh bien, nous y voilà !

-Pas de roulement de pelle dès le premier soir, dit Paul.

-Assieds-toi et relax, dit Cliff ne prêtant pas attention à ce qu’il venait de dire.

- Voici Dutch, Gary et Tarzan. Je vais te laisser deviner qui est qui,en faisant signe de la tête aux autres assis à la même table.

-C’n’est pas grave, je ne vais pas m’arrêter. 

- Oh, ne le prends pas mal. Je veux faire ta connaissance. Tu m’as eu par surprise la dernière fois, mais réflexion faite, j’ai bien aimé ta réaction. Défendre le d’m’oiselle. 

Araminta leva les yeux.

- Salut, dit-elle.

Cliff lui jeta un coup d’œil en haussa les épaules.

- Elle n’aime pas cela. N’aime pas être considérée comme une petite fille. Je ne peux pas lui en vouloir. Peux-tu l’imaginer en train de faire la vaisselle, debout au lavabo portant un tablier ? sourit-il s’attendant à ce que Paul lui réponde, un scintillement dans le regarden essayant de le déséquilibrer.

Paul jeta un coup d’œil aux autres hommes. L’un était grand, même assis, visage maigre et sombre et de grandes oreilles. Probablement Tarzan, à en juger par son physique musclé, pensa Paul. Il portait un tee-shirt taché sous une veste en velours marron ressemblant à un machinisted’un groupe des années soixante-dix. L’homme au milieu était blond et pâle, le visage carré et de grosses lèvres roses, la poitrine trapue, pas aussi grand que Tarzan, mais pas très petit non plus. Le blond de ses cheveux et sa pâleur suggéraient qu’il était néerlandais de nom et de souche, d’où le nom Dutch.

Le troisième homme devait être donc Gary. Le plus petit de tous, une lueur intense et nerveuse dans le regard, comme s’il n’avait jamais rien vu de bon dans sa vie. Il avait un sous-verre aux mains qu’il pliait,enroulait et en arrachait lentement des bandes fines, le faisant automatiquement sans regarder, une habitude. Son pull-over vert à col rond était éclaboussé de peinture blanche.

Tous en-dessous la trentaine, ils avaient le physique d’hommes terreux qui sortaient rarement ou qui ne marchaient pas plus d’un demi-kilomètre par semaine.

Paul soupira. Des petits scélérats dont il voulait se débarrasser. Comment s’était-il retrouvé ici, à fixer des pairs de yeux de macabres de personnesignares, qui ne réfléchissaient pas beaucoup et étaient incapables de contrôler leurs impulsions ?

Et qu’est-ce qu’Araminta faisait bon sens avec eux ?

Cliff le guettaitjeter un coup d’œil àses hommes. Il relevale menton pour attirer l’attention de Paul.

-Alors tu les astriés ? demanda-t-il. Allons, prends une chaise et bavardons un peu. J’ai l’impression que tu as beaucoup de choses à dire à des gens comme nous. Minty m’a dit que tu travailles dans les assurances. Ça me plait. On a tous besoin d’un boulot. J’ai besoin d’un boulot. Ces trois génies en ont besoin. Tu es le seul ici qui en a un, tu peux alors nous raconter comment c’est. 

Paul tira une chaise d’une autre table et s’assit en gardant sa distance des autres, ne voulant pas faire partie de leur groupe.

- Je me souviens de toi maintenant, le nom, dit-il à Cliff. Cliff Elliot. J’ai été trompée par ta barbe. Nous sommes allés au même collège – Caludon Castle. Tu y as été pendant quelques années, mais tu t’es concocté une réputation assez rapidement. Je t’ai vu te battre avec quelqu’un dans la cour, une fois. La seule fois où j’ai vu quelqu’un donner un vrai coup de poing dans une bagarre de collège qui ne soit pas du catch. 

Cliff se renversa sur sa chaise, le sourire aux lèvres en jetant un coup d’œil à ses potes comme s’il voulait leur dire, Je vous ai dit que j’étais un dur.

-Storey. Ouais, j’avais bien dit que je te connaissais. Tu étais dans l’équipe de rugby, ailier ou quelque chose comme ça, tout le temps en entraînement. Même si vous n’avez jamais gagné. C’était un dépotoir. Ils l’ont démoli, il y a dix ans, tu sais ? Ils ont construit un nouveau, l’une de ces Académies. 

- Alors, comment ça s’est passé dans ta vie après cela ? 

-Merde, tu ne t’intéresse pas à moi. Tu essayes juste de comprendre comment les choses fonctionnent ici. 

- C’est toujours bon de reprendre avec les vieux amis. 

Cliff sourit et regarda ses hommes, relevant brusquement le pouce vers Paul.

- Tu vois ? C’est ce que je voulais dire. Sympa, non ? J’avais raison, c’est ça ? 

-Raison à propos de quoi ? demanda Paul.

Cliff se pencha en avantpar-dessusla table.

- J’ai dit à ces sans-cervelles que tu étais quelqu’un sur qui on pouvait compter. Je l’ai remarqué plus tôt dans le café. Tu ne t’es pas dégonflé. T’aurais essayé de me foutre dehors si je n’étais pas parti. Agent d’assurances, tu ne l’es pas plus que moi – et je t’assure que j’en suis pas un.

- Vraiment ? 

- Qu’est-ce t’es devenu après le collège ? Je ne t’ai pas vu en ville, qu’est-ce t’as fait alors ? demanda Cliff en ignorant son commentaire.

Paul hésita en portant attention à l’endroit où il se trouvait :les buveurs, la musique émanant des haut-parleurs d’une autre pièce. Il réalisa qu’il devait parler fort pour se faire entendre. Il se demanda à nouveau qu’est-ce qu’il faisait ici – était-il si désespéré d’avoir un contact avec les genspour parler à Cliff et à ses morts-vivants à deux balles ?

Il remarqua qu’Araminta avait fini avec son téléphone et le regardait par-dessus un verre de vin rouge. Quel était son rôle dans tout ça ? Quand elle lui avait demandé plus tôt de la rejoindre pour prendre un verre, avait-elle prévu d’inviter également Cliff ? Ou était-ce uniquement une coïncidence qu’il se trouvait là ?

Il se sentait soudainement fatigué et bête, il n’était pas en forme pour affronter Cliff et son manège. Peut-être qu’il était valait mieux être franc et laisser tout tomber.

Tout bien réfléchi, peut-être pas.

- Je suis parti à l’étranger, me balader. J’ai découvert le monde. Je suis revenu à Londres pour chercher du boulot. J’en ai trouvé un dans les assurances, dit-il.

-Alors pourquoi es-tu revenu ici ? 

- Raisons personnelles.

- Ta femme t’a plaqué ? demanda Cliff avec un sourire.

- Pas marié. 

- Alors… des trucs familiaux. Maman ou papa ont crevé. 

Paul resta silencieux.

-Je l’ai eu dans le mil, c’est ça ? Tu es revenu pour mettre quelqu’un en terre, dit Cliff.

Paul s’éclaircitla voix.

-Pour parler dubon vieux temps, tu n’as pas répondu à maquestion. Raconte-moi donc un peu ta brillante carrière ? 

Cliff écarta ses bras et haussa les épaules.

- Quelques problèmes avec l’autorité. Impossible de garder un boulot. Donc je fais un peu de tout, par ci, par là. Moi et les gars, ici. J’aime bien les appeler les experts. 

- Vas te faire foutre, Cliff, dit Gary.

Paul réalisa que c’étaient les premiers mots que l’un d’eux avaient prononcés.

- Et au cas où tu te poses des questions, continua Cliff, je ne suis pas un agneau blanc. Est-ce que ça t’étonne ? Non, j’ai eu l’honneur d’avoir été emprisonné chez Sa Majesté pendant un temps. Je dis cela avec un esprit ouvert et honnête. Je ne voudrais pas que tu penses que je te parle sous un prétexte. 

- Mais ton expérience ne t’a pas remis sur le droit chemin. 

Cliff sourit à nouveau.

- Je ne connaîtrai jamais le droit chemin, même si je tombaisdedans et que je me cassais le nez. 

- On fait tous tout ce qu’on peut pour joindre les deux bouts. 

- C’est exactement ce que je veux dire, dit Cliff en lançant un regard d’appréciation vers Paul. Donc, tu es revenu pour un enterrement. Laisse-moi deviner : tes deux parents sont partis, car si ce n’était que l’un des deux, tu serais à la maison à remonter le moral de celui qui reste. Tu ne serais pas dehors à te balader avec des gens comme nous. Tu es probablement en train de régler les problèmes de testament, de vendre la maison et de te débarrasser de vêtements et toutes les conneries… j’ai dû faire tout ça, il y a des années. Ma mère et mon père se sont tués trop tôt à force de trop fumer. Ils n’y allaient pas à la légère. Cinquante par jour, chacun. J’avais presque envie de leur donner une pelle et de leur demander de commencer à creuser leurs tombes.

Paul se pencha en arrière sur sa chaise et jeta un coup d’œil à Araminta. Elle envoyait à nouveau des SMS.

- Tout cela est fascinant, mais je ne sais vraiment pas ce que je fais ici, dit-il.

- Je sais, dit Cliff en haussant les épaules, tu pensais venir prendre un pot en amoureux avec Minty et tu te retrouves avec quatre canailles à la place. C’est comme ce programme à la télé, c’était quoi déjà ? en jetant un coup d’œil à ses hommes pour qu’ils l’aident,mais n’ayant que des regards videscomme réponse, il reprit : Dragons Den. Tu dois nous vendre quelque chose alors qu’on ne veut rien acheter.

- Je ne vends rien. 

- Oh, je crois que oui. Tu vois, je m’intéresse à toi parce que ce que tu dis ne va pas du tout avec ton attitude. Tu as dit à Minty que tu travaillais dans les assurances. Mais tu m’as sauté dessuscomme un flic. Sûr de toi,gonflant tes muscles. Je me suis demandé – quels projets as-tu pour cette pauvre fille ? À quoi tu joues, hein ? À quoi du joues ? 

Maintenant Araminta s’était levée, rangea son téléphone et lissa le devant de sa robe. Paul remarqua à nouveau à quel point elle était mince aux hanches et à quel point son ventre était plat.

- Ça va David ? lui demanda Cliff en lui jetant un coup d’œil. 

Elle saisit un sac à main couleur crème du dossier de sa chaise.

- Un peu en pétard contre moi, dit-elle.Ça fait un bon moment que je ne l’ai pas vu. 

- Fais en sorte qu’il te désire plus, chérie. Les hommes sont tous pareils,n’est-ce pas ?dit-il en se tournant vers Paul. Donnez-nous une main et on vous demandera le bras. On parle du mec de Minty, au cas où tu te posesdes questions. Tu vois, tu n’es pas le seul sur la liste des conquêtes. 

Paul se leva en repoussant sa chaise et dit à Araminta :

- Je dois aller aux toilettes. Je vais t’accompagner à la porte. 

- Bon plan de drague, mais pas besoin.À plus tard !

Elle passa devant lui sans le regarder.Il sentit brièvement son parfum. Il se retourna pour la suivre du regard se faufiler entre les tables où des hommes accompagnés de leurs femmes et copines firent une pause pour la regarder,avant de jeter un coup d’œil dans sa direction.

- Minty, dit-il en lui saisissant le bras.

- Retire tes sales pattes, lui dit-elle en se retournant le regard obscur.

Il la lâcha.

- Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce tu fais avec ce tas de tocards ?

- C’n’est pas tes oignons, en adoucissant légèrement le regard. Je suis désolée, mais ils étaient ici quandtu n’arrives. 

- Qu’est-ce qu’il veut ? Pourquoi il te tourne autour? 

- Probablement pour les mêmes raisons que toi, lui dit-elle en le fixant du regard.

Puis elle se tourna et partit. Paul la regarda sortir dans l’air froid, hocha la tête et se dirigea vers les toilettes. Il pensait qu’il s’était enchevêtré dans un film dont l’intrigue était incompréhensible et dans lequel les personnages étaient incohérents.

Plus tard, il réalisera que c’était là la raison pour laquelle il aurait dû continuer à marcher, s’enfuir le plus loin possible de ce pub.

Tarzan et Gary entrèrentpendant qu’il remontait sa braguette.Le grand homme,plus grand que prévu, se pencha sous la cadre de la porte avant de la fermer et de s’adosser dessus. Gary jeta un coup d’œil dans toute la pièce carrelée en sifflant et vérifiant les différents compartiments.

Paul se rinçât les mains à l’eau et saisit une serviette en papier, se demandant ce qu’ils allaient bien faire. Rien de grave, pas dans un pub bondé.Probablementqu’ils voulaient juste discuter pour voir s’il était un menteur. Il avait lui-même l’habitude de le faire, lorsqu’il était plus jeune, pour apprendre les ficelles du métier.

- Lui Tarzan, toi Jane ? dit-il à Gary.

– Tu vois, qu’est-ce que je t’ai dit ? dit Gary en se retournant vers Tarzan,avant de pointer un doigt vers Paul.

- Ta gueule te foutra dans la merde, tu sais ? Tu ne peux pas t’en empêcher. On en parlait, Tarzan et moi, on s’est dit que ta gueule te foutra dans la merde un jour. C’est ça, Tarzan ? 

Tarzan hocha la tête en croisant les bras pour insister, son courage lentpresque endormi. Paul pensait qu’il était fort, mais n’avait aucune subtilité. Il serait donc facile à neutraliser tant qu’il était hors de sa portée.

Gary était plus petit que Paul, maigre à la peau grise et les yeux constamment en mouvement derrière les lunettes. Il n’était pas un soutien de confiance,il était préférable de l’avoir toujours à l’œil.

- Cet endroit pue. Est-ce qu’on peut discuter ailleurs ? dit Paul.

- On n’est pas là pour discuter, dit Gary. C’est… comment on dit, une leçon. 

- De quoi ? 

-De comment les choses fonctionnent. Entre nous et toi. Si tu tournes autour de Minty, il y a des règles à respecter.

-Et un règlement, dit Tarzan.

-Vous me dites que j’ai besoin de votre permission pour parler à quelqu’un ? Vous pensez que je vais me laisser faire ? Je ne l’apprécie pas autant que cela. Je n’aime pas les blondes. 

Gary se mit à rire et se retourna vers Tarzan.

- Pas de soucis, elle n’est pas vraiment blonde, n’est-ce pas ? 

- Pas vraiment, répondit Tarzan. Pas en bas,en faisant rire à nouveau Gary.

-C’est bon maintenant ? dit Paul.

- Non, dit Gary, nous n’avons pas fini. Tu travailles pour qui ? 

- Que veux-tu dire ? 

- Tu travailles dans les assurances. C’est quoi le nom de la compagnie ?

Paul croisa le regard de Gary et le fixa.

- Ça ne te regarde pas, dit-il.

- Ouais, je savais que tu dirais ça. Mais le problème,c’est que Cliff veut savoir si tu es bien la personne que tu prétends être. 

- Ou quoi ? 

-J’ne sais pas, il ne l’a pas précisé. 

- Quelle différence cela peut-il faire ? La compagnie pour laquelle je travaille se trouve à Londres. 

- Donc il n’y aaucun mal à ce que tu nous le dises, non ? se tournant sur le côté enlançant un regard arrogant vers Paul. Le problème est que je pense qu’il a prévu quelque chose pour toi. 

- La réponse est non.

- Ouais, on savait que tu dirais aussi ça. C’est pourquoi nous avons une motivation pour toi. 

Lorsqu’ilslefirent ressortir dans le bar, Cliff était au téléphone. Il les arrêta en levant une main avant qu’ils s’assoient. Gary agrippa le bras de Paul et le lâcha en le secouant.Mais il resta debout jusqu’à ce que Cliff eût fini en pointant son index sur le bouton Raccrocher et l’enfonça.

Maintenant Paul écoutait Gary raconter à Cliff ce qui s’était passé dans les toilettes : Paul avait refusé de dire pour qui il travaillait et n’était pas intéressé par ce que Cliff avait prévu pour lui. Cliff hochait la tête en écoutant, la bouche en cul-de-poule pour montrer qu’il prenait le sujet au sérieux. Puis il pointa du doigt la chaise sur laquelle Paul était assis auparavant. Tarzan le saisit par les épaules et le poussa.

Paul se demandait ce que les autres gens dans le bar pensaient dece manège – peut-être qu’ils n’avaient pas remarqué ou qu’ils étaient habitués à Cliff et à ses hommes, et qu’ils s’en foutaient. Peut-être que c’était le genre de pub où c’était normal que des bouteilles soient cassées et des menaces soient faites.

Paul n’avait aucun problème avec ça. Il avait vécu pendant un temps au