Théétète de Platon - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Théétète de Platon E-Book

Encyclopaedia Universalis

0,0

Beschreibung

Probablement rendu public en 370 av. J.-C. (mais cette date n’est pas certaine), le Théétète occupe une place particulière dans l’œuvre de Platon. Consacré à une définition de la science, il inaugure ce que la plupart des commentateurs considèrent comme le troisième volet des dialogues platoniciens. Le premier ensemble comprend les dialogues aporétiques (du grec aporein signifiant « échouer », « ne pas trouver de solution »), dans lesquels Socrate conduit son questionnement de telle façon qu’au terme de l’échange, son interlocuteur se déclare égaré. Dans le second ensemble, qui débute avec le Ménon, Platon élabore l’hypothèse des Idées, selon laquelle des réalités idéelles éternelles existeraient dans un monde suprasensible, dont les réalités du monde sensible ne seraient que des copies imparfaites. Quant au troisième ensemble – le plus surprenant –, c’est celui dans lequel Platon semble se livrer à une critique, parfois féroce, de sa propre doctrine. Le Théétète forme avec Le Sophiste et Le Politique un triptyque qui ébranle jusque dans ses racines la théorie des Idées.


À PROPOS DE L'ENCYCLOPAEDIA UNIVERSALIS


Reconnue mondialement pour la qualité et la fiabilité incomparable de ses publications, Encyclopaedia Universalis met la connaissance à la portée de tous. Écrite par 8 000 auteurs spécialistes et riche de plus de 31 000 médias (vidéos, photos, cartes, dessins…), l’Encyclopaedia Universalis est la plus fiable collection de référence disponible en français. Elle aborde tous les domaines du savoir.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 69

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.

ISBN : 9782341012935

© Encyclopædia Universalis France, 2023. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Dirk Ercken/ Shutterstock

Retrouvez notre catalogue sur www.boutique.universalis.fr

Pour tout problème relatif aux ebooks Universalis, merci de nous contacter directement sur notre site internet :http://www.universalis.fr/assistance/espace-contact/contact

Bienvenue dans la collection Les Fiches de lecture d’Encyclopædia Universalis.

Ce volume présente des notices sur des œuvres clés de la littérature ou de la pensée autour d’un thème, ici Théétète, Platon (Les Fiches de lecture d'Universalis).

Afin de consulter dans les meilleures conditions cet ouvrage, nous vous conseillons d'utiliser, parmi les polices de caractères que propose votre tablette ou votre liseuse, une fonte adaptée aux ouvrages de référence. À défaut, vous risquez de voir certains caractères spéciaux remplacés par des carrés vides (□).

THÉÉTÈTE, Platon (Fiche de lecture)

Probablement rendu public en 370 av. J.-C. (mais cette date n’est pas certaine), le Théétète occupe une place particulière dans l’œuvre de Platon. Consacré à une définition de la science, il inaugure ce que la plupart des commentateurs considèrent comme le troisième volet des dialogues platoniciens. Le premier ensemble comprend les dialogues aporétiques (du grec aporeinsignifiant « échouer », « ne pas trouver de solution »), dans lesquels Socrate conduit son questionnement de telle façon qu’au terme de l’échange, son interlocuteur se déclare égaré. Dans le second ensemble, qui débute avec le Ménon, Platon élabore l’hypothèse des Idées, selon laquelle des réalités idéelles éternelles existeraient dans un monde suprasensible, dont les réalités du monde sensible ne seraient que des copies imparfaites. Quant au troisième ensemble – le plus surprenant –, c’est celui dans lequel Platon semble se livrer à une critique, parfois féroce, de sa propre doctrine. Le Théétète forme avec LeSophiste et LePolitique un triptyque qui ébranle jusque dans ses racines la théorie des Idées.

1. De la sensation à la connaissance ?

Dans tous les dialogues antérieurs au Théétète, tels Hippias, Gorgias et à un moindre degré Protagoras, Platon brosse des portraits sévères et apparemment caricaturaux de ceux qu’il qualifie de « sophistes ». Ces maîtres de rhétorique, auprès desquels les riches Athéniens vont apprendre l’art oratoire afin de briller sur la scène politique, portent selon lui une responsabilité dans la condamnation à mort de Socrate par ses juges athéniens. Il en va tout autrement avec le Théétète, dialogue dans lequel le sophiste Protagoras est traité avec un très grand respect. Cela est si vrai que Socrate se fait le porte-parole de Protagoras, médiocrement défendu selon lui par le jeune mathématicien Théétète, un personnage réel dont les découvertes ont été intégrées par Euclide à plusieurs livres de ses Éléments.

Au début du dialogue, Théétète est invité à comparer science et sagesse. Ses réponses conduisent Socrate, dans un morceau d’anthologie, à comparer son art à celui de sa mère : sage-femme, celle-ci aidait les femmes à enfanter des corps, tandis que lui aide ses interlocuteurs à accoucher des idées. C’est ainsi qu’« accouché » par la maïeutique de Socrate, Théétète va proposer une définition de la science, dont Socrate repère la proximité avec les thèses de Protagoras.

En cherchant à expliciter la thèse de Protagoras, « l’homme est la mesure de toutes choses », Théétète va identifier science et sensation. Savoir consisterait à éprouver une expérience sensorielle, nécessairement individuelle. Mais si chaque individu détient la vérité – ce qu’affirme cette thèse relativiste –, alors pourquoi accorder plus de valeur aux thèses de Protagoras qu’à celles de n’importe quel homme ? Socrate retourne ainsi contre Protagoras sa propre thèse, ce qui ébranle particulièrement le jeune mathématicien. Il cherche à lui faire honte en affirmant que jamais Protagoras n’aurait cédé aussi facilement : « Tu es jeune, mon cher enfant : c’est pour cela que tu es si prompt à te laisser influencer. Mais voici ce que nous opposera Protagoras ». Platon va alors se livrer à un exercice qu’il n’avait encore jamais pratiqué : démontrer la cohérence d’une doctrine opposée à la sienne.

2. Platon contre lui-même ?

Sans doute pourrait-on considérer que la première réponse de Théétète, assimilant science et sensation, se trouve réfutée par Socrate. Elle semble l’être en particulier dans la mesure où Socrate rejette l’hypothèse selon laquelle il pourrait exister une véritable connaissance de ce qui, par définition, ne cesse de se mouvoir. Cet argument donne l’occasion à Platon de donner l’un de ses plus beaux portraits de philosophe. Tel Thalès de Milet, le philosophe, « élevé au sein de la liberté et du loisir », paraît maladroit dans les affaires quotidiennes, parce que son univers se situe à une tout autre hauteur. Mais, d’une part, ce portrait du philosophe ne convient qu’imparfaitement à Socrate, Athénien qui n’a jamais vécu dans la solitude et qui, au contraire, a fréquenté l’agora sa vie durant ; d’autre part, c’est bien davantage la doctrine du « mobilisme » d’Héraclite qui est attaquée – selon laquelle rien n’est stable et tout se transforme sans cesse – que la thèse relativiste de Protagoras.

Les deux autres définitions de la science que propose ensuite Théétète, une « opinion vraie » puis une « opinion vraie accompagnée de raison », donnent apparemment l’occasion à Socrate de défendre à nouveau l’hypothèse platonicienne des Idées. Mais la comparaison de l’âme avec une tablette de cire, conduite dans l’examen de la seconde définition de la science, est plutôt favorable à la thèse empiriste, qui veut que nos idées résultent de la somme de nos impressions sensibles (une thèse qui sera reprise par Aristote, l’élève de Platon). Et la comparaison de la réalité avec un texte dont il conviendrait de distinguer les éléments, dans une approche analytique, préfigure davantage les thèses de l’atomisme – qui saura décomposer la réalité matérielle en particules élémentaires et insécables – qu’elle ne défend l’hypothèse des Idées.

Enfin, si le Théétète revient à la forme aporétique avec laquelle Platon avait inauguré son parcours, n’est-ce pas parce que ce dialogue, qui sera complété par LeSophiste et LePolitique, est la première étape d’un cheminement qui semble être de l’ordre de l’autoréfutation ? Platon, qui avait jusqu’alors considéré que seule l’hypothèse des Idées autorisait l’édification d’une philosophie authentique, choisissant Parménide contre Héraclite, n’abandonne-t-il pas cette conviction ? Ne se voit-il pas contraint de reconnaître qu’une autre forme de philosophie a droit de cité ? Ainsi que le résume le philosophe Michel Narcy dans son introduction au Théétète : « Protagoras ou Parménide, l’homme ou l’être, voilà la véritable alternative du Théétète, et peut-être du platonisme ».

Le second membre de cette alternative est le relativisme défendu par Protagoras, une doctrine qui sommeillera près de deux millénaires avant qu’elle ne soit « réveillée » par Montaigne et revisitée par Nietzsche.

Philippe GRANAROLO

PLATON (428 env.-347 env. avant J.-C.)

Introduction

On a pu écrire que toute l’histoire de la philosophie se résumait à une série de notes en bas de page apposées à l’œuvre de Platon. Si pour certains il a déjà toutdit − l’être travaillé par le négatif et par la différence, la pensée transcendantale et les concepts a priori, la sublimation de l’énergie érotique, la grammaire des propositions −, d’autres réduisent sa pensée à quelques thèses aisément critiquables : le réalisme des Idées, le dualisme de l’âme et du corps, la contemplation d’un principe ineffable. Cela tient sans doute à la nature énigmatique d’un philosophe qui ne parle jamais en son nom et d’une philosophie qui ne s’exploite jamais, repart toujours à nouveaux frais, place la dialectique au sommet des sciences mais fait constamment appel à des images, des mythes et des métaphores. Et, dans le champ de bataille où s’affrontent des philosophes que Kant n’a pas réussi à pacifier, il apparaît que combattre Platon, c’est presque toujours le jouer contre lui-même. Tous n’avouent pas comme Nietzsche que son sang coule encore dans leurs veines, mais le même Heidegger qui invite Sartre à philosopher avec lui « loin par-delà tout platonisme » fait figurer une phrase du Sophiste en exergue à Être et Temps, et c’est sur ce dialogue que conclut L’Être et le Néant