Topkapi à Versailles. Trésors de la cour ottomane (Versailles - 1999) - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Topkapi à Versailles. Trésors de la cour ottomane (Versailles - 1999) E-Book

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Idée a priori séduisante que de présenter dans le palais du Roi-Soleil (4 mai-15 août 1999) le décor fastueux où vivait à la même époque le sultan, «Ombre de Dieu sur terre». Séduisante mais risquée, tellement le cadre du château de Versailles paraît incompatible avec l'art de vivre et de gouverner...

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Seitenzahl: 76

Veröffentlichungsjahr: 2016

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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.

ISBN : 9782341010115

© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Bluraz/Shutterstock

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Les grandes expositions sont l’occasion de faire le point sur l’œuvre d’un artiste, sur une démarche esthétique ou sur un moment-clé de l’histoire des cultures. Elles attirent un large public et marquent de leur empreinte l’histoire de la réception des œuvres d’art.

Sur le modèle des fiches de lecture, les fiches exposition d’Encyclopaedia Universalis associent un compte rendu de l’événement avec un article de fond sur le thème central de chaque exposition retenue : - pour connaître et comprendre les œuvres et leur contexte, les apprécier plus finement et pouvoir en parler en connaissance de cause ; - pour se faire son propre jugement sous la conduite de guides à la compétence incontestée.

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Topkapi à Versailles. Trésors de la cour ottomane (Versailles - 1999)

Idée a priori séduisante que de présenter dans le palais du Roi-Soleil (4 mai-15 août 1999) le décor fastueux où vivait à la même époque le sultan, « Ombre de Dieu sur terre ». Séduisante mais risquée, tellement le cadre du château de Versailles paraît incompatible avec l’art de vivre et de gouverner du Grand Turc. Un pavillon, Trianon par exemple, eût mieux convenu, comme il fut fait à Bagatelle au même moment pour une exposition modeste et charmante sur les jardins ottomans ! Mais les colonnades de Versailles et la chapelle royale sont aux antipodes de l’apparat ottoman : deux pouvoirs également orgueilleux – là cesse la ressemblance.

Un autre écueil se présentait. Il fallait certes céder aux sirènes de Topkapi, au clinquant authentique, à la fascination qu’inspirent les émeraudes géantes, les trônes d’or massif. Mais ne risquait-on pas d’ouvrir une caverne d’Ali Baba reflétant les fantasmes occidentaux plutôt que la réalité de l’Empire ottoman ?

Pour restituer l’atmosphère impalpable et magique du sérail, les organisateurs avaient adopté avec raison le point de vue des peintres qui, au XVIIIe siècle, accompagnaient les ambassadeurs européens : les tableaux de Jean-Baptiste Vanmour ont donc été extraits, pour l’exposition, des réserves du Rijksmuseum à Amsterdam. Des œuvres du grand peintre ottoman Levni devaient révéler cet artiste au public, avec cette réserve que nos musées se prêtent moins bien à la contemplation de ces précieuses miniatures qu’à celle des tableaux de chevalet. C’est surtout dans la salle des albums et manuscrits, aussi riche d’ors et de couleurs qu’un étalage de joyaux, que l’on ressentait l’impossibilité d’une présentation satisfaisante, devant tel album timouride ou safavide, comme celui d’Emir Hüseyin Bey, dont il faudrait pouvoir examiner à loisir chaque figure placée dans les marges... Les commissaires avaient choisi un très bel atlas datant des années 1675-1685, un projet de jardin à la française pour le sultan (1787-1788), bref, des œuvres représentatives d’un temps où l’Empire ottoman est parti à la rencontre de l’Europe.

Le parcours était donc résolument historique : évoquer le palais de Topkapi au XVIIe et au XVIIIe siècle, époque qui, pour beaucoup, correspond à la décadence de l’Empire ottoman. Contre cette notion, Gilles Veinstein s’élève d’une manière exemplaire au début du très beau catalogue. Que ce soit sur le plan administratif et politique, avec le vizirat des deux grands Köprülü, Mehmed et Fazil Ahmed (1656-1676), ou artistique et littéraire, avec l’« ère des Tulipes », sous Ahmed III (1718-1730), les deux siècles envisagés, tout traversés qu’ils sont de catastrophes, révèlent leur complexité et leur séduction.

Ils ne les révèlent nulle part mieux que dans le harem, objet d’une excellente présentation par Nazan Ölçer : objets et miniatures nous entraînaient ensuite dans ses recoins successifs qui évoquent moins un érotisme convenu que la grâce ou une sensualité discrète. Les passe-temps favoris des sultans restent en effet bien innocents – du moins quand ils sont avoués : calligraphies, spectacles de lutteurs bouffons, concerts réunissant la grande harpe çeng, la flûte droite et le tambourin. À l’extérieur du palais, la chasse est une passion que Mehmed IV « le Chasseur » partage avec son contemporain Louis XIV : ici fauconnerie, là vénerie. Seul élément saillant dans cet ensemble trop policé, l’exubérance des dames du palais lorsqu’elles ont la permission d’aller au jardin où elles gâtent tous les parterres en un clin d’œil. Mais les ragots de jardiniers trop méticuleux sont rapportés par les voyageurs « francs » !

Cette exposition proposait en fait deux parcours, reflet du caractère double de Topkapi : le premier, en quête de beauté et de vie raffinée, n’évitait pas malgré tout au promeneur l’impression de confinement – celle que l’on éprouve à Topkapi au cours de la visite du harem. L’autre évoquait la solennité des grands défilés, les panaches ondulant, les turbans aux plissés savants, les manteaux somptueux, les revues où, selon une coutume nomade immémoriale, les janissaires « pillent » la nourriture que le sultan leur offre. Il aurait débouché sur cette salle extraordinaire de l’exposition où des rangées de luxueux caftans, vides, rendaient hommage au trône impérial en or constellé de péridots, vide. Topkapi à Versailles : ce fut une occasion unique d’entrevoir l’âme d’un Empire défunt.

Pierre CHUVIN

BIBLIOGRAPHIE
Topkapi à Versailles. Trésors de la cour ottomane, catalogue de l’exposition (commissaires : Béatrix Saule, Marthe Bernus Taylor, Jean-Paul Desroches, Stéphane Yerasimos), A.F.A.AR.M.N.M. S. ALI EFENDI & S.A. MUHIBB EFENDI, Deux Ottomans à Paris sous le Directoire et l’Empire, traduit, présenté et annoté par S. Yerasimos, Sindbad-Actes sud, Arles, 1998M. EFENDI, Le Paradis des infidèles, traduit, présenté et annoté par Gilles Veinstein, La Découverte, Paris, 1981M. MONTAGU, L’Islam au péril des femmes, lettres de Turquie présentées et traduites par A.-M. Moulin et P. Chuvin, La Découverte, Paris, 1981L. P. PEIRCE, The Imperial Harem. Women and Sovereignty in the Ottoman Empire, University Press, Oxford, 1993.

ISLAM LA CIVILISATION ISLAMIQUE

Introduction

Peut-on parler d’un art islamique, alors que la civilisation née de l’islam s’étend sur quatorze siècles et sur un espace qui va de l’Atlantique au Pacifique, du Maroc jusqu’à l’Indonésie, et que cette civilisation a poussé des ramifications un peu partout dans le monde, aussi bien en Chine qu’au Brésil ? Il ne viendrait à l’idée de personne de mettre sur le même plan et de traiter dans un seul chapitre tout l’art issu de la religion chrétienne. Cette terminologie abusivement unificatrice vient non seulement de notre européocentrisme, mais aussi du fait que l’islam n’a jamais vraiment séparé monde spirituel et monde temporel ; dès sa genèse, il s’imposa comme religion triomphante, dans la cité comme dans les âmes. Cela explique que la notion d’« art islamique » n’est pas réservée aux seules expressions artistiques liées à la religion – comme l’architecture des mosquées et leur mobilier ou encore les objets de dévotion privée –, mais qu’elle couvre l’ensemble des créations émanant du monde musulman : palais, caravansérails, ponts ou objets décoratifs, comme des lustres ou de la vaisselle.

On devrait donc parler de l’« art des musulmans » plutôt que de l’« art islamique ». Il arrive d’ailleurs qu’on qualifie d’« islamique » des objets fabriqués certes pour des commanditaires musulmans mais par des artistes ou des artisans de toute évidence non musulmans, qu’il s’agisse de chrétiens au Proche-Orient, d’hindouistes au Penjab, etc.

Dans ce contexte, l’expression « art islamique » n’a donc plus que de très lointaines connotations religieuses et correspond à l’« art d’une civilisation où l’islam est la religion dominante » ou même, dans certains cas, « où l’islam est la religion de la classe dominante ».

1. Histoire de l’histoire de l’art islamique

On a pris l’habitude, en histoire de l’art et en archéologie islamiques, d’établir un classement dynastique qui offre une relative précision historico-géographique, mais qui a plusieurs inconvénients : le grand nombre de dynasties, souvent aussi éphémères que limitées dans l’espace, peut laisser perplexe le non-initié ; en outre, cette classification utilise des critères extrinsèques et n’est donc pas toujours pertinente pour désigner les objets. En effet, histoire politique et histoire de l’art ne se recouvrent pas, et le changement d’une dynastie ne modifie pas du même coup l’art d’une région. Des centres géographiques voisins, dominés par des dynasties différentes, peuvent utiliser un même langage artistique, ou le panorama artistique de longues dynasties peut se différencier selon les époques.

Les débuts de l’art islamique sont liés à la civilisation de la péninsule arabique du VIe siècle et du début du VIIe