À ronde-moutons sur le green - Alain Olivier - E-Book

À ronde-moutons sur le green E-Book

Alain Olivier

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Beschreibung

À ronde-moutons sur le green est un polar décalé mettant en scène un binôme de flics de choc, Molly et Ange, chargés d’enquêter sur un crime en Bretagne intérieure entre greens de golf et moutons. Énergiques et atypiques, épicuriens dans l’âme, ils accomplissent leur mission pour nous régaler de bons mots, sous la très haute surveillance d’un divisionnaire colérique.


À PROPOS DE L'AUTEUR 


Joueur de mots, Alain Olivier a rêvé petit de voir un jour ses écrits voleter au-dessus des rayons de la Bibliothèque nationale, cette mine de pensées et de culture qui l’impressionne tant. Des mots aux pinceaux, il cultive chaque jour sa soif d’existence. Il habille de couleurs ses messages d’alerte contre la misère et la solitude qui étouffent notre société.

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Seitenzahl: 131

Veröffentlichungsjahr: 2023

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Alain Olivier

À ronde-moutons sur le green

Roman

© Lys Bleu Éditions – Alain Olivier

ISBN : 979-10-377-8217-5

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Ce récit est une farce policière. Tout est faux sûrement et tout est vrai peut-être.

Les références cinématographiques et musicales ne sont pas fortuites.

Les nus et la police

Le commissaire divisionnaire, promu à Avignon depuis peu de temps, commençait à s’impatienter.

Son bureau embaumait la peinture à l’huile fraîchement étalée.

Un souci de crédit de l’administration ou un dépôt de bilan de l’entreprise chargée des travaux, nul ne savait. Seuls le plafond et deux murs brillaient de tous leurs feux.

Le charme de l’inachevé contrastait avec la rigueur du personnage.

Plus de quinze minutes d’attente, la contraction de la bouche de l’officier donnait à son rictus un air inquiétant.

Trois coups violents frappés sur la porte le sortent de sa torpeur. Debout, face aux arrivants, il aboie :

— Entrez !

Le capitaine Mollie Lijo et son adjoint, le lieutenant Ange Pedrini, pénètrent dans le bureau tels deux taureaux dans les arènes de Pampelune un jour de corrida.

Les yeux exorbités, les souffles rauques, ils recherchent la muleta et se retrouvent face à face avec leur supérieur.

Sur le coup de la surprise, le commissaire a entrepris un pas de côté pour éviter la charge folle du troupeau et s’est figé dans une attitude statuaire.

Il reprend vite contenance et leur intime d’occuper les fauteuils devant son bureau.

Se libérant de ses derniers stress, il s’installe le plus confortablement possible face au duo.

— Bonjour, j’espère que vous avez de bonnes excuses pour ce retard que je juge inacceptable. Je vous écoute.

Mollie Lijo, nommée capitaine à la suite d’une erreur du précédent responsable, prend la parole, en avançant les fesses au bout du fauteuil qui se plaint en grinçant.

— Enfin, voilà, nous nous sommes rendus à Marseille dans le 7e arrondissement pour transmettre un dossier sur deux petites frappes à nos collègues.

— Et alors ? rétorque le chef.

— Il y avait des bouchons partout, on n’a pas un hélicoptère, nous…

— Moi non plus, répond, de plus en plus fébrile, le jeune diplômé de l’ENSP.

— Cela n’a pas suffi à notre malheur, reprend la capitaine. Le restaurant était bondé, on a dû attendre avant de s’installer et je ne vous raconte pas le service…

Au bord de l’infarctus, le commissaire se lève, fait trois fois le tour de son fauteuil avant de se laisser choir, épuisé par les goguenardises de ses subalternes.

Ce qui le réconforte, c’est le motif de la convocation. Il n’est pas sans savoir que ça ne va pas être un moment de loisir avec ces deux oiseaux rares.

Mollie Lijo est surnommée depuis la nuit des temps « Ronde de nuit ».

Ce pseudonyme lui a été attribué par un binôme éconduit un soir de filature.

À la sortie de l’école de police, poids mannequin, grands yeux marron et cheveux bruns s’étalant à mi-dos, elle chavire pas mal de têtes, hiérarchie comprise.

Après différentes affectations, elle passe un certain temps aux mœurs. Noctambule, c’est l’explication de l’intéressée sur son surnom.

Aujourd’hui, avec son 1 m55 et ses 80 kg, elle remplit pleinement son sobriquet.

Qui plus est, on lui prête des sorties de folie dans les endroits malfamés de la ville.

Son équipier a pour pseudo « Napoléon », ce qui n’est pas très original en soi, vu qu’il est natif d’Ajaccio et qu’il culmine à une hauteur de 1,54 m au dernier relevé topographique.

Cela rend très fière Ronde de nuit, sa chef d’équipe, qui le toise royalement d’un cm.

La carrière de Mollie se caractérise par des allers et retours entre la police, des mises en disponibilité et la police.

Les enfants doivent être très indulgents envers

les grandes personnes

Antoine de Saint-Exupéry

Aînée d’une famille de 4 enfants, elle est la seule fille de la tribu.

Ses parents l’ont conçue en dehors de la sainte liaison du mariage, trahis par Dieu le père ou simplement l’oubli du préservatif.

Le village de Saint Glemnor, situé entre terre et mer, balayé par les vents d’ouest et jauni à la saison par les genêts envahissants, se souvient de cette folle journée.

Les invités de la noce, en apercevant dans la nef de l’église le ventre arrondi de Marie-Jeanne gonfler la robe blanche, la fleur d’oranger accrochée dans la chevelure, se touchaient le coude discrètement pour marquer leur acquiescement entendu.

Le père, Ferdinand, sanglé dans son uniforme du 503e régiment du train, képi, bandeau bleu foncé, turban garance et foulard blanc, regard fixé sur la ligne d’horizon de l’autel, gagnait sa plus belle bataille.

Artaban ressuscitait sur les terres celtiques.

Un rayon de soleil renvoie l’image de la barrette d’adjudant sur l’aube blanche du curé qui le précède.

Le mariage de ce couple, de la ville au fin fond d’un département embaumé par le lisier, s’avère un évènement majeur pour les notables.

La mère de Mollie, née dans la bourgade où le menhir tremble les jours de tempête, intrigue depuis sa jeunesse par son comportement.

Les habitants du village ont longtemps cru reconnaître en elle la réincarnation de Thérèse de Lisieux.

Les jeudis, sans école, vêtue d’une robe blanche, elle passe des heures sur les bords du Quiloury à méditer, les mains jointes.

Les pêcheurs restent abasourdis en la voyant dans cet état de prostration.

Nul ne la dérange, mais chez Marinette, entre deux ballons de rouge du Maghreb et un mensonge sur la taille du migrateur qui a échappé à l’hameçon, les langues se délient.

Au quatrième ballon, Marcel a vu la Vierge avec la petite Marie-Jeanne, main dans la main.

Le ton monte dans le dernier troquet sur la route de la ville.

Ce qui sauve le village du miracle « pugilistique » et de l’arrivée de la gendarmerie, c’est l’apparition réelle du curé.

Il lève ses grands bras. Sa trogne, la soutane et le béret imposent un silence dans l’estaminet en feu.

Le père Lagadec, tel le prophète sur le lac de Tibériade, se déplace sur les effluves répandus sur le parquet.

De sa voix de stentor, il éructe plus qu’il ne s’exprime :

— Il est grand temps de rejoindre vos foyers, vos propos deviennent complètement incohérents.

— Mais mon père, on…

— Toi, Marcel, dans l’état où tu te trouves, tu as le diable rouge sur langue et une fois que tu en as bu un, tu bois jusqu’à ce que la queue te sorte des narines.

Cette réflexion philosophico-religieuse laisse les débatteurs pantois. Le curé profite de l’état de béatitude des chevaliers pêcheurs assoiffés pour conclure :

— Laissez cette enfant vivre sa vie, sa foi. Le jour où elle transformera le pinard en eau, ce sera un prodige pour la paroisse et pour vous, fils du diable bourré.

Ce jour-là je ne manquerai pas d’en informer l’évêque afin de l’inscrire au registre des miracles, et surtout Marinette, pour qu’elle prépare sa reconversion commerciale.

Remettre de l’ordre dans les désordres

Depuis l’arrivée du duo, dans le bureau du brillant officier, le thermomètre vomit des températures à faire rougir un corps de garde.

Le silence pesant rythmé par le claquement des doigts du commissaire sur le plateau du bureau est rompu par un long soupir désespéré de Mollie.

— Enfin, vous nous avez convoqués pour tea-time, ose avec le sourire Ronde de nuit.

La réaction du chef est immédiate, il se lève souplement, renverse la photographie de sa petite famille, le cadre explose sur le sol.

Napoléon, réveillé par les bris de verre, sursaute brusquement.

On frise le drame, l’AVC du lieutenant.

La paupière lourde, Ange attend la suite avec épouvante.

L’avenir de la police phocéenne prend une profonde respiration, se racle la gorge, et dans ce bureau où même les mouches refusent de pénétrer, d’un ton qu’il veut solennel :

— J’ai deux annonces, cela concerne votre binôme.

— Le paiement de nos heures supplémentaires… répond Ronde de nuit en émettant un bruit suspect qui libère un sourire sur les lèvres de son acolyte.

Énervé, le commissaire monte le ton.

— Écoutez pour une fois sans la ramener toutes les dix secondes, j’ai entre les mains les conclusions du rapport de l’IGPN, le moins que l’on puisse dire c’est que vous vous en sortez bien.

— C’est quoi bien s’en sortir ? demande Mollie, les joues en feu.

— Le rouge est mis, ajoute Napoléon. En te voyant, on devine que rien ne peut nous traverser. Il part d’un long roucoulement, au grand dam de l’officier courroucé.

— Vous êtes totalement inconscients ou idiots. Vous n’êtes pas virés, mais mutés à Rennes. Vous pouvez remercier le divisionnaire.

— À Rennes le Château ?

— C’est de naissance la bêtise qui vous accompagne, Pedrini ?

— Non chef.

— Rennes en Bretagne, là-haut dans l’ouest, cela rafraîchira vos tristes neurones. Maintenant, avant d’apposer votre signature en bas du PV, je dois vous lire les conclusions de nos collègues.

— Mollie, tu retournes au pays, s’exclame Napoléon.

— Pedrini, je perds patience.

— Patron, un peu de gaieté dans un océan de mortifications.

— Bon ! Les faits jugés se sont déroulés le 2 juillet de l’an dernier, à la résidence naturiste de Bordisy, sise au village de Nomade, nous avons entendu les résidents dont les noms suivent…

Nous avons reçu le témoignage de Madame la Préfète qui était présente le jour cité.

— La pétasse, « Tù brusgi »1, lâche tout doucement Napoléon.

— Pardon ?

— Rien, rien.

— Je poursuis. Les dépositions concordantes décrivent une situation grotesque et inimaginable. Les officiers susnommés ont été surpris en patrouille, autour de la piscine, dans la tenue d’Adam et Ève comme l’impose l’endroit.

Un début de panique s’est propagé chez les résidents en voyant les officiers nus, sanglés de leurs armes de service.

Nonobstant le ridicule de la situation, le lieutenant a répondu à la Préfète qui lui demandait sa carte de police : « Devine où je l’ai rangée ? »

Les officiers Mollie Lijo et Ange Pedrini ont répondu pour leur défense qu’ils filaient les activités d’un individu proche du premier cercle d’amis de la Préfète.

Le malaise dû à la réponse inappropriée du lieutenant ajoute à la confusion de la situation.

Après délibérations, etc., je vous passe les formules, les officiers seront privés d’avancement pendant les trois prochaines années et mutés à Rennes, en Ille-et-Vilaine.

En cas de désaccord, ils feront appel par écrit auprès du Commissaire responsable.

— Je dois vous poser la question : « Faites-vous appel ? »

Une mouche kamikaze survole les protagonistes, on entend le battement de ses ailes.

La ventilation dans cette atmosphère surchauffée ne suffit pas à remettre l’esprit à l’endroit pour nos deux compères.

Napoléon ronchonne dans sa barbe de trois jours. Il peste et répète en boucle la salope, la salope… c’est elle qui devrait être pendue par les pieds.

— Pedrini, maintenant trop c’est trop, gardez votre néo-criticisme de bas étage pour vos copains.

— Mon « néo quoi », encore une punition, chef ?

— Réfléchissez à la suite, et…

Le commissaire est interrompu par un rire deux tons venu de l’Averne qui fait frissonner l’assemblée.

— Votre fébrilité m’inquiète, Ron… Mollie. Vous désirez un café ou une suspension de séance ?

En hoquetant comme une poule rousse délivrant son œuf quotidien, elle étouffe et réussit à enfin s’exprimer.

— Cela prouve que nous étions sur la bonne piste, et que le cul nu de la Préfète protège une fripouille.

Oui, pour les pistolets, ce n’était peut-être pas la meilleure idée du mois. Mais aujourd’hui on a affaire à des petites frappes de seconde zone.

— On sort couverts comme dit la pub, chef, ajoute Napoléon dans un bruyant pouffement.

— Arrête, je vais pisser dans ma culotte, ajoute Mollie. Désolée, patron.

Le commissaire commence à perdre les pédales, il reste coi devant autant d’ataraxie de ses subordonnés.

Il tousse plusieurs fois et conclut dans une envolée lyrique : « C’est toujours avec un peu de tristesse que l’on doit se séparer de deux collaborateurs.

En effet, les remplacements ne sont pas prévus et le commissariat sera en sous-effectif pour un moment.

Je m’égare… nous sommes mercredi, on vous attend en Bretagne lundi prochain, à 8 heures précises !

Vous transmettrez “vos”, non, “votre” dossier commun à vos collègues. On vous attend aux RH pour les formalités. Merci. »

Ronde de nuit se lève. Sur son visage rougi par la colère, de grosses gouttes de sueur inondent ses joues, elle bredouille.

— Patron, on fera un pot de départ vendredi soir. On compte sur vous ?

Abasourdi par cette dernière proposition, le commissaire est KO, assis et dans l’incapacité de desserrer les lèvres.

Les deux détectives se lèvent, Napo pousse son fauteuil avec force contre le bureau du chef.

Ils quittent le bureau sans se retourner sous l’œil hagard du commissaire.

Un alunissage mouvementé

Après une soirée digne des orgies barbaresques, nos deux bannis ont quitté leurs collègues dans la joie et la mauvaise humeur.

Sur le quai de la gare d’Avignon, la tristesse remplit la moitié de la valise de Mollie.

Elle quitte sa région, elle quitte sa maison, sa triste vie, se traîne sans raison, comme dit Enrico.

Elle entend siffler le train et sait qu’elle ne dansera plus sur le pont avant un long moment.

Napoléon a choisi la route pour rejoindre la préfecture bretonne dans son cabriolet Clio d’un autre âge.

Afin de rendre le voyage plus agréable et de chasser le spleen, il décide de dormir dans un hôtel gastronomique, il présentera la note à son nouveau patron.

Assise dans son wagon de deuxième classe, le dos à son soleil perdu, elle s’immerge brutalement dans son passé si proche, si lointain.

Les yeux mi-clos, Mollie a vingt ans, tout juste sortie de l’école de police, elle est affectée dans le 20e arrondissement.

De filature en filature, elle croise son coéquipier, Andrew, beau comme un Andalou. Le coup de foudre les cloue au lit tous les deux.

Elle n’a pas toujours été Ronde de nuit, sa taille 36 et son joli minois faisaient ruminer les machos du commissariat.

Ils ne se quittent plus. Nuit et jour, jour et nuit, et finissent à la mairie du 13e pour un « oui » franc et massif à monsieur le maire.

Pour des raisons de service, le voyage de noces se trouve reporté à une date éloignée.

Les taux d’insécurité et de délinquance dans l’arrondissement étant en progression exponentielle, le ministre de l’Intérieur a convoqué le divisionnaire pour le mettre face à ses responsabilités : l’inversion de la courbe ou l’affectation à Saint Pierre et Miquelon.

Les congés et autres récupérations d’heures supprimés, le jour polaire s’est levé au commissariat.

La ruche est en effervescence, on traque, on verbalise, on emprisonne, du chiffre encore du chiffre…

Le faux bourdon locataire de la place Beauvau analyse tous les soirs les chiffres et résultats avant son grand audit à Matignon.