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En Bourgogne, Christian, un jeune prêtre, succombe à sa passion pour Myriam, une femme médecin. Leur liaison, révélée au grand jour, entraîne son exclusion de l’Église tandis que Myriam, divorcée, quitte la région. Trois ans plus tard, Christian refait sa vie avec Océane, une œnologue, et l’épouse. Mais le passé ressurgit : Myriam réapparaît avec leur enfant et une demande bouleversante. L’équilibre fragile de Christian vacille, laissant présager un dénouement tragique.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Auteur d’une cinquantaine d’ouvrages,
Pierre Zanetti s’est distingué par son exploration de divers genres littéraires. Défense d’aimer, inspiré d’un fait réel, plonge au cœur des affres humaines, où se mêlent passions défendues et dilemmes vertigineux.
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Seitenzahl: 131
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Pierre Zanetti
Défense d’aimer
Roman
© Lys Bleu Éditions – Pierre Zanetti
ISBN : 979-10-422-6339-3
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La foudre aux yeux (2022)
Lémanie noire (2022)
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Pura vida (2023)
Mandragore (2023)
Le grand paradis (2023)
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Bienvenue à la morgue (inédit, 2024)
Les jeux sont faits (inédit, 2024)
À vrai dire, si d’obscures taches troublent ce qui est écrit,
C’est que le sang de ta maîtresse aura coulé sur la feuille.
Début d’une lettre imaginée par le poète latin Ovide, voici 2040 ans.
Canacée, fille d’Éole, écrit à son frère et amant Macarée.
Elle tient dans sa main gauche un poignard, qu’elle va s’enfoncer dans le cœur.
Son père lui a ordonné de mettre fin à ses jours.
Quand il a découvert la naissance d’un enfant incestueux.
Macarée, ayant lu cette lettre, se donnera la mort à son tour.
Le père Laurier était arrivé un jeudi de mars dans la petite ville de Chagny. L’évêque d’Autun, monseigneur Develey, l’avait nommé dans cette paroisse tranquille pour remplacer un vieux prêtre parti en retraite.
— C’est votre première cure, mon jeune ami. Vous m’arrivez tout juste du séminaire, alors je ne vais pas vous envoyer dans un endroit trop difficile. Dans cette petite ville, Dieu est bien connu, et pas trop délaissé. Vous arriverez aisément à remplir votre église pour les messes. Comme partout, le troisième âge sera surreprésenté. Sentant venir la fin, les fidèles s’inquiètent du bilan de santé de leur foi chrétienne. Ils veulent tous et toutes une place au Paradis, et sont prêts à aligner des kilomètres d’Ave Maria pour cela.
— Monseigneur, vos paroles me surprennent.
Il partit d’un rire franc.
— Père Laurier, nous sommes les fonctionnaires de Jésus. Nous avons une liste de courses bien longue à accomplir de notre mieux. Vous croyez en Dieu, comme moi, mais vous n’êtes pas un illuminé, un Savonarole au petit pied. Comme au séminaire, porter la parole du Christ est fait de moments de bonheur, et de longues périodes de routine. Votre mission est : enseigner, sanctifier et conduire, et je vous fais confiance pour la mener à bien. Faites-vous connaître, en bien, évidemment. Du maire, des commerçants, des bigotes, des enfants.
Il s’arrêta un instant.
— Vous êtes jeune ! trente-trois ans, l’âge du Christ ! Vous avez beaucoup de chance. Profitez-en !
— Je n’ai pas l’ambition de devenir évêque !
Monseigneur Develey s’offrit une seconde tournée de rire.
— Vous connaissez l’avenir ? Pas moi ! Bien ! Nous sommes en Bourgogne, où les bons vins coulent de source. Je vous propose de partager un excellent pommard. C’est bien mieux que le vin de messe ! J’espère que vous aimez le vin, ici, en Bourgogne, c’est obligatoire.
À voir sa trogne rubiconde, il devait adorer le pommard.
Étant originaire d’Is-sur-Tille, au nord de Dijon, il avait traversé plusieurs fois Chagny dans son adolescence – un mauvais moment à passer, disait François Truffaut – d’abord à vélo, lors de longues balades le long de la Saône avec ses copains de lycée, sans oublier les copines dont les jupes flottaient au vent malin. À cette époque, ils fredonnaient tous la chanson d’Yves Montand, À bicyclette, même si aucune des filles ne se prénommait Paulette.
La traversée de Chagny s’était ensuite faite en voiture, celle de ses parents, puis la sienne, une vieille Renault d’occasion. Mais sans trop s’y arrêter, même pour déjeuner. La carte du restaurant Lameloise titillait ses envies, mais l’endroit était beaucoup trop cher pour sa bourse plate. Il devait alors se rabattre sur La Chicorée, bien plus abordable. Il n’avait jamais compris cette appellation, la chicorée étant une spécialité du nord de la France, et non de la Bourgogne. Le restaurateur devait être un déraciné, ayant la nostalgie de son pays d’origine.
Mais désormais, cette commune devenait son point d’attache, et il s’était résolu à la scanner tout entière.
D’abord l’église, bien entendu. La vénérable Saint-Martin, du XIIIe siècle, une architecture cistercienne romane typique. Une nef centrale, deux petites nefs latérales, une tour carrée abritant deux cloches. À l’entrée, un porche en bois couvert d’un toit en tuiles romaines. Devant l’église, une place avait été dégagée. En son centre trônait l’Octagon, un octogone de deux mètres de haut, en l’honneur de Saint Eloi, patron des orfèvres et des forgerons. Le maire, Jean-Charles Tisserand, lui avait fait remarquer que l’édicule se dressait à treize mètres du porche, lui-même à treize mètres de l’autel.
— Pourtant le chiffre treize porte malheur, dit-on, sauf pour la Française des Jeux, où un vendredi treize est presque synonyme de gains mirifiques.
— Treize représente les douze apôtres, plus Jésus. Rien de malheureux là-dedans, avait rétorqué le père Laurier.
— Quand même, dans les tours américaines, vous pouvez toujours chercher un treizième étage.
— Ce ne sont que des superstitions, comme croiser un chat noir, passer sous une échelle ou présenter le pain à l’envers.
— Notre Seigneur est bien mort sur la croix un vendredi treize !
— Nous n’en savons rien.
— Mais le douzième apôtre était bien Judas !
— Oui, et Judas est devenu synonyme de traître. Mais aussi d’œilleton.
Le maire cessa de ferrailler.
— Excusez-moi, j’ai peut-être été un peu vif ! Soyez le bienvenu dans ma commune. Les chagnotins et les chagnotines vont être ravis d’avoir un prêtre jeune, plein d’allant.
— Je l’espère, oui.
— À propos, vous êtes bien originaire d’Is-sur-Tille. Comment nomme-t-on les habitants ?
— Les issois et issoises, rien de bien original.
Le maire, qui avait imaginé une réponse étonnante, en fut pour ses frais, et quitta le prêtre, prétextant un rendez-vous urgent.
Ayant remonté la nef centrale, le père Laurier s’agenouilla sur un banc et pria.
Enfin, il allait pouvoir prêcher la bonne parole. Le chemin parcouru défila dans son esprit. D’abord ce diplôme d’électricien obtenu au ras des pâquerettes, par cet élève feignant, disaient ses professeurs, rêveur, corrigeait-il. Puis cette période musicale, passant sans hésiter de Bach ou Beethoven à Deep Purple ou Santana ou les Who. La guitare de Jimi Hendrix à Woodstock l’avait électrisé, et il avait repassé en boucle les disques de ce festival de folie, jusqu’à en écœurer ses parents pour qui c’était de la musique de sauvages. Et puis, il avait découvert Pink Floyd et ses variations sidérales, planantes, cosmiques. Ummagumma, Meedle, Atom heart mother ou The dark side of the moon.
Ce fut en écoutant une énième fois ce disque qu’il eut la révélation. Ces accords étaient divins, Dieu existait, il l’appelait, il serait la lumière éclairant sa vie.
Au grand dam de ses parents, il abandonna le métier d’électricien, puis obtint en quatre ans son diplôme universitaire d’études théologiques, et entra au Séminaire, pour quatre autres années. Le rêveur-feignant du lycée s’était mué en un bourreau de travail, passionné par ces études.
Ordonné prêtre, il allait pouvoir aider les âmes des chagnotins, préparer au baptême, au mariage, célébrer des enterrements, administrer les sacrements, visiter les malades, organiser des services de charité, faire la catéchèse aux enfants, animer des groupes de discussion. Une mission prenante, qui l’occuperait à plein temps. Pour la réussir, il lui faudrait se faire accepter par le pasteur protestant, un concurrent sur ce marché ; par les autorités médicales ; par les femmes, bien plus présentes aux messes que les hommes ; par le conseil municipal, pour l’entretien de l’église ; et par sa hiérarchie, à qui il devrait prouver sa valeur.
La tâche ne l’effrayait pas, bien au contraire, elle le stimulait.
Il contempla longuement le Christ en croix qui dominait l’autel. Lui parlerait-il, comme à Don Camillo ? Il n’était pas un acteur de cinéma, il était l’acteur de sa vraie vie. Et ce n’était pas en implorant cette statue de bois qu’il trouverait des réponses à ses questions, à ses doutes. En fait, elle n’était que le miroir de son âme, elle ne dénouerait pas ses tourments, si jamais ils devaient se présenter.
Il se signa, se releva, et fit le tour du propriétaire, le dedans d’abord, le dehors ensuite. Sa maison de Dieu ne semblait pas avoir besoin de travaux importants. Pas mal pour une église érigée 700 ans auparavant. Le conseil municipal, qui hésitait toujours avant de dépenser, en serait ravi. Mais pour lui, le bâtiment n’était pas qu’un ensemble de pierres et de bois parfaitement emboîtés. La petite lumière rouge qui brillait à gauche du chœur montrait que Dieu l’habitait. Le père Laurier la ferait sienne, lui aussi, semaine après semaine, dimanche après dimanche. Il y déposerait ses joies et ses peines, elle deviendrait le cocon de son âme.
Tout à ce futur qu’il allait modeler, il appela son frère.
Qui répondit, bien qu’il le dérangeât en pleine après-midi.
— Christian, un problème ?
— Non, non, aucun, bien au contraire. Je suis arrivé à Chagny, l’accueil a été sympathique, et l’église est belle. Elle est romane, tu l’aimerais !
— Très drôle ! Ce n’est pas parce que je m’appelle Roman que tu dois me ressortir ta blague à chaque fois ! Je ne me ressers pas de ton prénom, Chris, à chaque conversation.
— Excuse-moi, je ne voulais pas te froisser. Du grabuge ?
— Pas vraiment. Des soucis, mais le tout-venant dans une entreprise comme la nôtre.
Le père de Roman avait créé une société de transport routier, Laurier, à qui ses clients tressent des couronnes, clamait la publicité. Et de fait, elle se développait rapidement, passée en quelques années d’un à trente poids lourds. Roman y occupait le poste de directeur logistique, jouant le rôle de second de son père Rémi. Pauline, sa mère, dirigeait le service financier.
— Tu comprends, frérot, nous avons acheté deux nouveaux semis, mais ils n’ont pas encore été livrés, alors qu’un de nos gros clients piaffe d’impatience. Lui aussi doit expédier sa marchandise, il doit tenir ses délais.
— Tu pourrais peut-être louer deux gros culs.
— J’ai essayé, sans succès ou alors, trop cher ! Frérot, tout est beaucoup plus simple pour toi.
Christian opina en silence. Lui œuvrait dans l’invisible, dans les cœurs de ses paroissiens et paroissiennes. Ce qui n’était pas forcément plus simple.
— Ton ministère va peut-être te laisser un peu de temps pour passer nous voir ?
— J’ai bien mieux que cela : je vous invite à ma messe inaugurale, dimanche en quinze. Mon évêque sera là.
— L’homme à la crosse dorée ? Mazette ! il t’a à la bonne ?
— Pas encore, mais j’y travaille.
— Tu veux prendre sa place, plus tard ?
— Mais non, le pouvoir ne m’intéresse pas !
— Et qui sait, devenir archevêque, puis cardinal, puis pape ! Maman adorerait avoir un fils pape, à défaut d’avoir un petit fils.
Et voilà que la vieille rengaine réapparaissait. Ses parents avaient eu du mal à accepter la vocation de leur cadet, qui les privait de petits-enfants à chérir. Certes, Roman comblerait sans doute ce manque, quand il aurait trouvé femme à son goût. Mais il ne semblait guère pressé, préférant collectionner des conquêtes passagères.
— De plus, reprit Roman, le pouvoir aspire l’argent. Mais cela ne t’intéresse pas, je sais. Et le pouvoir aimante les femmes, comme une lumière, attire les papillons.
— Un prêtre a fait vœu de chasteté.
— Ah oui, c’est vrai. Tu ne sais pas ce que tu perds. Sais-tu que vingt pour cent des clients des bordels sont des prêtres ?
— Depuis 1946, les bordels n’existent plus.
Il entendit Roman éclater de rire.
— De plus, j’ai vécu, avant de me consacrer à Dieu.
— Et tu ne regrettes rien ?
— Non, rien du tout. Pour moi, c’était une autre vie. Mais aujourd’hui, ce n’est plus moi. Alors, vous viendrez ?
— Pourquoi pas ? Je vais demander aux parents.
Après les salutations d’usage, Christian raccrocha. À l’ouest, le ciel bleu virait à l’orange. La Terre s’apprêtait à avaler le soleil jusqu’au lendemain. Il respira à pleins poumons. Il se sentit le plus heureux des hommes.
En un mois, il avait gagné son pari. Les chagnotins l’avaient adopté, appréciant sa gentillesse et son dévouement. Le maire lui-même, qui était un farouche républicain, ne tarissait pas d’éloges sur lui, dès le deuxième verre de vin avalé. Le père Laurier, bourguignon grand cru, s’était coulé avec bonheur dans cette peau de prêtre bienveillant et dynamique. Sans en parler à sa hiérarchie, il avait innové pour l’office dominical. Il avait remplacé l’homélie, destinée à faire la morale à ses ouailles, par une séance de catéchisme pour les jeunes, réunis en cercle autour de lui, à l’image de ce qui se pratiquait chez son concurrent luthérien. Au début, les ados avaient bougonné – quoi, une classe le dimanche, le seul jour sans école ! – puis avaient fini par apprécier ces monologues que le prêtre improvisait au fur et à mesure. Leurs parents, ravis de cette aide précieuse pour l’éducation de leurs enfants, en avaient fait une large publicité. Et l’église s’était remplie.
En cette fin de journée d’avril, il avait fait entrer au presbytère un jeune couple, pour entamer leur préparation au mariage. Il maîtrisait parfaitement la théorie, mais il s’agissait quand même d’une première fois.
— Je vous souhaite la bienvenue. Je suppose que vous me connaissez, mais moi, je ne vous connais pas. Alors ?
Lui prit la parole en premier.
— Je suis Sébastien Tisserand, le fils du maire de Chagny. Mon père m’a beaucoup parlé de vous, en bien, je vous rassure. Je souhaite me marier religieusement, tout simplement parce que je crois en Dieu.