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"Déviation" est un éloge à la femme. Au cœur de cette histoire, les femmes maîtrisent leur destin ou le cherchent ardemment. Les hommes sont des instruments qui les aident à atteindre leurs ambitions. Parmi elles, Alexandra, jeune femme en quête du plaisir ultime, découvre un monde sans tabou dans lequel elle se perd avant de trouver sa voie. Elle plonge dans un érotisme sulfureux, parfois intense, mais teinté de sensibilité et de surprises. Incertaine de son rôle et sa place au sein de cette communauté, elle oscille entre résistance et fascination, jusqu’à ce qu’elle se révèle pour bâtir sa propre destinée.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Écrit en 1999, "Déviation" est resté longtemps en sommeil. Après quinze ans sur son voilier dans l’océan Indien,
Pascal Céhair décide de soumettre cet ouvrage à la lecture. Avec ce deuxième roman, inspiré du film d’Oshima « l’empire des sens », il nous entraîne dans un monde érotique.
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Seitenzahl: 177
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Pascal Céhair
Déviation
Roman
© Lys Bleu Éditions – Pascal Céhair
ISBN : 979-10-422-0084-8
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
— Entrez, le maître vous attend.
Le vieux serviteur s’effaça pour laisser entrer le couple qui patientait sur le perron. Lui, la quarantaine bien tassée, était vêtu d’un costume trois-pièces un peu guindé, quoique d’une excellente facture. Avec son visage plutôt rond, la lèvre un peu molle et ses yeux éteints, il avait tout du bureaucrate discipliné, le parfait commis de l’État. Avec un peu plus de dynamisme, il aurait pu être beau gosse. D’ailleurs, il avait dû l’être, jadis. Il se tenait raide comme un piquet et essayait de ne pas trahir sa nervosité en regardant où il posait les pieds. Elle, au contraire, semblait étrangère à ce qu’elle vivait et esquissait seulement un léger sourire. Son tailleur beige très cintré trahissait son origine de bourgeoise provinciale. Sa silhouette grande et élancée, sa démarche fluide ainsi que son regard droit montraient qu’elle se savait sûre de sa beauté.
Ils étaient arrivés en fin d’après-midi après un long périple. D’abord le TGV, puis la limousine qui les attendait à la gare. Il leur sembla que le chauffeur ne prenait pas la route la plus directe. Ils ne s’en formalisèrent pas, le paysage était plutôt agréable. À leur arrivée, un domestique avait pris les bagages en charge, tandis que le chauffeur leur montrait de loin les différents bâtiments : la roseraie, les écuries, enfin le manoir qui, malgré sa façade de pierres jaunes, paraissait renfermer d’obscurs secrets. La femme écoutait d’une oreille distraite, son mari faisait mine de s’intéresser. Le vieux les avait immédiatement conduits dans leurs appartements. Un bien grand mot. Une vaste chambre aux murs simplement chaulés : Une petite table, deux fauteuils, le lit, une salle de douche attenante. Sobre, un peu monacale, mais plutôt agréable. Elle constata que sa valise avait été ouverte. Elle fit un inventaire rapide.
— Ça commence bien, murmura-t-elle.
On vint leur annoncer que le maître les attendait dans le grand salon.
Quand ils découvrirent la pièce, ils marquèrent un temps d’arrêt. Le séjour était immense et comme le jour tombait, la lumière provenant des fenêtres était insuffisante pour en éclairer la totalité. Ils parvinrent à discerner cependant des tentures un peu défraîchies qui tentaient de réchauffer l’atmosphère. Seul un petit îlot éclairé par deux bougeoirs émergeait de cet antre un peu lugubre. C’est de là qu’ils aperçurent l’homme venir à leur rencontre et s’incliner devant eux. Il n’était pas très grand ni petit d’ailleurs et il était difficile de lui donner un âge. La cinquantaine, peut-être. Sa tenue était celle d’un gentleman-farmer, un peu désuète mais soignée. Un charme un peu anglais émanait de son allure.
— Je suis Armand, le maître des lieux. Je vous prie d’excuser cet accueil, mais nous avons eu une panne de courant due aux violents orages de cet après-midi. Venez vous installer, je vous prie.
Il les précéda et leur indiqua deux fauteuils en cuir noir dans lesquels ils prirent place. Lui-même s’installa en face d’eux dans un immense canapé. Aussitôt, une servante entra et déposa un plateau sur la table basse. Elle fit le service du thé sans rien demander à personne, comme s’il allait de soi que chacun désire cette collation.
— Je vous laisse vous servir en sucre, dit le maître, et parlons de nos affaires. Avez-vous pris possession de vos appartements, chère Madame. En êtes-vous satisfaite ?
— Parfaitement, répondit-elle d’une voix claire, cependant, il y a certaines choses qui me troublent ?
— Ah oui !
— Mes bagages ont été ouverts et certaines affaires ont disparu. C’est fort déplaisant.
— Pourriez-vous me dire lesquelles exactement ?
— Tous mes sous-vêtements et mes pantalons, répondit-elle d’un ton pincé.
— C’est normal, ne vous formalisez pas pour cela, ils vous seront restitués. Ils vous ont été enlevés, car ici ils ne seront d’aucune utilité durant votre séjour au manoir. Je suppose que vous avez lu le règlement de la maison.
— Absolument.
— Alors pourquoi croisez-vous les jambes ?
Elle avait effectivement reçu les règles de la maison quelques semaines auparavant. Certains points l’avaient étonnée, intriguée même. Pourtant, elle avait signé sans y accorder plus d’importance. C’était la condition pour être admis au manoir, alors…
La femme rougit jusqu’aux oreilles et se raidit. Elle regarda son compagnon pour y chercher une aide, mais celui-ci fuit son regard en se concentrant sur sa tasse de thé. Elle posa ses yeux sur son interlocuteur qui lui, la fixait avec une lueur ironique. Lentement, elle décroisa les jambes, sans baisser les yeux pour autant.
« Elle est vraiment très belle, pensa le maître. Une ligne superbe et un port de tête remarquable, les traits fins et harmonieux couronnés par une chevelure blonde qui tombent sur de fines épaules. »
— Pardonnez-moi, dit-il en chassant ses pensées, mais ce sont des détails auxquels je tiens.
— Puis-je savoir ce que vous attendez de moi ?
— Bien sûr. Vous avez sollicité un séjour au manoir. Votre recommandation a été fort utile, car sinon vous n’auriez pas été acceptés. Voyez-vous, nous n’ouvrons notre porte qu’à une gent triée sur le volet. Tout ce qui vous sera demandé ici sera votre disponibilité totale. Mais puis-je à mon tour connaître vos motivations ?
— Mon mari et moi pensons que nous avons besoin de redonner un peu de nouveauté à notre couple. Mon mari a eu une relation ancillaire en automne dernier avec une soubrette…
— Chérie, ces détails…
— Laisse-moi parler, chéri, je préfère jouer cartes sur table !
L’homme baissa les yeux et les plongea ostensiblement sur ses chaussures.
— Donc, reprit-elle, nous avons fait le point après, disons, cet écart de conduite. Il nous a semblé que nous devions réagir, le personnel n’étant pas fait pour pallier nos carences. C’est lors d’une soirée à l’ambassade de Grande-Bretagne qu’un de nos amis nous a parlé de votre petite société, en langage très voilé, il faut bien le concéder. Sa femme et lui-même avaient fait un petit séjour chez vous et en semblaient très satisfaits. Nous en avons discuté mon mari et moi et avons invité nos amis à nous fournir plus de détails. Nous en avons été pour nos frais, sachez que vos secrets sont bien gardés, Monsieur.
— Vous m’en voyez ravi, mais il n’y a pas de secret. Nous recommandons seulement à nos membres un peu de discrétion.
— Tout ce qu’ils nous ont révélé, c’est qu’ils se sentaient comme neufs dans leur couple. Ils nous ont également proposé de nous recommander, puisque cela semble nécessaire.
— Effectivement, c’est indispensable.
— Nous avons mis quelques jours avant de nous décider, puis finalement nous avons fait la demande qu’ils vous ont transmise.
— Si j’en crois votre courrier, vous serez la seule, Madame, à séjourner ici, votre mari étant retenu ailleurs.
— En effet, dit précipitamment l’homme, je suis appelé à l’étranger pour quelques semaines. D’habitude, ma femme m’accompagne, mais elle a voulu profiter de ce déplacement pour suivre, comment dire, votre stage.
Le maître éclata de rire.
— Stage n’est pas tout à fait le mot approprié. Disons que vous entrez dans une auberge espagnole. Vous n’y trouverez que ce que vous pouvez apporter. Bien sûr, vous serez guidée. Parfois, vous serez surprise, heurtée peut-être, mais c’est la règle du jeu. Et vous en sortirez quand vous le voudrez. Cela arrive parfois qu’un résident abrège son séjour, rarement en fait.
Il se tut, laissant planer un silence plein de mystères.
— Désirez-vous toujours rester parmi nous, Madame ?
— Je m’y suis engagée.
— Alors je vous demanderai de me confier votre cellulaire.
Elle se raidit pour la seconde fois et fronça les sourcils.
— Je suis votre prisonnière ?
À nouveau, le maître s’esclaffa.
— Absolument pas, mais ici les portables sont interdits. Ces petits appareils sont de vrais petits mouchards et nous tenons à notre tranquillité. D’ailleurs moi-même, je n’en possède pas. Vous pouvez vous servir du téléphone fixe de la réception à votre guise, c’est le seul de la maison.
— Pour les conversations privées, ce n’est pas très pratique.
— Madame, sachez qu’à partir de maintenant et tant que vous serez dans ces lieux, vous n’avez plus de vie privée.
Il prononça ces mots sans élever le ton, mais où transparaissait une autorité presque menaçante. Il ne lâcha pas la femme du regard et elle se sentit transpercée. Un frisson lui parcourut le dos et elle pinça les lèvres. Elle bougea enfin et saisissant son sac à main, elle en retira son téléphone. Elle le lui tendit avec un air de défi.
— Le voilà.
— C’est bien. Ce soir, je vous laisse vous installer. Vous prendrez votre repas dans votre chambre. Je ne sais pas si Monsieur reste pour la nuit !
— Non, je dois partir ce soir, c’est préférable.
L’homme avait perdu de sa superbe et semblait soulagé de quitter rapidement les lieux.
— Comme il vous plaira. Madame, vous ferez connaissance avec le personnel et les autres invités demain matin. Sara, la maîtresse de maison, va vous raccompagner. Ah oui, j’oubliais, pour nous tous maintenant vous vous appelez Miel.
— Miel, c’est charmant.
— Cela vous va bien. Bonsoir.
Ils se levèrent pour prendre congé. Une femme entra. C’était Sara. Le type eurasien, elle était toute en finesse et son charme exotique était saisissant. Son visage semblait avoir été ciselé dans la plus pure des porcelaines. Mais surtout, ce qui captivait, c’était son regard perçant qui brillait d’une rare intelligence à travers deux billes de jade. Sans un mot, elle salua le couple et les précéda vers la sortie.
La porte s’ouvrit brutalement et une énorme silhouette se dessina dans la pénombre. Elle se dirigea vers la fenêtre et écarta violemment les rideaux. La lumière inonda la chambre et révéla le monstre qui avait fait intrusion dans toute sa splendeur. Qu’en dire, si ce n’est que la femme, si c’en était une, était plutôt plantureuse. Miel (puisque c’est ainsi qu’elle s’appellerait désormais) la regarda, un peu effarée.
— Je m’appelle Éloïse. Ne riez pas, on ne choisit pas son prénom. Je suis chargée de votre service. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous sonnez. Si je ne suis pas prise ailleurs, je viens. En attendant, voilà votre petit déjeuner, après je vous préparerai.
Miel s’étira. La nuit avait été courte et pleine de méchants cauchemars dont elle avait encore la trace, mais plus le souvenir exact. Elle avait envie de rire en voyant la bougonne Éloise s’agiter à ranger ses affaires. En fait, la journée commençait bien. Et puis elle se souvint :
— Me préparer ? Me préparer à quoi ?
— Mangez, on verra tout ça après. Prenez votre temps, on a toute la matinée. Je vous laisse, c’est que je n’ai pas que ça à faire moi.
Et elle sortit dans un tourbillon de jupons, sans oublier de claquer la porte. Un service plein de délicatesse, décidément…
Miel s’étira une nouvelle fois. La bonne et tendre Éloise avait raison : ne pas se poser de questions et manger. Elle se leva et se dirigea vers la fenêtre. Un immense parc s’offrait à ses yeux encore ensommeillés, une invite à une promenade matinale. Elle s’assit à sa table et découvrit un vrai petit déjeuner à l’anglaise. « Au moins, les gens savent vivre ici ». Elle attaqua ses œufs au bacon avec avidité. Les vacances commençaient bien. Une fois restaurée, elle parcourut son nouveau domaine du regard. Là, sur le fauteuil, Éloise avait déposé une robe bleu ciel et quelques lanières de cuir. Étrange, je dois mettre ça ? Elle n’eut pas à attendre longtemps la réponse, la trombe réapparut dans la chambre.
— Vous allez mieux ? Allez, je vous prépare. D’abord cette robe, Madame Sara l’a choisie pour vous. Si elle ne vous convient pas, vous vous arrangerez avec elle. Ensuite, vos bracelets.
— Mes quoi ?
— Aux poignets et aux chevilles. Le collier pour le cou, bien sûr.
— C’est l’uniforme réglementaire ?
— Uniforme ? Il n’y a pas d’uniforme. Ensuite, je m’occupe de votre chatte.
Miel crut suffoquer.
— Ma chatte ? Vous voulez dire…
— Oui, je veux dire, montrez-moi ça !
— Mais il en est hors de question, vous me prenez pour qui ?
La grosse Éloise la regarda d’un air étonné.
— Je dois vous préparer, c’est tout.
— Vous ne me toucherez pas, c’est clair !
— Je ne vous force pas, mais ce qui est clair, c’est que cela ne va pas plaire à Madame Sara.
— Je me moque de cette dame, sortez !
La grosse haussa des épaules et sortit avec le même fracas que la première fois. Miel essaya de faire le point. D’abord, Miel, qu’est-ce que cela signifiait ? Pourquoi pas Marmelade tant qu’on y était ? Elle s’approcha du fauteuil. Elle se débarrassa de sa nuisette et essaya sa nouvelle robe. Plutôt sympa, Sara avait du goût. Le bleu va bien aux blondes. Mais ces bracelets ? Pourquoi pas après tout ? Elle ne savait pas pourquoi, mais ces accessoires exerçaient sur elle une étrange attraction. Elle s’en défendit en se disant que ce serait amusant de les porter. Ils étaient fins et confortables et s’ajustaient parfaitement à ses articulations. Seul le collier la dérangeait un peu plus, mais bon, c’était un ensemble, alors… Chacun de ces accessoires était muni d’un anneau. En plein sado-maso, bonjour l’ambiance. Elle se regarda dans le miroir en pied. Pas mal, ma petite Marmelade. Et il va falloir se balader dans cet accoutrement ? Pourquoi pas après tout, descendons.
Franchie le seuil de sa chambre, elle découvrit un immense couloir. Flûte, hier, elle était guidée et n’avait pris aucun point de repère. Marmelade, te voilà partie à l’aventure ! Demande ton chemin aux fantômes de rencontre. En fait à force de tourner, de descendre des escaliers étroits, de franchir des voûtes, elle se retrouva dans les cuisines. Il y régnait une intense activité et les arômes subtils vinrent flatter ses narines. Son arrivée ne provoqua aucun trouble.
— Bonjour, je m’appelle Marmel… Heu, pardon, Miel !
— Bonjour Madame, vous avez besoin de quelque chose ?
Une grosse matrone à l’air avenant s’était retournée.
— Non, en fait, je visite et je cherche le parc.
— Je vois, vous êtes nouvelle. Eh bien, visitez. Gilbert va vous conduire jusqu’au parc, c’est la bonne heure, à la fraîche. Gilbert, bouge-toi et conduit Madame Miel.
Le nommé Gilbert, accoudé à la grande table de cuisine, prit un morceau de lard dans son assiette, l’avala et en grognant souleva son immense carcasse. Impressionnant le bonhomme, mais une bonne douche ne lui ferait pas de mal. Il passa devant Miel sans la saluer et elle dut courir derrière lui pour le suivre. Enfin, à force d’escaliers, de couloirs et de portes, ils débouchèrent à la lumière du jour. Le parc s’ouvrait devant elle.
— Vous faites quoi, Gilbert, ici ?
— Responsable des écuries. Si vous voulez faire une balade à cheval, prévenez-moi.
Là-dessus, il tourna les talons et s’enfonça dans la bâtisse. Son lard l’attendait en refroidissant.
— Merci, murmura Miel tandis qu’il s’éloignait.
Elle entra dans le sous-bois et se remplit des odeurs des résineux. Elle sentit sa peau se laisser caresser des fragrances sylvestres. Les aiguilles crissaient sous ses pas et il en émanait une odeur acide légèrement enivrante. Un bain de jouvence, souvenir d’enfance… Elle s’appuya contre un vieux douglas et se laissa glisser sur le sol moelleux. Elle sentit la sève de l’arbre couler en elle, elle revivait. Machinalement, elle caressa sa joue, son collier de cuir et sentit une vague étrange de sensualité monter en elle. « Oh ! Marmelade, on se calme ». C’est à ce moment-là qu’un de ses bracelets se mit à biper. C’est quoi ça encore ? Plus rien. Alors, profiter de l’instant qui passe. Elle resta ainsi longtemps, mais pas tant que ça, le temps de retourner au paradis de son enfance où rien n’est corrompu, où la réalité est simple. Elle se releva, vivifiée. Elle se dirigea vers ce manoir qu’elle trouva bien sombre d’un coup. « Ma prison dorée, que suis-je venu faire ici ? » Elle se rapprochait lentement quand elle remarqua le vieux serviteur qui les avait accueillis hier se précipiter à sa rencontre. Il arriva vers elle hors d’haleine, mais put articuler :
— Madame, mon maître vous attend, faites diligence.
— Je veux bien faire diligence mon ami, mais de grâce reprenez votre souffle, il n’y a pas d’urgence que je sache.
— Mais il vous a bipé !
— Ah, c’était donc ça, eh bien allons-y, mais calmement, et respirez, vous me faites peur. Où est-il votre maître ?
— Dans le boudoir de Madame.
— Ça promet, eh bien allons-y, voyons.
Et le manoir, et encore des couloirs et enfin une porte. Le vieux machin ouvrit sans même frapper et s’effaça pour la laisser entrer. Là, l’atmosphère était plutôt apaisante. Parfums subtils de l’orient, lumière douce, calme et sereine. Elle s’avança prudemment, elle entrait dans un sanctuaire.
— Bonjour Miel.
La voix la surprit. Pourtant, elle était douce et bienveillante. C’était Sara.
— Le maître veut vous recevoir, mais vous êtes chez moi, sachez-le.
Elle la prit par la main et la conduisit sur un sofa. Elle alla se réfugier un peu plus loin, dans une lumière plus tamisée. Pourtant, son regard ne quittait pas Miel comme pour la réconforter. Armand était devant elle, il fumait un cigare.
— Bonjour Miel, avez-vous passé une bonne nuit ?
— Oui parfaitement, heu, Monsieur.
— J’en suis ravi. Je constate que Sara vous a trouvé une tenue qui vous sied à merveille. Vos entraves ne vous blessent pas j’espère.
— Entraves ? Ah ça, non, c’est amusant, tout au plus.
— Il n’y a rien d’amusant à cela, mais vous le découvrirez bien assez tôt. Levez-vous, je vous prie, et approchez.
Miel jeta un œil sur Sara qui l’encouragea à obtempérer. Alors elle se leva et s’approcha d’Armand. Il se dressait au-dessus d’elle et tirait nonchalamment sur son cigare. Il prenait son temps à la parcourir du regard et cela devenait vraiment gênant.
— Troussez votre robe.
Avait-elle bien entendu ? Le ton de sa voix avait été si anodin, elle avait dû mal entendre.
— Pardon ?
— Vous avez très bien compris et je déteste me répéter. Troussez votre robe.
— Mais je n’ai rien dessous.
Un froissement de robe, Sara s’approchait et lui posait une main sur l’épaule. Miel ne comprenait plus, elle ferma les yeux. Elle sentit des doigts légers glisser le long de ses cuisses et relever le pan de sa robe.
Elle réagit violemment et s’empara du poignet de Sara.
— Mais ça va pas, non ! Pour qui vous prenez-vous ?
Elle tremblait de tous ses membres sur la défensive. Le maître la regardait, impassible, ses petits yeux perçants exprimaient une vague désapprobation. Tout s’était immobilisé, le temps suspendu. Miel se souvint : disponibilité. C’était donc ça qu’on lui demandait. De s’exhiber, puéril. Pourquoi pas après tout ? Elle hésita encore. Elle libéra le poignet qu’elle tenait. Sara acheva son geste.
Elle était exposée dans toute son intimité et complètement tétanisée. Elle sentit d’autres doigts se poser sur elle, elle se raidit encore.
— Éloise n’a pas fait son travail. Miel, vous faites ce que vous voulez, votre séjour est payé et bien payé, sachez-le. Vous voulez passer des vacances au manoir libre à vous. Continuez ainsi, cela ne me perturbe pas et vous repartirez telle que vous êtes entrée ici. Maintenant, je ne crois pas que vous soyez venue pour cela. Libre à vous de décider.
Tout en parlant, le maître glissait ses doigts entre les lèvres de son sexe offert. Il ne faisait que l’effleurer en fait.
La main s’attardait un peu trop à son goût. Miel sentit son bassin osciller malgré elle, et elle s’en voulut de se rendre aussi facilement. La main de Sara était toujours sur son épaule. Miel inclina la tête et la posa sur l’épaule de la maîtresse. Ses jambes commençaient à trembler, elle allait gémir. Non !
La caresse cessa aussi brutalement qu’elle avait commencé. Le pan de sa robe retomba et Sara s’écarta d’elle.
— Rentrez chez vous, je veux vous revoir ce soir dans la grande salle. Vous pouvez sortir.
Miel se dirigea vers la sortie et ne sut jamais vraiment comment elle avait regagné sa chambre.