Dis, c'est quoi l'homophobie ? - Valérie Dureuil - E-Book

Dis, c'est quoi l'homophobie ? E-Book

Valérie Dureuil

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Beschreibung

« PD, sale gouine, fiotte ! » Des insultes courantes, parfois taguées, criées dans les couloirs des écoles ou prononcées dans les médias. Des ados jetés à la rue par leurs parents, des personnes virées de leur emploi, des agressions physiques, des thérapies de conversion pour changer d’orientation sexuelle. Autant de rappels que l’homophobie reste bien ancrée. Elle peut revêtir différentes formes, être proclamée haut et fort ou diffusée insidieusement au quotidien. Dès lors comment l’identifier, la comprendre, la désamorcer ? Pourquoi la question de l’homosexualité, de la bisexualité, provoquent-elles autant de réactions de rejet, de peur ? Que remettent-elles réellement en question ? Toutes ces interrogations pointent un des fondements de notre société, le modèle hétéronormé. Si la différence continue à effrayer, cet ouvrage tente de concevoir les fonctionnements de l’homophobie et les moyens d’en sortir.

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Seitenzahl: 77

Veröffentlichungsjahr: 2021

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DIS, C’EST QUOI

l’homophobie ?

Valérie Dureuil, Déborah Fabré

Dis, c’est quoi l’homophobie ?

Renaissance du Livre

Drève Richelle, 159 – 1410 Waterloo

www.renaissancedulivre.be

Directrice de collection : Nadia Geerts

Maquette de la couverture : Corinne Dury

Mise en page : CW Design

e-isbn : 9782507057206

dépôt légal : D/2021.12.763/08

Droits de traduction et de reproduction réservés pour tous pays.

Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage est strictement interdite.

Valérie Dureuil Déborah Fabré

DIS, C’EST QUOI

l’homophobie ?

Préface de Patrick Charlier

Avertissement

Ce livre traite de la question de l’homophobie, de la lesbophobie et de la biphobie. Tout ce qui est lié à la transphobie, apparaissant comme une matière trop importante, devrait bénéficier d’un ouvrage uniquement consacré à cette question. Pour cette raison, nous ne reprendrons dans certains passages que les termes L (Lesbienne) G (Gay) B (Bisexuel) et dans d’autres, nous ajouterons le T pour Trans et autres appellations qui seront définies dans le lexique.

Préface

L’homophobie, toujours d’actualité

La lecture de cet éclairant « Dis c’est quoi » consacré à l’homophobie m’a rappelé une anecdote personnelle. C’était lors d’un repas de mariage, j’étais à une table avec des proches et des amis, plutôt ouverts et tolérants. Nous évoquions un ami commun, présent d’ailleurs au mariage mais à une autre table, qui était venu avec son compagnon. Nous savions toutes et tous qu’il était homo et je n’ai jamais senti la moindre animosité, hostilité ou réticence de qui que ce soit dans notre groupe.

Cependant, à la faveur de l’ambiance festive, peut-être à la faveur du champagne et du vin, la conversation s’est orientée vers cet ami et son compagnon avec des commentaires, des questions et des interrogations sur leurs pratiques sexuelles supposées. Qui joue quel « rôle » ? Com­ment cela se passe-t-il dans l’intimité de leur couple ? etc…

Je me suis alors étonné du tour que prenait cette conversation en m’interrogeant sur le fait de savoir si nous aurions eu la même réaction face à un couple hétérosexuel. Ça a jeté un bref froid et très vite nous sommes passés à autre chose.

Cette anecdote illustre le chemin qu’il reste à faire.Comme le rappellent Valérie Dureuil et Déborah Fabré, la Belgique a connu une évolution considérable sur la reconnaissance des droits des personnes LGBTQI+ ces quelques vingt dernièresannées, au point de situer très régulièrement notre pays sur le podium de la Rainbow map éditée chaque année par ILGA1.

Et pourtant, si l’égalité en droit n’est pas vraiment contestée dans notre pays, il reste une hétéronormativité de principe, une homophobie latente qui se traduit dans des propos, des remarques, des commentaires mais aussi dans des actes, des pressions, du harcèlement, des discriminations, de la violence.

S’il est vrai que la Belgique n’a pas connu des manifestations majeures hostiles au mariage pour tous, à l’homoparentalité, comme on a pu le voir en France, il n’en reste pas moins que de vivre en personne gay, lesbienne, bi, trans*, queer et inter* + n’est pas toujours une sinécure. Comme s’il y avait une acceptation intellectuelle du principe d’égalité et de non-discrimination mais qu’il restait encore une hostilité viscérale. Chacune et chacun peut vivre comme il l’entend, mais pour autant que je ne le voie pas, que cela ne concerne pas quelqu’un de ma famille, un de mes collègues…

Que nous disent les chiffres d’Unia ? Nous ouvrons en moyenne une centaine de dossiers par an, chiffre relativement stable au cours des cinq dernières années. Cela situe les discriminations, les discours de haine et les actes de haine envers les LGBTQI+ sur la cinquième place du podium des critères pour lesquels nous sommes le plus saisis (sur 17 critères pour lesquels nous sommes compétents). Soulignons qu’Unia n’est compétent que pour les LGB, tout ce qui vient après, c’est-à-dire la transidentité, l’identité de genre, et l’intersexuation,… revient à l’Institut pour l’égalité entre les femmes et les hommes. En 2019, l’IEFH a enregistré 5 % de leurs signalements relevant de la catégorie « transgenre ».

Même si 2019 a connu une augmentation du nombre de dossiers liés au travail et aux médias, la singularité des dossiers ouverts concernant l’orientation sexuelle, c’est la prédominance du secteur « vie en société ». Cela vise les incidents, tels que les insultes, les menaces, les coups, le harcèlement, qui se passent dans la rue, dans les transports publics, dans le cercle familial, entre voisins. Pour aucun autre critère, que ce soit le racisme, le handicap, l’âge, les convictions religieuses, etc., nous ne constatons un phénomène d’une même ampleur. Si on ajoute à cela le secteur des médias, qui concerne essentiellement les médias sociaux, les forums de discussion, etc., nous avons une image qui traduit de l’homophobie au sens strict, à savoir une hostilité, un mépris, une violence à l’encontre des personnes homosexuelles, bien plus que de la discrimination même si cela arrive bien entendu.

En effet, plus de 60 % des dossiers relèvent des discours ou des actes de haine lorsqu’il s’agit d’orientation sexuelle, alors qu’il y en a moins de 60 % lorsqu’on parle de racisme, moins de 50 % lorsqu’on parle de convictions religieuses… et 5 % lorsque l’on parle de handicap.

Concernant les discours de haine, la proportion d’insultes verbales et non verbales (33 %) est bien plus importante qu’en matière de racisme (13 %) ou de convictions (7 %).

Enfin, si on s’attache aux actes de haine, la proportion de coups et blessures (plus de 30 %) est aussi bien plus importante (17 % pour racisme, 16 % pour convictions).

Dans une récente publication éditée par la Fon­dation Roi Baudouin (Comment (mieux) aider les victimes de délits de haine à se reconstruire ?,2020) plusieurs victimes de LGBTQI+phobiestémoi­gnent de leurs craintes ou de leurs expériences négatives lorsqu’elles souhaitent porter plainte à la police, chercher un soutien dans leur cercle proche, dans leur environnement professionnel, dans les services de santé, dans des services de médiation,… Et cela fait boule de neige. Être mal reçu une fois décourage à entamer des démarches ultérieures.

Une autre étude, commanditée par Unia et réalisée par l’Institution national de criminologie et de criminalistique (Une analyse des dossiers judiciaires classés sans suite comprenant une prévention liée à la discrimination, 2020) s’est attachée au classement sans suite des plaintes pour infractions aux législations antidiscrimination. Une analyse de ces dossiers judiciaires permet d’avoir une idée plus précise des stéréotypes et des préjugés à l’égard des LGBTQI+. Outre l’insulte elle-même, et notamment le terme « fiotte », sont associés des qualificatifs qui renvoient à la saleté, à la maladie ou à la déviance, en ce compris la pédosexualité. Les références à des interdits d’ordre religieux ou culturels sont également régulièrement mobilisées.

La question de l’homophobie est particulièrementimportante dans le cadre scolaire. Déborah Fabré et Valérie Dureuil soulignent le plus grand risque de harcèlement, de dépression et de tentative de suicide chez les jeunes homos que chez les hétéro. Le Baromètre de la diversité enseignement (2018) indique que s’il y a une ouverture de principe assez importante (variable en fonction des niveaux et des réseaux), il n’en reste pas moinsune méconnaissance importante, un man­qued’outils et d’approche véritablement inclusive des personnes LGBTQI+.

L’enseignement, comme notre société dans son ensemble, reste terriblement hétéronormé. Une autre anecdote pour terminer cette préface qui illustrera cette réalité. Un couple homo se fait contrôler par la police lors du confinement lié au Covid-19. Ils se promènent ensemble sans respecter la distance d’un mètre cinquante. Ils ont dû démontrer et prouver au policier qu’ils étaient en couple, qu’ils vivaient ensemble et qu’ils étaient donc de la même bulle. Tant il est vrai que l’ensemble de la communication autour de la lutte contre la pandémie a été marquée par un retour vers une certaine normativité familiale.

Toutes ces raisons font qu’un ouvrage tel que celui que vous tenez entre vos mains est d’un intérêt primordial. S’adressant aux jeunes, nous formulons le pari qu’il permettra à chacune et chacun de mieux comprendre, de mieux se comprendre, de s’accepter tel qu’on est et d’accepter l’autre tel qu’il ou elle est.

Patrick Charlier Unia2

1. ILGA : International Lesbian, Gay, Bisexuel, Trans and Intersex Association (www.ilga.org)

2. UNIA : Centre interfédéral pour l’égalité des chances www.unia.be

Dis, c’est quoi l’homophobie ?

Ce soir-là, je rentrais chez moi en flânant après une journée de travail. C’était la fin des vacances d’été, il faisait beau, je n’étais pas pressée et je voulais profiter de la fraîcheur de la soirée.

Je ne croisai pas grand monde, beaucoup de gens étaient encore en vacances. J’aimais cette période, j’avais l’impression que la ville m’appartenait, je pouvais m’y promener en toute quiétude.

J’avais rendez-vous avec ma nièce de dix-neuf ans dont j’étais assez proche, nous avions prévu de prendre un verre à une terrasse.

– Tu veux boire quoi ? Après cette chaude journée, je me laisserais bien tenter par le thé glacé maison. Et toi ?

– Bonne idée, je prends comme toi. Parce que tu sais, le thé, mine de rien, ce n’est pas une boisson de fiotte ! Même Winston Churchill en buvait. Je l’ai entendu à la radio.