Erzulie - Claire Le Guellaff - E-Book

Erzulie E-Book

Claire Le Guellaff

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Beschreibung

Ce récit s'inspire d'un fait divers réel. Une jeune femme est découverte sur une plage du sud de l'Europe, amnésique, sans papiers d'identité, les pieds nus et avec cinquante euros en poche. Qui est-elle ? Comment s'est-elle retrouvée là ? D'une rencontre, au-delà des coïncidences et d'un univers à l'autre : deux femmes à la recherche d'une identité. Et la vie bascule... Qui ment ? Qui dit la vérité ?

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Seitenzahl: 54

Veröffentlichungsjahr: 2024

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Il est de la capacité de l’esprit de voir un problème sous tous les angles et de voir la possibilité sous d’autres perspectives, même lorsque ces perspectives semblent se contredire.

Sommaire

Prologue

I. L’Hôpital psychiatrique

2. À la recherche d’une identité

3. De l’une à l’autre

4. Ailleurs : quelques grains de sable

4. Ajustement des variables

5. À l’épreuve du temps et des espaces

6. Un passé fixe

7. Réajustement des variables

8. Les impératifs du présent

9. La conjugaison des temps

10. Mémoire du temps pour une libération conditionnelle

11. La faille

12. Le devoir de mémoire

13. L’Alignement

14. L’impossible retour

PROLOGUE

Ce récit s’inspire d’un fait divers réel. Il y a quelques années, une jeune femme fut retrouvée sur une plage à plus de mille kilomètres de son domicile sans aucun papier et avec cinquante euros en poche.

Le Figaro.fr avec AFP - Publié le 18/02/2014 à 19:32, Mis à jour le 18/02/2014 à 19:34

« La Garde civile espagnole a annoncé aujourd'hui qu'une femme retrouvée sur une plage du nord de l'Espagne, souffrant d'amnésie avec une mystérieuse inscription sur les mains, avait été identifiée comme une Française de 24 ans disparue à Toulouse le 11 février. "La jeune femme était apparue désorientée et amnésique, sans se souvenir qui elle était ni d'où elle venait... Sur ses mains était inscrite une phrase en anglais « Forgive me, I failed », (pardonne-moi, j'ai échoué), ajoute la Garde civile, précisant qu'elle n'avait "subi aucun type d'agression et que les examens toxicologiques avaient donné un résultat négatif...

Elle revendiqua haut et fort une identité et un passé dont les autorités administratives ne trouvèrent aucune trace.

Déclarée amnésique, l’hôpital psychiatrique dans lequel elle fut transférée lança un appel à témoin. Reconnue par des proches, il s’avéra que sa véritable identité était toute autre, preuves à l’appui.

Elle la contesta apportant de nombreux détails sur celle qu’elle prétendait être. »

Voilà pour le fait divers !

Les éléments apportés au récit qui suit ne constituent qu’un éclairage imaginaire. Ils seraient à considérer comme fortuits s’ils révélaient une quelconque réalité.

I. L’HÔPITAL PSYCHIATRIQUE

TOULOUSE

Dans la salle de consultation pluridisciplinaire de l’hôpital, la jeune femme se tient assise face au médecin et à l’infirmier, le visage impassible et le regard vide. Pourtant, son esprit reste en alerte sous les pensées qui l’assaillent : elle affirme de toute son âme et jure sur sa vie avoir croisé cette femme Erzulie et depuis sa vie a basculé. Elle l’a écrit, récrit dix fois déjà. Elle n’en peut plus d’être filmée et refuse tous traitements médicaux. Elle n’est pas folle...juste amnésique de quelques bouts de son existence.

Depuis son arrivée, elle n’a pas prononcé un seul mot.

Les feuillets dans les mains, le praticien la surveille du coin de l’œil. L’infirmier à son côté épie les éventuelles réactions d’agressivité. Le médecin poursuit la lecture du document qu’elle lui a remis, d’une voix neutre, lasse...trop peut-être. Ce n’est pas la première fois qu’une telle séance se produit, la version rédigée reste identique aux précédentes dans son contenu, mais les détails s’accumulent.

"… Je rentrais chez moi, J’avais planché toute la journée sur un projet à rendre dans le cadre de mes études. Il faisait nuit. Je m’apprêtais à traverser la chaussée. Les réverbères se reflétaient sur les vitrines décorées pour le nouvel an. La Grande rue m’attendait, comme chaque soir. Il était tard, mais pas encore assez pour franchir le seuil de la nouvelle heure. Celle du changement d’année. La foule envahirait la ville sous peu. J’étais seule. J’avais froid, inadaptée aux hivers rigoureux. Je vous l’ai déjà signalé : je viens d’autres latitudes. »

Le médecin secoue la tête, encore la même chose. Il poursuit.

« Éclairée par les néons jaunes et blafards, je croisais une première fois mon regard dans la vitrine qui s’offrait à moi. Le moment fut saisissant. Le renvoi de mon teint terne, de mes yeux grisâtres et de mes joues creuses m’effraya. Je ressemblais à un cadavre, moi la jolie métisse aux formes rebondies, il y a quelques mois encore. Ce continent m’avait éreintée et esquintée. Je baissais la tête à l’approche de la deuxième devanture prête à me refléter de nouveau. Un feu rouge se mit à clignoter et m’obligea à relever le regard, happée par le flash lancinant... »

Quelques mouvements saccadés secouent le corps de la patiente. L’infirmier s’approche et pose sa main sur son épaule ; elle se calme.

« … Elle a surgi devant moi. Son large sourire dissimulait à peine la balafre qui traversait sa joue. Elle remontait en diagonale jusqu’à son front et renforçait l’éclat de ses yeux. L’entaille rougissait avec le froid.

Le Bonsoir qu’elle m’adressa était empli de douceur. Elle affichait une couleur de peau, un âge et un déracinement similaires aux miens. Je la trouvais belle, très belle. J’ai senti son frôlement, son odeur, sa chaleur, sa force et son énergie. Comme si je croisais un double, un autre moi… En mieux !

Cette apparition était la bienvenue, elle m’arrachait quelques instants à ma solitude et à mon épuisement à travailler et à étudier en même temps. Je lui rendis son sourire. Elle s’arrêta, retint mon bras, stoppa mon pas…"

Le médecin fait une pause et l’encourage à sortir de son mutisme : « un double, vous voulez bien préciser ? », mais en vain. Elle ne répond pas. Il souligne d’un feutre les mots les plus importants selon lui ; puis écrit à la marge un style romanesque : affabulation ? La caméra la filme, garantie objective de la neutralité de l’échange sollicité. Elle reste muette et impavide. L’infirmier, silencieux lui aussi, accentue le déséquilibre du face à face.

Depuis une semaine, date de son entrée dans le service, elle s’obstine à ne pas parler ; elle écrit s’appeler Barbara S., sans se lasser, avoir vingt-quatre ans, être née sur l’île de la Réunion et poursuivre des études de droit à Lyon, ville où elle partage une colocation. Elle réitère ne pas comprendre son internement. De tout évidence, sa mémoire défaille quand il lui faut expliquer s’être retrouvée à plus de mille kilomètres de son domicile sur cette plage au sud du Portugal, la Praia de Santo António, ce 18 février dernier.