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"L’affaissement de la mémoire" dévoile le combat poignant de Jeanine, emportée par la maladie d’Alzheimer, et de sa famille, confrontée à l’effacement inexorable de ses souvenirs. Pierre, son époux, et Simon, leur fils, luttent avec acharnement pour préserver les fragments de son passé, tout en portant le poids d’une douleur qui ne cesse de grandir. Ce roman explore l’impact dévastateur de la maladie sur les liens familiaux, la douleur du deuil anticipé et la puissance de l’amour, même face à l’oubli. Chaque page invite à réfléchir à la force des liens humains lorsque tout semble s’effacer. Un hommage à la résilience et à l’amour inébranlable.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Touhami N’heri, docteur en langue et littérature françaises de l’Université Paris-Est et spécialiste du théâtre classique, est professeur de lettres modernes en région parisienne. Poète, dramaturge et romancier, il explore dans ses œuvres la complexité des passions et les conflits émotionnels profonds qui façonnent les relations humaines. Inspiré par l’histoire de sa grand-mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, il écrit "L’affaissement de la mémoire" pour témoigner de l’érosion progressive des souvenirs.
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Seitenzahl: 158
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Touhami N’heri
L’affaissement de la mémoire
Roman
© Lys Bleu Éditions – Touhami N’heri
ISBN : 979-10-422-6047-7
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À la mémoire de ma grand-mère,
celle qui a su insuffler l’amour dans mon cœur !
La mémoire est fragile, fragile comme une architecture invisible qui soutient notre existence, nos liens, notre identité. Lorsque cette structure s’affaisse et s’effondre, ce n’est pas seulement une personne qui se perd, mais aussi les souvenirs partagés, les émotions vécues, les repères qui nous ancrent dans le monde. Ce roman, L’affaissement de la mémoire, raconte cette lente érosion à travers l’histoire de Jeanine, une femme atteinte de la maladie d’Alzheimer, et de ceux qui l’aiment.
Dans ces pages, nous assistons à la lutte silencieuse et douloureuse de Pierre, son mari, et de Simon, leur fils, contre l’oubli. Ils se battent pour maintenir vivante une part d’elle, pour refuser que les souvenirs se dissolvent, même quand Jeanine elle-même n’est plus capable de se souvenir. À chaque oubli, à chaque mot effacé, c’est une partie d’eux qui s’effondre aussi.
Mais cette histoire n’évoque pas seulement la maladie. Elle est aussi une exploration de l’amour. Cet amour qui persiste, qui refuse de céder malgré l’inévitable. La mémoire peut s’effriter, se dérober, mais l’amour reste là, comme un pilier, même quand tout semble s’écrouler autour de lui.
À travers des récits poignants, des dialogues intenses et des moments de silence déchirant, L’affaissement de la mémoire interroge ce que signifie aimer quelqu’un qui s’efface devant nos yeux. Comment continuer à exister face à l’absence progressive de l’autre ? Comment résister à l’inéluctable ?
Ce roman est une invitation à réfléchir sur la mémoire, la perte, et la manière dont l’amour tente de transcender la destruction. Il rend hommage à ceux qui, dans l’ombre de la maladie, continuent à aimer avec une ferveur inébranlable, même quand les souvenirs s’effritent et que les visages familiers deviennent étrangers.
La mémoire demeure donc le fil invisible qui tisse nos vies, reliant chaque instant vécu, chaque relation forgée, chaque amour partagé. Mais que se passe-t-il lorsque ce fil commence à se défaire, lorsque les souvenirs se désagrègent, emportant avec eux l’identité de ceux que nous aimons ? L’affaissement de la mémoire plonge au cœur même de cette érosion lente et dévastatrice, en retraçant la trajectoire d’une femme, Jeanine, engloutie par la maladie d’Alzheimer, et de sa famille qui assiste, impuissante, à son effacement progressif.
Cette histoire ne se limite pas à une lutte contre la maladie, elle est avant tout une exploration de l’impact profond et souvent silencieux que l’Alzheimer inflige aux proches. Pierre et Simon deviennent des témoins d’une perte qui ne cesse de s’accumuler. À chaque oubli, à chaque nom que Jeanine ne parvient plus à prononcer, c’est une partie d’eux-mêmes qui s’effondre aussi. Dans l’intimité des gestes du quotidien, ces hommes voient s’éloigner la femme et la mère qu’ils ont connue, remplacée par une présence qui vacille entre l’ici et l’ailleurs, entre la réalité et un passé qui s’efface.
Dans ces pages, le lecteur a l’occasion de découvrir que l’Alzheimer ne détruit pas seulement les souvenirs d’une personne, mais aussi la structure même des relations familiales. L’équilibre familial, autrefois fondé sur des bases solides d’amour et de réciprocité, se transforme en un combat inégal contre l’oubli. Pierre doit apprendre à aimer une femme qui ne se souvient plus de leurs moments partagés, tandis que Simon lutte pour accepter le fait qu’il ne soit plus reconnu comme le fils qu’il a été.
Cette épreuve fait apparaître un paradoxe cruel : plus Jeanine s’enfonce dans l’oubli, plus son entourage se sent dépossédé d’elle, et pourtant, leur amour s’intensifie, comme une flamme vacillante mais obstinée. La maladie d’Alzheimer dévore tout, mais elle ne peut effacer la force de l’attachement que Pierre et Simon portent en eux, bien que ce lien soit mis à l’épreuve jour après jour. Chaque geste, chaque parole devient une tentative de maintenir Jeanine dans un espace de tendresse, malgré l’oubli qui ronge leur quotidien.
Il est crucial de comprendre que cette maladie n’est jamais un fardeau porté seul. Ce sont les proches, invisibles acteurs aux yeux du monde, qui endurent une transformation émotionnelle déchirante. Au-delà du désarroi de voir l’être aimé s’éteindre progressivement, il y a la culpabilité de ne pas pouvoir le retenir, de ne pas savoir comment l’aider. L’affaissement de la mémoire explore donc cette souffrance muette, ce poids insupportable que la famille porte en silence, tout en essayant de préserver l’image de celle ou celui qu’ils ont tant aimé.
Mais cette histoire n’est pas uniquement une tragédie. C’est aussi une histoire de résilience, de dévouement, et de ce qu’il reste quand la mémoire s’efface : l’amour. Un amour qui ne connaît ni le temps ni l’oubli, un amour qui persiste même lorsque les souvenirs disparaissent. À travers le regard de Pierre, nous voyons qu’aimer quelqu’un qui s’efface est une manière de résister à l’inévitable, de trouver un sens, malgré tout, dans l’absurde.
Enfin, ce roman est une invitation à plonger dans cette réflexion intime sur la mémoire, la perte, et la manière dont la famille, malgré la dévastation, continue de tenir. Ces pages sont également une invitation à comprendre l’épreuve invisible mais si réelle que des milliers de familles traversent chaque jour. Et peut-être, en nous rapprochant de ces personnages, pourrions-nous percevoir un écho de ce que signifie réellement aimer quand tout s’effondre.
Certains lecteurs pourraient trouver dans ces pages un écho de leurs propres émotions, une trace de réconfort ou un espace de réflexion. Et peut-être, au-delà du récit de Jeanine, comprendre un peu plus profondément la force de l’amour quand tout le reste semble s’effondrer.
Enfin, ce roman s’adresse particulièrement à ceux qui luttent dans l’ombre, à ceux qui portent la mémoire des autres quand elle faiblit, et à ceux qui transforment le chagrin en amour inépuisable. C’est tout simplement un hommage à la mémoire de ceux qui s’effacent, et ceux qui les portent en eux, même après leur départ.
Paris s’éveillait sous la lumière douce et dorée d’un automne paisible. Les premières feuilles jaunies s’éparpillaient le long des trottoirs, portées par une brise légère qui murmurait entre les façades haussmanniennes. Les grands platanes bordant les avenues laissaient filtrer des rayons de soleil obliques, dessinant des ombres mouvantes sur les pavés encore humides de la rosée matinale. Au loin, on entendait le grondement régulier des voitures, le son feutré des talons résonnant sur les dalles de pierre et les voix étouffées des passants qui se hâtaient, enveloppés dans leurs manteaux, dans la fraîcheur naissante d’octobre.
Dans le XVIe arrondissement, où les immeubles bourgeois s’élevaient comme des sentinelles silencieuses, un calme apaisant régnait. Le quartier, avec ses boutiques de luxe et ses cafés et restaurants chics, semblait vivre au rythme lent des saisons. Les odeurs mêlées de café frais et de pâtisseries chaudes s’échappaient des boulangeries, se mêlant à l’air vif du matin. Quelques joggeurs, passant devant les grilles majestueuses du Trocadéro, profitaient de ce moment de quiétude, tandis que le ciel, d’un bleu pâle, s’étirait au-dessus des toits d’ardoise.
Depuis les fenêtres du quatrième étage de l’appartement haussmannien des Martin, la vue s’étendait majestueusement sur les jardins du Trocadéro comme un tableau vivant. La vaste esplanade, ornée de fontaines scintillantes, s’étirait en direction de la Seine, encadrée par des sculptures imposantes qui semblaient veiller sur la ville. De là, on apercevait les allées parfaitement alignées, où les promeneurs matinaux, emmitouflés dans leurs écharpes, déambulaient tranquillement, profitant des premiers rayons de soleil d’octobre. Le murmure apaisant des jets d’eau, entrecoupé des cris lointains des enfants jouant près des bassins, parvenait parfois jusqu’aux oreilles de ceux qui, comme Jeanine et Pierre, observaient ce spectacle quotidien depuis leur balcon.
Au-delà du Trocadéro, se dressait la silhouette imposante de la tour Eiffel, majestueuse, presque intemporelle. Ses immenses piliers de fer s’élevaient avec élégance au-dessus du Champ de Mars, cette vaste étendue de verdure qui contrastait avec l’architecture rigide des bâtiments environnants. Les feuilles des marronniers qui bordaient le parc avaient commencé à rougir et à tomber, recouvrant les pelouses d’un tapis coloré, comme un ultime hommage à l’été qui s’éteignait doucement. La Seine, juste en contrebas, miroitait sous la lumière d’automne, serpentant paresseusement à travers la ville.
Chaque matin, Pierre s’attardait quelques instants devant cette scène, savourant la sérénité qu’elle dégageait, un calme qui semblait parfois éloigner les préoccupations du quotidien. De son point de vue privilégié, il pouvait suivre du regard les péniches glissant silencieusement sur l’eau, les touristes s’agglutinant autour de la tour Eiffel, émerveillés par sa grandeur, et les Parisiens pressés qui traversaient le Champ de Mars pour se rendre à leur travail. Tout semblait si petit, presque insignifiant, depuis ce belvédère en hauteur.
Le soir, lorsque la tour s’illuminait, et que ses scintillements se reflétaient dans les grandes baies vitrées du salon, une ambiance feutrée enveloppait l’appartement. Les murs ornés de moulures délicates et les parquets en point de Hongrie paraissaient se réchauffer à la lumière dorée des lampadaires parisiens. C’était un univers à part, où le passé et le présent se mêlaient, ancrant la famille Martin dans une routine douce, mais solide.
Ces paysages urbains, si proches et pourtant si lointains, avaient accompagné Jeanine et Pierre durant des années. Ils avaient été les témoins silencieux de leurs conversations matinales, de leurs silences partagés, de leurs espoirs et de leurs voyages.
C’est dans ce cadre raffiné que vivait le couple Martin, depuis des décennies, dans un grand appartement haussmannien qui surplombait les rues pavées. Leur existence, tranquille et aisée, avait longtemps été rythmée par les petites routines du quotidien et les grandes joies partagées en famille.
Pierre, architecte de renom avant sa retraite, avait consacré sa vie à la conception d’édifices modernes qui ornent les paysages urbains de nombreuses villes françaises. Son travail, empreint de rigueur et de sens esthétique, se reflétait dans la manière dont il avait pensé et aménagé son appartement. Cet homme grand et élégant, à l’allure droite et majestueuse malgré le poids des années, venait de fêter ses soixante-dix ans. Ses cheveux gris bien coiffés, ses mains puissantes aux gestes mesurés, témoignaient de sa force et de son ancien charisme. C’était un homme méticuleux, aimant les lignes nettes et les détails subtils, à la fois dans son travail et dans sa vie quotidienne. Chaque matin, après avoir bu son café noir, il s’asseyait à son bureau, dans une pièce adjacente à la chambre, feuilletant ses anciens projets ou s’occupant de la gestion du patrimoine immobilier qu’il avait accumulé au fil des ans. Derrière cette apparence imposante se cachait un cœur tendre, rempli de douceur et de dévouement pour Jeanine, son épouse depuis plus de quarante ans. Leur amour, intact malgré le passage du temps, restait le socle de sa vie. Pour lui, Jeanine n’avait jamais cessé d’être cette femme fascinante qui avait illuminé ses premiers jours à ses côtés. Il la regardait encore avec des yeux empreints d’admiration, profondément attaché à elle, prêt à tout pour la protéger, comme si leur amour était toujours neuf, inébranlable malgré les épreuves.
Jeanine, elle, avait soixante-sept ans. Elle était enseignante à Louis-le-Grand, pendant presque trente ans. Son amour pour la littérature française et les arts se reflétait dans l’appartement, où trônaient des œuvres de Flaubert, Maupassant et Balzac… posées ici et là. Elle consacrait encore du temps à des lectures paisibles ou à des rencontres amicales dans des cafés parisiens, mais c’était avant que les signes d’un trouble insidieux ne commencent à la déranger. Avec Pierre, elle avait partagé une vie faite de routines rituelles et de moments extraordinaires.
La vie des Martin avait été rythmée par les voyages, une passion commune qui les avait emmenés bien au-delà des frontières de la France. Ils avaient parcouru les routes sinueuses de l’Italie, visité les temples antiques de Grèce, déambulé dans les ruelles colorées de Barcelone… Chaque voyage avait laissé une empreinte indélébile dans leurs souvenirs, immortalisée par des photos soigneusement rangées dans des albums en cuir que Jeanine feuilletait parfois. Des souvenirs de ces escapades ornaient les étagères de leur appartement : une poterie ramenée de Crète, une sculpture d’un artisan catalan, ou encore une tapisserie iranienne…
Leurs habitudes étaient simples et bien réglées. Chaque matin, ils prenaient ensemble leur petit-déjeuner, un moment sacré où Pierre lisait le journal pendant que Jeanine feuilletait ses romans ou préparait mentalement sa journée. L’après-midi, Pierre sortait pour ses longues promenades dans les jardins du Trocadéro, tandis que Jeanine aimait flâner dans les librairies du quartier. Le soir, ils dînaient ensemble, souvent en silence, savourant cette routine partagée, avant de regarder un film ou une émission sur la télévision discrètement nichée dans un coin du salon.
Ce cocon harmonieux et feutré, empreint de confort et de sérénité, avait longtemps été le témoin de leur amour et de leur complicité. Mais peu à peu, des signes de changement apparaissaient, des failles invisibles commençaient à se dessiner dans cette vie quasi parfaite. Jeanine, qui autrefois organisait tout avec précision, oubliait parfois de préparer le repas, et Pierre, bien qu’attentif, sentait cette légère dérive sans vraiment en comprendre l’ampleur.
Simon, leur fils unique, avait grandi dans cet écrin de confort et de sérénité, formant avec ses parents une famille unie, où l’amour et la tendresse régnaient en maître. C’était un homme de trente-cinq ans, grand et svelte, avec des traits marqués par une sensibilité discrète. Ses cheveux châtains, légèrement ébouriffés, et ses yeux profonds reflétaient souvent une certaine gravité, celle d’un homme qui porte le poids des responsabilités familiales. Si sa carrière dans l’informatique lui avait valu une reconnaissance professionnelle, son véritable centre de gravité restait sa mère. Depuis toujours, Simon vouait à Jeanine un attachement indéfectible, presque fusionnel. Il admirait sa force, son élégance, mais aussi sa tendresse qu’elle lui avait prodiguée avec générosité tout au long de son enfance. Cet amour filial, teinté de respect et d’admiration, le poussait à la protéger, à être présent à ses côtés dans les moments les plus difficiles, refusant de la voir s’éloigner, de la perdre dans les brumes de la maladie.
Marié à Élodie, sa collègue au travail, avec qui il avait fondé une famille solide et heureuse, Simon est père de trois enfants. Son visage reflétait tout à la fois la rigueur de son père et la douceur de sa mère, un mélange subtil d’autorité et de bienveillance. Très attaché aux valeurs familiales que Pierre et Jeanine lui avaient inculquées, Simon entretenait un lien indéfectible avec ses parents. Avec son père, c’était un rapport fondé sur le respect et un sens profond des responsabilités. Pierre avait toujours été pour lui un modèle de droiture, et Simon se faisait un devoir de maintenir cette exigence de rigueur dans sa propre vie. Quant à sa mère, il lui vouait une tendresse particulière, reconnaissant en elle une douceur et une fragilité qu’il tentait de protéger malgré la distance que ses obligations professionnelles imposaient. Malgré un emploi du temps chargé, il faisait de son mieux pour rendre visite régulièrement à ses parents, soucieux de ne jamais rompre le fil qui les reliait, même dans ces moments où Jeanine semblait s’éloigner peu à peu dans son monde de silence.
L’appartement des Martin, véritable havre de paix, dominait le paysage parisien. À travers ses larges fenêtres aux rideaux de velours, on pouvait apercevoir la tour Eiffel se découper fièrement contre le ciel, et au loin, les toits ondoyants de Paris se perdaient dans la brume légère. Tout dans cette demeure respirait l’élégance et le confort discret propre aux demeures parisiennes des années 80, de la vaste bibliothèque où Pierre et Jeanine aimaient passer leurs soirées, aux chambres baignées de lumière, emplies des souvenirs d’une vie passionnément partagée. Dès l’entrée, le visiteur était accueilli par un vaste hall au sol de marbre noir et blanc, aux murs ornés de moulures délicates et de tableaux aux cadres dorés, témoignant du goût raffiné de Jeanine. Le salon, pièce maîtresse de l’appartement, s’étendait sous un plafond haut et décoré de rosaces finement sculptées. De larges fenêtres cintrées, aux rideaux de velours grenat, laissaient entrer la lumière dorée des couchers de soleil sur la capitale, baignant la pièce d’une douce chaleur.
Le mobilier, soigneusement choisi, mêlait l’ancien et le moderne. Un grand canapé en cuir brun trônait au centre du salon, entouré de fauteuils en velours vert, tandis qu’une table basse en verre accueillait des piles de livres et de magazines artistiques. Le parquet en chêne, patiné par le temps, craquait légèrement sous les pas, comme pour rappeler l’ancienneté et l’authenticité des lieux. Sur les murs, la bibliothèque encastrée abritait des collections de romans, d’ouvrages historiques et d’albums de voyage, chaque volume témoignant de la passion de Jeanine pour la culture et celle de Pierre pour les grands récits du monde.
À droite du salon, la salle à manger s’ouvrait sur une table en bois massif, souvent couverte d’une nappe blanche brodée. C’était là que la famille partageait ses repas, dans une ambiance paisible, entre conversations douces et éclats de rire. Un vieux lustre en cristal illuminait la pièce, projetant sur les murs des éclats de lumière tamisée. De cette salle, on accédait à la cuisine, où Jeanine, bien que rarement derrière les fourneaux, aimait y retrouver les traces de son passé lorsqu’elle cuisinait encore pour Pierre et Simon lors des grandes occasions.
Pourtant, malgré cette harmonie apparente, une ombre insidieuse commençait à s’étendre sur leur quotidien, une ombre que personne n’avait encore su nommer. Les premiers signes étaient imperceptibles. Jeanine, d’ordinaire si organisée, oubliait parfois de fermer une porte ou de terminer une phrase. Des moments de confusion passagers qu’elle attribuait à la fatigue ou à l’âge. Mais Pierre, malgré son pragmatisme, ne pouvait s’empêcher de ressentir une inquiétude sourde, une peur qui grandissait à mesure que ces oublis devenaient plus fréquents, plus troublants. L’automne parisien, avec sa mélancolie douce et ses couleurs fanées, semblait refléter l’état d’esprit de cette famille autrefois sereine, désormais en proie à une incertitude grandissante.