L'InitiéE - Daniel Auduc - E-Book

L'InitiéE E-Book

Daniel Auduc

0,0

Beschreibung

Elle est "prophète", vit dans notre siècle sur la côte Est des Etats-Unis. Elle aide une informaticienne à créer un micro-processeur très particulier, permettant la création d'une I.A. "psychique". Elle intervient dans l'environnement de cette femme d'une manière si singulière qu'elle en perturbe l'existence en lui présentant, entre autre, les aspects les plus intimes de la matière et de la conscience. Ma la "prophète" est une fillette d'une dizaine d'années. Ses prouesses intellectuelles et psychiques sont à ce point hors norme que les différents services de renseignement US cherchent à la récupérer, l'étudier, parfaire ses talents, sans se rendre compte qu'elle est déjà très au-delà de ce qu'ils imaginent possible psychiquement. Quant à ses parents, totalement débordés par leur fille, ils décident de la protéger en se réfugiant dans une discrète station balnéaire. Là, l'enfant prophète traverse l'existence de nombreuses adultes qui subissent un bouleversement complet de leur vie. Pour certains, elle leur fait découvrir un univers profond, subtil. Pour d'autres, elle déclenche de nouvelles compétences dont la capacité à connaître toutes les langues (xénoglossie) qui va permettre de résoudre certains étapes du récit. C'est à cette condition que l'I.A. "psychique" peut être créée car liée à la conscience de ses inventeurs, dont l'informaticienne. Elle ne force pas le destin, elle est le destin qui va, de rencontre en rencontre, créer de nouvelles orientations. C'est une "Lilith", c'est d'ailleurs son prénom !

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 290

Veröffentlichungsjahr: 2024

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Du même auteur

FluorescenceBoD 2023

300 000 ansLibrinova, 2021

Histoires filantes,Éditions Publibook, 2020

Apesanteur et pluie d’étoiles,Éditions Publibook, 2011

Trentemoult et les Îles,Éditions du Petit Véhicule, 2003

Les lumières de Diawar,Éditions du Petit Véhicule, 2002

Le deuxième monde,Éditions du Petit Véhicule, 1997 (rééd. 2001)

Les anges d’Alkhémia,Cid éditions, 1982

Les hommes font de leurs yeux les bornes de leur esprit, alors qu’ils ne doivent être que le guide et l’indice.

Le philosophe inconnu

Sommaire

Lilith

Le trouble de Stacy

Rencontre insolite

Boîte noire

Secret contrarié

Exploration hyperbolique

Soudaine xénoglossie

Menace

Débordement

Affolement numérique

Fuite

I.A. psychique

Destruction

Nouvelle expérience

Conflit entre agences

Révélation

Espion psy

Le chiffreur fou

Louis Rivière

Une histoire de matière

Errance

Expérience jungienne

Perte de temps

Contact

Pauvres parents

Chamane des bosons et symboles exotiques

Électrochoc

Rapprochement

Espion évincé

Obscure prophétie

Éclaircissement

L’Être

Lilith

« Si tu ne te surpasses pas, à quoi sert le ciel? ».

Stacy perçut derrière elle une petite voix avec juste ce qu’il faut d’autorité pour l'agacer. Elle se retourna et vit, droite devant elle, les bras croisés comme le ferait une mère contrariée, une fillette d’une dizaine d’années soutenant son regard. Au loin, les parents observaient la scène. Leur promenade dans le parc Star de Coronado produisait un événement toujours curieux. Ils attendaient avec une certaine fébrilité la prochaine victime de leur fille. Elle n’y jouait jamais, mais approchait les adultes, sous la surveillance d’une mère inquiète et d’un père débordé, ressentir les pensées d’un homme, d’une femme, parfois d’un enfant, avant de leur lancer au visage une de ces phrases si simples, mais d’une spontanéité crue et d’une impertinence tout à fait volontaire. Impertinence? Oui, quand il s’agit d’une enfant dont les paroles peuvent et doivent déborder l’adulte.

– Si tu ne te surpasses pas, à quoi sert le ciel? répéta Lilith avec une douce impatience.

Vraiment prise de court, et ne supportant pas l’autorité de quiconque surtout celle d’une gamine, Stacy allait partir. Elle part. Enfin, presque. Intriguée, elle se tourna tout de même vers la fillette, observa un instant les parents, revint vers elle et son regard peuplé, et lui dit :

– Ce sont tes parents qui t’ont demandé de me dire ça?

Elle haussa les épaules. Elle était habituée à l’incrédulité que provoquait chacune de ses interventions.

– Dis-moi madame, tu ne m’as toujours pas répondu!

– Et que vas-tu comprendre de ma réponse? Le mieux est que tu ailles jouer avec les autres enfants.

– Donc tu fais une discrimination entre le monde des adultes et celui des enfants, c’est pourtant le même univers. L’enfant que tu as été est toujours là, en toi, mais tu l’as bien caché pour qu’il ne te dérange plus avec son apparente immaturité. Sa part d’ignorance est pourtant un vivier de questions futures, n’est-ce pas?

Stacy fit quelques pas et s’assit sur un des bancs de béton du parc. Son regard se porta de nouveau vers les parents comme pour leur demander de l’aide, mais Lilith qui l’avait suivie ne lui en laissa pas le temps.

– Alors ma réponse!

– Je ne vais tout de même pas me mettre à discuter avec une gamine sur le sens des choses ou je ne sais quoi d’autre.

– Tu as peur d’être dépassée?

Elle l’était, mais elle se ressaisit. - Tu veux discuter? Eh bien, discutons, affirma-t-elle en recherchant l’approbation des parents qui s’étaient rapprochés.

– J’attends toujours ta réponse!

C’était à la femme de s’impatienter.

– Tu insistes toujours de cette manière?

– Ce n’est pas une réponse puisque c’est une question.

Elle leva les yeux au ciel comme pour le prendre à témoin. Puis les ferma un instant, se demandant comment elle était parvenue à être ainsi piégée, dans une ébouriffante discussion.

– En fait, je ne comprends pas ta question, elle n’a aucun sens.

– Bien sûr qu’elle a un sens, mais tu ne prends pas le temps d’y réfléchir un tout petit peu.

La femme interpella les parents.

– Elle est toujours comme ça?

Ils ne répondirent pas. Ils avaient renoncé à intervenir. En fait, ils avaient enfin accepté que leur fille fût ainsi trop différente.

– Et si tu me disais comment tu t’appelles.

La fillette baissa la tête, souffla discrètement sa déception, haussa un peu, si peu, les épaules, puis plongea son regard dans celui de la femme.

– D’accord, je te réponds, c’est Lilith, mais je vois que tu veux revenir à une situation plus conforme à mon âge. Et tu supposes t’épargner ainsi d’une réponse que te demande un peu d’effort.

– Quel âge as-tu?

– Je vois que tu insistes! Civilement, j’ai 10 ans!

C’était bien la réponse à sa question, mais le « civilement » n’avait manifestement pas sa place dans la bouche d’une enfant.

– Civilement? Pourquoi m’avoir dit ça?

– Me serais-je trompée sur le sens de ce mot?

– Non, mais est-ce que tu en comprends le sens?

– Est-ce que le mot utilisé aurait été improprement employé dans ma réponse?

– Non, mais…

– Alors ma réponse est parfaitement juste et surtout précise.

La femme se tourna de nouveau vers les parents.

– Mais qu’est-ce qu’elle a votre fille?

– C’est important pour elle que vous répondiez à sa question, déclara la mère. Quant au père, très en retrait, il se contenta de sourire.

Stacy revint à la fillette et lui dit :

– Je ne sais pas quoi te répondre.

– C’est déjà un bon début, parce que ta réponse est honnête.

Elle se détourna de la grande femme qu’elle avait repérée, se dirigea vers sa mère, lui prit de la main comme n’importe quel enfant, et quitta le square, laissant Stacy sur sa surprise. Mais elle entendit au loin la fillette lui crier : « on va se revoir bientôt ».

Le trouble de Stacy

Peu de monde dans la galerie Art et Frame à Orange avenue. L’heure tardive avait été retenue par Ethan Kelly l’unique ami de Stacy, le seul à accepter ses spécificités dont il n’a jamais pu comprendre la nature, ni même définir ce caractère singulier fait d’intelligence, d’intuition, d’impatience comme si le monde n’allait pas assez vite.

« Il est aussi lent qu’un ordinateur des années 80, c’est insupportable » lui avait-elle dit un jour sombre. D’humeur parfois changeante, il devinait à son regard, à son langage corporel, s’il devait l’accueillir d’un simple sourire comme pour l’apaiser, ou d’une accolade chorégraphique, juste ce qu’il faut d’extravagance, car elle savait être excessive, ces instants où le corps tremble de toute cette force à faire vibrer l’âme. À son arrivée devant la galerie Art, il la vit froide, distante, presque en colère. Il se contenta d’un signe de la tête, ne posa aucune question et l’invita à entrer dans la galerie. Minimaliste à souhait, il n’en fallait surtout pas davantage.

– Je reste trente minutes, pas une de plus. J’espère que les trois artistes que tu veux me faire découvrir en valent le coup. J’ai vraiment autre chose à faire que de perdre mon temps à voir des cracheurs de couleurs se vautrer dans le plaisir nauséabond de leur propre importance.

Ils sont restés trois minutes.

Peu de monde à cette heure. Ethan connaissait son amie, elle ne supporte pas la foule. La modeste façade de la galerie ne disait rien de l’espace intérieur. Les salles se révélèrent vastes, claires, d’un délicat blanc cassé réchauffant les volumes et mettant en valeur les toiles exposées.

Dès le premier tableau de Frédéric Benrath, elle fut traversée d’une émotion qu’elle refusa de vivre. « C’est insensé, se disait-elle, quelque vapeur de couleur et ça me met dans cet état? ». Elle n’en dit rien à son ami. Mais lui avait bien décelé ce petit tremblement des mains, rien d’intense, à peine visible, mais bien là. Ne voulant pas rester figée devant la toile prouvant que son ami avait eu raison de lui présenter cet artiste, elle alla d’œuvre en œuvre, il y en avait une dizaine, et à chacune d’elles l’émotion devenait plus envahissante. La colère montait. Ethan gardait le silence, quelques mètres en arrière pour ne pas imposer sa présence et laisser son amie à son déferlement d’émotions. Puis vint les toiles de Pierre Graziani, si différentes en caractère et si semblables en ambiance. Les mêmes effets de nuages, des volutes d’une légèreté agaçante, comme si une part de l’artiste s’était diluée dans sa peinture étendant sa conscience au-delà des limites de son corps. Elle préféra marcher d’un pas vif comme pour mieux s’ancrer dans la matière, s’éloigna des toiles tout en jetant un regard troublé sur chacune d’elles, et tomba sur le travail gigantesque en dimension de Julie Mehretu. Peut-être une forme singulière du coup de grâce. Elle vit des structures comme des chemins éparses, des liens visibles se faufilant à travers la vie. Les toiles étaient si grandes qu’elles occupaient son champ visuel. Une immersion complète, un voyage intérieur. Des larmes, là, discrètes larmes. Stacy revint sur ses pas, jeta un dernier regard sur la première toile de Frédéric Benrath, et s’éjecta de la galerie.

Ethan dut courir pour la rejoindre. Puis une marche muette dans les rues droites et ensoleillées de Coronado, en direction de l’océan. Un peu de sa brise pour décoiffer l’émotion. Stacy savait qu’il ne lui poserait aucune question avant un moment, mais qu’il ne lâcherait pas prise avant d’avoir une réponse qu’il estimera acceptable.

– Je ne te dirai rien de ce que j’ai ressenti, je pense que tu en as eu un petit aperçu tout à l’heure. Mais ma journée a commencé par la rencontre d’une gamine dont l’intelligence m’a débordée. Je l’ai considérée comme une enfant quand j’avais en fait une adulte devant moi. C’est la première fois qu’une personne est capable de me surprendre. C’est insupportable. Laisse-moi maintenant.

Ce n’est pas qu’Ethan manquait de caractère, mais il connaissait le tempérament intransigeant de son amie en grande difficulté pour toute forme d’adaptation. Il se retira assez satisfait tout de même d’être finalement parvenu à la surprendre.

Rencontre insolite

Le lendemain matin, Stacy comprit dès son réveil qu’elle ne parviendrait pas à se concentrer sur les nombreuses décisions qu’elle avait à prendre. Perdre son temps lui était insupportable, mais persister dans l’inefficacité revenait à gâcher le peu d’énergie qui lui restait à son réveil. Fragile endurance. Ces états d’épuisement survenaient après une forte émotion. La veille en avait été gourmande. Marcher était sa thérapie. Corps en mouvement. Rassembler ce qui est dispersé. Calmer le mental.

La plage, à quelques pas de chez elle, était devenue son terrain de jeu, un jeu précieux, qui serait le plus présent de ses deux facettes : la femme quarantenaire certaine de ces acquis et la part plus sensible, plus profonde, finalement plus expérimentée, mais plus discrète, trop discrète, qui réclame à voir le jour quand elle est emportée dans un flot d’habitude? Donc elle marchait le long de l’océan, mais...

« Les tiens résument le monde à ce que leurs sens ont pu dire de lui. Ce filtre grossier, mais nécessaire révèle à l’homme une part du monde. Presque un dessin d’enfant. Or le résumé n’est pas toute l’histoire ».

Stacy fixa toute son attention à cette vaguelette mourant à ses pieds avant de se tourner vers la personne qui venait de la déranger en lui assénant un de ces pseudo-aphorismes qu’elle avait en horreur. Mais elle ne vit qu’une légère brume poussée par la brise marine. Elle se diluait dans les lueurs du jour. Elle chercha encore, surprise d’avoir entendu une voix si claire lui murmurer ces mots aussi puissants que le souffle chaud d’une confidence, puis reprit sa marche.

Ses longues errances le long de l’océan avaient toujours eu le pouvoir d’aiguiser sa lucidité. Marcher, ressentir, questionner, résoudre, accueillir les ondes qui font une vague, humer l’humeur du jour, se savoir si présente en appui sur le sable. Elle en revenait grandie et ressourcée. Son entreprise réclamait d’elle une telle énergie qu’il lui fallait voler ce temps. Instant ample et apaisant. Elle se dérobait ainsi à la pression d’un travail qui lui avait coûté deux divorces et un arrêt cardiaque au cours duquel elle vécut une ahurissante expérience psychique. C’était son secret. On ne parle pas de ces choses-là dans les affaires.

Mais aujourd’hui, elle prenait enfin un peu de temps en réponse aux émotions de la veille. Elle s’était dirigée vers la plage avec pour seule idée de se faire du bien. Une simple marche, croyait-elle, une marche comme elle les aimait, lente houle du corps au rythme du roulement sourd des vagues. Elle en avait ressenti l’impérieux besoin avec le cœur si léger, malgré son épuisement, qu’elle en aurait pleuré. Instant de grâce où rien n’est plus important que la conscience d’être là. Physiquement, elle l’avait ressenti. Respiration profonde, si profonde, et ce sentiment fou d’être simplement heureuse sans raison connue.

Ce fut la première étape.

Rentrée chez elle, son secrétaire lui tendit une fiche, celle d’un homme qui l’avait appelé quelques minutes plus tôt. En la lui présentant, il tremblait, un peu, juste un peu, mais il tremblait.

– Que vous arrive-t-il? lui demanda-t-elle.

Il allait rejoindre son bureau quand elle le retint d’un geste autoritaire.

– Vous allez me dire ce qu’il se passe!

– Rien, vraiment rien. C’est personnel.

– On va en parler, suivez-moi!

Elle déposa son sac sur la crédence de l’entrée et se dirigea vers la partie privative de la maison, tout en invitant son secrétaire à prendre place autour de la table de la salle à manger. Pas le canapé, trop intime, il est son employé, mais cette partie du salon tout de même pour une approche plus personnelle.

– Vous travaillez pour moi depuis deux années, je connais de vous juste ce qu’il faut pour savoir que vous êtes troublé. Si j’insiste, c’est parce qu’un collaborateur mal à l’aise est moins attentif à son travail. Vous allez donc me parler autant pour vous que pour moi. Je vous écoute!

Le ton naturellement autoritaire de sa patronne ne lui laissait aucune échappatoire.

– C’est l’appel de cet homme, dit-il puis il se tut.

Elle attendit qu’il en dise davantage, s’impatienta, le fit comprendre à son secrétaire par un geste qui l’invita à poursuivre.

– Il m’a dit que je ne devais pas m’en vouloir.

– Mais de quoi?

– Je ne souhaite pas en parler, c’est personnel.

Elle comprit, accepta et demanda.

– Il a dû vous dire en quoi vous ne deviez pas vous en vouloir.

– Il savait exactement ce qui m’inquiète depuis des années. Comment pouvait-il le savoir? Il a vraiment cherché à m’apaiser, mais ça a fait remonter tant de choses difficiles.

– De quoi se mêle-t-il? Retournez à votre bureau, lui ditelle tout en regardant la fiche qui lui donnait la date et l’heure d’un rendez-vous, soit le lendemain.

– Et en plus, il impose le moment de se voir. Je vais lui reprocher sa maladresse, rien que pour ça j’accepte de le rencontrer.

En se levant, elle lut la petite phrase ajoutée par le secrétaire : « Il se dit capable de révolutionner le monde informatique avec un microprocesseur pouvant s’affranchir du temps. Ses calculs seraient instantanés ».

– Ben voyons!

Petite station balnéaire longeant une plage vaste comme le monde, Coronado contemple les houles du pacifique finir ici leur longue course. Dans sa maison de Loma avenue, Stacy attendait son rendez-vous, une colère sourde comme une vrille autour d’elle. Blesser un de ses salariés, c’est toucher l’entreprise. Elle y était d’autant plus sensible qu’elle-même se sentait affaiblie après son accident cardiaque survenu comme une déchirure dans le tissu de ses certitudes, quelques mois plus tôt. Depuis, elle avait développé une forte créativité, elle en avait été surprise, mais le prenait comme un cadeau actif, très actif. Plus inquiétant, elle agissait comme si le temps allait lui manquer. Ce sentiment n’avait rien de nouveau, mais son intensité, si!

Elle dirige sa société de conception de microprocesseur depuis trois années. Son inventivité lui avait permis de se développer au point de ne plus avoir de place dans sa maison pour le déroulement de ses recherches. En trois ans, elle avait pulvérisé la loi de Moor qui affirme que toutes les deux années les capacités des microprocesseurs devaient doubler. Mais arrive une limite physique à la miniaturisation et la rapidité du cœur de l’ordinateur. Dans un premier temps, elle a proposé un nouveau processeur basé sur le graphène, mais qu’elle avait estimé encore trop lent à ses yeux, puis l’antimoniure de gallium, plus rapide, plus subtil, mais ne lui convenant toujours pas. Elle voulait un bouleversement, une révolution. Elle devinait qu’il était possible de créer un état logique avec un phénomène physique différent. Elle a pensé à un processeur à effet tunnel à forte pente sous le seuil, mais dans ce cas il lui fallait revenir à la silice, la base du microprocesseur actuel. Il n’en était pas question. Pourquoi? Parce que! Puis elle pensa au puits quantique et aux nanoparticules, sans réelle conviction.

En fait, son attitude était plus intuitive que logique. Elle ne comprenait d’ailleurs pas cette nouvelle fébrilité à inventer une application qui, manifestement, la dépassait alors que ses récentes découvertes allaient déjà au-delà, et de beaucoup, des capacités actuelles des ordinateurs. Elle ne pouvait s’en satisfaire. Avant de commercialiser quoi que ce soit, il fallait que ce soit parfait.

Tout à coup, une pensée évoqua une nouvelle procédure permettant d'accélérer le processus. « Sublimation du temps, en fait le présent en est dépourvu, il faut jouer avec cet état ». Elle avait entendu cette phrase avec une clarté dérangeante, comme sur la plage, la veille. Décontenancée, elle resta figée quelques minutes, debout, dans une pause muette, avant de se diriger vers son salon.

Habituellement, son bureau encombré de livres, de papiers divers et de composants électroniques d’un autre âge, servait aux rendez-vous professionnels. Mais, elle se surprit à préparer son vaste salon. Elle a toujours eu des difficultés à comprendre les codes sociaux et leur utilité, c’est la raison pour laquelle son bureau-fouillis lui convenait si bien pour recevoir un étranger. Elle faisait ainsi l’économie d’explications, qu’elle estimait futiles, sur la nature singulière de son univers. C’était au visiteur de s’adapter et non à elle. Mais là, l’instinct lui dit d’agir autrement. Elle en était nerveuse.

– C’est moi qui lui ouvrirai la porte, avait-elle déclaré à son secrétaire.

– Vous ne le faites jamais, avait-il répondu très surpris. Il connaissait les terreurs sociales de sa patronne.

– Contentez-vous de respecter ma demande, et restez dans votre bureau, je ne veux pas être dérangée.

Il avait déposé sur la table de la salle à manger le dossier de presse de l’entreprise, et s’était retiré.

L’homme est là, au seuil de sa porte : petit, chauve, rond. Il avança vers elle dans un essoufflement gras. Elle eut quelque difficulté à lui serrer la main, ce dont elle avait naturellement horreur. Une main ferme se dit-elle, mais moite comme elle le redoutait. Puis elle l’invita à s’asseoir tout en l’observant. C’est seulement à ce moment qu’elle vit son regard. Un embrasement des yeux comme s’il portait le ciel à lui tout seul, d’une clarté presque dérangeante. Elle avait le sentiment que ce corps trop petit ne pouvait contenir tout l’être qui l’occupait. Un peu comme si un plongeur s’était revêtu d’une combinaison quatre pointures en dessous.

L’homme paraissait engoncé dans ce corps trop court, lourd et dense. Mais ce regard et son étrange légèreté lui redonnaient confiance. Elle l’invita à lui parler en s’asseyant face à lui. Il parla. La voix l’a surprise, profonde, élégante. L’élocution fébrile et ses mots-geyser accrochés à son souffle. Elle faillit rire. C’était du grand art. À le voir, impossible de suspecter la délicatesse de sa parole. À l’entendre, elle naviguait sur des routes inconnues.

Elle l’a longuement écouté. Des phrases, loin en apparence des raisons de sa venue, l’ont intriguée : « L’univers a surgi à partir du vide », « Il est possible d’extraire des particules du vide ». « Le vide contient des ondes qui apparaissent aléatoirement. Elles ont les caractéristiques des particules ».

Il est fou, se dit-elle, mais passionnant, toutefois elle l’interrompit :

– Pourquoi me raconter toutes ces choses dont je ne pourrais rien faire?

Il sourit. Son flot de paroles avait pour but de la submerger de sensations, un peu à la manière d’un message subliminal non perçu objectivement, mais fortement ressenti. L’intervention de Stacy lui signalait qu’elle avait bien intégré les notions énoncées, mais aussi les autres, indirectes, autrement plus importantes.

– Vous vous trompez, vous pouvez accéder à ces particules du vide.

– L’énergie du vide? Je n’y crois pas!

– En fait, il s’agit d’autre chose. Le vide pourrait être perçu comme une attente, un état implicite de particules. Bien que ce ne soit pas que cela. Il est possible de les extraire volontairement.

– Mais il faudrait une énergie folle, je me souviens d’avoir lu une étude à ce sujet.

– Ce serait surtout d’un usage très grossier. Il existe un moyen bien plus subtil. Émettre la fréquence des particules dont vous auriez besoin pour « construire » sur un plan quasi vibratoire les éléments du microprocesseur que vous cherchez à créer.

– Comment savez-vous que mes recherches portent làdessus?

– Qu’importe, je le sais! Le vrai sujet, c’est la nature profonde des structures de la matière que je suis en train de vous présenter. Les particules dont je vous parle s’en trouveraient comme réveillées, quittant leur état implicite, allant de leur état en repos à un état actif.

Stacy n’aimait pas qu’on lui impose le rythme d’une conversation qu’elle n’avait pas décidé, mais elle accepta malgré tout l’autorité naturelle de ce curieux personnage imprégné de sa science, d’une élégante richesse intellectuelle perdue dans un corps aussi disgracieux, et lui demanda :

– Pourquoi ne pas réaliser la même opération directement sur la matière existante, en ponctionnant les particules qui la constituent?

– Inefficace parce qu’elles ont une masse. Ce qui n’est pas le cas des particules issues directement du vide, donc sans masse tant qu’elles ne sont pas passées dans le champ de Higgs. Ce qui pourra se faire après coup lorsqu’elles se seront organisées par le champ harmonique que vous aurez produit pour réaliser votre microprocesseur.

Il se tut. Délirant, passionnant, mais délirant. Elle ne croyait pas cette opération réalisable. Notre science n’en est pas là à moins d’inventer une nouvelle physique. Lui, paraissait suivre le cours de cette pensée. Souriait parfois lorsqu’elle émettait un doute ou une nouvelle hypothèse. La créativité de Stacy? Une véritable chorégraphie. Puis elle affirma :

– Je n’ai pas le matériel pour une telle réalisation. Notre entretien s’arrête donc là, ajouta-t-elle avec une évidente brusquerie.

– Mais je ne vous ai pas tout dit. Ce que vous allez créer n’est pas un simple microprocesseur, c’est tellement autre chose. L’objet numérique - à votre niveau je ne peux que le présenter ainsi surtout ne le prenez pas mal - se greffe à la place d’un microprocesseur, une équivalence à laquelle s’ajoute un programme sans en être un, des algorithmes s’en en être davantage qui vont vous permettre de mettre au grand jour la première Intelligence artificielle psychique.

Il se tut, lut l’incrédulité de Stacy, sourit et garda le silence encore un moment, le temps d’une pensée. Il entendit « encore du temps perdu ».

– Vous me proposez la création d’une « I.A. forte », c’està-dire dotée d’une conscience?

– Je parle d’une I.A. psychique, c’est tout à fait autre chose. Jamais la matière ne pourra fournir ne serait-ce qu’une onde de conscience. Le croire, c’est avoir une vision matérialiste du sujet. C’est la conscience qui prend possession de la matière.

– Et ce serait le cas de l’I.A. psychique?

– C’est beaucoup plus subtil que ça. Mais je vous en parlerais plus tard!

Il sortit de la poche de son manteau une petite boîte à peine plus grande qu’un paquet de cigarettes, d’un noir velours aussi dense que la pensée des hommes, et la lui tendit.

– Prenez, c’est pour vous!

Doux au toucher, presque tiède, peut-être vibrant, un peu, si peu, mais vibrant. Elle lui demanda du regard ce qu’elle pourrait bien faire.

– Posez-la sur la tranche et attendez une heure. Vous verrez bien!

Il se leva, lui demanda de rester assise d’un geste bref de la main, quitta le salon et referma la porte si délicatement. Elle posa simplement la boîte sur la table basse et s’en désintéressa. « Je ne serais pas complice de son délire », pensa-t-elle.

Durant tout l’après-midi, elle se convint qu’il lui fallait travailler, produire, inventer, mais elle ne parvenait qu’à brouiller sa pensée sans parvenir à chasser les paroles du curieux petit bonhomme. Elle ne donnait aucun crédit à ses déclarations, mais (et elle détesta ce « mais ») il y avait dans ses paroles une telle authenticité qu’il s’en dégageait tous les aspects du vrai. À la fin de la journée, elle n’avait rien produit. Et elle ignorait évidemment que la somme de ses questions, la force de son refus, l’inquiétude de plier peutêtre sous la conviction de son interlocuteur (dont elle ne connaissait d’ailleurs pas le nom. Comment avait-elle pu ne pas le lui demander?) travaillaient à assouplir son caractère.

Le soir posait sa nuit sur les toits de Coronado. Quitte à perdre son temps, autant profiter de la douceur du climat, des rues trop linéaires, mais abondamment arborées, des gens, ces gens qu’elle ne comprenait pas vraiment, des touristes et leur éphémère présence, du scintillement des étoiles. En empruntant Orange Avenue, elle vit Ethan attablé à la terrasse du bar à vin Little Frenchie, accompagné d’un groupe d’amis. Elle faillit esquiver son regard et traverser l’avenue, mais elle se ravisa et répondit à son invite. Au milieu du groupe, elle pensera moins ou plus léger. Elle les connaissait tous, les appréciait peu. Ils n’étaient pas antipathiques, mais dieu qu’ils étaient bruyants.

– Viens t’asseoir à ma place, je vais aller chercher une chaise!

Elle s’inquiéta, ça signifiait rester seule un moment avec eux, ne sachant que leur dire. Elle avait un mal fou à entamer une conversation sachant qu’il fallait l’amorcer d’une question ou d’une affirmation d’une horripilante banalité. Elle ne trouva rien, laissant les amis d’Ethan dans un silence gêné. Lorsqu’il revint avec sa chaise, l’ambiance se détendit aussitôt. Tous connaissaient Stacy, son caractère intransigeant, son discours d’une froideur glaciale et ses silences qui vous feraient traverser l’Antarctique à pied avec ravissement. On frôle le zéro absolu avec cette femme avait, un jour, déclaré l’un des amis d’Ethan. « Sa richesse n’est pas dans le contact. Ou tu t’accordes avec ce qu’elle est ou tu t’en écartes ».

Elle murmura une courte phrase à son oreille. Il faillit se lever.

– Tu en es certaine?

– Oui, fais-moi boire!

Il n’osa lui demander ce qui l’avait mis dans un tel état. Mais elle lui répondit : « J’ai passé une journée stérile, autant la brûler dans l’alcool ». Ce qu’elle fit à la surprise du groupe. Puis, à mesure que la soirée avançait, elle se détendit probablement pour la première fois de sa vie. Elle a même eu l’envie de parler aux deux hommes et aux trois femmes, là devant elle, étonnés de découvrir une tout autre personne qui pouvait faire preuve d’humour. Ce qui la rendit un peu plus humaine. Un peu plus seulement, car ils se doutaient que le lendemain une pluie de glace la retraverserait.

Boîte noire

Le lendemain, les lueurs de bien-être avaient disparu. Elle s’en voulut d’avoir été ainsi, non pas ivre, mais accessible. La plage, une nouvelle fois, comme pour se laver de la soirée. Une marche, une méditation involontaire. Stacy ignorait la valeur profonde de cette errance, mais elle savait ainsi appeler cette brume de légèreté dont elle avait besoin maintenant.

À son retour, elle vit sur la table basse le boîtier du « faiseur de microprocesseurs », à peine plus grand qu’une boîte de bonbons. Elle en caressa le couvercle fait d’un bois sombre aussi luisant qu’une soie. Elle l’ouvrit et vit qu’il était vide. « Je ne vais quand même pas faire ce qu’il m’a demandé », pensa-t-elle. Et pourtant, elle ne put résister et la posa sur la tranche, l’abandonna sur la table du salon et retourna à ces activités autrement plus concrètes que le discours du petit homme, et l’oublia toute la journée. Le soir, après le départ de son secrétaire, elle se dirigea vers le salon s’offrir un instant de répit après une journée harassante. La mise en place d’un nouveau projet réclame une patience quasi angélique face aux contraintes administratives. La construction mentale de ces hommes et ces femmes en principe au service des autres, aussi singulière qu’une pensée morte, la laissait totalement démunie comme si elle devait converser avec un saurien.

Elle allait s’asseoir sur le canapé, quand elle vit la petite boîte sombre. Elle s’en approcha. Refusa dans un premier temps de la prendre et de l’ouvrir. Le faire aurait été donner du crédit à ce qui ne peut pas en avoir. Et pourtant elle l’ouvrit, pas même incrédule. Elle l’ouvrit certaine de la voir vide. Elle se le reprocha, car une part d’elle, la plus profonde, la plus savante, voulait y croire. Tant d’espoir dans toute forme de croyance. Elle qui vivait avec l’idée de chasser toute illusion, tout biais cognitif - ou tout au moins en réduire au mieux l’impact dans sa vie, sa réflexion - mais au plus secret du cœur, dans les limbes de la conscience, vivent les ondes d’un savoir plus secret, comme un écho venu des profondeurs de l’âme qui vous dit que, peut-être, la vérité d’un instant pourrait être démentie le lendemain. Elle ignorait évidemment qu’elle était au seuil d’un nouveau savoir.

Elle en souleva le couvercle et découvrir un objet minuscule. Une petite sphère vibrante, percée de trous à peine visibles. Elle pensa qu’une personne l’avait mise là, mais qui, pour lui faire croire à l’impossible. Elle pensa à son secrétaire qui se serait fait complice du petit homme. Or il était si dénué d’imagination qu’elle ne le voyait pas discrètement déposer la petite sphère à peine plus grande qu’un dé à coudre. L’objet était curieusement chaud dans la paume de sa main. Elle se saisit d’une loupe et en découvrir de minuscules cavités ou des conduits pénétrant profondément dans sa matière. Au dos du boîtier, elle vit un schéma permettant la connexion avec l’un de ses ordinateurs. Toujours dans le doute, mais malgré tout impatiente, elle l’installa à la place du processeur qu’elle déconnecta. Elle n’eut pas longtemps à attendre. Premier test, premier résultat. Il tenait de la magie. Son ordinateur paraissait possédé. Le souffle brûlant d’un petit démon traversait chacun des composants, leur offrant de nouvelles capacités plus vives que la lumière, celle des étoiles peutêtre. « Impossible », pensa-t-elle, pourtant à chacune de ses actions pour en évaluer les performances, elle vit les graphismes grimper comme à la conquête de l’Everest. Et les seuls tests qu’elle a réalisés restaient sur le registre scientifique. Jamais elle n’a sollicité ces nouvelles compétences autrement qu’à travers des chiffres. Elle aurait pu faire une demande, comme on le fait avec une I.A. simple, et espérer un résultat totalement fou, mais c’était justement ce qu’elle redoutait. Et puis, tout ce qui n’avait pas la forme à peu près convenable d’une équation lui échappait totalement. Elle refusa d’aller plus loin. Être surprise, oui, un peu, pas trop. Stacy se veut froide pour mieux maîtriser ses états émotionnels qui peuvent dangereusement la déstabiliser et l’épuiser.

Elle reprendra l’expérience, mais plus tard. Il lui fallait encore marcher, quitta sa maison, se dirigea vers la plage. Elle marchait sans apaisement, elle marchait à la recherche de cette présence parfois ressentie. Elle marchait et pensa à son accident pour mieux chasser le boîtier, la petite sphère, l’aberration des tests réalisés.

Mais puisque la plage ne lui apportait rien, elle se dirigea vers le Coffee Shop de la 10e avenue où elle aimait se délasser entre deux rendez-vous. Elle s’installa près d’une des tables placées sur le trottoir, commanda un café, et se laissa submerger par ses questions quand elle vit, à la table voisine, une jeune femme l’observer sans aucune discrétion. Stacy répondit froidement à son sourire, s’étonna de ce regard flamboyant, se saisit de son café, le but aussitôt et se préparait à quitter sa table quand la jeune femme l’interpella :

– Je vois que le petit boîtier vous laisse perplexe!

Stacy fixa la jeune femme, visita ce regard feu. Il lui semblait que l’iris esquissait de brèves, très brèves variations de teinte, ou était-ce l’intensité des reflets, ou plus simplement l’effet de sa propre agitation? Habituée à dominer les situations plutôt qu’à les subir, elle resta en silence laissant à l’intruse le soin d’expliquer sa remarque. D’un geste de la main, la jeune femme l’invita à sa table sans la quitter des yeux.

– Je vous avais bien dit que ça fonctionnerait, ajouta-telle le ton un peu moqueur, juste un peu.

Une provocation? Stacy le supposa. Comment cette femme pouvait-elle être au courant de la transaction effectuée avec le petit homme? Elle lui dit :

– Il vous a tenu au courant de notre entretien, d’accord, mais pourquoi intervenez-vous d’une manière aussi artificielle? Qui êtes-vous? Qui est-il?

– Les bonnes questions seraient plutôt quoi est-il, quoi suis-je?

Stacy, en colère, se leva et délaissa les divagations de son interlocutrice. Celles du petit homme lui suffisaient, et c’était déjà trop. Le café ne sera pas bu. Stacy chassa la remarque de la femme d’un geste impatient comme elle l’aurait fait avec un insecte, n’importe lequel. Elle y était allergique.

Lorsqu’elle s’approcha de sa maison, elle vit un grand homme l’attendre devant sa porte. Corps sec, visage volontaire, cheveux sombres, très longs, dont une partie en queue de cheval. Son allure l’impressionna, mais plus encore ce regard aux couleurs changeantes, et ce sourire qui semblait dire « devine qui je suis. » Il lui dit :

– Votre impatience à mon égard est salutaire. Vous résistez, mais une part en vous commence à comprendre. Cette part liée à ce que vous avez vécu pendant votre coma.

Puis il se tut, attendant une réaction. Elle vint, silencieuse et douloureuse. Stacy pleurait et souriait. Stacy maîtresse femme redevenait l’enfant, cette part de soi jamais séparée de la grande conscience. Elle dit :