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Christian Sulleman, témoin des bouleversements majeurs qui ont jalonné deux siècles et deux millénaires, livre une réflexion saisissante sur une société qu’il perçoit en perte d’humanité. La violence omniprésente et l’essor des intelligences artificielles dépourvues de sensibilité donnent, selon lui, l’impression d’un monde peuplé de robots humanoïdes. Avec une nostalgie palpable, il revisite l’époque révolue de la Douce France, ce pays de son enfance où résonne encore l’écho de la chanson de Charles Trenet. À travers cet ouvrage, il pose un regard lucide et mélancolique sur le temps passé, tout en interrogeant sur les dérives d’un présent déshumanisé.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Auteur et réalisateur,
Christian Sulleman a à son actif une trentaine de courts métrages, dont certains ont été distribués par la Warner Columbia en première partie d’un long métrage. Il a également réalisé de nombreux documentaires télévisés couvrant des thématiques variées, y compris des portraits de personnalités. En tant que réalisateur vidéo en régie, il a réalisé des centaines d’heures d’émissions enregistrées ou en direct, aussi bien en studio qu’en car vidéo
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Seitenzahl: 119
Veröffentlichungsjahr: 2025
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Christian Sulleman
La fin de mon monde
© Lys Bleu Éditions – Christian Sulleman
ISBN : 979-10-422-5597-8
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Ça peut être un été, au soleil allongé sur un transat en regardant courir de rares nuages dans l’immensité d’un ciel bleu, porte d’un infini propice à la réflexion, voire à une introspection. Ça peut aussi être à l’occasion d’autres hasards comme un soir pelotonné dans son lit, enveloppé par une douce chaleur, la lumière éteinte, avant de s’endormir et que l’esprit s’échappe du présent et ouvre l’armoire de la mémoire des souvenirs. Là c’est une avalanche de tranches de vie, de sa vie qui jaillit d’une semi-inconscience, des visages, des lieux, des couleurs, des odeurs que l’on ressent. Comme un torrent, elles jaillissent du passé en nous faisant remonter le temps, c’est une évasion dans l’onirisme de flashs de notre existence qui jaillissent pêle-mêle…
Les années qui passent, qui s’accumulent, s’entassent en vrac, marquent la peau de chacun, leurs visages, leurs mains, ce sont les rides où sont gravées les étapes, les épreuves d’une vie comme la musique l’est dans les sillons d’un disque…
Chaque être humain est unique. Aucun n’est identique à un autre comme le sont les empreintes des doigts d’une main. Sa diversité est liée au hasard que le mystère de la vie a décidé, pour son sexe, sa race, sa couleur, pour son physique, son intellect. Sa diversité est aussi liée à son lieu de naissance dans le monde, à son pays, sa région, sa ville, son quartier, le milieu social où il est né et a grandi. L’environnement dans lequel il a vécu l’a formé, parfois formaté à une idéologie envahissante pour les plus faibles psychologiquement. L’éducation de ses parents, son parcours de vie, ses rencontres ont aussi pu l’interpeller, l’inciter à la réflexion et l’influencer. Tout cela a construit un monde autour de lui, un monde qui est une sorte de matrice et aussi de motrice de son existence… Un monde qui a étalonné sa personnalité et aussi parfois a pu le faire évoluer dans des domaines vers des horizons qu’il n’imaginait même pas ou qu’il pensait inaccessibles… Le hasard a-t-il parsemé d’opportunités, de rencontres, son chemin de vie ou comme l’a écrit Paul Eluard, Il n’y a pas de hasard, mais des rencontres. Notre destin serait-il ainsi sur une trajectoire qu’inconsciemment nous suivons sans dévier ?
Hormis les grandes lignes civilisationnelles communes à une époque de l’humanité, à un pays, une religion qui ont pu nous pousser à des interrogations, nous ballotter, nous chahuter, chacun dans son espace a vécu, vit dans le monde, mais avant tout dans son monde…
J’ai vécu et vis ma vie la tête dans les étoiles, mais les pieds bien sur terre. Les facettes de ces deux aspects de personnalités paraissent être antinomiques, mais bien au contraire elles donnent une force exceptionnelle à ceux qui en sont conscients et qui savent les gérer, les exploiter ensemble pour tirer le meilleur des opportunités de leur vécu et du chemin que l’on choisit ou sur lequel le hasard, voire notre destinée, nous conduit. Il faut aussi croire en son étoile, une étoile mystérieuse comme la légende des rois mages où ils auraient été guidés vers le but décidé par une force mystérieuse et incompréhensive pour les humains. Une légende ? Une parabole ? Une sensation, une intuition peut suggérer à chacun de suivre la direction de son inconscient, là où il nous appelle. Cette étoile peut aussi être appelée la chance. La chance qu’il faut suivre, saisir, savoir interpréter, savoir interpeller et suivre par intuition et avec confiance… Beaucoup l’implorent, elle est très courtisée, c’est un peu comme une très jolie femme et au milieu de ses courtisans, il faut savoir la draguer, la séduire par nos actes pour qu’elle nous remarque, s’intéresse à nous… Il faut croire en elle en nous souvenant du proverbe « aide-toi et le ciel t’aidera ».
Est-on maître de son destin ou celui-ci est-il programmé ? Inscrit dans les lignes de nos mains, comme le prétendent certaines sciences occultes ?
Tout homme qui ne se retourne pas sur son passé est un homme perdu, car pour essayer de comprendre où l’on va, ce qu’il nous faut faire, on doit se souvenir d’où l’on vient, quel parcours on a fait, voir les erreurs que l’on a pu commettre pour éviter de les reproduire, celles-ci doivent être des leçons. Ceci sans pour autant que nous devions vivre avec des regrets ou des remords. L’avenir c’est toujours devant, même si l’horizon de la fin du chemin se rapproche chaque jour…
Avec l’empilement des années surviennent brutalement les premières séquelles physiques et quasi au même moment nous ressentons une perte d’énergie et de dynamisme. On s’éloigne partiellement du personnage battant et fonceur que l’on a pu être. C’est comme une lente hémorragie de la vie qui semble nous quitter lentement. On doit alors affronter notre condition et mobiliser toutes nos forces pour toujours être un battant et pas un battu ! Certains pour ne pas perdre pied se réfugient dans des associations, d’autres dans la lecture ou ils se laissent habiter par la pensée d’autrui. C’est à ce moment que l’on peut, que l’on devrait, se replonger dans les débuts de notre existence et comprendre comment nous avons évolué dans un monde toujours en métamorphose et comment nous nous y sommes adaptés plus ou moins vite au fil du temps…
Se retourner sur son passé, c’est remonter notre sentier de Petit Poucet, les principales étapes de notre vie qui sont marquées par autant de petits cailloux blancs ou noirs… En remontant le temps, on se rend compte que notre destinée a suivi une logique, celle de l’être que nous sommes intimement, pour nous mener là où nous en sommes et ceci même si parfois nous n’avons pas compris certaines étapes, les épreuves qui ont pu nous ébranler, nous égarer de ce que nous aurions pu faire, voulu faire, être… Si nous n’avons pas pu faire aboutir certains projets, souhaits, avec le recul des années, on peut se poser la question : étions-nous prêts à les concrétiser ? Une certaine logique se serait-elle imposée à notre insu ?
Il y a des situations, des personnes qui ont pu nous perturber sur le moment, mais là encore, le gommage du temps étant passé, ces moments, ces personnages sont devenus si insignifiants que l’on peut se demander pourquoi à l’époque on a pu leur donner une moindre importance…
Et puis il y a ces êtres très chers qui nous ont accompagnés, escortés, aidés, fait vivre des moments gravés à jamais dans notre mémoire malgré parfois des hauts et des bas dans la relation… Ils ont été avec nous sur une partie plus ou moins longue de notre existence et ils nous ont quittés, perdus dans le temps, dans la vie ou dans la mort, que des croyants appellent la porte ouverte sur un autre monde, celui de l’autre côté du miroir de la vie… Notre passage est ainsi fait… Ces départs ont pu être des déchirures et le temps qui a passé, qui passe a atténué la souffrance, a en partie cautérise les plaies, même s’il reste des cicatrices.
Je suis né à Brioude il y a plusieurs décennies, une petite ville d’Auvergne d’environ 8000 habitants à l’époque. La ville se situe dans la plaine de La Limagne où serpente la rivière Allier. Elle est localisée entre les monts du Cantal et ceux du Forez… En ces temps de mon enfance, la vie en général était celle des villes à peu près semblables de la même région, hormis de petites particularités liées à un secteur économique spécifique… Là, l’industrie était celle du bois, de la scierie à la menuiserie en passant par la fabrication de poteaux destinés aux lignes électriques ou téléphoniques. Il y avait aussi 2 sociétés prospères qui travaillaient l’or, le transformant en bijoux, 2 entreprises de travaux publics dont une qui fabriquait également des éléments en béton pour des constructions de maisons, de bâtiments. Une usine métallurgique et chimique complétait le secteur industriel ; elle n’existe plus aujourd’hui. Plusieurs sociétés, dont celles travaillant l’or, le bois ont aussi disparu et avec elles 2000 habitants environ ont quitté la ville, la région ou se sont installés en périphérie pour des raisons économiques.
À l’époque, Brioude avait aussi une économie liée avec sa proximité du bassin minier de Brassac La Combelle. À Sainte Florine, une usine d’équipements automobiles était un employeur important…
Mon père était menuisier charpentier et ma mère femme au foyer… Pour eux comme pour beaucoup d’autres, pour pouvoir vivre décemment, ils devaient travailler dur. Mon père faisait des heures supplémentaires et en dehors de son travail professionnel cultivait un jardin avec l’aide de ma mère qui elle élevait poules et lapins pour améliorer le quotidien…
J’ai été élevé dans un cocon, aimé, choyé autant que mes parents le pouvaient, voire parfois PLUS. Je pense que j’ai vécu cette situation privilégiée grâce, même si c’est plutôt hélas, au décès d’une petite sœur de 5 ans que je n’ai pas connue, étant partie au pays imaginaire des merveilles et des anges 3 ans avant ma naissance… Traumatisés par ce deuil, mes parents ont comblé d’amour celui qui était arrivé. À moi seul je profitais d’un amour pour deux, de l’amour pour moi et peut-être inconsciemment aussi pour elle. Je suis un fils unique pour l’état civil, mais dans la vie de tous les jours, le souvenir de celle qui aurait été mon aînée n’a cessé d’être présent et évoqué dans notre famille, voire m’accompagne toujours. Elle a une place dans mon esprit par l’imprégnation indélébile du ressenti que mes parents m’ont transmis… Parfois dans les bourrasques de la vie, j’aime à penser qu’elle, et maintenant mes parents sont les étoiles qui m’éclairent, veillent sur moi et que, lorsqu’il y a épreuve, tout s’arrangera, et tout s’est toujours arrangé… Si j’avais l’impression d’être lâché, je serais perturbé, égaré, sans balise, encore plus aujourd’hui, tellement le monde actuel m’est en grande partie étranger…
Cette petite ville où je suis né a bien changé, elle est méconnaissable par rapport à celle de mon enfance… Elle était très vivante, c’était avant l’implantation de supermarchés, hypermarchés qui ont éradiqué cette vie du centre-ville. Son cœur battait dans ce centre qui était très animé, toutes les rues étaient bordées par des magasins de toutes sortes, dont les vitrines, les étals exhibaient les produits de leurs spécialités souvent régionales. C’était un capharnaüm, c’était comme voir la vie avec un kaléidoscope par la multitude de couleurs qui se dévoilaient. C’était aussi un mélange d’odeurs, de senteurs dont les effluves pouvaient soit flatter ou agresser l’odorat. Ces rues, les magasins étaient l’occasion de contact entre les habitants où l’on parlait de tout et de rien, comme de la météo. C’était bien avant internet et les réseaux sociaux… Tout le monde se connaissait, échangeait avec le respect de l’un pour l’autre…
Pour m’apprendre des parcelles de la vie en m’immergeant en elle, en me confrontant à elle, ma mère m’envoyait faire des courses. Je prenais ainsi conscience de la valeur de l’argent, du respect que l’on devait avoir avec en faisant attention au prix de chaque chose. Je faisais attention à l’argent que je donnais en échange de mes achats et à la monnaie que l’on me rendait. Ce fut une partie de mon éducation…
Une autre partie de mon éducation, En plus de mes parents, ce n n’est pas l’école qui me l’a donnée ou très peu, mais l’expérience de ma vie et cette éducation parallèle est très bien évoquée dans une partie du texte de la chanson du Canadien Jean Pierre Ferland, Mes années d’école.
Si j’ai appris à écrire, c’est que j’ai souvent lu dans les feuilles de chêne et les plumes de paon
Si je sais parler aux belles, c’est que je sais comment font les tourterelles et les chauds lapins.
Dans le fond de mes sabots, il y a comme un renard…
Mais de mes années d’école, je n’ai rien gardé, ce n’était que des paroles pour gâcher l’été.
J’ai appris à ma manière que la liberté c’est de cracher dans la rivière ou dans le sentier.
Se peut que j’ai fait mes classes sous un églantier, que j’oublie ou que je ne sache pas très bien compter
Mais je sais tendre l’oreille et je sais rêver comme rêvent les corneilles et les peupliers
Si je sais plier bagage quand il est temps c’est qu’avec les oies sauvages j’ai frayé longtemps
Si je sais lécher en outre je sais mordre aussi, je l’ai appris d’une loutre et d’un saumon gris
Quand j’aurai tenu parole et bien gagné ma vie, quand j’aurai mis pauvres écoles à pauvres profits
J’apprendrai d’un solitaire à vivre caché et d’un loup quinquagénaire à me taire…
Mes plus lointains souvenirs sont flous, partiels, car embrumés par des décennies qui ont évaporé des pans de mémoire dilués par le temps… Rechercher ses souvenirs c’est parfois comme vouloir se souvenir d’un rêve, du rêve de la dernière nuit, ce ne sont que des fragments noyés dans de la brume, brume du temps ou d’un état onirique…
Ces souvenirs sont la plupart du temps des images arrêtées, comme l’éclair d’un flash qui illumine un visage très brièvement extrait du noir éblouit une scène une fraction de seconde en la figeant… Plus rarement, ce sont des images animées quelques brefs instants. Le défilement des années a fait son œuvre de dilution…