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"La Galoppaz – Ou la France des sans-papiers" ouvre une fenêtre sur la vie des sans-papiers en France, dévoilant leur réalité au quotidien : modes de vie, aspirations, projets et errances. À travers des témoignages vibrants, cet ouvrage plonge au cœur de leurs perceptions de la France, de leurs racines et de leur vision du monde. En dépeignant sans détour les complexités et les incohérences des rouages administratifs, il enrichit chaque récit en le replaçant dans le vaste panorama des enjeux mondiaux contemporains. Une lecture qui promet d’interroger, d’émouvoir et d’éveiller les consciences.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Né en pleine tourmente de la guerre à Biskra, en Algérie,
Hassen Bennoui a emprunté la voie de l’exil, trouvant refuge au Maroc avant de retrouver sa terre natale après l’indépendance. Artiste-peintre et comédien, il a ensuite parcouru l’Europe, vivant d’abord dans la légalité, puis sous de fausses identités, jusqu’à sombrer dans la précarité du statut de sans-papiers. À travers cette œuvre, il sensibilise le lecteur aux réalités et aux épreuves invisibles de ceux qui, comme lui, survivent dans l’ombre, espérant éveiller une prise de conscience face aux destins souvent ignorés.
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Seitenzahl: 527
Veröffentlichungsjahr: 2024
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Hassen Bennoui
La Galoppaz
Ou la France des sans-papiers
© Lys Bleu Éditions – Hassen Bennoui
ISBN : 979-10-422-5201-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122- 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122- 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335- 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Je me réveille à dix heures du matin, en forme, à la Galoppaz, un foyer pour sans-abris à Chambéry, gratuit, et confortable pour un Algérien, luxueux pour un Africain. Je suis un sans-papiers. Je suis arrivé en France légalement il y a plus de 40 ans. J’ai vécu légalement, avec des papiers, et honnêtement. Puis j’ai voyagé dans quelques pays européens, légalement, avec papiers, tant que la légalité était possible, quand le monde n’était pas le monopole de l’Occident ; puis illégalement, sans-papiers ou avec de faux papiers, quand la force et la face primèrent sur la loi et le droit, me reléguant dans l’axe du mal, celui du soviétique, de l’Arabe, du musulman, de tout ce qui n’était pas l’Occident de la loi et du droit… Il était devenu désormais impossible de voyager pour un non-Occidental ; l’Algérien qui voyageait sans visa dans la plupart des pays européens ne pouvait plus le faire sans acheter un visa à deux mille euros au moins, et encore devait-il prouver qu’il n’était pas un terroriste. Il a fallu attendre la destruction de plusieurs pays du terrorisme, de l’axe du mal, la renaissance de la Russie et l’apparition de la Chine, pour que les choses s’améliorent, pour pouvoir voyager librement, avec ou sans visa, légalement ou clandestinement. Mieux encore, on n’a plus à songer où dormir, quoi manger, il y a des centres d’hébergement gratuits comme la Galoppaz, avec priorité pour les étrangers illégaux et sans-papiers. La destruction de pays entiers n’a servi à rien, pour un mort il est né plusieurs enfants qui, dès la majorité, et parfois encore mineurs, prennent la route, sous la bénédiction de la Russie, de la Chine, et de tout l’axe du mal non occidental. Un jour l’Occident regrettera ses explorations et ses découvertes, quand il s’apercevra qu’il est la colonie de ses colonies.
Quand je revins en France, il n’y avait plus de papiers, c’était complet. On ne voulait plus en donner, il y a trop de crises, de migrants du Sud et de l’Est. Seuls les Occidentaux ont le droit de se déplacer dans le monde. Et quelques Japonais, quelques Chinois, quelques Arabes du Golfe… Il y avait des papiers quand on avait besoin de soldats, puis d’ouvriers, puis de géniteurs. Les papiers, ce n’est pas une question de loi, de droit, c’est une question de besoin, d’intérêt. Aujourd’hui en France on discute de régulariser les sans-papiers qui travaillent ; malgré leur double illégalité : ils sont sans-papiers et ils travaillent au noir. Comme des bêtes, des esclaves, il est vrai. Et ils ne parlent pas français. Et on discute de dérégulariser et dénaturaliser des gens présents en France depuis toujours ou longtemps sous des prétextes à faire pleurer et rire jusqu’aux larmes. C’est qu’on a besoin de ceux qui travaillent comme des esclaves, de bons colonisés. Ça rassure les nostalgiques et ça rapporte de l’argent. Finalement on ne régularise ni ne dérégularise, sauf exceptionnellement ; on parle et on promet pour faire plaisir à ses électeurs ; ce n’est pas une question de loi et de droit, mais de démagogie. En attendant, ceux qui travaillent comme des esclaves nourrissent ceux qui ne travaillent pas.
Je dors bien à la Galoppaz, je dors quand je veux, autant que je veux ; le lit, le chauffage, l’électricité, l’eau, le ramassage des poubelles… tout est gratuit. J’ai le temps de me reposer, je n’ai pas de travail. Je mange avec appétit et gratuitement, je n’ai pas besoin de médecin et de médicaments, je ne tombe pas malade parce que je suis sportif et heureux, c’est psychosomatique, quand on est heureux, on ne tombe pas malade, on ne tombe malade que si on l’est déjà dans la tête. Sinon les soins sont gratuits, et de loin meilleurs qu’en Algérie. Il ne manque qu’une femme gratuite…
Quand j’ai un empêchement pour faire du sport, je marche, j’évite de paralyser mes muscles en prenant le bus, gratuit pour les sans-papiers.
Ce que je fais à part dormir, manger, me reposer et me promener ? Si je m’ennuie ? Je ne m’ennuie jamais, c’est peut-être psychosomatique ; c’est certainement parce que je vis comme rêvent ceux qui ont travaillé toute leur vie : je lis, je pense, je médite, je regarde, je me promène… Je cueille des orties, c’est très bon pour la santé, c’est gratuit, et il y en a partout, il pleut assez en France, il y a assez de soleil. Il y a des naïfs qui les achètent !
C’est aussi parce que travailler, dans ma culture, c’est mauvais pour la santé et l’économie. En Algérie on ne travaille pas et on n’aime pas travailler ; avant il y avait des Français pour ce faire, et maintenant il y a des Chinois. Travailler c’est se condamner à avoir des chômeurs, et à vivre dans le besoin et l’inquiétude. C’est ainsi qu’est la France. Le travail est une manie, un vice : dans Les Misérables, de Victor Hugo, et dans Germinal, d’Emile Zola, il y a des gens qui travaillent comme des fous et vivent mal. Avant l’industrie ce n’était pas mieux, les travailleurs de la terre étaient des esclaves dits par pudeur des serfs. Les Chinois, s’ils continuent de travailler comme ça, subiront le même sort que les Français. Chiffrer, compter, planifier, avec exactitude, le travail, l’économie, sans regard pour les fantaisies de la nature et sans égard pour la main mystérieuse de Dieu, ne sert pas. Le monde est une osmose entre l’homme et le pain ; l’homme va vers le pain ou le pain va vers l’homme. 80 % d’Irlandais ont été en Amérique pour manger leurs pommes de terre ; 70 % d’Argentins sont Italiens ; les Turcs et les Hongrois viennent d’Asie centrale ; bientôt 75 % de Français seront Africains. Migration, invasion, conquête, colonisation, trafic d’êtres humains…
Mon foyer est chauffé, il y a tout le temps de l’eau, froide, tiède et chaude ; des douches et des toilettes. Mais c’est sale, il y a des résidents qui boivent et se droguent, la saleté ne les dérange pas, ils trouvent que la vie est déjà sale, ils vivent sans espoir dans l’avenir, ils n’ont pas confiance dans leurs politiques. Ils ne veulent pas travailler, c’est dur et mal payé ; ils touchent un peu d’argent, ils sont français ou étrangers légaux. Et il y a des Africains qui n’ont pas de douches dans leurs pays, et peut-être pas d’eau et de toilettes, et qui ne savent pas qu’il faut nettoyer après avoir sali. Pourtant, ils sont depuis un certain temps en France. Ils savent donc qu’il faut nettoyer, mais ils pensent qu’ils ont des droits, qu’on les a assez volés et qu’on les vole encore ; ils sont wokistes. Ils dorment, mangent, s’habillent, gratuitement, mieux que chez eux où ils doivent travailler dur. Ils sont sans-papiers. On ne peut pas les expulser, ce ne sont pas des criminels ; le monde et les lois ont changé en leur faveur, le racisme est désormais interdit. On ne peut pas les enfermer, il n’y a pas de place, et ça coûte cher. Sans-papiers, ils ont de l’espoir et font des projets et des rêves ; ils ont une lutte à mener, leur vie a un sens. Ils sont contents quand ils trouvent un peu de travail au noir, même dur et mal payé. Quand ils touchent leur paye, ils courent à Western Union, Ria ou MonneyGram pour envoyer 50 ou 100 euros au pays, où les salaires commencent à 30 euros par mois et par famille souvent nombreuse. Un sans-papiers en France gagne mieux que le maire de son village en Afrique. En travaillant de temps en temps. S’il travaille régulièrement, il gagne mieux qu’un ministre africain qui ne vole pas. S’il fait du trafic de drogue, il gagne autant qu’un ministre qui vole.
Ils téléphonent aux leurs, c’est gratuit avec Viber ou WhatsApp, ils parlent longtemps, ils aiment parler, ils hurlent à cause de la longue distance, ils montrent avec les caméras de leurs appareils leurs baskets de marque récupérées à Emmaüs ou à la Croix rouge. Ils montrent aussi la Galoppaz, ça ressemble à un bel hôtel. Une vie de bourgeois qui excite, motive les prochains candidats à la migration, les frères, les cousins, les amis du quartier ou du village, et même les femmes, et même enceintes, à la traversée du Sahara et de la Méditerranée, des milliers de km, sans bagages, les poches vides, avec seulement un corps musclé, un rêve têtu, une volonté inébranlable et une philosophie ultra-wokiste.
Les sans-papiers du Maghreb ont moins de chance, les salaires dans leurs pays commençant à 200 euros par mois et par famille moins nombreuse. Il faut envoyer plus d’argent, et l’argent se fait de plus en plus rare.
Il y a aussi quelques personnes propres à la Galoppaz, qui nettoient leurs chambres, leurs couloirs et leurs sanitaires. Ce sont les sans-papiers avec enfants, ou des Français et des étrangers légaux avec des difficultés d’emploi, de famille ou de logement.
Les familles sont africaines, et un peu d’Europe de l’Est. Elles ont et font volontiers des enfants. Les enfants, ça rapporte en France. C’est un des métiers les mieux payés. Sans-papiers et sans ressources, ces familles ont gratuits la nourriture, l’abri, les habits, les soins, les landaus et les poussettes, les visites d’assistantes sociales, l’école, les jouets, les cadeaux à la Noël et au Nouvel An…
Les vieux qui viennent à la Galoppaz sont des abandonnés par leurs femmes, leurs enfants, ou ils n’ont pas de famille ; ou ils n’ont pas assez d’argent pour aller dans une maison de retraite. La vie coûte de plus en plus cher, les revenus ne suivent pas. L’inflation est élevée, officiellement 8 %, dit-on aux informations. En réalité et dans les magasins, elle est de 80 %.
Certains vieux étrangers légaux subissent le même sort que les Français de leur âge : ils sont abandonnés eux aussi par leurs femmes et leurs enfants ; parfois pour insultes et coups, oubliant qu’ils ne sont pas en Afrique, où on a le droit d’insulter et de frapper sa femme et ses enfants sans risquer de se retrouver dans la rue. Ils ont mal calculé, ils n’ont vu en France que l’argent, souvent touché grâce aux enfants.
Les jeunes étrangers légaux sont rares à la Galoppaz ; sauf s’ils ne sont pas sérieux, s’ils boivent et se droguent. S’ils sont sérieux, il y a toujours du travail, malgré le chômage, du travail qui a un seul petit défaut : il est dur et mal payé. S’ils sont sérieux et ambitieux, ils fréquentent la mosquée ou la prison et s’y abonnent : ces métiers sont faits pour les hommes, les vrais, les durs. Les doués allient les deux qualités : ils transforment la prison en mosquée ; ils se lancent à leur libération à prêcher l’Islam aux quatre coins de leurs quartiers, de la France et du monde où ils peuvent voyager librement étant Français contrairement aux autres musulmans qui ne peuvent le faire qu’en tant que sans-papiers. Ce fut une grave erreur, l’octroi de la nationalité française à des étrangers, qui plus est des musulmans. On devrait les défranciser tous. Mais comment faire avec les Français d’origine, les vrais Français, convertis à l’Islam ? Il faudrait revenir à l’Inquisition, ou aux ghettos, ou aux camps de concentration. Une autre grave erreur : plus il y a le chômage, plus il y a la crise, plus il y a de l’aide sociale, et plus ils font des enfants, des petits musulmans qui seront de grands musulmans. Encore une grave erreur : plus on interdit le port d’un morceau de tissu, plus les femmes en portent, et les petites filles aussi et même les hommes ; plus on insulte le Coran et Mohammed, et plus de gens se convertissent à l’Islam. Les erreurs de la France sont innombrables : plus elle critique et insulte le djihad, plus de gens deviennent djihadistes. À croire qu’elle le fait exprès. Ils voyagent facilement avec leurs passeports français, djihader à travers le monde. On devrait interdire le passeport français à certains Français. À trop médire de quelque chose ou de quelqu’un, on lui donne vie. Quand on demanda à un poète arabe classique : « Tel poète t’insulte ; pourquoi tu ne lui réponds pas ? », il répondit : « Je suis connu et il est inconnu ; il désire que je le fasse connaître, il ne l’aura pas ! »
La France est atteinte par la maladie de la suffisance et de l’orgueil, elle est nostalgique de sa grandeur de mère de la Révolution et de fille aînée de l’Église.
Elle fait tout pour appeler les migrants, elle les accueille bien et fait tout pour les garder ; pourquoi se plaint-elle ? Il n’y a pas d’invasion de la France, c’est elle qui se vend librement. Il n’y a pas viol, il y a consentement. Les migrants sont l’antidote aux manifestants, aux rebelles et aux casseurs contre le chômage et les bas salaires. Ils travaillent pour n’importe quel salaire, et chôment gentiment et tranquillement pourvu qu’on les nourrisse et loge. Ils font aux Françaises de beaux enfants, quand les Français sont incapables de leur en faire, ne serait-ce que des ordinaires ; par vieillesse, par impuissance, ou par pédérastie.
J’ai entendu dire que pour un euro que dépense la France pour un Africain, elle en gagne 10, 100, 1000… en Afrique.
L’expulsion n’est pas la solution idéale, parce que d’une part, pour un expulsé il y aura deux ou trois nouveaux migrants, un expulsé étant un homme d’expérience qui connaît le chemin, un « agent de renseignements », qui devient un guide pour les autres, un passeur. Et un expulsé peut revenir plus facilement, s’il le désire. D’autre part il faut des lois pour expulser sérieusement et durablement, il faut des accords entre la France et les pays concernés ; ce qui ne se fait pas pour l’instant, à cause de la mentalité colonialiste qui ne veut que des accords gagnants dans un seul sens. Comme dans le commerce ; d’où la banqueroute de la France en Afrique au profit de la Chine aux accords gagnant-gagnant.
Surtout, il y a le problème des salaires à partir de 30 euros mensuels par famille nombreuse en Afrique. S’il existait un pays où on peut gagner mille euros en travaillant une matinée ou une après-midi, beaucoup de Français y migreraient légalement ou clandestinement. Si de plus dans ce pays on est mieux nourri, logé, vêtu, soigné, que chez soi, la France se viderait de sa population, il ne resterait que des vieillards ; et encore certains d’entre ceux-ci migrent déjà et finissent leur vie de retraités dans des pays ensoleillés et pas chers ; c’est comme s’ils touchaient beaucoup plus d’argent ; avec mille misérables euros en France ils vivent comme des bourgeois en Afrique. Plus les salaires sont bas dans un pays africain, plus les habitants de ce pays veulent migrer en France ; les migrants ne viennent pas de pays en guerre, mais de pays à bas salaires. On peut gagner facilement en France, en une matinée ou en un après-midi, quelques dizaines d’euros, salaire mensuel fréquent en Afrique. Le colonialisme monétaire se retourne contre les colons par l’invasion migratoire. Déjà des Européens de l’Est et du Sud, qui ne sont pas Africains et qui touchent beaucoup plus que 30 euros par mois, migrent en France. On ne le voit pas dans la rue à cause du faciès. Il arrive qu’on arrête un étudiant, un médecin ou un fonctionnaire d’ambassade pour défaut de blancheur de la peau, et qu’on oublie d’arrêter un bandit européen… Il y a aussi les sondages et les statistiques qui n’ont rien à voir avec les mathématiques et la réalité, mais avec la politique et les sentiments ; ainsi les étrangers, les envahisseurs et les délinquants en France sont d’abord les Algériens…
Un collégien peut faire ce calcul : quelle est la superficie cultivable dans tel pays africain, quelle est la production agricole possible. Le résultat est qu’il y a assez à manger pour toute la population. Et pourtant il y a la sous-alimentation ! Et nous laissons de côté le sous-sol, gaz et pétrole, or et diamant, métaux et terres rares…, et le tourisme, et l’artisanat, et l’élevage et la pêche, et l’industrie… Un pays riche où les gens vivent pauvres. 30 euros par mois et par famille nombreuse.
Ce collégien peut faire aussi facilement cet autre calcul : le Royaume-Uni produit de ses terres à peine de quoi nourrir Londres. La France, plus vaste et plus ensoleillée, peut peut-être nourrir, avec Paris, Lyon ou Marseille… Où mangent les habitants de ces pays ? En Afrique ! Entre autres. La France ne nourrit donc pas ses étrangers, elle n’accueille pas la misère du monde ; c’est l’Afrique, entre autres, qui nourrit la France et accueille ses misères.
Bien sûr il n’y a pas que les ressources naturelles, il y a aussi les ressources humaines, intellectuelles, intelligentes, de ceux qui n’ont pas de pétrole, mais des idées… Des idées colonialistes. Avant on disait ressources raciales… Comment expliquer le bond de la Chine ?...
Il y a une autre ressource intelligente qu’on oublie : Monsieur Dollar. L’Euro est sa fille. C’est lui qui décide des 30 euros, ou dollars, par mois et par famille nombreuse. Un dicton arabe dit : « Ne nourris pas trop ton chien, il s’amollira, et ne l’affame pas trop, il te mordra ». Et voici les Africains montrant les dents, et les Français fuyant et laissant tomber leur casse-croûte. Monsieur Dollar a trop affamé les uns et trop nourri les siens.
D’habitude je ne me réveille pas à dix heures du matin, mais à sept. Pour aller prendre, mon petit déjeuner à la Cantine Savoyarde, café, thé, chocolat, lait ; pain blanc, ou noir, ou de campagne, ou au beurre, ou avec des graines de sésame ou autres ; beurre normal, salé ou demi-salé, confitures diverses, parfois miel, chocolat à tartiner ; brioches, viennoiseries, gâteaux ; parfois chocolat dur, fruits, yaourt. Ceux qui croient que j’exagère peuvent aller vérifier. C’est vrai que la Cantine Savoyarde est l’une des meilleures en France ; c’est voulu : pour voler à l’Italie, à côté, ses migrants ; d’où les problèmes politiques entre les deux pays. On s’arrache les migrants ; l’Allemagne, pourtant un peu raciste, en a pris il n’y a pas longtemps, à elle toute seule et d’un seul coup, un million, des Syriens surtout. Les migrants, c’est du pétrole, de l’or, de l’uranium…
Le petit-déjeuner est gratuit, de même que le repas du soir. Le repas de midi est payant pour les Français, 1 euro, 50, gratuit pour les sans-papiers. C’est juste et équitable : les Français touchent quelque chose ; pas beaucoup, ce n’est pas assez pour aller au restaurant, 10 à 30 fois plus cher, mais c’est assez pour la Cantine Savoyarde. Les sans-papiers ne touchent rien ; quand ils gagnent quelque chose, ils courent vite à Western Union, Ria ou MonneyGram, les petits frères et sœurs au pays doivent manger aussi, on n’a pas fait des milliers de km périlleux pour rien, à pied, à la nage, ou accroché à un avion.
Les sans-papiers mangent avant les Français, ce n’est pas une loi, ce sont les muscles.
Normalement il faut faire la queue, chacun son tour, il y a assez à manger pour tout le monde, les commerces de l’alimentaire se débarrassent de leurs invendus que les Français ne peuvent pas acheter à cause de la cherté, de l’inflation. Les sans-papiers, surtout les Africains, ne font pas la queue ; ils mangent les premiers. Pour bien manger en France, il faut être un sans-papiers.
Les Africains n’aiment pas faire la queue parce que c’est contraire au wokisme ; ce serait une trahison de leurs valeurs et principes philosophiques et moraux. En groupes, ils bousculent les résistants, menacent les mécontents ; les timides et les faibles ne disent rien, ou grommellent bas de peur d’être entendus ; parfois on les entend, alors on leur demande avec un regard accusateur et inquisiteur : « Vous êtes raciste ? ». Ils répondent : « Moi ? Pas du tout ! » Les plus racistes répondent : « Moi je n’ai rien contre les Africains ! »
Les Africains ne sont gentils que quand ils sont seuls ou à deux ou trois, ou quand ils sont face à d’autres groupes plutôt violents, Maghrébins, Albanais ou autres. Mais c’est rare, en général ils sont les plus nombreux, ils s’arrangent pour être unis. L’union fait la force. Il n’y a pas longtemps ils étaient deux ou trois cents millions dans le monde, moins nombreux que les Européens ; aujourd’hui ils sont un milliard et demi, quatre fois plus nombreux que les nouveaux Européens, des Européens au sang mêlé déjà arabo-africain. D’après les démographes, en 2050, il y aura en France plus d’Africains que de Français.
Leur gentillesse ne garantit pas toujours celle des Maghrébins, ou des Albanais, et parfois il y a des bagarres rangées, quelquefois sanglantes. Les Africains perdent en général ; ils se calment les premiers, non parce qu’ils sont moins forts, au contraire ils sont athlètes et alertes, mais parce qu’ils ont peur de la police, de l’expulsion. Un Albanais expulsé revient en quelques jours, par route, confortablement assis ; un Africain doit faire des milliers de km, durant des mois, des années. Le Maghrébin se situe entre les deux, il se calme un peu, mais il sauve son honneur qui l’aveugle.
Pourquoi les Africains se battent-ils pour manger ? Ils ont de l’appétit, certes, mais il y a assez à manger ! Et les premiers servis ne mangent pas mieux que les derniers ! Manger en Afrique est payant et pas donné, c’est cher et parfois il y a des pénuries. Ce n’est pas comme en France, où c’est un droit, qu’on travaille ou pas. Les Africains bousculent même pour passer avant les vieux, les femmes, les enfants, les handicapés, prioritaires. Ils doivent être fatigués d’être toute leur vie les derniers, et ils veulent, par revanche, être les premiers. Ou craignent-ils qu’il ne reste plus rien à manger pour les derniers ? Pourtant on leur a dit plusieurs fois qu’il y a assez à manger pour tout le monde. Pour manger avec les Africains, il faut faire de la musculation, et peut-être un art martial.
Les Africains sont les plus grands jeteurs de nourriture. Il est péché pour un musulman de jeter la nourriture, elle est sacrée. Un Français n’en jette qu’en cas de nécessité, c’est une question de civisme. Un Africain ramasse et amasse toute la nourriture qu’il peut, dans son ventre, dans ses poches, dans son sac ; et comme il ne peut pas tout manger, il jette ce qui lui reste à la poubelle ou par terre ; il ne garde que les boîtes de conserve.
L’arme des Africains, pour avoir raison même quand ils ont tort, pour obtenir une chose à laquelle ils n’ont pas droit, c’est : « Vous êtes raciste ! » Le « raciste », gêné, culpabilisé, se laisse faire pour sortir d’affaire. Parfois ils sont sincères, ils voient vraiment du racisme, où il est et aussi malheureusement où il n’est pas sinon dans leur imagination.
Certains Français refusent de payer leur ticket, à peine le prix d’un café, ils estiment qu’ils touchent trop peu d’argent, juste de quoi payer leur tabac, très cher en France, et leur alcool et leur drogue aux prix raisonnables heureusement. Ils trouvent injuste que des sans-papiers soient mieux traités que des Français. Ils mangent quand même gratuitement, la Cantine Savoyarde ne va pas appeler la police chaque jour !
La Cantine Savoyarde est subventionnée par des bienfaiteurs, des particuliers et des associations, afin de garantir la paix des habitants de la ville et la propreté des rues.
Les sans-papiers, les SDF, les pauvres de plus en plus nombreux, les Français mécontents et difficiles doivent être bien nourris, ils doivent bien dormir au chaud, se laver et s’habiller, se faire soigner. Pour éviter la guerre civile.
Pendant la journée, ils doivent être à l’abri du mauvais temps, à l’Accueil de Jour, chauffé, avec wifi, TV, café et thé à volonté, lait, chocolat, boissons fraiches, céréales et choses à grignoter… Tout est gratuit. Téléphone gratuit aussi, pour toute la France, normalement pour les affaires administratives, mais on peut appeler des amis ou une copine. Il y a aussi une infirmerie, une dentiste, une psychologue ; c’est gratuit aussi. Et des éducateurs, des assistantes sociales, des cours de français ; tout le monde est gentil, serviable, heureux d’avoir du travail, craignant le chômage, adorant les sans-papiers, les pauvres et les oubliés, source de leur emploi… Il ne manque que des masseuses !
Le problème, c’est quand il fait beau… Quand il fait mauvais temps, les Chambériens sont tranquilles. Aux premières lueurs tièdes du soleil, les sans-papiers, et les Français alcoolisés, ou drogués ou les deux, accompagnés de chiens au même caractère qu’eux, envahissent la ville, chassant les habitants vers les lacs et les montagnes environnants ; ça fait vacances en même temps. Ceux qui n’ont pas les moyens se terrent chez eux, sauf les plus braves, les Maghrébins avec papiers. On ne se croit alors ni à Chambéry ni en Europe, mais en Afrique du Nord ou en Afrique tout court.
L’Accueil de Jour est désert par beau temps, malgré les boissons fraîches, les sucreries, la climatisation. Les clients passent, mais ne restent pas ; juste le temps de boire et grignoter, et ils repartent.
Je ne m’ennuie jamais ; chaque jour, à l’Accueil de Jour, à la Cantine Savoyarde, à la Galoppaz, en plus de mes lectures, mes méditations, je vois des pièces de théâtre plus vivantes et plus réelles que celles de Molière et de Shakespeare, et je rencontre de vrais Don Quichotte et Sancho Panza ; je fais le tour du monde sur place ; j’apprends plus que les théories chimériques des sociologues et des ethnologues, que les informations des médias et les analyses des experts. Me demander de ne pas être heureux, c’est me demander l’impossible ! Si je n’étais sans-papiers, je paierais pour le devenir. Comme ce pickpocket algérien, sans-papiers, riche et heureux, grâce à ses mains de prestidigitateur, grâce à ses convictions philosophiques et politiques malgré son analphabétisme, à savoir « voler la France ce n’est que récupérer en détail ce qu’elle vole en gros », enfin grâce aux juges quand il se fait arrêter, auxquels il s’excuse en se plaignant : « Je suis un pauvre orphelin, tous les miens sont morts tués par des terroristes, je suis venu en France, pays accueillant et généreux, pays de la démocratie, de la justice, des droits de l’homme, de policiers gentils qui ne frappent pas et de juges droits qu’on ne peut pas acheter, comme en Algérie… Je ne connais personne, je suis seul au monde, je n’ai pas de papiers ni d’aide sociale, alors quand je ne trouve pas un petit travail pour survivre, je vole un peu pour manger, pour ne pas mourir de faim et de froid… »
Les pickpockets ont des gestes d’une extrême douceur, d’une non-violence rivalisant avec celle de Monsieur Gandhi. Les juges ont d’autres chats violents à fouetter ; il n’y a pas d’agression dans un vol à la tire, il n’y a que des gens distraits qui ne font pas attention à leurs poches et sacs.
Toute sa famille était en vie en Algérie ; il envoie régulièrement de l’argent, il en gagne bien, sans investissement ni matériel et sans impôts ; il avait beaucoup de talent. Il n’est pas venu en France pour perdre son temps ; ni pour manger, il ne crève pas de faim en Algérie.
Un jour, lors d’une régularisation massive, il dépose un dossier vite fait, pour la forme, afin qu’on ne l’accuse pas de ne rien faire pour vivre légalement. Les papiers ne l’intéressent pas, c’est l’argent qui l’intéresse. Malheureusement il obtint son titre de séjour.
Les régularisations massives arrivent toutes les dix ou quinze années, dans certains pays européens ; les démographes s’aperçoivent qu’il y a trop de vieux, peu de jeunes et très peu de naissances, et que leur race est en train de s’éteindre ; même les Allemands ; alors ils régularisent massivement les sans-papiers, tous jeunes, dynamiques, débrouillards. Ils sont déjà là, ce n’est pas la peine de les importer, de payer le transport ; il suffit de les laisser entrer, d’aller les attendre à la mer, d’autoriser des ONG à les secourir, de leur préparer des Galoppaz.
Régularisé, devenu un avec papiers, avec des ressources pour vivre, son calvaire commença, parce qu’il n’avait pas pensé à une chose : il ne pouvait plus, s’il continuait à pickpocketer et qu’on l’arrêtait, prétendre devant les juges qu’il volait parce qu’il avait faim. Il serait condamné et enfermé. Si au moins il se faisait expulser ! Avec ce qu’il gagnait en pickepocketant, il reviendrait en France en une semaine avec de faux papiers ou des passeurs, par l’Italie, l’Espagne, la Grèce, la Turquie, les Balkans, la Bélarusse… Au choix, beaucoup de pays à découvrir, moins chers que la France. En payant bien, il peut acheter un visa, et un vrai de l’ambassade ; les ambassades vendent des visas pour finir leurs fins de mois… Il ne perdrait pas des mois voire une année ou deux de chômage forcé en prison. Comment faire pour redevenir un sans-papiers, afin de pouvoir travailler, pickepocketer ? De plus il n’y a pas que l’argent qui compte, il y a aussi l’oisiveté : il meurt d’ennui s’il ne travaille pas, il ne comprend pas ces gens oisifs qui vivent assistés sans rien faire.
Je ne suis pas pickpocket, mais, franchement, c’est une bonne affaire d’être sans-papiers. D’une certaine manière, je suis un pickpocket : je suis pris en charge totale sans travailler, je vole tous les Français et les étrangers qui travaillent. Mais je les rembourse, je donne des cours et fais de l’animation à leurs enfants, comme bénévole, dans un centre socioculturel à Chambéry, et je nettoie sans contrepartie là où les autres salissent à la Galoppaz ou ailleurs. Moi aussi j’ai des convictions philosophiques et politiques, je ne veux pas voler les autres, je veux payer le pain que je mange. Si la France vole l’Algérie, c’est une affaire politique et moi, je ne fais pas de politique. Pourtant la France me vole, et l’Algérie me vole.
Je n’ai pas cherché à être sans-papiers, ce privilège m’est venu tout seul ; j’ai tout fait pour être légal, mais l’administration française est peu claire en matière de légalité.
Je le sais bien, il y a trop d’hommes sur terre, ils gênent, on n’a besoin ni de leurs bras ni de leurs cerveaux : il y a des machines, des ordinateurs, des robots, qui font ce qu’on leur demande sans se plaindre ni manifester. Loi du marché, l’offre et la demande : il y a trop d’hommes, sans valeur marchande.
Il y a assez d’hommes en France ; il y a surtout trop de Français trop vieux, qui ne veulent pas mourir. L’Afrique ne veut pas de ses Africains, ils feront la guerre civile ; en France ils sont mieux, ils envoient de l’argent, et des devises. Que faire de tous ces hommes ?
En France, non seulement on ne fait pas de papiers aux sans-papiers, mais on enlève aux avec-papiers les leurs. On les fait courir pour le renouvellement, ou en cas de perte, de vol ou de… vente. La crise est telle que les gens font n’importe quoi pour joindre les deux bouts. Il n’y a plus de travail, les machines et les robots ont tout pris. De plus en plus de sans-papiers volent ou achètent les papiers des autres, ça leur coûte moins de temps, d’argent et de tracasseries administratives qu’une demande régulière. Quand les avec-papiers récupèrent leurs papiers après avoir vécu le calvaire des sans-papiers, ils sont si contents, qu’ils arrêtent de se plaindre, de manifester et de faire la grève ; ils passent de l’opposition à la collaboration et deviennent de bons citoyens. Quand ils ont vendu leurs papiers, ils deviennent plus riches. L’administration ne manque pas de prétextes pour faire les papiers au compte-gouttes : débordements, nouvelles procédures, pannes ou attaques informatiques, grèves, troubles, accidents, découverte de bandes et de réseaux de faussaires…
Ce que les sans-papiers admirent le plus en France, ce sont les soins. Personnellement je n’ai pas la chance d’en profiter, je tombe rarement malade, et je ne vais pas voir le médecin ; je crois que notre corps est son propre médecin, que la nature est pleine de médicaments gratuits.
Ils sont soignés comme leurs ministres, dans leurs pays, qui d’ailleurs se soignent plus souvent en France que chez eux. Aussi se soignent-ils beaucoup, et donc tombent-ils malades souvent. Tel s’est fait opérer d’un œil, qui est encore bon à 40 %, l’autre étant bon à 80 %. D’après son âge, 40 ans, c’est normal, la vue baisse, et il voit quand même assez bien. Mais lui regarde le prix exorbitant de l’opération, gratuite pour lui, sans-papiers. Il montrera fièrement ça aux siens. Les Français doivent payer, au moins en partie, une telle opération.
On aime opérer en France, ça rapporte, ça coûte très cher. Si les sans-papiers ne paient pas, les médecins sont quand même payés, par l’État, par ceux qui travaillent. Les laboratoires et les industries de santé ont une croissance galopante. La plupart des femmes civilisées accouchent, quand elles accouchent, par césarienne, alors qu’elles ont un organe naturel pour le faire, comme les animaux et les Africaines. Peut-être ont-elles perdu l’habitude ; un organe qui ne fonctionne pas meurt.
À chaque invention, à chaque création d’un nouveau médicament, comme pour la cosmétique et la mode vestimentaire, à chaque création d’un nouvel appareil médical, comme pour un portable ou une voiture, il y a, pour expérimenter, des candidats qui adorent la médecine gratuite : les sans-papiers. Beaucoup d’hommes d’affaires abandonnent leurs métiers en crise pour se convertir dans le marché de la santé, plus rentable.
Tel sans-papiers est handicapé, il se déplace en chaise roulante, on la lui a offerte. Avant il marchait péniblement avec des béquilles qu’on lui a offertes également. Comment il a fait pour parcourir des milliers de km pour arriver à Chambéry ? Avait-il les jambes saines ?
On ne tombe pas malade seulement pour les soins gratuits, mais aussi pour avoir ses papiers pour raison médicale, et une belle pension de handicapé. Combien sont capables de s’empoisonner, de se casser une jambe, de perdre une main ! Il y en a dans le monde des pauvres qui vendent un organe ou une partie de leur corps, et des bandits qui les volent. L’affaire est aussi juteuse que la médecine et la pharmacie.
Tel sans-papiers, fatigué après quinze ans de course vaine après ses papiers, attrape toutes les maladies imaginables, il a une valise de médicaments ; il doit faire le bonheur des industries pharmaceutiques. Il n’a mal nulle part, il va voir un médecin, il dit qu’il a mal à l’estomac, ou à la tête, ou au dos, ou qu’il a une allergie, ou une insomnie, ou pas d’appétit… Le médecin n’a pas de temps à perdre ; comment peut-on savoir avec certitude ? S’il ne voit rien, il ne va pas se tracasser, si le patient a mal c’est qu’il est malade, il souffre, il faut l’aider. Il ne faut pas perdre des clients. Si les malades attrapent l’idée de guérir en changeant de style de vie, les médecins chômeront, les industries de santé ne feront pas de profits.
Mais tomber malade ne marche plus comme avant, pour obtenir ses papiers pour raison médicale ; alors il faut tomber gravement et le plus malade possible.
Pendant qu’en France des Africains malades ou malades imaginaires se soignent gratuitement, en Afrique de vrais malades ne trouvent pas de soins, malgré les médecins formés à grands frais dans leurs pays ou à l’étranger. Où passent ces médecins africains ? Ils passent en France, on leur fait vite leurs papiers ! Et on envoie quelques médecins français en Afrique ! Ne serait-il pas plus simple si la France laissait à l’Afrique ses médecins et gardait les siens ? C’est que l’affaire rapporte deux fois ; le beurre et l’argent du beurre. Il n’y a pas que le cacao, le café, les bananes, le pétrole, l’or, le diamant, l’uranium… ; l’Afrique c’est comme la Croix Rouge, les Restos du Cœur, pour la France ; la France est une sans-papiers en Afrique, c’est pourquoi ces derniers temps elle reçoit tant d’OQTFA (obligation de quitter les territoires français d’Afrique).
Les progrès de la médecine sont une catastrophe en France. Ça fabrique des personnes très âgées. D’ailleurs, le progrès en général. La science et la technologie ont généré le chômage. Seuls les riches peuvent vivre à l’air pur. Et seuls les très riches peuvent vivre comme des sauvages, dans la nature exotique. Les Africains laissent de l’or derrière eux en migrant, obsédés par le progrès. Ils laissent leurs terres sentant bon, où il y a de l’espace, de la lumière et de l’air, un vaste horizon, des étoiles dans le ciel la nuit ; où on peut faire des km sans rencontrer personne ; pour des terres couvertes de bitume et de ciment, densément peuplées, où partout il y a des murs, du bruit, un air vicié, où on ne peut pas faire dix mètres sans rencontrer un homme, une construction, un panneau, un poteau, une barrière, un policier ou un mendiant.
En Algérie, je me souviens, quand il n’y avait pas de médecine moderne, les gens ne tombaient pas malades ; depuis qu’il y en a, tout le monde tombe malade ou veut tomber malade. Parmi les vieillards qui se hasardent dans les hôpitaux, certains meurent dans la salle d’attente, oubliés, abandonnés.
En France donc la médecine a fait beaucoup de progrès : elle prolonge la vie des vieilles personnes. Ils restent malades, mais c’est mieux que la mort. Ils coûtent cher à la société, mais ils rapportent beaucoup à la médecine. La France n’a pas de pétrole, elle a de la médecine.
Qui nourrira ces vieilles personnes ? Il n’y aura plus de jeunes, et le peu qui en restera leur en voudra pour la vie qu’elles lui ont laissée, pour les dettes qu’elles ont contractées en son nom et en son absence.
Les Africains, travailleurs peu exigeants, respectueux des vieilles personnes, par culture et tradition, jusqu’à la superstition, sont leurs sauveteurs.
La plupart des sans-papiers galoppaziens sont musulmans, cela ne se voit pas toujours parce qu’ils ne pratiquent pas tous, ils mangent la viande de la Cantine Savoyarde sans demander si elle est hallal, ils ne regardent pas s’il y a de la gélatine dans la nourriture, ils boivent de l’alcool s’ils en trouvent. Quelques-uns seulement prient régulièrement et vont à la mosquée.
Pourquoi il y a tant de musulmans qui quittent leurs pays ? Il y a dans certains pays les guerres, les musulmans aiment cette activité ; il y a aussi que les médias et les statistiques ne disent pas la vérité quant au nombre de musulmans dans le monde. L’Islam est la première religion en Afrique. Je croyais à l’époque de Senghor, Président du Sénégal, qui était chrétien et marié à une Française, que le Sénégal était un pays chrétien où il y avait quelques musulmans. Alors que c’est un pays musulman avec quelques chrétiens.
Officiellement et statistiquement, il y a plus de chrétiens que de musulmans dans le monde. En réalité il y a plus de musulmans que de chrétiens. Il y a des musulmans qu’on ne compte pas, comme en Sibérie jusqu’aux régions polaires, depuis les Mongols islamisés. La Russie a été pendant plusieurs siècles sous domination ou influence islamique.
En France des athées, des agnostiques, des tas de non-croyants, d’antichrétiens, sont comptés dans les statistiques comme chrétiens. Beaucoup de dits chrétiens n’ont jamais été de leur vie dans une église, ne savent pas réciter un seul verset de l’Évangile. De ce point de vue il y a en France plus de musulmans que de chrétiens. L’Islam est la première religion en France, en témoigne le tapage qu’on en fait, les craintes qu’on en ressent et les phobies qu’on en exprime.
Ces musulmans certes sont un fardeau, ils tiennent avec entêtement à leur Islam, ils sont prêts à se battre, ils aiment la bagarre, ils se reproduisent alors que les autres se réduisent ; les sciences économiques, la gestion, la prévision, la croissance, ou l’inflation, la crise, ne les intéressent pas ni ne les inquiètent ; pour eux Dieu nourrit toutes ses créatures, il y a la Main invisible de Dieu. Mais ils sont les seuls à pouvoir travailler pour les vieilles personnes et à les respecter. Ils ne regardent pas aux dettes laissées par les autres. Ils aiment la France telle qu’elle est, on les voit rarement manifester, contester, protester, ils font peu de politique, en bref ils sont des citoyens modèles.
S’ils ne travaillent pas et vivent assistés, ce n’est pas de leur faute même si ça les arrange, ils ne le font pas exprès, c’est la faute au chômage c’est-à-dire à la technologie, au progrès, les machines et les robots. Les politiques et les médias mentent aux Français quand ils leur disent que le chômage c’est la faute aux étrangers.
Ah le beau temps, quand il n’y avait pas de technologie, quand il y avait du travail ! Tellement de travail dur et si peu de repos et de sécurité qu’on n’avait pas le temps de vieillir, on mourrait vite ; il n’y avait alors pas de problème de retraite ! On vivait heureux, le temps passait vite, et on mourrait heureux, on agonisait vite. Les riches aimaient les travailleurs qui les enrichissaient, et ceux-ci les aimaient réciproquement parce qu’ils les nourrissaient. Il y avait des intérêts communs, de l’entraide, de la fraternité, de l’amour. La lutte et la haine des classes n’étaient pas encore apparues. Les colons et les indigènes s’entr’aimaient, de même que les Blancs et les esclaves. Aujourd’hui hélas c’est la guerre civile froide, entre Français riches et Français pauvres, Français-Français et Français-étrangers, Français et étrangers, Nord et Sud, Est et Ouest…
Ceux qui travaillent comme bénévoles à la Cantine Savoyarde sont pour la plupart des sans-papiers ; les autres sont Français, des retraités. Après quelques années de bénévolat, les sans-papiers ont une chance d’obtenir leur titre de séjour, en théorie. En pratique les années passent après les années et le document n’arrive pas. Les sans-papiers démissionnent alors. D’autres, en liste d’attente, nombreux, les remplacent ; il y a beaucoup de sans-papiers qui rêvent de faire leurs papiers. L’illusion, comme l’espoir, fait vivre. Le réveil est douloureux, alors on espère encore et toujours. D’ailleurs, si on donnait un titre de séjour à tout sans-papiers après quelques années de bénévolat, il y aurait dix fois plus de migrants en France. Des sans-papiers depuis plusieurs années, parents d’enfants nés en France, attendent toujours leur titre de séjour.
Les migrants croient encore au droit du sol, spécialité française, et font des enfants qui sont d’après la loi automatiquement français. Étant parents de français, ils sont, ou seront français. Ils oublient qu’il faut d’abord avoir un titre de séjour, et qu’ils risquent de se faire arracher les enfants et expulser. Ils oublient la mentalité colonialiste et esclavagiste. Il est normal qu’il y ait des disputes entre les parents, parfois des violences, alors on expulse le père, d’abord de sa maison, vers la rue, ensuite de la rue vers son pays. Surtout les Maghrébins, qui aiment frapper leurs femmes. La France a besoin d’enfants pour son équilibre démographique, et de femmes pour les élever ; elle n’a besoin d’hommes que pour la fécondation. Il y a trop d’hommes, inutiles, il n’y a pas de travail.
En Allemagne, en Italie, en Belgique, on a le droit de naître, mais on n’a pas droit à la nationalité si les parents sont étrangers ; il faut la demander. La France est le pays de la Déclaration des Droits de l’Homme…
Une Africaine passée par la Galoppaz accouche d’un joli bébé conçu en Italie. Il est donc français. Sa mère aussi, avec un peu de patience… Peut-être son père aussi, avec un peu plus de patience ; à condition de découvrir lequel parmi les amants nombreux de la mère un peu trop jolie. Il y eut plusieurs bagarres à la Galoppaz, entre plusieurs maris, chacun jurant être le vrai père. L’un d’eux était mineur. Il y a tellement de migrants mineurs africains, qu’on croirait que certains pays africains interdisent à leurs majeurs de migrer !
Un titre de séjour en France est, pour un Africain, le meilleur diplôme, le métier le plus rentable, la plus belle affaire, un titre de noblesse et de richesse. Un jour un Noir, j’ai oublié son pays, me dit : « Il y a des Noirs qui s’en foutent s’il y a une guerre chez eux, si leur famille disparaît, pourvu qu’ils aient leurs papiers en France… » Nous discutions de réveil africain, d’histoire et de révolutions africaines, de pourquoi certains Africains ne luttent pas pour leur patrie, trahissent leurs révolutionnaires… Les Français ne sont pas les seuls nostalgiques de l’époque coloniale et du bon sauvage bon domestique, il y a des nostalgiques africains aussi.
Il y a des jeunes Algériens qui préfèrent un titre de séjour en France à un diplôme ou un métier en Algérie. Sans travailler en France, ils touchent comme aide sociale l’équivalent d’un salaire d’ingénieur en Algérie, oubliant le coût de la vie et le pouvoir d’achat dans les deux pays. Ils touchent encore plus d’argent s’ils font l’amour et des enfants. Et la femme est gratuite en France, alors qu’en Algérie elle est payante. Ils touchent encore plus s’ils travaillent au noir. Ils touchent encore à chaque aller-retour au pays, en petites affaires commerciales. Ils peuvent voyager librement, quand en Algérie on est acculé à voyager clandestinement. Ceux qui disent que les migrants se trompent de croire qu’en France on ramasse l’argent dans la rue, se trompent eux-mêmes : les migrants ont raison, en France il y a de l’argent dans la rue. Sinon ils ne se sacrifieraient pas au risque de leur vie !
La France est plus intelligente que les autres pays européens : elle peut être frappée par toutes les crises imaginables, sauf la plus désastreuse, la démographique ; la démographie équilibrée assure la survie de la race. L’Allemagne ne l’a compris que ces dernières années ; le travail bien fait, une économie forte, ça ne suffit pas, il faut des étrangers puisque les Allemands ne veulent plus faire d’enfants ; elle est sortie de sa mentalité racialiste. L’Espagne ou l’Italie, nonchalantes, négligentes, sont en train de vieillir et de disparaître, leurs villages se vident, leurs sans-papiers partent où il y a des droits, du sol et de l’homme comme en France, et de l’aide sociale. L’Italie et l’Espagne ne sont qu’un passage, et plus ils appellent de migrants plus ceux-ci les quittent, c’est à désespérer !
La France, grâce au droit du sol, fait d’une pierre deux coups : 1 – Les enfants étrangers nés en France peuvent rester à condition qu’ils se tiennent tranquilles, pour équilibrer la démographie. 2– Les Français nés en outre-mer sont chez eux en Nouvelle-Calédonie, en Guyane, à Mayotte… en France impériale.
Il n’y a que l’Algérie qui embête la France : les Français d’Algérie sont partis, adieu l’Algérie française, et les Algériens de France sont non seulement restés, mais ils se sont multipliés, bonjour la France Algérienne… Les filles mettent le voile, les garçons menacent les profs, ils font Ramadhan, chaque samedi ils se marient pour se reproduire et empêchent de se reposer les autres avec leurs cortèges, leurs youyous et leurs klaxons assourdissants ; ils se réunissent dans leurs mosquées qui poussent comme des champignons, on ne sait pas ce qu’ils n’y disent ni ce qu’ils y font ; les jeunes couples français n’osent plus s’embrasser innocemment dans la rue…
Heureusement que les musulmans ne boivent pas, sinon il y aurait la guerre civile !
Il est 10 h. 30. Je viens de me laver en vitesse, j’ai bu du café, deux cafés, c’est gratuit, et fumé deux cigarettes, du tabac à rouler le moins cher. Le tabac coûte très cher en France : plus de dix euros les vingt à trente grammes, ou le paquet de 20 cigarettes. On ne trouve pas de mégots par terre, ils sont vite ramassés, il en faut plusieurs pour faire une cigarette, les gens la fument jusqu’au bout avant de la jeter. Chaque jour on me demande vingt fois une cigarette, à la Galoppaz, dans la rue, à la Cantine Savoyarde, à l’Accueil de Jour… Je dois rouler ma cigarette en cachette, sinon si on voit le paquet on court vers moi ; on est capable de braquer, d’agresser quelqu’un pour fumer.
Heureusement qu’il y a les cigarettes et le tabac de contrebande, de l’étranger, Italie, Suisse, Espagne, Belgique, Luxembourg, pays de l’Est de l’Europe, Algérie ; moitié prix. L’État surtaxe sous prétexte de santé, en réalité pour faire du profit ; à la fin il vend moins et en sort perdant.
Souvent je dois nettoyer les lavabos trop sales, parfois bouchés, avant de me laver le visage. Ça me prend un quart d’heure au lieu d’une ou deux minutes. Les résidents de la Galoppaz s’y lavent, lavent leur linge et leur vaisselle, y laissent leurs graisses et y jettent leurs déchets au lieu de faire quelques mètres jusqu’à la poubelle ; les Africains y lavent leurs baskets déjà propres, neufs, non par propreté, mais par esthétique…
Il y a une machine à laver et à sécher le linge, à côté du bureau des surveillants, mais soit elle est en panne à force d’utilisation soit elle est occupée par les familles et les Africains qui lavent chaque jour et tout le jour des montagnes de linge récupéré ou offert par des associations. On aime bien s’habiller ; les sans-papiers ressemblent dans la rue à des gens plutôt riches. Les clochards sont souvent des Français, qui touchent de l’aide sociale qui part en alcool, tabac, herbe, ou qui mendient s’ils ont de la dignité et qu’ils refusent cette aide, ou s’ils n’aiment pas courir dans les administrations, contentes de pouvoir détourner l’argent des contribuables, qui donnent de bon cœur aux mendiants pour ne pas les voir se transformer en braqueurs. Un Africain mendiant c’est rare, il faut chercher longtemps et patiemment pour en trouver. Un Maghrébin mendiant c’est encore plus rare, à moins que ce soit un fou. Il est plus digne de gagner son pain à la sueur de son front, même s’il faut voler ou trafiquer.
Certains galoppaziens lavent du linge pour le revendre, d’autres lavent celui d’amis en ville, pour faire des économies sur les laveries automatiques, ou sur l’électricité si ces amis ont des machines à laver chez eux. La vie est de plus en plus chère, les gens n’arrivent plus à payer leurs factures d’énergie ; par la faute de Poutine ; seuls les sans-papiers arrivent.
Normalement on n’a pas le droit de cuisiner à la Galoppaz, puisqu’il y a la Cantine Savoyarde matin, midi et soir, mais les sans-papiers ne veulent pas manger toujours la même chose, ils trouvent la cuisine française fade, elle n’a pas de saveur, elle n’est pas assez épicée, aromatisée. Et puis il faut vingt minutes de marche pour y aller pour un jeune, trente minutes pour un vieux, quarante minutes par bus. Il n’y a pas de bus toutes les cinq minutes, il y a des arrêts, des feux rouges, des travaux, des manifestations… Enfin, arrivé à la cantine, il faut faire la queue, bousculer ou se faire bousculer, par les Noirs, manger à côté de clochards, d’alcooliques, de drogués, français.
Tout le monde cuisine dans sa chambre ; les alarmes anti-feu ne fonctionnent pas, elles ont été arrachées des plafonds. On a beau les renouveler, il est plus facile de les arracher. Il n’y a jamais eu de feu, d’ailleurs en Afrique un accident n’arrive que quand il est écrit là-haut, et il y a plus d’incendies en France, avec ses alarmes, qu’en Afrique.
Les familles cuisinent pour les enfants, les Africains cuisinent parce qu’ils aiment cuisiner et manger, ils cuisinent et mangent tout le temps. Les ingrédients sont gratuits, donnés par des associations d’aide alimentaire, et les sans-papiers sont les premiers ayants droit, puisqu’ils n’ont pas de revenus ; les autres, les Français, qui touchent un peu d’argent de l’aide sociale, sont les derniers ayants droit.
On cuisine à l’électricité, c’est gratuit ; on récupère, toujours gratuit, des fours, des micro-ondes, des plaques électriques, dans des associations, ou simplement dans la rue à côté des poubelles ; les gens n’ont plus les moyens de payer leurs factures d’électricité depuis les sanctions de Poutine contre l’Europe, et ces appareils consomment énormément, alors on les abandonne dans la rue.
Certains Africains les ramassent en nombre pour les envoyer dans leurs pays.
On ramasse aussi des petits frigos, il faut bien conserver la nourriture, trop abondante ; c’est mal de la jeter, dans la tradition.
Il y avait des frigos communs à la Galoppaz, mais ils ont été supprimés, parce que certains utilisateurs volent la nourriture des autres, ou oublient la leur qui se gâte et fait pourrir le reste.
Il y avait aussi des micro-ondes communs, mais régulièrement ils sautent, alors on les a supprimés. Des Africains les utilisent pendant une heure ou plus comme si c’était des fours, pour cuire du riz, des pâtes, des œufs durs, des ragoûts, ou ils les oublient en marche pendant des heures, parfois toute la nuit jusqu’au lendemain matin. Quand on leur explique comment fonctionne un micro-ondes, ils ne comprennent pas, ou n’écoutent pas, ou oublient ; certains pensent tout de suite au racisme.
Il est 11 heures, je pars en ville, libre et heureux, je n’ai pas de rendez-vous, pas d’engagement nulle part, pas de responsabilité aucune. Mon temps m’appartient, je ne pense ni à ma nourriture ni à mon toit, je les ai gratuitement. Les autres appartiennent à leur temps, ils sont ses esclaves.
Je marche, je ne prends pas le bus, gratuit pour nous les sans-papiers ; je fais un détour par le parc de Buisson Rond, où je vais courir souvent, et où je cueille des orties ou du pissenlit, c’est bon pour la santé, en tisane, salade ou soupe. L’entrée du parc est gratuite, de même que son oxygène et ses plantes sauvages. En Algérie c’est différent ; non que les parcs soient payants, mais qu’ils n’existent pas, on les a rasés, pour construire des maisons, pour loger tous les enfants qu’on surproduit.
À la fin du parc, côté centre-ville, il y a une minuscule bibliothèque publique de rue, un placard en bois, dans lequel les gens se débarrassent, ou se servent, de livres et magazines, jeux et jouets, mais aussi vaisselle, linge, vêtements, et nourriture encore bonne, non périmée. Les donateurs sont des riches qui rachètent du neuf, ou des pauvres qui déménagent ou se font expulser de leur logement et qui ne peuvent pas ou n’ont pas le temps de tout emporter. Des pauvres, des avares, des sans-papiers, des commerçants de deuxième main, des Africains exportateurs, se servent ; la France est riche et prospère. Je trouve souvent, parmi la multitude de livres, la plupart de mauvais goût, quelques-uns intéressants ; je ne manque jamais de quoi lire, la lecture est comme mon oxygène, et je suis francophone ; je suis donc bien en France. Les vêtements ne m’intéressent pas, je n’ai pas où les mettre, et il faut les laver ; l’élégance ce n’est pas la mode, mais l’allure, elle est dans la personne non dans l’habit.
Beaucoup de choses sont gratuites en France, c’est un pays accueillant et généreux, avec beaucoup d’humanité et de droits.
Mes journées passent vite, je trouve le temps trop court, j’aurais aimé qu’il y eût 48 ou au moins 36 heures par jour, tellement j’ai de choses à regarder, à penser, à lire, tellement la vie est riche, mystérieuse, et vaut la peine d’être vécue. Le premier problème à régler pour se libérer, c’est l’argent. C’est le problème numéro un. Celui qui gagne 3000 euros et en dépense 4000 est moins riche que celui qui gagne 1500 euros, mais n’en dépense que 1200. La richesse c’est la gestion. Un euro ne vaut pas un euro, ça fait des enfants, ça peut faire de fausses couches, ça peut mourir, les banques le savent très bien, qui donnent deux euros pour trois, et prennent trois pour deux. Il y a des pays qui croulent sous l’or, se noient dans le pétrole, s’asphyxient dans le gaz, et vivent pauvres, et fabriquent d’autres pauvres : ils font sans arrêt des enfants. Il y a des pays riches qui s’endettent pour dépenser plus qu’ils n’en gagnent, laissant le soin de payer aux générations futures, qui vivront pauvres.
J’ai gagné de l’argent dans ma vie, et ça ne m’a pas rendu plus heureux que maintenant que je n’en ai pas. J’ai mangé, et je mange toujours ; j’ai moins bien digéré et moins bien dormi que maintenant. La vie est un art non monnayable. Les Africains sont plus souriants, plus heureux de vivre, en meilleure santé et plus beaux que les Français ; qu’on n’aille pas me dire que c’est à cause du temps froid et gris ! La richesse de la France est une arnaque, comme ses Droits de l’Homme, y compris les droits des Français. Droits innombrables dans les textes, aussi nombreux que les misères réelles. Plus il y a de misères, plus on sort de droits ; pour lutter contre, c’est logique… Le mariage pour tous par exemple. Au moment où justement le mariage et le sexe se raréfient. Où le refoulement, l’obsession, les vices, sexuels, se généralisent. Mariage pour une minorité homosexuelle, oui. Il est moins coûteux de donner des droits à quelques-uns qu’à tous. C’est vrai que si on se marie trop, qu’on fait beaucoup d’enfants, la terre croulera sous le poids humain ; mais on peut se marier sans faire tant d’enfants. L’avantage du mariage homosexuel c’est qu’on ne peut pas faire d’enfants. Mais on ne peut pas obliger les gens à devenir homosexuels. Il y a une dictature homosexuelle. Le christianisme a pendant plus de mille ans privé et refoulé sexuellement ses adeptes.
J’ai appris la gestion. Je vis bien, sans ressources, sans-papiers. Les papiers se vendent, comme les visas dans les ambassades françaises en Afrique. C’est moins cher en Italie, Espagne, Grèce, et dans les pays d’Europe de l’Est. Je ne vois pas pourquoi j’achèterais un morceau de papier, mon droit selon la loi française, que la Préfecture qui a d’autres lois voit comme une faveur, ou comme un danger, une invasion, un grand remplacement.
Je vis bien, j’ai tout ce qu’il me faut. Parce qu’il me faut peu de choses. Mes besoins les plus importants sont gratuits : dormir, manger, m’habiller, me laver ; penser, méditer, lire ; le sport, la nature, les gens, la vie… Reste le sexe. Il est beaucoup dans la tête. On n’a pas besoin d’une quantité précise de sexe, ce n’est pas comme la nourriture, le sommeil ou la respiration. Avec peu, ou sans, on peut être satisfait ; avec beaucoup on peut être insatisfait. Il ne m’est plus vital. Quand il m’était vital, je l’avais. Je ne me sens pas en manque.
Je n’ai pas fait beaucoup d’enfants, je n’en ai qu’un, après deux mariages et quelques concubinages. Il est français, mais je ne le vois pas, sa mère lui a dit que je n’étais pas un type bien ; pourtant le juge qui nous a séparés, c’est-à-dire qui m’a répudié, ne m’a condamné à rien de plus que la répudiation. En France la famille n’est pas à préserver, mais à détruire, surtout si le père est étranger ; pour s’en débarrasser ; du coup on donne moins de papiers. Il y a de plus en plus de pères d’enfants français qui ne voient pas leurs enfants, et qui sont sans-papiers ; ils doivent être très dangereux, des terroristes, des pédophiles, des incestueux, des assassins…
Ils étaient contents au départ, mariage gratuit, logement social, allocations familiales, aides sociales diverses, la France de la civilisation et du progrès… Il n’y avait plus de travail, mais ce n’était pas un problème : on touchait bien, on ne s’ennuie pas quand on a foi en Dieu, et puis on peut bricoler au noir ; enfin à chaque voyage en Algérie on fait un peu d’import-export, les douaniers sont très compréhensifs, il suffit de leur glisser quelques devises.
Moi j’ai été plus malin : j’ai fait un seul enfant avec plusieurs femmes ; si j’avais fait comme eux, j’aurais eu deux douzaines d’enfants. J’ai vu loin…