La porte aux losanges - Nicole Chappe - E-Book

La porte aux losanges E-Book

Nicole Chappe

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Beschreibung

Flo, Elsa, Hugo et Max sont invités dans la nouvelle maison de leur ami Ralph, un génial inventeur. Ils vont de surprise en surprise, ravis par ses dernières découvertes : ici, des bulles servent de lampes pour éclairer la pièce ; là, les pages d’un livre tournent en suivant le mouvement des yeux... Les choses se compliquent quand Ralph leur présente d’étranges miroirs qui permettent de voyager à une vitesse jusque-là inconnue. Ses explications sont tellement étonnantes que personne ne le croit... L’inventeur serait-il devenu fou ? Flo se souvient alors d’une porte couverte de losanges qui pourrait bien avoir des pouvoirs semblables à ceux des miroirs et décide de la retrouver. Toute l’équipe la rejoint pour tenter de percer le mystère de la fameuse porte mais ils ne sont pas les seuls à s’y intéresser. Qui sont donc ces personnes et que veulent-elles ? Ralph et ses jeunes amis sont loin de se douter de ce qui les attend...


À PROPOS DE L'AUTEURE


Née à Tulle, en Corrèze, Nicole Chappe est l’auteur de plusieurs romans pour les enfants et de contes pour les plus jeunes. Passionnée dès son plus jeune âge par la lecture, elle aime inventer ses propres personnages auxquels elle fait vivre de formidables aventures.

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Du même auteur

– Recueil de contes

Editions 5 Sens, 2020

 

– Le mystère du vieux livre

Editions 5 Sens, 2019

 

– La maison dorée

Editions 5 Sens, 2017

 

– Mille ans plus loin

Editions 5 Sens, 2017

Nicole Chappe

La porte aux losanges

 

Chapitre 1

Chez Ralph et Béatrice

 

– Entrez ! Entrez donc, mes amis ! Ah, si vous saviez combien je suis heureux de vous revoir ! s’exclame Ralph en accueillant ses invités devant la porte de sa maison.

– Je suis ravie moi aussi, répond aussitôt Elsa en sautant au cou de son hôte avant que personne n’ait le temps d’ouvrir la bouche. J’attendais ce moment depuis si longtemps !

 

Max, Flo et Hugo sont sidérés de voir leur camarade aussi exubérante. Elsa est la plus réservée du groupe et pas du tout du genre à se mettre en avant. Mais aujourd’hui est un jour exceptionnel. Ralph, le célèbre inventeur devenu leur ami après d’étranges aventures vécues ensemble, les reçoit dans sa nouvelle demeure.

 

– J’avoue qu’il me tardait aussi de vous revoir, renchérit Vincent, le père de Flo. Merci pour votre invitation. C’est vraiment très gentil de votre part de nous avoir offert le voyage en avion.

– Ne me remerciez pas ! Après toutes les péripéties que nous avons connues ces derniers mois, notre amitié ne fait plus aucun doute et vous faire plaisir est pour moi un immense bonheur.

– Comment va Béatrice ? demande Max de ce ton sérieux qui le fait ressembler davantage à un homme qu’à l’adolescent qu’il est maintenant.

– Très bien, très bien ! Je ne l’ai pas vue de la matinée mais je suis certain qu’elle ne va pas tarder à se manifester. Sans doute nous concocte-t-elle quelque merveille pour le repas. Vous connaissez ma femme : imprévisible mais toujours efficace !

 

Personne ne fait écho à l’affirmation de l’inventeur pourtant tout le monde acquiesce intérieurement. Chaque fois qu’ils ont rencontré Béatrice, elle les a surpris, ne serait-ce que par ses tenues excentriques mais toujours portées avec une extraordinaire élégance. Nul, en dehors de sa famille, ne connaît son âge et chacun se garde bien de le lui demander. Même Virginie, sa petite-fille qui passe toutes ses vacances chez eux, n’a pas jugé bon de le révéler à ses camarades. Au fond, cela n’a aucune importance. Béatrice est si dynamique et si moderne que le temps semble glisser sur elle. Quant à son efficacité évoquée par son mari, elle ne fait de doute pour aucun des invités tant ses bonnes initiatives et son sang-froid les ont si souvent tirés d’un mauvais pas.

 

– Avez-vous fait bon voyage ? demande Ralph, une fois qu’ils sont confortablement installés dans le superbe salon aux fauteuils moelleux.

– Excellent ! répond Vincent. Nous n’avons pas vu le temps passer.

– Super ! rajoute Flo, pour confirmer l’impression de son père. Toutefois, rien de comparable avec notre expédition dans votre voiture volante.

– Ah, je suis content qu’elle t’ait laissé un bon souvenir ! Cette fois-ci, j’ai préféré ne pas l’utiliser, je la réserve aux cas d’extrême urgence. Mieux vaut éviter de trop attirer l’attention. Aujourd’hui, il s’agissait d’une simple promenade dans un pays voisin et l’avion m’a semblé plus adapté.

 

Flo fait allusion à un véhicule volant ultra-rapide, né dans la tête de l’inventeur, grâce auquel il les avait conduits en quelques heures au Portugal pour résoudre une affaire de la plus haute importance. Les cinq amis étaient bien embêtés et sans son aide, les choses auraient pu très mal tourner. Vincent était aussi de la partie et avait fait tout son possible pour se rendre utile. Aussi, pour rien au monde, l’un d’entre eux n’aurait manqué l’invitation de Ralph Sybill tant ils apprécient l’inventeur et sa charmante femme Béatrice.

 

Lorsque Virginie a dit à ses camarades que ses grands-parents aimeraient les recevoir dans leur nouvelle maison le troisième dimanche du mois d’avril, tous lui ont promis d’être là sans la moindre hésitation. Flo devait faire une randonnée à la fin de cette première semaine de vacances de printemps. Qu’à cela ne tienne, ce sera pour plus tard ! Depuis que ses parents sont séparés, la jeune fille passe tous ses week-ends chez son père et ils auront bien l’occasion de partir en balade une autre fois. De son côté, Hugo devait participer à un match de foot mais il n’a pas hésité une seconde. Son équipe se passera de lui ! Quand ses copains lui ont demandé le motif de son absence, il leur a répondu avec son espièglerie naturelle qu’il allait prendre un bain sous le soleil des tropiques. Surpris mais pas dupes, ils n’ont pas insisté, se contentant de hausser les épaules.

Max, lui, a empilé tout un tas de livres dans son sac et en moins de temps qu’il ne lui en a fallu pour préparer ses affaires, il avait déjà calculé le nombre d’heures pour faire le trajet aller-retour. Une manie de tout analyser ! Passionné par le décryptage de codes dans tous les domaines, le jeune garçon est habitué à une réflexion beaucoup plus poussée mais faute d’énigme à se mettre sous la dent, un petit calcul distance/temps est toujours le bienvenu. Quant à Elsa qui redoute par-dessus tout de devoir affronter une nouvelle aventure avec ses camarades intrépides, cette fois elle n’a pas eu peur puisqu’il s’agissait simplement de passer la journée chez leur ami l’inventeur.

Obtenir l’autorisation des parents pour tout ce petit monde n’a été qu’une pure formalité. Ralph s’est chargé de les contacter et, vu l’accueil qu’il leur avait réservé quelques mois plus tôt avant de déménager, ceux-ci ne pouvaient que donner leur accord. Ils regrettaient seulement de ne pas faire partie du voyage. Même Céline, la mère de Flo, n’a rien trouvé à redire. Sans aucun doute, un repas chez les Sybill, bien qu’assorti d’un court voyage en avion, sera bien moins fatigant pour sa fille que les randonnées auxquelles elle se livre d’ordinaire avec son père. Pour une fois, elle n’aura pas de souci à se faire !

 

– Nous allons descendre au jardin en attendant le repas si vous le voulez bien, propose Ralph. J’ai demandé à Virginie de nous y préparer un petit coin agréable, elle doit nous y attendre. Je vous ferai visiter ensuite ma nouvelle demeure.

– Génial ! dit Hugo en se levant, impatient de découvrir les lieux qui, il en est certain, ne manqueront pas d’intérêt, compte tenu de ce qu’il a déjà pu voir dans la précédente maison de ses hôtes.

– Stop ! Restez assis. Surtout ne bougez pas ! Vous êtes installés sur des fauteuils-ascenseurs qui vont vous conduire directement sur la pelouse du jardin. À quoi cela servirait-il d’être un éminent inventeur si je devais sans arrêt monter et descendre de simples escaliers ? déclare Ralph, amusé par la surprise qu’il lit sur le visage de ses invités.

 

Joignant le geste à la parole, il appuie en des points bien précis de son propre siège et aussitôt, tous s’enfoncent lentement entre les lames du parquet qui s’écartent pour les laisser passer. Posés sur des bras articulés, les fauteuils suivent un itinéraire parfaitement calculé et à peine quelques secondes plus tard, tout le monde se retrouve autour d’une table au beau milieu d’une végétation luxuriante arrosée par un joli ruisseau dont le cours a été détourné pour former par endroits des piscines d’eau douce.

 

– Magnifique ! s’exclame Vincent. Je me disais aussi que votre salon, même s’il est très agréable, présente un côté classique qui ne vous ressemble guère. Maintenant, je comprends : sous un aspect banal, chaque objet est doté d’un système qui permet une utilisation inattendue.

– Je constate que vous commencez à bien me connaître, mon cher Vincent ! Quand quelque chose semble normal chez moi, c’est là qu’il faut se méfier. Pour parler franchement, j’ai voulu que cette pièce où je reçois pour mon travail soit lisse aux yeux de tous. Même si je fais désormais très attention aux personnes que j’accueille chez moi compte tenu de mes mésaventures précédentes, il se peut néanmoins que certains arrivent encore à tromper ma vigilance. Vous comprendrez donc que je préfère cacher mes inventions tant qu’elles ne sont pas médiatisées pour ne les dévoiler qu’à ceux en qui j’ai totalement confiance et dont vous faites partie.

 

En effet, les objets dont s’entoure Ralph ont la plupart du temps une deuxième fonction très éloignée de la première, ses invités ont déjà eu l’occasion de le vérifier à plusieurs reprises. Qui se douterait que le réfrigérateur de la cuisine dissimule l’entrée d’un souterrain ou que chaque rose du bouquet posé sur le guéridon offre la possibilité de communiquer avec le monde entier ? Alors que le petit groupe bavarde tranquillement, un morceau de pelouse découpé en carré se soulève soudain jusqu’à hauteur d’homme à côté d’eux et Béatrice, semblant sortir des entrailles de la terre, apparaît, rayonnante dans un cube de verre. La boîte transparente s’ouvre gracieusement, ses quatre côtés se dépliant comme les sépales d’une rose pour la laisser sortir de cet écrin translucide.

 

– Ah, voilà mon papillon adoré ! déclare Ralph d’un ton à la fois malicieux et admiratif.

 

À vrai dire, Béatrice ressemble plutôt ce matin à une libellule aux ailes scintillantes. La taille enserrée par une large ceinture, elle porte une robe noire agrémentée d’un voile bleu aux reflets dorés qui se déploie gracieusement sur ses bras. La maîtresse des lieux est tout simplement ravissante !

 

– Vincent, Flo, Elsa, Max, Hugo ! Quel bonheur de vous recevoir enfin dans mon nouveau logis ! lance-t-elle avec un immense sourire, en s’avançant les bras grands ouverts vers la petite assemblée.

– C’est un bonheur tout à fait partagé, croyez-le bien ! répond aussitôt Vincent, s’exprimant au nom des jeunes, certain qu’ils apprécient autant que lui leur hôtesse.

– Eh bien, je crois qu’il est grand temps de fêter nos retrouvailles ! conclut Ralph. Virginie, demande donc à tes amis ce qu’ils souhaitent boire en guise d’apéritif.

– Que diriez-vous d’un cocktail de fruits exotiques tout frais cueillis ? propose aussitôt la jeune fille en quittant son fauteuil. Je peux vous préparer un mélange demangue, d’ananas, de goyave, de papaye…Dites-moi ce que vous préférez.

– Tout frais cueillis ? Et comment comptes-tu donc t’y prendre pour aller chercher ces fruits dans leurs pays respectifs ? plaisante Hugo, étonné par ce choix inattendu. Ah ! Je comprends, tu t’es levée très tôt ce matin pour aller faire ton marché en ville en prévision de notre arrivée. C’est vraiment gentil de ta part…

– Pas du tout, mon cher ! Aujourd’hui, j’ai fait la grasse matinée et je ne suis debout que depuis 10 heures. Tous ces fruits qui poussent au Brésil, en Afrique ou ailleurs sont à portée de main. Enfin presque…

– Des mangues, des ananas ici ? Vous avez donc installé une serre géante avec une plantation d’arbres exotiques ? demande Vincent, vivement intéressé.

– Pas vraiment ! répond Virginie avec un sourire mystérieux.

– J’ai trouvé ! intervient Max, persuadé d’avoir résolu l’énigme. Vous avez créé plusieurs microclimats dans un coin du jardin.

– Ton idée est judicieuse, mon garçon, reconnaît Ralph. Mais sans vouloir te décevoir, ça, tout le monde ou presque est capable de le faire avec quelques moyens. En réalité, ma solution est un peu plus compliquée, vois-tu… Mais je vous expliquerai tout cela plus tard si vous le voulez bien.

 

Sans poser d’autres questions pour ne pas paraître indiscrets, chacun commande un cocktail en prenant soin de choisir un mélange original afin de découvrir de nouvelles saveurs. Virginie disparaît pour préparer les boissons pendant que la conversation se poursuit tranquillement. Après une petite demi-heure qui passe bien vite, la jeune fille revient, les bras chargés d’un plateau couvert de grands verres aux couleurs variées qu’elle leur sert aussitôt.

 

– Superbe ! s’exclame Hugo, en faisant tourner le sien entre ses mains.

– Et vraiment délicieux ! rajoute Elsa en passant la langue sur ses lèvres recouvertes de pulpe. On croirait vraiment que ces fruits viennent juste d’être cueillis tellement ils sont parfumés. Je n’ai jamais rien bu d’aussi bon.

– Étonnant ! Je dirais même étrange, rajoute Max, les sourcils froncés, se doutant qu’il y a là anguille sous roche. Comment faites-vous pour avoir des fruits d’une telle fraîcheur ? Auriez-vous inventé un drone capable de parcourir la planète à la vitesse de l’éclair ?

 

Ni Ralph, ni Béatrice, ni Virginie ne répondent mais pas plus les jeunes que Vincent ne remarquent leur silence, trop occupés qu’ils sont à déguster leur cocktail. Seul Max, habitué à une grande observation du fait de sa passion pour les langages codés perçoit un léger frémissement sur le visage de l’inventeur et le regard de connivence qu’il lance à sa femme. Il en est certain, il y a bien là un mystère mais il serait impoli d’insister. Si Ralph n’en dit pas davantage pour l’instant, il a sûrement d’excellentes raisons.

 

Après cet apéritif succulent et un bon repas terminé par des desserts dignes d’un pâtissier chevronné, les Sybill conduisent leurs amis à travers leur nouvelle maison où chaque pièce se révèle plus étrange que la précédente. Dans l’une, la lumière vient de grosses bulles qui circulent dans l’air en toute liberté. Dans une autre, d’une taille impressionnante, un morceau de forêt accueille des lits suspendus et des couchettes au ras du sol proposent un agréable moment de détente. Les invités sont sous le charme. Il n’y a pas de doute : Ralph est un inventeur hors du commun, Béatrice possède un sens aigu de la décoration et leurs efforts réunis donnent un résultat époustouflant.

 

– Quel curieux miroir ! s’étonne soudain Flo en passant devant un grand cadre doré sculpté de roses, accroché sur un mur du couloir. Pourquoi ne se voit-on pas dedans ?

– Tout simplement parce qu’il ne s’agit pas d’un miroir, précise Ralph mais d’une de mes dernières trouvailles, sans doute celle dont je suis le plus fier. En fait, c’est une illusion d’optique. Nous avons sous les yeux un cadre, une surface lisse et claire donc tout le monde croit voir une glace alors que…

 

Ralph marque un temps d’arrêt comme s’il hésitait à parler davantage. Ses invités attendent, retenant leur souffle. Finalement, il reprend :

 

– Vous vous souvenez des jus de fruits que nous avons bus avant le repas ?

– Bien sûr, j’ai choisi ananas-mangue, s’exclame Elsa. Un régal !

– Virginie vous a dit tout à l’heure que ces fruits poussaient tout près d’ici. En fait, ils viennent… ils viennent de derrière le… le cadre…

– Comment ça ? C’est impossible. Je ne vois aucune plantation à proximité ni aucune étagère pour ranger quoi que ce soit, dit Flo en écarquillant les yeux. Il y a juste le mur.

– J’ai compris ! s’exclame Hugo. Ce miroir est une porte déguisée pour se rendre dans une plantation chauffée.

– Tu n’es pas loin de la vérité, sauf que… Comment dire ? J’espère que cela ne va pas trop vous perturber…

 

En prononçant ces mots, Ralph pense surtout à Elsa. Depuis que Virginie leur a présenté ses camarades, il a eu l’occasion de les rencontrer plusieurs fois et a très bien cerné la personnalité de chacun. Flo est une grande sportive, battante, dynamique et optimiste. Max, lui, réfléchit toujours avant d’agir, il pèse le pour et le contre et ne prend jamais une décision à la légère. Malgré son âge, il a déjà un raisonnement d’adulte, les aventures précédentes qu’ils ont affrontées ensemble lui en ont fourni la preuve. Hugo est d’un tempérament plus insouciant et jovial, ce qui ne l’empêche pas de faire preuve de sérieux quand il le faut. S’il plaisante souvent, on peut compter sur lui dans les moments difficiles. Quant à Elsa, toujours prête à apporter son aide, elle n’abandonnerait pour rien au monde ses amis s’ils se trouvaient en difficulté, mais elle est plus fragile et facilement impressionnable. Ralph craint que ses révélations ne l’effraient.

 

– Nous perturber ? Aucun risque ! Depuis que nous vous connaissons, nous sommes habitués aux situations exceptionnelles, affirme Hugo, dévoré par la curiosité. Même Elsa est prête à tout entendre, rajoute-t-il, ignorant que c’est justement sa réaction que redoute le plus l’inventeur.

– Hugo a raison, confirme l’intéressée d’un ton très sérieux, impatiente, elle aussi, de connaître le secret du miroir et ne voulant surtout pas être celle qui empêche Ralph de le dévoiler. Chez vous, je me sens en sécurité et rien ne peut me faire peur. Je m’attends à tout, même à voir des serpents ou des lions enfermés à deux pas d’ici dans une serre tropicale, ajoute-t-elle pour bien montrer sa détermination, sans toutefois en penser un seul mot.

– Dans ce cas, me voilà rassuré ! dit Ralph. Je vais donc vous révéler la fonction exacte de ce faux miroir. En réalité, il s’agit… il s’agit d’une porte… sur… différents continents.

– Une porte ? C’est-à-dire ? demande Vincent, en fronçant les sourcils.

– Un passage, si vous préférez. Par exemple, en appuyant sur la première rose de celui-ci, vous vous retrouvez au Brésil.

– Vous voulez dire que vous avez planté derrière le miroir les arbres fruitiers qui poussent au Brésil assortis de la végétation locale ? interroge Flo, incrédule.

– Et pourquoi pas la forêt vierge agrémentée de quelques crocodiles et d’araignées géantes tant que tu y es ? ironise Hugo.

– Je… veux… dire…, reprend Ralph en détachant chaque mot, je veux dire que si vous franchissez cette porte en appuyant sur la rose, vous vous retrouverez réellement dans la seconde qui suit au Brésil.

 

Un silence pesant s’abat sur le groupe. Elsa pâlit, Flo ouvre de grands yeux étonnés, Vincent reste bouche bée, Hugo se gratte la tête, signe chez lui de profonde incompréhension. Même Max n’a pas la moindre hypothèse à avancer. Aucun moyen connu à ce jour ne permet de parcourir sur terre une telle distance en aussi peu de temps. Les inventions de Ralph sont étonnantes, stupéfiantes parfois, mais au fond, elles sont explicables alors que celle-ci est tout simplement inimaginable. Là, il y a un problème : soit le grand-père de Virginie plaisante, soit son travail lui est monté à la tête et il raconte n’importe quoi !

 

Chapitre 2

Les miroirs

 

– Je me doutais bien qu’une telle révélation risquait de vous troubler, déclare l’inventeur en voyant la mine de ses invités. Voilà pourquoi j’hésitais à vous en faire part. Peut-être n’aurais-je pas dû vous parler de ce miroir.

– Au contraire, c’est passionnant ! s’exclame Max, curieux d’en savoir davantage.

– Vous prétendez que le Brésil se trouve là, tout près de nous ? demande Vincent, incrédule.

– Tout à fait !

– Incroyable ! Mais comment avez-vous fait ? demande Hugo en sautillant sur place tandis que Max se creuse les méninges pour essayer de trouver une explication.

– Je vais tenter de vous expliquer, dit Ralph, ne voulant pas laisser ses amis dans l’ignorance plus longtemps. Dans le monde des chercheurs, on parle à demi-mot de plusieurs possibilités permettant de se déplacer à des vitesses prodigieuses, de se trouver à un endroit et l’instant d’après dans un autre sans aucun moyen de locomotion apparent. Cela n’a rien à voir avec des portes sur le passé ou sur le futur, il s’agit seulement d’un déplacement géographique qu’on pourrait appeler téléportation.

– La téléportation ? répète Hugo, surpris.

– Tu n’en as jamais entendu parler, je suppose.

– Euh ! Si, vaguement, mais j’ignore en quoi ça consiste.

– C’est un peu compliqué… Pour faire simple, imagine que nos corps disparaissent d’un endroit et réapparaissent aussitôt dans un autre lieu de la planète.

– Cela signifie qu’ils se dématérialisent pour se rematérialiser ailleurs, précise Max pour être sûr de bien comprendre.

– C’est à peu près ça, en effet.

– Mais c’est super ! s’exclame Hugo.

– Oui, sauf que la téléportation n’existe pas, tout le monde le sait, rectifie Max.

– Certes… Certes…, répond Ralph avec un sourire mystérieux. Il n’empêche que des chercheurs travaillent sur le sujet depuis des lustres. Déplacements ultra-rapides, téléportation… Appelez-les comme vous voulez ! Bien sûr, toutes les expériences sont tenues secrètes, même si parfois quelques informations arrivent à filtrer parmi les initiés. Passionné par le sujet, j’ai cherché de mon côté et j’ai obtenu des résultats assez satisfaisants.

– Fantastique ! s’exclame Vincent. En fait, ce miroir n’est autre qu’un véhicule ultra-rapide qui va plus vite que les fusées ?

– Pas vraiment puisqu’il n’existe aucun véhicule matériel mais ce support permet effectivement de se déplacer à une vitesse prodigieuse jusque-là inconnue.

– Grâce à un simple miroir, on peut vraiment se retrouver n’importe où comme d’un coup de baguette magique ? demande Elsa, craignant le pire.

– Pas n’importe où. Cela viendra peut-être mais pour l’instant, les points d’arrivée sont peu nombreux et soigneusement programmés.

– Mais ce voyage doit terriblement secouer…

– Non. Le cadre travaille pour nous et évite toute fatigue, néanmoins, un choc n’est pas à exclure. Imagine que tu poses le pied au Groenland ou dans un pays d’Afrique, la différence de température peut être énorme et notre organisme doit s’adapter.

– Comment savez-vous dans quel pays vous allez vous matérialiser de nouveau ? demande Hugo. Il suffit de fermer les yeux et de le penser très fort ?

– Bien sûr que non ! Ce n’est pas aussi simple. Nous ne sommes pas dans un film de science-fiction mais dans une réalité même si elle semble futuriste, je te l’accorde. Dans le système que j’ai mis en place, chaque miroir correspond à une porte programmée pour une destination précise. Plus tard, nous ferons cela couramment, j’en suis sûr. Hélas, pour l’instant, j’en suis à l’état expérimental et nous avons besoin d’un support pour franchir l’espace. Venez, suivez-moi !

 

Ralph conduit ses amis un peu plus loin, dans un corridor dont l’entrée très sécurisée est dissimulée par un meuble coulissant. Ils découvrent alors une multitude de cadres qui tapissent les murs des deux côtés.

 

– Ouah ! s’exclame Hugo. C’est pire que le salon de coiffure où va ma mère.

 

Ses amis éclatent de rire à sa plaisanterie mais ils retrouvent vite leur sérieux. Ces miroirs, comme le précédent, ne permettent pas de réfléchir le visage de ceux qui sont en face et ils en sont d’autant plus inquiétants.

 

– Vous voulez dire que chacun de ces… cadres permet de se rendre dans une zone différente de la planète ? demande Elsa, la mine décomposée.

– Tout à fait ! Aux miroirs ou aux cadres si tu préfères, A, B, C, D, E, F, se trouvent des destinations européennes. Aux miroirs G, H, nous avons des pays d’Asie. Derrière les miroirs I et J, l’Afrique nous attend avec ses oiseaux ravissants et ainsi de suite. Pour l’instant, j’ai presque autant de destinations que de lettres de l’alphabet.

– Mais on risque d’arriver dans des endroits très dangereux !

– Non, ne t’inquiète pas. Il y a seulement une destination par miroir et toujours près d’un aéroport. Au cas où il y aurait un problème, il faut pouvoir rentrer…

– Imaginez que quelqu’un, votre femme de ménage ou un de vos invités par exemple, appuie sur la rose qui déclenche le départ et se retrouve à l’autre bout du monde sans être au courant ! Il y a de quoi paniquer, fait remarquer Hugo.

– Rassure-toi, j’ai tout prévu. L’accès à ces miroirs est ultra-sécurisé, comme tu peux le constater, répond Ralph. Seules Virginie et Béatrice connaissent l’existence de cette pièce.

– Mais comment faites-vous pour revenir ? demande Max, très intrigué.

– Tant qu’on ne s’éloigne pas du point d’arrivée, le retour se fait automatiquement dans un délai de cinq minutes. Au-delà de ce temps ou si on s’écarte, il faut actionner un bracelet spécial dont est équipé le voyageur pour permettre le retour.

– Sinon ? demande Vincent.