Le Bon Genre De Mauvaise Fille - A. C. Meyer - E-Book

Le Bon Genre De Mauvaise Fille E-Book

A. C. Meyer

0,0
2,99 €

-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

Amusante et accompagnée de références musicales : la nouvelle histoire d'A. C. Meyer est le compagnon idéal pour ceux qui rencontrent des difficultés au début de l'âge adulte.

Ce roman est parfait pour ceux qui doivent faire face aux difficultés du début de la vie d’adulte : choisir une carrière, partir de la maison familiale, commencer l’université, se découvrir de nouveaux talents, apprendre à établir des liens. Pfiou ! L’âge adulte n’est vraiment pas quelque chose de facile, encore plus si vous n’êtes pas le genre de fille à faire ce que l'on attend de vous : cette fille qui rentre à l’université dans une filière que son père a choisi et qui fera tout pour y réussir ; cette fille avec des cheveux parfaits et des habitudes saines. Malu ne fait pas partie de ses filles. Elle est différente, elle vit sa vie à fond et rien ne semble ébranler son courage et sa détermination. Vie familiale compliquée avec ses parents, elle s'inscrit malgré elle à la faculté de droit. Là, elle rencontre Rafael, un étudiant de dernière année. Ils deviennent inséparables, liés par une très forte amitié. Peu à peu, cette amitié évolue en un sentiment plus fort. Quand l’attraction devient hors de contrôle, ils s’autorisent à vivre une relation sans contraintes : libre, intense et passionnée. Mais un jour le destin, parfois cruel, se met en travers de leur route. L’amour à lui seul, peut-il être plus fort que la peur d’aimer ?

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern

Seitenzahl: 372

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Le bon genre de mauvaise fille

Les filles – Livre 1

A.C. Meyer

Synopsis

L’amour à lui seul peut-il être plus fort que la peur d’aimer ?

Malu vit pleinement sa vie, comme si chaque jour était le dernier. Rien ne semble pouvoir entamer son courage ou sa détermination. Elle révèle sa fragilité et sa sensibilité à travers son art délicat et intense, ainsi que dans les bras de Rafael - son meilleur ami et son lieu sûr. Cette amitié fait naître des sentiments forts et en même temps effrayants, que tous deux ne veulent pas explorer.

Quand le désir surpasse la raison, Malu et Rafa s’autorisent à vivre une relation sans restrictions, mais, en même temps, intense et passionnée, qui leur fait vivre des montagnes russes émotionnelles. Jusqu’au jour où le destin leur tend un piège cruel, contraignant Malu à prendre une décision fatale et douloureuse pour protéger celui qu’elle aime.

“Au bout du compte, tout ira bien. Si ça ne va pas, ce n’est pas encore la fin.”

Fernando Sabino

À Sebastião Cantarino (in memoriam).

Tu es parti si vite… et tout ce qui reste est la nostalgie.

Chapitreun

“La mauvaise personne doit apparaître à tout le monde, parce que la vie n'est pas juste, rien ici n'est juste.”

Luís Fernando Veríssimo

Malu

Ce n’est pas une histoire à propos d’une princesse qui vit dans un château jusqu’à ce qu’un jour, elle trouve le prince charmant, tombe amoureuse de lui et où ils vivent heureux, galopant vers le couchant sur un cheval blanc. Je ne suis pas une princesse. Je ne l’ai jamais été. Ça ne veut pas dire que la vie ne m’a pas donné l’occasion d’être un peu une princesse, au contraire. Je suis née dans une famille conventionnelle pour ainsi dire. J’ai eu des parents conventionnels, je suis allée dans une école privée, mais j’ai toujours été le vilain petit canard de la famille : celle qui a des cheveux colorés et une attitude inappropriée ; celle qui fume, boit, jure et adore la vie de Bohémienne. Le bon genre de mauvaise fille. Cette fille que les mères ne voudraient jamais avoir comme belle-fille et que les garçons n’ont pas l’habitude de présenter à leurs parents. Cette fille drôle dans la bande qui est toujours prête pour de nouvelles aventures.

Jusqu’au jour où la vie vous met à terre et vous fait réaliser que tout peut changer en un battement de cils.

Il est quatre heures, un vendredi matin et je suis ici, allongée dans ce lit d’hôpital. Je regarde autour de moi et il y a Rafa, assis sur une chaise à coté de mon lit, les yeux fermés, plongé dans un profond sommeil. Je peux voir les cernes noirs sous ses yeux, sa barbe de trois jours, son manteau sur l’accoudoir. Je le regarde prudemment : ses cheveux bruns emmêlés par les doigts qui les ont trop souvent recoiffés ; les petites rides aux coins de ses yeux, qui font que ses yeux et ses lèvres sourient ensemble, et ses joues, qui marquent des fossettes irrésistibles. Pendant que je le regarde, je réalise combien sa présence est importante dans ma vie et dans la raison pour laquelle je suis ici, dans ce lit d’hôpital, avec toutes ses choses attachées sur moi.

Tout ce que je voulais, c'était faire ce voyage, être en paix avec ce que la vie me préparait, mais Rafa ne le permettait pas. La seule chose dont j'avais besoin pour reconsidérer cette décision était une once d'espoir et c'est exactement ce que j'ai eu.

Pour vous aider à comprendre comment les choses en sont arrivées là, on doit retourner huit ans dans le passé. Je me rappelle, comme si c’était hier, de la première fois où j’ai mis les pieds à l’université. C’était un jour d’été très chaud, où le soleil était brûlant. Mon voisin et mon pote de bière, Beto, m’a emmené en balade. Oui, j’avais seulement dix-sept ans, mais j’étais déjà à fond dans les sorties nocturnes. Mes amis ont l’habitude de dire que j’ai une vieille âme sage et bohémienne. J'étais en ville depuis un peu plus de trois mois pour étudier, devinez quoi, le droit. C’était ma dernière tentative pour faire plaisir à mes parents, qui ne voulaient même pas considérer la possibilité que je ne suive pas la carrière familiale, à la suite de mon père, mes oncles et mes grands-parents, qui travaillaient tous dans différentes branches du droit.

Beto était un étudiant en communication sociale, en avance sur moi de quelques semestres, qui vivait dans l'appartement du dessous. Il était la personnification même du surfeur de rêve pour les femmes, presque un cliché vivant : des cheveux blonds quasiment tout le temps emmêlés, la peau bronzée, un tatouage de dragon sur l’un de ses bras, un sourire franc et des tongs aux pieds. Peu importe où nous allions, il ne portait jamais de chaussures ou de baskets : il disait que ça lui faisait mal aux pieds. Et honnêtement, ça fait partie de son charme naturel.

On avait laissé la voiture dans un parking à côté du campus. La vieille voiture de Beto détonnait avec la plupart des nouvelles voitures des play-boys, comme il les appelait, mais ça ne le dérangeait pas. Il est allé à l’université à cause d’une promesse qu’il a faite à sa mère, qui est morte lorsqu’il avait quinze ans. La seule chose qui comptait réellement pour lui, après honorer ses promesses, était de savoir à quel point les vagues étaient bonnes.

Nous nous sommes dirigés vers le majestueux campus, qui comprenait cinq immenses bâtiments et était noir de monde.

- Bébé, ça doit être ton bâtiment. Beto m’avait montré un bâtiment un peu plus loin. Le mien, c’est le premier. Tu vas bien ? m’a-t-il demandé, apparemment inquiet, comme si j’étais sa petite sœur. Beto m’a toujours traité comme si j’avais besoin de protection. Il était comme ça, pas de romance de sa part ou quelque chose de ce genre.
- Oui, ça va Beto. Je vais regarder l’emploi du temps que j’ai imprimé. Je suis sûre que les numéros des salles sont marqués dessus.
- Parfait ! On se voit après les cours alors. Si tu as un quelconque problème, appelle-moi.

- Cool. Je lui réponds avant de me diriger vers le bâtiment qu’il m’a montré. Après être sortie avec lui presque tous les jours, j’avais en quelque sorte appris son argot de surfeur et incorporé certaines choses dans ma routine quotidienne. J’ai cherché mes écouteurs dans ma poche et je les ai mis avant de traverser le campus, écoutant du rock et regardant tout le monde autour. Il semble qu’il y avait toute sorte de personne : les garçons de fraternités, les bimbos, les rockers, les skaters et ainsi de suite, ce qui était bien, parce que ça m’a faisait me sentir moins différente, si on considérait mon look habituel.

Mes cheveux foncés étaient coupés de façon asymétrique, juste au-dessus de mes épaules, avec des mèches violettes. Je portais un short en jean, un t-shirt noir du groupe brésilien Legião Urbana, des sneakers et un sac à dos. J’étais sûre que si ma mère avait pu me voir à cet instant, elle aurait dit que je ressemble à une sans-abri. Réaction excessive, non ?

J’ai attrapé le bout de papier dans mon sac à dos. J’ai comparé les numéros de salles et le nom des buildings à ceux figurant sur le panneau accroché à l'entrée du bâtiment, lorsqu'une voix grave a résonné derrière moi, ce qui a fait se dresser soudainement tous les poils de mon corps.

- Besoin d’aide ?

Je me suis retourné sur une vision qui m’a coupé le souffle. Je ne suis pas le genre de fille qui tombe amoureuse. Je suis plus tournée vers les flirts ou, encore mieux, être célibataire mais pas seule. Je ne crois même pas en l’amour, les fins heureuses et toutes ces merdes. Tout ce que je veux c’est boire, danser et donner des french kiss. Je n’avais toujours pas d’expérience sexuelle juste par manque d’opportunité. La raison ? C’est simplement que les types avec qui je suis sortie ne m’ont pas donné envie d’aller plus loin et pas parce que je crois que je dois me préserver pour l’amour de ma vie. Mais ce type en face de moi n’était pas comme les autres que j’ai connus. Il était un homme, dans tous les sens du terme. Ses longs cheveux étaient attachés en man-bun. Ses yeux avaient une teinte de gris que je n’avais jamais vue de ma vie. Sa peau brune, bronzée par le soleil, contrastait avec son sourire d’un blanc éclatant. Il portait un t-shirt qui lui serrait le corps et un jean délavé. Malgré sa barbe et ses cheveux longs, il ne semblait pas négligé, au contraire. J’avais secoué la tête, essayant d'organiser mes mots.

- Je vérifie que ma salle est bien ici.

Quand il a sourit, le coin de sa bouche a rejoint ses yeux.

- Tu as cours de quoi ? Création de mode ? m’a-t-il demandé, me regardant de bas en haut. Quel cliché !
- Droit. Ma réponse ne s’est pas fait attendre, ce qui l’a fait rire.
- Encore une rebelle ! Bienvenue dans la famille ! Il a rigolé et a pointé le bâtiment. Entre, fais comme chez toi.

J’ai hoché la tête, me sentant reconnaissante, mais soudain j’ai réalisé que j’avais perdu la capacité de parler simplement en me tenant à côté d’un magnifique étranger. Il m’a entraîné dans le bâtiment, se tordant le cou pour regarder mon bout de papier et savoir à quel cours je devais me rendre.

- Droit constitutionnel ! Ta salle est juste là. Il m’a montré la salle 01.
- Merci.
- Rafael. Il s’est présenté en me tendant la main.
- Malu, lui ai-je répondu en prenant sa main.
- Je te verrais plus tard, Malu. Il m’a sourit encore une fois et m’a fais un clin d’œil avant de disparaître dans le couloir, se rendant vers une autre salle.

Et c’est à cet endroit, le premier jour de l’ennuyeuse école de droit, que j’ai rencontré l’homme qui a volé le cœur que j’ignorais avoir.

Chapitredeux

“Argentant l’horizon, les rivières et les fontaines brillent dans une cascade de lumière.”

Lulu Santos

Rafa

Je continue de marcher tout droit sur la promenade, sentant la brise marine sur mon visage. Nuit étoilée et temps chaud : parfait pour les plans d'aujourd'hui. Il est presque 22 heures, un vendredi soir. Je suis un peu fatigué après avoir passé des heures à regarder des audiences pour compléter mes crédits. Même si je meurs d'envie de rester au lit après une semaine de dur labeur, il n'est pas question de manquer la fête d'anniversaire de Malu. C'est la plus jeune de notre groupe, mais de loin la plus amusante. A dix-neuf ans, Malu est l’étincelle de vie de nos fêtes et rien n’est pareil si elle n’est pas là.

Beto a organisé une luau 1 à la plage près de chez moi et la fête n’est pas encore terminée. Je suis presque arrivé quand mon téléphone sonne.

- Oui ?
- Rafaaaa ! T’es où ? me demande immédiatement Malu, la musique en fond.
- Je suis en route, Malu. Presque là. Le son de son rire est suffisant pour me rendre engourdi.

En même temps, Malu me fait me sentir surprotecteur à cause de son intrépidité et quelques fois son impulsivité, deux aspects de sa personnalité qui me fascinent. Son rire sexy, la façon dont elle me regarde quand elle n’est pas sûre de ce que je raconte, sa peau aussi blanche que la lueur de la lune contrastant avec ses cheveux toujours colorés différemment. De temps en temps, elle change son look pour un plus adapté à ce qu’elle est : ses mèches ont déjà été mauves, vertes et bleues. Depuis deux ans qu’on se connaît, ses cheveux, normalement noirs ont déjà été colorés en rouge, marron et même en blond. Elle ressemble à un petit caméléon, changeant de couleur en fonction de son « état d’esprit », comme elle a l’habitude de dire, même si je préfère ses cheveux naturels. Au plus profond de moi, je crois que tous ces changements ont quelque chose à voir avec son esprit artistique, comme elle l’appelle.

- Ok, je t’attends, dit-elle en raccrochant.

Malu est étudiante en deuxième année de droit, et je sais à quel point elle est malheureuse. Elle est à l'université pour faire plaisir à sa famille, qui se fiche complètement d'elle, au lieu de poursuivre sa passion et d'étudier ce qu'elle aime vraiment : l'art.

Quand j’arrive au kiosque mis en place au point de rendez-vous, je peux voir les gens fourmiller au luau. Il y a une trentaine de personnes à la plage, bavardant ou mangeant des snacks offerts par le kiosque sur une table improvisée. Même de loin, je peux voir Malu à coté de Beto et Merreca, un ami de la fac qui a reçu ce surnom parce qu'il est toujours fauché et n'a presque jamais d'argent sur lui, comme il le prétend habituellement, merreca signifiant très peu d'argent en portugais. Elle porte une robe blanche ample, ses pieds nus à même le sable, et elle danse sur une ballade que quelqu'un joue à la guitare.

Ses cheveux sont ondulés, pas lisses comme d’habitude, et descendent dans son dos. Je n’ai jamais vu ses cheveux aussi longs que maintenant, ça lui donne un air innocent, quelque chose qui ne colle pas à son exubérante personnalité.

Il n’y a que de l’amitié entre nous. Depuis la première fois que je l’ai vu, perdue devant notre bâtiment pour son premier jour de cours, je l’ai, en quelque sorte, adopté et présenté à ma bande. On est juste amis, parce que je crois qu’elle est trop jeune pour mes vingt-deux ans. Je suis en dernière année, je prépare l’examen du barreau et même si elle provoque certaines réactions en moi, elle est trop jeune.

Je pose un pied sur le sable et je sens les grains toucher mes pieds. J’enlève rapidement mes tongs et je les laisse à coté de ceux des autres invités qui sont rassemblés dans un coin. Je salue quelques personnes et je me dirige vers la reine du jour. Comme si elle pouvait sentir ma présence, elle se retourne et sourit en me voyant. Ses yeux brillent, ses lèvres sont rouges et elle tient une cigarette entre ses doigts.

- Hey, jeune fille ! Tu fumes déjà ? Je me rapproche d’elle pour voir une expression amère sur son visage alors qu’elle étire ses bras pour m’enlacer.
- Quand tu parles comme ça, tu me fais passer pour une ado de quatorze ans, au lieu de dix-neuf. Je suis une femme, Rafa, pas une jeune fille. Elle me répond en fronçant ses sourcils mais elle rigole et presse son corps contre le mien. C’est moi ou elle a gagné quelques courbes dernièrement ?
- Joyeux anniversaire, femme. Je la taquine, la faisant rire encore plus et elle m’embrasse sur la joue.
- Merci, beau gosse. Elle me répond, me faisant un clin d’œil, ses mains caressant mon visage là où il y avait ma barbe. « Ta barbe me manque ».

Je soupire au souvenir d’avoir coupé mes cheveux et ma barbe l’année dernière à cause du travail. Je les ai fait couper, mais pas beaucoup, juste assez pour avoir un look plus convenable pour ma carrière, même si je peux toujours sentir quelques mèches rebelles près de mon cou.

- Moi aussi. Je souris et me dégage de son corps toujours contre le mien. Je prends sa cigarette quand quelque chose sur son poignet attire mon attention. Après avoir mis la cigarette dans ma bouche, j’attrape son poignet et le tourne pour voir l’intérieur.
- C’est quoi ça ?
- Quoi, ça ? me demande-t-elle alors que je regarde le tatouage sur son bras. Un symbole infini entrelacé avec une phrase d’une des chansons des Beatles : « You may say I’m a dreamer » Oh, je l’ai fait aujourd’hui. Tu aimes ?

Mes yeux bougent du dessin à sa jolie tête avant de lui sourire.

- Ça te va bien. Elle me sourit en retour, me regardant prendre une bouffée sur sa cigarette. Je ne fume pas d’habitude, seulement quand je sors boire un verre ou quand je me sens nerveux. Aujourd’hui, c’est un peu des deux. Je vais certainement boire un verre, mais en même temps je me sens étrangement agité à sentir son corps si proche du mien. Elle prend la cigarette de ma main.
- Je vais aller parler aux gars et prendre une bière, lui dis-je et elle hoche la tête.

Je dis bonjour au type à la guitare et je bouge, rejoignant d’autres amis qui sont déjà là. Après avoir parlé à tout le monde, je prends une bière, suivi de Léo, mon meilleur ami.

- Je ne sais pas combien de temps tu vas continuer à résister à ça. Je le regarde curieusement.
- Résister à quoi ?
- Ta Lolita, dit-il en rigolant et regardant Malu, qui danse encore.
- Y’a rien entre nous, mec. Je proteste, dépité. On est juste amis.
- Ouais, ouais… je sais c’est clair comme de l’eau de roche qu’elle te drague et que t’es sur elle.

- Peut-être qu’elle m’excite mais elle est trop jeune pour moi. Je réponds, sentant mon corps réagir au mouvement de ses hanches quand elle danse. Mais tu sais que je n’ai pas de relation et que je n’en veux pas, c’est toujours source de problèmes.

- Elle non plus, me répond Léo, me faisant hocher la tête. Ses mots me rappellent une conversation qu’on a eut, il y a quelques mois, avec Malu quand elle m’a raconté que ses parents se sont mariés par obligation et qu’elle ne croit pas vraiment à l’amour. Mais ça ne veut pas dire que vous ne pouvez pas sortir de temps en temps.

Ces mots stimulent une série d’images mentales et je n’ai aucune idée d’où elles viennent. Nos lèvres s’embrassant dans un baiser urgent, son corps nu contre le mien. Je secoue ma tête essayant d’effacer ces images de mon esprit. Mauvaise idée, Rafael.

On change de sujet quand César, un ami de la plage, arrive. La fête continue alors que la nuit tombe. Malu passe la nuit à aller de groupe en groupe, parlant à tout le monde, les faisant tous rigoler, interagissant avec chacun. De temps en temps, comme d’habitude, on échange des regards et des caresses. Je ne peux pas nier qu’il existe une forte connexion entre nous : c’est comme si un champ magnétique nous ramenait l’un vers l’autre.

À la fin de la soirée, je la ramène à la maison, comme je le fais toujours quand on sort ensemble. Malu est distraite et toujours à deux doigts de laisser quelque chose lui arriver parce qu'elle ne fait pas attention et ne voit pas le danger possible. Nous sommes assez défoncés par les bières et les caïpirinhas – un cocktail brésilien. Heureusement, nous vivons près de la plage, donc nous pouvons rentrer à pied.

On marche dans les rues du voisinage, se tenant la main, rigolant et parlant. À mi-chemin, elle lâche ma main et m’attrape la taille. Son corps doux et chaud la rend encore plus désirable.

- Tu ne m’as même pas donné de cadeau, Rafa, me dit-elle en faisant une drôle de tête.
- Ton cadeau est chez moi. Je ne pouvais pas l’emmener à la plage, tu l’aurais perdu après avoir trop bu, n’est-ce pas ? Ma réponse la fait rire davantage.
- Je ne perdrais jamais quelque chose qui vient de toi.

On entre dans son bâtiment et on prend l’ascenseur jusqu’au septième étage. Je la regarde pendant qu'elle se met devant sa porte, soulève le paillasson et prend une clé en dessous.

- C’est quoi ce bordel ?
- Quoi ? Ma clé …
- Sous le paillasson ? Putain, Malu ! Quelqu’un pourrait trouver cette clé et rentrer dans ton appart !
- C’est mieux que de la prendre avec moi à la plage et la perdre. Où suis-je supposé la garder, si je n’ai pas de sac ?
- Au même endroit où tu gardes ton téléphone ? Pour la première fois, je réalise qu’elle n’a pas de sac et que son téléphone n’est à aucun endroit où on peut le voir. Peut-être qu’elle l’a perdu ? Où est ton téléphone ?
- Juste ici. Elle plonge sa main dans son décolleté et sort son téléphone, caché entre ses seins. Cette vision réveille mon corps tout entier et rend mon souffle plus lourd.
- Je ne veux plus que tu gardes tes clés sous ton paillasson maintenant. Tu dois les prendre avec toi. Si t’as pas de sac, garde les dans tes mains jusqu’à ce que j’arrive. Je les garderais dans ma poche. Ou demande à quelqu’un en qui tu as confiance.
- Tu es trop autoritaire. Tu ne m’embrasses même pas mais tu veux me donner des ordres ? Je ne peux pas dire si c’est son ton audacieux, ses sourcils levés ou la vision d’elle dans cette robe blanche, peut-être que c’est un mélange des trois et beaucoup de caïpirinhas qui me poussent à l’attraper par la taille, la tenir dans mes bras et la plaquer contre le mur, pour lui voler un baiser passionné.

Je n’attends aucune permission, ma langue envahit sa bouche, provoquant et attisant son désir. Je peux la sentir presser son corps contre le mien, passant ses bras autour de mon cou en me rendant mon baiser.

Je ne peux pas dire combien de temps nous sommes resté ainsi, perdus sur les lèvres l’un de l’autre, jusqu’à ce qu’un faible gémissement venant de sa gorge me signifie qu’il est temps d’y mettre fin. Le prochain niveau impliquerait un lit et je sais que Malu n’a aucune expérience. Elle me l’a dit de son plein gré et je ne suis bon pour personne en ce moment. Je laisse ses lèvres et je réalise que j’étais en train de tenir ses cheveux vraiment fort et que son corps est complètement pressé contre le mien.

- Ne laisse plus jamais ta putain de clé sous ton paillasson, Malu. Compris ? Ma voix sonne faible, irritée par le fait qu’elle ne se préoccupe pas de sa propre sécurité, et rauque à cause de l’excitation provoquée par ce baiser. Elle sourit et hoche la tête. Je la regarde et prends la clé dans sa main. J’ouvre la porte, la pousse à l’intérieur, lui redonne cette foutue clé, et je lui recommande vivement de fermer sa porte après que je sois parti.

- Au revoir, Rafa, me dit-elle, appuyée contre la porte, les lèvres encore gonflées par notre baiser.

- Joyeux anniversaire, tête de pioche.

Chapitre trois

“Ma vie d’avant c’était whisky, larmes et cigarettes.”

Pink

Malu

Quand j’arrive à la maison, je claque la porte après être entrée. Je vois mes yeux dans le miroir, entourés de bavures de mascara et bouffis d’avoir trop pleuré. C’est la dernière fois que je verse des larmes pour eux. Les liens sont définitivement rompus après ce qui est arrivé aujourd’hui.

Retourner à la maison est toujours très difficile. Je ne sais même pas si je peux appeler le fait d'aller dans la maison de ceux qui m'ont mis au monde un retour à la maison, puisque cette grande maison n'a jamais été un véritable foyer pour moi. L’honorable juge Eduardo Figueroa Bragança et la mondaine Lucia Bragança aussi connus sous le nom de mes parents, ne sont pas la définition de vrais parents. Ils se sont mariés il y a plusieurs années après un arrangement de famille et depuis ils appartiennent à la haute société de notre petite ville.

La maison de mes parents est un manoir qui, pour moi, ressemble plus à un donjon. Impeccablement décorée, où tout a une place précise, cette maison est extrêmement oppressante pour un esprit libre comme le mien. Mes parents sont froids, indifférents, distants. Les seuls baisers et câlins dont je me souviens étaient ceux que me faisaient les nounous et gouvernantes qui, subrepticement, essayaient de me donner une enfance normale. Peut-être que c’est la raison pour laquelle je suis autant en demande aujourd’hui. Je suis une personne tactile, quelqu’un qui aime prendre, toucher, tenir, parler avec les mains et friande d’affection humaine.

Quand mon frère, de deux ans plus jeune que moi, est né, je croyais que j’allais enfin avoir quelqu’un qui allait me donner l’affection dont j’avais besoin. Je pensais qu’il serait quelqu’un avec qui partager mes sentiments et qu’il serait mon ami. Quelle erreur.

Eduardo Junior. – Il est interdit de l'appeler Du, Dudu, Edu ou tout autre surnom, ce qui signifierait la fin du monde pour lui. – est presque une petite réplique de mes parents. Il étudie très dur et à l’âge de quinze ans, il a été admis dans l’une des plus prestigieuses universités du pays. Tout ce qu’il veut c’est devenir juge comme mon père, alors que moi je déteste le droit et rêve d’études artistiques pour vivre de ma passion : l’art. Manifestement, le couple parfait ne l’autorise pas. J’ai dû aller à la fac de droit, avoir à peine la moyenne au fil des semestres et sécher le plus de cours possible. Je me sens piégée comme un condamné à mort qui n'arrive pas à entrevoir une solution à sa situation.

Dans la grande ville, j’habite dans une des propriétés de mes parents qui me supportent financièrement pour que je puisse me concentrer sur mes études et, dans le futur, suivre la carrière qu’ils ont choisie pour moi.

En parallèle, je peins. Puisque personne ne me rend visite, j’ai transformé l’une des chambres en atelier dans lequel je passe des heures et des heures, y trouvant mon bonheur. Je peins des visages, des paysages, des choses qui me viennent en tête au détour d’un rêve. Comme je dois donner un rapport de mes dépenses et que mes parents ne me laisseraient pas gaspiller de l’argent dans de la peinture, des toiles ou des pinceaux, je travaille en tant que serveuse dans un bar chaque soir du jeudi au dimanche, utilisant le reste de la semaine pour peindre ou, quand je décide de me lever tôt, aller en cours. Je gagne pas mal d’argent avec les pourboires, ce qui me permet d’investir dans mon matériel.

Pour des raisons évidentes, après quelque temps de cette vie très occupée, mon corps commence à se plaindre, tout comme mon cœur. Je passe plus de temps à être déprimée qu'à me sentir bien dans ma peau, mais je fais de mon mieux pour cacher toutes les choses qui font souffrir mon âme. Les cigarettes et les toiles où je déverse mon cœur sont mes principaux compagnons quotidiens. Cependant, pour tous les autres, je mets un point d'honneur à toujours exprimer ma joie et à ne laisser personne voir ma douleur.

La seule personne qui me connaît assez bien pour apercevoir mes émotions, c’est Rafa. On est amis depuis quatre ans, mais il me connaît mieux que je ne me connais moi-même. Il déteste mon job au bar, parce qu’il pense que les types peuvent profiter de moi, comme si j’étais une fleur fragile, ce que je ne suis pas. Je suis plus une Maléfique qu’une Blanche-Neige.

Il connaît mon amour pour l’art et mon aversion pour le droit. Après quelques conversations à ce propos, j'ai réussi à rassembler le courage nécessaire pour dire à mes parents que je change de matière principale à l'université. Rafa est déjà diplômé et, sans lui pour m’encourager, je sais que je ne peux pas continuer dans ce cursus.

Je me promène dans la maison et vais dans ma chambre. Regardant dans le grand miroir suspendu à la porte de la penderie, je vois à travers cette piste lugubre des larmes sur mon visage, une ecchymose violette sur ma joue. Lorsque j'enlève ma chemise à carreaux aux manches longues, je peux voir ma peau pâle ornée de tatouages, ainsi que les marques des doigts laissées par une poigne serrée. J'enlève aussi mon jean, me tenant seulement en sous-vêtements devant le miroir, pour voir les marques de ceinture sur mes jambes.

Je ferme les yeux, mais je peux encore entendre leurs cris et leurs insultes. Traînée, mendiante, salope, ce sont quelques uns des mots par lesquels ils ont l’habitude de m’appeler. Je me regarde dans le miroir, ne reconnaissant pas l’image douloureuse en face de moi. Sentant le goût du sang dans ma bouche, je me promets à moi-même que c’est la dernière fois qu’ils me maltraitent comme ça. Je ne les laisserai plus jamais m’atteindre, physiquement ou mentalement.

Je vais ensuite dans la salle de bain, cherchant le confort d’une douche chaude. Je sais que c’est ce dont j’ai besoin pour rassembler mes forces. Autorisant l’eau à couler le long de mes longs cheveux colorés, je pense à ce que je dois faire après.

J’éteins la douche et j’appelle Tito, le manager du bar où je travaille.

- Salut, Malu.

- Salut, Tito. Désolé de prévenir aussi tard, mais je ne pourrais pas travailler ce soir.

- Tu es toujours chez tes parents ? me demande-t-il, inquiet.

- Non, Sweetie, je suis déjà rentrée, mais je ne me sens pas très bien. Je vais prendre un antidouleur et me coucher. Je suis sûrement fatiguée à cause du long trajet. Je lui réponds en espérant qu’il ne me pose pas trop de questions. Je déteste mentir et je ne suis jamais capable de lui cacher des choses. Tito a probablement la cinquantaine passée mais il agit comme un garçon de dix-sept ans. Surfeur, toujours à faire des blagues et de bonne compagnie, il est une personne merveilleuse et il m’a toujours traité avec le plus grand respect. Il m’a donné un travail même en sachant que je n’avais pas d’expérience dans ce domaine.

- Alors reposes-toi, petite Malu, je m’occupe de tout ici.

Je le remercie et je raccroche, promettant de prendre soin de moi. Après avoir séché mon corps et mes cheveux, je démêle ces derniers devant le miroir de la salle de bain. En ce moment, ils sont blonds platines, avec des racines foncées et plus longs qu’ils ne l’ont jamais été. Sans réfléchir, j’attrape une paire de ciseaux et les coupe au niveau de ma nuque, jetant toute ma frustration dans ces longues mèches. Je regarde mon propre reflet et je réalise que mes cheveux ne sont plus égaux. Mes yeux, bouffis et rouges d’avoir trop pleuré, ajoutent un air encore plus dramatique à mon apparence. Fait chier.

Je pars dans le salon, enroulée dans une serviette. J’attrape une bouteille de whisky, verse généreusement le liquide dans un verre et j’allume ensuite une cigarette. Je mets un peu de musique, et je m’assois sur le fauteuil du balcon.

La voix mélancolique d’Amy Winehouse me laisse me perdre dans mes pensées jusqu’à ce que le bruit de la porte d’entrée qui s’ouvre m’en sorte et que quelqu’un m’appelle.

- T’es où, Malu ? Rafa est le seul à part moi à avoir les clés de chez moi. Je lui ai donné un double quand il a commencé à se plaindre du fait que je me coupe du monde quand je peins et qu’il restait dehors à sonner sans être entendu.

- Sur le balcon ! Je lui réponds en apportant le verre à mes lèvres. Je le regarde précautionneusement, réalisant qu’il est encore plus beau aujourd’hui qu’il ne l’a jamais été. Presque vingt-quatre ans et travaillant dur pour un cabinet juridique, il ressemble à peine au garçon que j’ai rencontré le premier jour à l’université. Il est un homme maintenant. Son corps est fort, mis en valeur par un haut bleu et une paire de jeans. Ses cheveux courts et sa barbe rasée lui donnent un air encore plus âgé. La seule chose qui n’a pas changé c’est son parfum et sa peau bronzée. Rafa adore être dehors à faire des activités.

- Je suis allé au bar et Tito m’a dit que tu ne travaillais pas ce soir. Comment s’est passé la conversation avec tes parents ? me demande-t-il en entrant sur le balcon alors que je prends une bouffée de ma cigarette presque finie.

- Je dois déménager. Je lui apprends la nouvelle sans lui faire face. Je ne veux pas bouger d’un centimètre, parce que mon corps me fait mal.

- Putain, Malu ! C’est quoi sur ton visage ? Et qu’est-ce qui est arrivé à tes cheveux ? demande-t-il, clairement inquiet. Je touche mes mèches inégales, les regarde et une larme solitaire s’échappe de mes yeux.

- J’ai aussi besoin d’aller chez le coiffeur. Je réponds en me retournant vers l’horizon. Il vient plus près, s’asseyant juste à coté de moi. Après avoir pris le verre vide de ma main et ma cigarette, il me prend dans ses bras et me relève.

- Allez, viens, je vais prendre soin de toi, me dit-il d’une voix faible, me ramenant à l’intérieur. Je me blottis contre son torse, m'autorisant le soulagement de savoir que je ne suis pas seule. Pas complètement.

Chapitre quatre

“Ce qui nous définit c’est la façon dont on se relève après être tombé.”

John Hughes

Rafa

Trouver Malu dans cet état m’a donné un coup à l’estomac. C’est un désastre : une coupe inégale, le visage gonflé, des yeux bouffis et un énorme bleu sur la joue.

Je l’ai emmené dans sa chambre, on dirait qu’une tornade est passé par ici : les vêtements sont éparpillés, une valise est jetée dans un coin, un paquet de cigarettes sur la table de nuit. Je l'emmène au lit, l'aide à mettre un T-shirt de son placard en enlevant la serviette humide dans laquelle elle s’est enveloppée. Elle se couche en position fœtale et je la recouvre de sa couette. Pendant qu’elle se repose, je débarrasse ses affaires, j’étends la serviette humide et ramasse les cheveux gisants sur le sol de la salle de bains. Quand tout est en ordre, j’enlève mes chaussures et je m’allonge à coté d’elle sur le lit, la serrant dans mes bras.

Au-delà du désir, Malu m’apporte de la tendresse comme personne d’autre ne peut le faire. Au plus profond de cette femme forte et vibrante, il y a une petite fille qui se cache et qui ne se montre presque jamais.

La seule pensée de ce qui aurait pu arriver me broie le cœur. Elle a quitté la maison pour rendre visite à ses parents sans aucune contusion sur son visage ou sur son corps. Malheureusement, je dois attendre demain pour le découvrir.

Je laisse mes doigts courir sur son bras gauche, celui qu’elle utilise pour peindre, le caressant doucement. Quand j’arrive sur son poignet fin, ce que je vois me donne le sourire. Là, suspendu sur sa main, se trouve mon cadeau pour son dix-neuvième anniversaire, qu'elle n'a pas quitté depuis. Touchant son poignet, je sens le métal froid du bracelet où pendent deux breloques. La première est une palette en argent avec un petit pinceau en or pour lui rappeler de ne jamais abandonner l’art qu’elle aime tant. La seconde est une blague sur le fait qu'elle ne croit pas en l'amour : une adorable grenouille argentée portant une minuscule couronne dorée représentant ce qu'elle dit habituellement des hommes : il n'y a pas de prince charmant, tous les hommes sont des grenouilles déguisées. Je souris à la pensée que, année après année, elle n’a jamais enlevé ce bracelet. C'est quelque chose qui représente notre lien, qui peut être quelque chose au-delà de l'amitié... nous sommes presque une famille, même si c'est une famille dysfonctionnelle.

Petit à petit, son souffle ralenti, signe que Malu s’est endormi. Je me perds dans le parfum de fraise qui se dégage de ses cheveux, la peau douce de son corps proche du mien et le mouvement constant de mon pouce sur son poignet. Quelques minutes plus tard, je m’endors également.

****

La lumière du soleil et l’odeur du café me réveillent. J’ouvre les yeux et réalise que je ne suis pas dans mon lit mais dans celui de Malu. Je me lève d’un bond, remet mon jean qui était sur le fauteuil et je suis cette merveilleuse odeur.

Je m’attends à trouver Malu toujours un peu à plat, avec des larmes dans les yeux, mais la femme qui me salue depuis la cuisine est totalement différente. Ses cheveux, coupés de façon inégale mais très à la mode sont bouclés pour cacher leur irrégularité. Son visage est très maquillé et ne trahit aucune tristesse ou hématome. Elle porte une robe à manches bleues qui laisse une partie de son bras tatoué visible, ainsi que la rose noire qui recouvre sa cheville et son pied gauche.

- Bonjour, Chéri. Elle me salue avec un baiser sur les lèvres, comme elle le fait d’habitude, et une tasse de café.

- Bonjour, je lui réponds en prenant une gorgée. Comment tu vas ?

Elle prend une profonde respiration et se retourne pour me faire face avec un sourire. Je sais qu’elle joue à la femme forte et je suis fier d’elle car elle ne laisse pas les évènements derniers la mettre à terre.

- Je vais bien, j’ai besoin de ton aide … elle commence à marcher à travers le salon, et je la suis.

- Je veux savoir ce qui s’est passé, Malu. Et ne commence pas à dire que ce n’est rien.

Elle laisse tomber sa tête, prend une profonde respiration et hoche la tête.

- J’ai fais ce que j’avais prévu. Je suis allée là-bas, j’ai expliqué que je ne suis pas heureuse et que je veux changer de filière, qu’il n’y a aucun moyen pour que je prenne ce putain de chemin qu’ils veulent que je prenne. Elle commence son récit et je ne l’interromps pas. Au début le juge m’a crié dessus. Il a dit que son argent ne poussait pas sur les arbres et que je devais finir mon cursus d’une manière ou d’une autre. Quand j’ai dit que je refusais, il m’a sauté dessus en me disant que je n’avais pas le choix.

- Il t’a frappé ?

- Yep. Il m’a donné trente jours pour trouver un appartement que je peux louer avec mon propre argent, comme je ne peux pas me permettre un endroit comme celui-là. Il a suspendu mon argent de poche, mes frais de scolarité et tout le reste. Oh, et il a aussi dit que je suis une pute et que je n’appartiens plus à cette famille désormais.

- Tu n’es pas une pute. Je lui réponds, irrité.

- La première pute vierge de l’histoire, dit-elle en riant et je ne peux m'empêcher de rire de son sens de l'humour. Si tu couchais avec moi, au moins il y aurait un peu de vérité là-dedans.

- Tu mérites plus que quelques types avec des problèmes de relations.

- Laisse tomber, Rafa. Qui a dit que je voulais une relation ? Je t’ai déjà dit que je ne crois pas en toutes ces merdes d’amour éternel. Elle secoue le bracelet avec le pendant grenouille pour me rappeler ce qu’elle pense.

- Si tu n’y croyais pas, tu ne serais plus vierge.

- Je dois arrêter de sortir avec toi. Tous les gars qui veulent me sauter ont peur de se faire frapper par toi. Je ne peux rien faire d’autre que rigoler de ce qu’elle dit. Je ne connais pas une seule relation qui ait fonctionné ou une histoire d'amour qui ait duré éternellement. C'est des trucs de feuilleton, ou de film. L'amour est un fils de pute inventé pour des idiots délirants.

- Qu’est-ce que je dois faire de toi, Malu ? Elle est la personne la plus honnête que j’ai jamais rencontré.

- Et si tu m'aidais à faire le point sur ma vie ? Je ne sais pas quoi faire. Une fois que ma vie sera de nouveau en ordre, je trouverai un beau gosse pour m'emmener au lit et résoudre ce problème gênant.

- Putain, Malu.

- Quoi, putain ?! J’en ai marre de cette merde. Je sais que tu te retiens à cause de ça. Tu crois que je ne sens pas ton petit copain tout agité quand je suis là ? Ainsi, quand l'un de nous aura besoin d'une attention plus intime, nous pourrons nous tourner l'un vers l'autre comme nous le faisons déjà quand nous avons besoin de quelqu'un à qui parler. Tu n'auras plus à chercher des pouffiasses dans les rues.

- Grande gueule

- Têtu. Elle sourit et je ne peux m’empêcher de penser à tout ce qu’elle vient de dire. Bien, mais avant le plaisir, je dois décider quoi faire. Je dois déménager dans un nouvel appartement. Elle regarde autour d’elle avec tristesse. Je sais combien elle aime cet endroit où elle a vécu pendant si longtemps.

- Tu peux venir chez moi.

- Sans façon. Elle ne me laisse même pas finir.

- Mais Malu …

- Rafa, non. Tu as ta propre vie. Je ne gagne pas beaucoup au bar, mais je peux toujours demander à travailler quelques heures de plus.

Mon visage montre mon mécontentement et en même temps j’essaie de penser à une manière de lui trouver un autre travail. Tout d’un coup, j’ai une idée.

- Laisse-moi jeter un coup d’œil à ton atelier.

- Quoi ? Pourquoi ?

- Parce que. Allez, bouge ce joli petit cul et ouvre la porte de la pièce mystérieuse. Je veux vérifier un truc.

Elle m’entraîne sans le vouloir dans la chambre qu’elle garde fermée, comme si elle cachait un grand secret à l’intérieur. Quand elle ouvre la porte, l’odeur de la peinture et du diluant nous assaille. Elle pénètre dans la pièce et ouvre les rideaux pendant que je me balade à l’intérieur, surpris par ce que j’y vois.

Je pensais que les peintures seraient moyennes. De ce que m’a dit Malu, elle n’a jamais suivi de cours de peinture et tout ce qu’elle sait, elle l’a apprit par elle-même ou en regardant des vidéos sur internet. Elle utilise ses sens pour coucher sur la toile ce qu’il y a dans son imagination. Toutefois, à ma grande surprise, son travail est vraiment bon. Bien sur, je ne suis pas un expert, mais de par mes petites connaissances en la matière, je peux voir un grand potentiel. Je me dirige vers une pile de tableaux dans un coin : des paysages, des gens, un garçon sur une planche de surf qui tente une manœuvre, la moitié du visage d'une femme triste avec des larmes noires qui coulent sur sa joue. Ces tableaux font naître en moi des sentiments différents. J'attrape immédiatement mon téléphone dans ma poche et appelle Hellen.

Hellen est une amie de mes parents qui a sa propre galerie d’art. Du haut de ses cinquante ans, elle possède une incroyable sincérité. Elle serait capable de jeter un œil aux productions de Malu et évaluer si on peut en tirer quelque chose.

- Tu as déjà montré ces peintures à quelqu’un ? Comme des vendeurs ou quelque chose comme ça ?

- Non, jamais, me répond-t-elle. Je secoue la tête et reporte mon attention sur le téléphone.

- Bonjour, Hellen. C’est Rafael Monteiro. Comment vas-tu ? Je vais bien. Je suis désolé de te déranger si tôt, mais j’ai besoin de ton avis professionnel. Une de mes amies a fait quelques peintures et elle s’est enfin décidée à me les montrer. Je ne suis pas un expert, mais je pense que c’est plutôt bon. Tu pourrais jeter un œil et nous donner un avis professionnel ? Elle doit décider si elle continue sa carrière artistique et on apprécierait vraiment d’avoir ton avis. Bien sur, je t’enverrais l’adresse. J’attends ta réponse. Merci.

- C’était quoi ça ? me demande-t-elle, confuse.

- Hellen a une galerie d’art. Elle sera là dans quelques minutes. Apparemment, elle cherche de nouveaux artistes à exposer dans sa galerie depuis plusieurs mois maintenant, depuis que le dernier qu’elle avait a décidé de tout laisser derrière lui et d’aller à Paris.

- Exposer ? Malu semble étrangement effrayée.

- Quoi ? C’est pas le but pour quelqu’un qui peint ?

- Oh … je ne sais pas. Elle me regarde, perdue. Je la rapproche pour la prendre dans mes bras.

- Qu’est-ce que tu en penses ? Hellen s’arrête pour jeter un œil à tes peintures et nous dire si tu as une chance de faire carrière. Après, on verra ce qu’on fait avec le problème de logement. Quand tes grands-parents sont décédés, ils ne t’ont pas laissé à toi et à ton frère une sorte de fonds en fiducie ?

- Je suppose, mais le juge m’a toujours dit que je pourrais pas y avoir accès avant l’âge de vingt-sept ans.

- Tu as des papiers qui en attestent ?