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Tu réalisais ton rêve.
Je comprends cela.
Mais une partie de moi est morte quand tu es parti,
Parce que tu étais mon cœur,
mon souffle,
mon tout, tu étais tout pour moi.
Et tu avais raison.
Maintenant tu es de retour. Pas parce que tu as aussi besoin de moi.
Mais je vais changer tout ça.
Tout ce dont j’ai besoin, c’est un moment seule avec toi
Pour te le faire comprendre.
Tu peux tomber amoureux entre
deux battements de cœur.
Un regard.
Un toucher.
Instantanément, tout change.
Es-tu prêt ?
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Veröffentlichungsjahr: 2018
À propos de : Le Cow-Boy
Prologue
Chapitre Un
Chapitre Deux
Chapitre Trois
Chapitre Quatre
Chapitre Cinq
Chapitre Six
Chapitre Sept
Chapitre Huit
Chapitre Neuf
Chapitre Dix
Chapitre Onze
Chapitre Douze
Chapitre Treize
Chapitre Quatorze
Chapitre Quinze
Chapitre Seize
Épilogue
À Propos de Le Play-Boy
Livres d’Amanda Adams
Tu as poursuivi ton rêve.
Je le respecte.
Mais une partie de moi est morte quand tu es partie,
Parce que tu étais mon cœur,
mon souffle,
mon tout.
Et tu avais raison.
À présent, tu es de retour. Pas parce que tu as besoin de moi, toi aussi.
Mais j’ai l’intention d’y remédier.
Tout ce dont j’ai besoin, c’est d’un moment seul avec toi
pour que tu comprennes.
On peut tomber amoureux entre deux
battements de cœur.
Un regard.
Un contact.
Instantanément, tout change.
Tu es prête ?
Copyright 2016 Amanda Adams
Le Cow-Boy: Les Frères Walker, Tome 2
Illustration de couverture Copyright 2016 eBook Indie Covers
Publié Par Tydbyts Media
Tous droits réservés
Ce livre est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, les lieux et les événements sont le pur produit de l’imagination de l’auteur, ou sont utilisés dans un but artistique. Toute ressemblance avec des personnes mortes ou vivantes est une coïncidence.
Réalisé avec Vellum
Jake Walker sonna à la porte et attendit. Quelques secondes plus tard, Mme Klasky l’ouvrit. Elle portait un pantalon bleu marine et un pull-over ample de couleur crème. Elle devait avoir au moins soixante-dix ans, mais elle en faisait dix de moins.
« Je suis navrée pour votre mère, mon grand. »
Elle l’attrapa par le bras et le tira à l’intérieur avant de refermer la porte derrière lui avec douceur.
« Vous êtes le premier à arriver.
— Pas étonnant. »
Jake retira son chapeau et en fit rebondir le rebord contre sa cuisse. Il était toujours le premier à arriver partout. Ses trois frères semblaient avoir un problème avec la ponctualité. Il suivit Mme Klasky dans la cuisine, en passant devant un mur plein de photos de famille et de portraits sépia de leurs ancêtres, puis il s’assit à sa place habituelle à la table de cuisine des Klasky, dans la chaise en bois de chêne la plus proche du canapé vieux de vingt ans couvert de motifs cachemire, dans des couleurs qui d’après ce qu’on lui avait dit, dataient des années soixante-dix.
« Vous voilà, mon grand. »
Mme Klasky posa un verre de limonade devant lui, et il en prit une gorgée.
« Merci. »
Des citrons fraîchement pressés avec du vrai sucre, comme celle que faisait sa mère. Ses yeux s’embuèrent et il leva un moment le regard au plafond, en attendant que la douleur qu’il avait derrière les yeux s’amenuise. Il avait assez pleuré. Des garçons perdaient leur mère tous les jours. Il avait vingt-quatre ans, pas douze. Il fallait qu’il se reprenne et qu’il se souvienne que certains garçons n’avaient pas de mère du tout.
La sonnette retentit et Mme Klasky disparut pendant environ une minute avant de mener deux de ses trois frères dans la cuisine. Derek était l’aîné, et le plus coriace, et Jake s’était reposé sur cette force plus d’une fois en grandissant. Derek tenait une boutique de customisation de motos dans le centre de Denver, et ça se voyait : bottes de motard, veste en cuir noire et tatouages. Mitchell, lui, était en deuxième année de résidence de chirurgie à l’hôpital du coin. Derek avait l’air rebelle, là où Mitchell ressemblait à un gars des villes, avec ses cheveux trop longs au goût de Jake, ses vêtements hors de prix et sa voiture de sport. Jake préférait ses jeans, ses bottes et son pick-up. S’il essayait de porter les mêmes trucs chics que son frère, il savait qu’il aurait l’air d’un chien errant à un rassemblement de caniches. Trop grand. Trop nature. Trop sale.
Après quelques bonnes tapes dans le dos, la sonnette retentit une nouvelle fois.
« Ça doit être Chance. »
Mme Klasky disparut encore et revint avec son frère Chance, fraîchement devenu avocat, un an après la fin de ses études de Droit.
« Chance. »
Derek se leva de sa chaise en bout de table et prit le nouvel arrivant dans ses bras.
« Salut, loser. »
Après une étreinte rapide, Chance donna une tape sur l’épaule de Derek. Jake et Mitchell y passèrent chacun à leur tour. En temps normal, ils n’étaient pas très câlins, mais être ici aujourd’hui le rendait nostalgique, et il s’imaginait que ses frères ressentaient la même chose.
« Tu es en retard, comme d’habitude », dit Jake.
Il souleva son frère du sol comme s’il s’agissait d’une petite fille. Jake était le plus jeune, mais ses trois frères aînés faisaient tous au moins dix centimètres et vingt kilos de moins que lui. Et en tant que bébé de la famille, Jake ne ratait jamais une occasion de leur rappeler qu’il était capable de leur botter les fesses à tous.
« Et tu sens toujours la bouse de vache et les ballots de foin », dit Chance en riant, et Jake lui retourna son sourire.
Ses frères, et surtout Chance, lui avaient fait croire qu’il était le seul de la fratrie à avoir été adopté. Et Jake avait passé plusieurs semaines à croire à leurs conneries. Il avait cinq ans, à l’époque. Il avait été voir sa mère en pleurant, et elle lui avait dit la vérité.
Ils étaient tous adoptés.
« T’es dur, mon frère. Mais toi, tu sens comme quelqu’un qui se ferait essuyer les fesses par un employé de salle de bains avec une lingette parfumée. Tu te transformes en l’un de ces métrosexuels de la ville ? »
Jake le reposa et Mitchell prit sa place pour taquiner Chance. Mitchell était le seul qui passait plus de temps en ville que Chance.
« Nan, mon pote. Ça, c’est moi. »
Mitchell sourit et attrapa Chance par les épaules. Mitchell vivait en ville, désormais, mais se ruait dans les montagnes à la première occasion. Son frère allait même jusqu’à leur envoyer à tous des photos de lui, pendu à une paroi rocheuse dans son sac de couchage, à une centaine de mètres d’altitude. Mitchell vivait pour la poussée d’adrénaline que lui offrait la salle d’opération. Les blessures par balles sanglantes et les coups de poignard rendaient son frère plus heureux que la flopée d’infirmières avec lesquelles il sortait sans arrêt.
Chance se tenait là en costume, et comme d’habitude, il était le seul à porter une cravate. Même M. Klasky, l’avocat octogénaire de leur mère, portait un pantalon beige et un polo.
« Maintenant que vous êtes tous là, nous allons pouvoir commencer. »
M. Klasky fit rouler une petite télévision avec un vieux magnétoscope. Jake sortit une chaise et Chance s’assit à la table de la cuisine et tira sur sa cravate.
Ils remercièrent tous Mme Klasky avec respect pendant qu’elle leur servait de la limonade et un plateau de cookies aux pépites de chocolat, comme elle le faisait depuis qu’ils étaient à l’école primaire.
Lorsqu’elle alla prendre place contre le mur, Jake lui proposa sa chaise, mais elle agita les mains.
« Vous voudrez être assis pour ce qui va suivre.
— Sauf votre respect, Monsieur Klasky, le patrimoine de notre mère a été réparti il y a des mois, lorsqu’elle est tombée malade.
— Oui. Oui. Je sais. »
Le vieillard se pencha en avant et chercha une prise sur le mur pour pouvoir y brancher sa télévision qui datait de Mathusalem.
« Alors que faisons-nous là ? Chance alternait les regards entre M. Klasky, qui avait enfin trouvé une prise, et sa femme, qui lui jeta un regard noir et haussa un sourcil jusqu’à ce qu’il ajoute : Monsieur.
Satisfait, M. Klasky se redressa et se frotta les mains, comme un écolier excité.
« Bon, les garçons. J’ai promis à votre mère de tous vous réunir ici aujourd’hui, six semaines après sa disparition, que Dieu ait son âme.
— Mais pourquoi ? Tout est réglé.
— Pas tout », dit Mme Klasky en sortant quatre enveloppes de la poche de son tablier.
Toutes avaient l’air de pouvoir contenir une grande carte d’anniversaire. Elle marcha jusqu’à la table et leur en donna une à chacun.
« Ne les ouvrez pas encore. Vous devez d’abord regarder la vidéo. »
Jake sentit une boule se former dans sa gorge quand il passa les doigts sur le contour de son nom, inscrit sur l’enveloppe. Il avait l’impression qu’ils s’étaient tous fait happer par une faille temporelle maléfique. En voyant l’écriture cursive de sa mère, reconnaissable entre mille, il sentit encore une fois combien elle lui manquait. Elle avait écrit son nom à l’encre rouge sur l’enveloppe blanche. Rouge, parce que quand il avait neuf ans, il lui avait dit que c’était sa couleur préférée. Il leva les yeux pour voir celles de ses frères. Comme il s’y était attendu, sa mère avait aussi écrit leurs noms sur les enveloppes. Celle de Chance était verte, et Jake sourit. Qui aurait pu oublier l’obsession de son frère pour l’Incroyable Hulk ? L’enveloppe de Mitchell était un peu délavée, mais rouge. Et Derek ? Monsieur cuir noir et tatouages avait dans les mains une enveloppe d’un jaune pétant.
« Nom de Dieu », Jake s’enfonça dans son siège avant de se mettre à se tapoter le genou avec son chapeau de cow-boy.
M. Klasky fourra une vieille cassette VHS dans le magnétoscope et l’écran enneigé devint noir durant quelques secondes. Jake entendit le bruit de la bande alors qu’elle se mettait à tourner, et il sourit. Leur mère avait toujours détesté la technologie. Il lui avait fallu trois ans pour la convaincre de prendre un portable. Son sourire s’effaça quand elle se mit à parler dans la cuisine des Klasky. Aïe. Elle leur réservait quelque chose. Il le savait au ton de la voix de sa mère, à la note sournoise qu’elle avait dans la voix, et grâce à laquelle elle avait toujours eu un temps d’avance sur ses quatre adolescents à la tête dure pendant tant d’années.
« Bonjour, mes garçons adorés. Je vais enregistrer cette vidéo et la donner à M. Klasky au cas où il m’arriverait quelque chose. Je n’ai pas l’intention de disparaître, mais si ça arrive, je veux que vous sachiez que je vous aimais plus que tout et que j’ai toujours été fière, chaque jour, d’être votre mère. »
Jake renifla et se détourna. Ça suffit, les pleurs. Bon sang.
« Vous savez que je vous ai toujours encouragés à suivre vos cœurs. Suivez vos rêves, je le dis toujours. Eh bien, j’ai beaucoup pensé à ça cette année. Derek a quatorze ans, à présent, et je vois que ça arrive déjà.
« La vie va vous rattraper, et vous voler vos rêves. Je le sais. Le monde réel est dur et sans pitié. Les petits garçons ne peuvent plus rêver. Ils doivent être des hommes. Le monde attendra de vous que vous soyez durs. Et je sais que vous pouvez être coriaces. Vous tous. Je sais ce que vous avez vécu. Vous êtes nés dans un monde difficile. J’ai essayé de vous montrer une vie différente, mais j’ai peur. J’ai peur que vous grandissiez et oubliiez qui vous êtes vraiment. Je ne veux pas que vous oubliiez vos rêves.
Alors, j’ai fait quelque chose d’un peu fou. Vous vous en souviendrez peut-être, ou peut-être pas, mais le jour de mon anniversaire il y a quelques années, je vous ai tous demandé d’écrire une lettre particulière... »
Jake posa les yeux sur l’enveloppe, horrifié. Ah non. Il ne voulait même pas l’ouvrir. Il ne voulait pas revivre cette journée, pas plus qu’il ne voulait revivre ce qui était arrivé huit ans plus tôt.
Un cœur brisé. Voilà ce qu’il avait dans les mains.
Le rire de sa mère emplit la cuisine silencieuse et le moment parut surréaliste. Elle était juste là, sur ce petit écran, souriante, heureuse et magnifique.
« Je vais demander à M. Klasky de garder ces enveloppes un moment. Un jour, je mourrai. J’aurai peut-être quatre-vingt-dix ans, peut-être pas, mais si je meurs et que vous avez besoin qu’on vous le rappelle, il vous dira qui vous êtes vraiment. »
Elle prit un air sérieux et se pencha en avant jusqu’à ce que son visage emplisse tout l’écran.
« Je vous aime. Tous autant que vous êtes. Et vous m’avez tous fait une promesse, il y a toutes ces années. Et morte ou vivante, je m’attends à ce que vous la teniez. »
Puis elle rit encore.
« Morte ou vivante. Elle est bien bonne, non ? Je vous aime. N’oubliez pas qui vous étiez destinés à être. Ouvrez vos enveloppes, maintenant. Lisez-les. Et par-dessus tout, souvenez-vous de la raison pour laquelle vous les avez écrites. Tenez vos promesses. Je vous aime, et vous savez que je vous regarde. »
Jake ne prêta pas attention à ses frères, qui étaient tous assis dans un silence hébété. Dieu seul savait ce qu’ils avaient écrit sur leurs cartes, mais il savait exactement ce qu’il avait écrit dans la sienne en CE2. Sa mère lui avait fait écrire trois choses, mais une seule d’entre elles l’inquiétait. La première sur sa liste.
Claire Miller...
La seule fille qui lui ait véritablement brisé le cœur.
Six Mois Plus Tard - Bassin de la Rivière Amazonienne, Brésil.
Avec son avant-bras, Claire Miller essuya la sueur qu’elle avait sur le front et continua de brosser les derniers morceaux de pierre et de poussière qui la séparaient de son trésor. Elle avait trouvé un nouveau fragment de poterie, vieux d’au moins cinq mille ans, et elle sentait le passé l’appeler à travers les couches de terre et de décombres, presque comme si le fantôme de la femme qui avait laissé la poterie dans cette grotte se tenait derrière elle, penchée sur son épaule, à observer, en attendant que Claire touche ce qu’elle avait un jour touché, qu’elle ressente ce qu’elle avait ressenti. Attendant de revivre, à travers Claire.
Le passé attendait d’être ramené au présent, et elle vivait pour ce moment de découverte, le quart de seconde entre le rien et le quelque chose. Chaque artefact était comme une pièce du passé qui venait hanter le présent, désireux d’être vu et ressenti, impatient d’exister encore, rien que pour elle.
Elle souleva délicatement le petit pot et le tint dans la paume de sa main, émerveillée qu’il soit intact. Il était petit, et, pour le plus grand plaisir de Claire, ses motifs étaient bien visibles. Alors qu’elle passait le bout du doigt sur les contours de la poterie avec douceur, elle parvint presque à sentir les mains qui l’avaient un jour tenue, à sentir la force qui avait forgé la pierre ancienne et avait consacré des heures à la décorer. Parfois, Claire aurait juré pouvoir sentir la joie de ce peuple et sa difficulté à survivre. Les gens qui avaient vécu dans cette grotte étaient réels à ses yeux, et protéger leur histoire et les ramener à la vie était son devoir sacré.
« Il va bientôt falloir remballer, Claire », dit Emily, qui fourrait son matériel dans son sac à dos à la gauche de Claire.
Emily était son amie depuis la fac, sa colocataire, et une étudiante en archéologie, comme elle. Elles avaient eu la chance de parcourir le monde ensemble. Claire adorait chaque voyage, chaque nouvel endroit, chaque nouvelle nourriture, et chaque nouvelle aventure. Elles étaient là depuis cinq semaines et leur séjour allait bientôt se terminer. Dans moins d’une semaine, elle rentrerait chez elle.
Tout autour d’elle, l’équipe de fouille s’agitait pour tout ranger et pour emballer les artefacts du jour pour qu’ils soient transportés en toute sécurité jusqu’au musée, où chaque pièce serait inspectée, cataloguée et nettoyée.
« Je sais, je sais », répondit Claire.
Assise en tailleur sur le sol, elle berçait le pot dans la paume de sa main, peu désireuse de l’abandonner tout de suite.
« Il est beau, non », elle pencha la tête pour mieux le regarder. « On peut encore voir une partie de la peinture.
— C’est une super pièce, Claire. Étiquette-la et range-la. Il faut qu’on parte. Il doit pleuvoir dans une heure environ », intervint Howard, le chef d’équipe.
Il enfila son énorme sac à dos et s’essuya le visage avec un mouchoir. Au début du mois de juin au Brésil, il fallait s’attendre à des températures autour de vingt-six degrés, un fort taux d’humidité, et seulement quelques heures de répit avant que la pluie de l’après-midi rende dangereuse la conduite sur les pistes.
« Fichue pluie. »
Si elle avait pu, Claire aurait campé sur place et aurait creusé toute la nuit. Elle pourrait ramper jusqu’à la grotte où Howard et d’autres membres de l’équipe avaient installé une autre zone de fouilles. Elle pourrait creuser à la lueur de sa lampe frontale, s’il le fallait. S’il n’y avait pas eu les moustiques et les serpents, elle aurait été tentée de le faire.
Elle sortit de la zone de fouilles à quatre pattes et se précipita vers leur matériel pour étiqueter et emballer l’artefact avec précaution, dans la boîte pour attirail de pêche marron qu’ils avaient reconvertie en boîte à outils. Une fois la poterie en sécurité, elle sortit une bouteille d’eau de son sac et en but la moitié. Il faisait très chaud et elle avait l’impression d’être en train de fondre. Il leur restait à marcher au moins quatre cents mètres dans la montagne avec tout leur matériel sur le dos. Plus bas, deux véhicules tout terrain les attendaient pour les ramener jusqu’à la petite ville brésilienne de Monte Alegre, où leur hôtel et un bon lit les attendaient. À quelques kilomètres de là, le gros rocher noir en forme de champignon, le Pedra Pintada s’élevait comme un ami qui les saluait au loin. Vingt-cinq ans plus tôt, l’une de ses idoles dans le monde de l’archéologie, Ann Roosevelt, y avait découvert la fameuse caverne qui contenait des artefacts et des peintures datant de plus de dix mille ans.
Roosevelt avait réécrit l’histoire avec cette découverte, et Claire rêvait de faire le même genre d’annonce au monde, un jour. Elle voulait être celle qui enfoncerait ses mains dans la terre et découvrirait quelque chose qui changerait la façon dont le monde se voyait. Claire voulait laisser sa trace dans l’histoire.
Mais pas aujourd’hui. Elle fourra sa bouteille d’eau dans une poche latérale de son sac à dos. Le soleil se levait tôt et se couchait tôt, ici. Quand ils auraient parcouru les routes sinueuses jusqu’à la ville et regagneraient la civilisation, il ferait noir, et elle était fatiguée.
Claire souleva son sac et écarta les pieds pour faire contrepoids. Il n’était pas léger, et son dos était déjà collant et mouillé là où sa sueur avait trempé son tee-shirt et son short. Elle sentait la terre, la sueur, l’anti-transpirant qui avait essayé de faire son boulot mais avait échoué, et aussi le répulsif anti-insectes.
« J’ai la même odeur qu’une usine chimique », dit-elle.
Emily rit. Elle semblait aussi sale que Claire. Les cheveux blond foncé d’Emily semblaient être de plusieurs teintes de brun et lui collaient au visage et au crâne sous sa casquette. De la sueur lui coulait sur les tempes et imprégnait son tee-shirt, qui avait le même col en V, au-dessus du décolleté et dans le dos, que celui de Claire. Elles auraient pu servir de pubs ambulantes pour une marque de déodorant. Non pas que ça puisse beaucoup les aider ici, avec cet air si moite qu’à l’instant où elle se séchait après la douche, elle était de nouveau mouillée.
Emily leva le bras et se renifla rapidement l’aisselle avec une expression dégoûtée.
« On pue tous. Saletés de moustiques.
— C’est mieux que de donner son sang, j’imagine. Ou que de tomber malade. »
Claire avait subi plusieurs piqûres d’aiguilles au cours des dernières années alors qu’elle se faisait vacciner contre à peu près tout, de la fièvre jaune à la rage, en passant par la typhoïde. Elle avait l’impression d’être un cobaye. Mais de nouvelles maladies apparaissaient sans arrêt, et ces foutus moustiques semblaient toujours jouer un rôle dans l’histoire.
« Pas faux. »
Emily souleva son sac et Claire lui emboîta le pas et toute l’équipe se mit en route sur le sentier. Ils étaient neuf, et Emily et elle, étaient les seules femmes - ce qui n’était pas étonnant. Lors de ce voyage, les hommes étaient plutôt corrects. Ils n’étaient pas vulgaires, irrespectueux ou insistants, ce qui faisait du bien et changeait un peu. Leur équipe de fouille comprenait deux hommes plus âgés du musée, des amis d’Howard, deux autres âgés d’une vingtaine d’années, qui étaient mariés et qu’Emily et elle, connaissaient depuis la fac, et leur guide, Senhor Gomes, un archéologue du coin qui leur servait d’intermédiaire avec les autorités brésiliennes. Il parlait aussi couramment le portugais et le français. Claire parlait un peu espagnol, mais elle aurait été perdue sans lui.
Le fait que chaque membre de l’équipe soit marié à l’exception de Claire et Emily était là aussi habituel.
Apparemment, les femmes étaient censées laisser leurs maris poursuivre leurs rêves et les laisser parcourir le monde à la recherche d’aventure.
On attendait des femmes qu’elles organisent leur foyer, qu’elles tombent enceintes, et qu’elles se tiennent tranquilles.
Au diable tout ça.
Chaque fois qu’elle y pensait, elle ressentait de la tristesse et de la colère en ressassant tout ce qu’elle avait abandonné... ou plutôt, qui. Mais elle mit tout cela de côté et continua de marcher. Jake Walker appartenait au passé. Leur histoire d’amour était morte depuis longtemps. Son plus gros problème, c’était qu’elle ne l’avait jamais vraiment oublié. Il était bien trop parfait, à l’exception d’une chose.
Il voulait une femme au foyer, une petite femme avec qui partager la vie au ranch et élever des chevaux. Et c’était un super cow-boy, incroyablement sexy, qui pouvait sans doute mettre toutes les femmes qu’il voulait dans son lit. Ses bébés ressembleraient à de petits chérubins blonds, des versions miniatures de Jake, trop mignons, avec des sourires timides et des petits bras potelés impatients de faire des câlins à tout le monde. Ses enfants seraient absolument parfaits. C’était la vie rêvée pour presque n’importe quelle femme. Enfin, n’importe quelle femme, sauf elle.
Claire chassa ces idées venues du passé, prit une profonde inspiration et admira la vue. Le Bassin de la rivière amazonienne s’étendait sous leurs pieds comme une photo de carte postale. La zone abritait une grande biodiversité. Partout où elle regardait, tout était vert, en pleine croissance, et plein de vie. Les oiseaux étaient colorés et sauvages, les fleurs et les arbres étaient si différents de la sauge sèche et des pins de son Colorado natal qu’elle avait l’impression qu’il s’agissait d’un autre monde.
L’équipe avait descendu la moitié de la montagne lorsque son téléphone satellite sonna.
Personne ne l’appelait lorsqu’elle partait faire des fouilles, sauf en cas de mauvaise nouvelle. Elle passait des appels vidéo à sa famille et ses amis depuis l’hôtel lorsqu’elle avait accès à internet, mais le téléphone était réservé aux urgences. Seules trois personnes avaient son numéro : ses parents, Emily, et son patron, en Californie.
Emily s’arrêta devant elle et Claire se tourna pour que son amie puisse sortir le téléphone de la pochette latérale de son sac à dos.
« Tu veux qu’on attende ? » demanda Howard par-dessus son épaule en criant à moitié, en tête de file.
« Non. Continuez. On arrive », répondit Emily à sa place.
Claire adressa un sourire plein de gratitude à son amie. Elle ignorait si l’appel provenait de ses parents ou de son patron. Quoi qu’il en soit, elle n’avait pas besoin que sept paires d’oreilles masculines écoutent le moindre mot de sa conversation. Claire tendit la main sur le côté et Emily plaça le téléphone, qui sonnait toujours, dans sa paume pour que Claire puisse répondre.
« Allô ?
— Claire, ma chérie ? C’est toi ?
— Maman ? Tout va bien ?
— Où es-tu, Claire ? Tu as une minute ? Je peux te rappeler plus tard. »
La voix de sa mère tremblotait, et Claire eut l’impression qu’une pierre lui tombait dans l’estomac. Quelque chose n’allait pas.
« Maman. Tout va bien. Je suis toujours au Brésil, et je rentre dans quelques jours. Qu’est-ce qui ne va pas ?
— Chérie, c’est ton père. Faiseur de Veuves l’a jeté à terre, et ils l’emmènent passer un scanner cérébral en ce moment même. Il est gravement blessé. »
Un million de scénarios se bousculèrent dans sa tête, de la nuque brisée aux os en miettes, et elle sentit une drôle d’impression de calme s’emparer de son esprit.
Elle tourna le dos aux roches escarpées qui couraient le long du sentier et elle posa son sac à dos dessus pour l’aider à supporter son poids. Tous les cavaliers savaient qu’ils risquaient de tomber à tout moment. L’euphorie de la montée s’accompagnait de ce risque, mais son père montait cet étalon obstiné depuis des années. La bête était butée, mais pas méchante ou imprévisible.
« Que s’est-il passé ? C’est grave à quel point ? »
Emily jeta un coup d’œil au visage de Claire d’un air inquiet, ses yeux verts écarquillés, et Claire lui murmura :
« C’est mon père. Il a fait une chute de cheval.
— Oh, non. »
Emily avait pâli, son visage d’ordinaire joyeux était devenu stoïque alors que Claire attendait en silence que sa mère poursuive.
« Ils pensent qu’il s’en remettra, mais il a un traumatisme crânien, des côtes cassées, et il s’est démis l’épaule. Ils vont lui mettre des vis dans la clavicule pour la rattacher. »
Sa mère semblait plutôt calme, vu les circonstances.
« Son traumatisme crânien est grave ?
— Ils ne savent pas encore, ma chérie. Il est allé passer son scanner, mais on n’a pas encore les résultats. Tu sais comment ça marche. Et à présent, ils parlent d’opération. Mais ils ont dit qu’ils attendraient d’être sûrs que son cerveau aille bien avant de lui faire subir une anesthésie générale, alors on va rester ici quelques jours mais il souffre beaucoup. »
Claire avait les idées claires, mais son pouls battait à tout rompre. Son père était un roc. Son roc. Il ne pouvait pas être blessé, ou à l’hôpital. Il ne pouvait pas avoir de séquelles au cerveau. Cela était tout simplement impossible dans son monde.
« Tu veux que je rentre ? »
Sa mère se mit à pleurer, et c’était la seule réponse qu’il lui fallait.
« Je prendrai l’avion demain, maman. »
Avec un peu de chance, elle pourrait trouver un vol au départ de Monte Alegre. Sinon, elle allait devoir prendre un car jusqu’à l’aéroport de Santarem, qui se trouvait à près de cent kilomètres, mais cela restait faisable.
« Je rentre dès que possible. Avec un peu de chance, je serai là demain soir.
— Je suis désolée, ma chérie. Je ne voulais pas gâcher ton voyage.
— Tu ne gâches rien du tout. Je suis déjà en route. »
Claire parla encore à sa mère pendant quelques minutes puis, mit fin à l’appel. Elle tapota le téléphone contre sa cuisse et poussa un soupir.
« Merde.
— Ça n’avait pas l’air très encourageant, dit Emily. Comment va ton père ?
— Il a un traumatisme crânien et il a besoin de se faire opérer l’épaule. Il va rester à l’hôpital pendant au moins encore quelques jours, et ma mère a besoin d’aide. »
Claire regarda les arbres et ravala la boule qu’elle avait dans la gorge.
« Ça va ? Il faut qu’on y aille. Ils chargent déjà le matériel », Emily fit un signe de tête dans l’autre direction pour lui montrer les véhicules qui y étaient garés.
Claire jeta un coup d’œil en bas de la falaise et vit les hommes ranger leurs sacs à dos, certains déjà en train de les attendre.
« Ça va. Allons-y. »
Emily hocha la tête et se mit en route à grands pas. Claire la suivait de près, mais elle avait l’impression d’être une grosse menteuse. Elle n’allait pas bien. Elle rentrait chez elle pour la première fois depuis sept ans. Elle avait vu ses parents deux ou trois fois par an depuis qu’elle avait quitté le Colorado. Ils venaient lui rendre visite en Californie, mais elle n’allait jamais chez eux.
Trop de souvenirs l’y attendaient. Elle adorait le passé, à condition qu’il ne s’agisse pas du sien.
Deux jours plus tard, Claire Miller se rangea dans la longue allée qui menait au ranch familial des Walker et poussa un soupir. Elle était de retour chez elle, dans le Colorado, sur son ancien terrain de jeux, et c’était aussi douloureux qu’elle l’avait imaginé.
Ces sept années s’étaient évaporées comme si elles n’avaient jamais existé. Tout au ranch était exactement comme le jour où elle avait quitté la ville, mais elle savait qu’une différence majeure l’attendait... la mère de Jake était morte.
Ce décès la touchait davantage à présent. Pour la première fois de sa vie, Mme Walker ne se trouverait pas sur le porche, à lui sourire et à lui faire des grands signes, ou à leur apporter un pichet de limonade dans la grange. Elle ne serait pas dans la cuisine, occupée à frire un poulet ou à harceler ses quatre garçons à propos de leurs devoirs ou de leurs petites copines, dans cet ordre, en général.
Claire s’attendait à moitié à ce que les lieux paraissent aussi tristes à l’extérieur qu’elle se sentait à l’intérieur, mais la Terre ne s’arrêtait jamais de tourner, quelle que soit la personne disparue. La grande grange rouge venait d’être repeinte, les dépendances débordaient de selles, de foin et de tracteurs. Les manèges étaient souvent utilisés et les sabots des chevaux s’assuraient que rien ne puisse y survivre, pas même un brin d’herbe. Et cette grosse maison jaune, où elle avait passé les plus beaux jours de sa vie. Des pots de fleurs printanières étaient pendus à des crochets, au plafond du porche et débordaient de pétales de couleurs vives. La balancelle était jaune, verte et blanche, avec des coussins placés avec précision, prêts pour qu’elle s’y mette en boule pour faire une sieste. Les rambardes étaient d’un blanc pur, et la porte d’entrée était d’un vert forêt profond, avec un heurtoir tournesol et un paillasson assorti - tout était exactement comme Mme Walker l’avait souhaité. Un jour, la mère de Jake avait dit qu’un endroit devrait donner l’impression d’être chez soi avant même d’ouvrir la porte, et Claire lutta contre ses larmes lorsqu’elle réalisa qu’elle n’avait pas eu cette impression d’arriver dans un endroit familier depuis très longtemps.