Les Mages d'Utopia - Rémy Duriau - E-Book

Les Mages d'Utopia E-Book

Rémy Duriau

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Beschreibung

Découvrez le sombre passé familial du jeune Yvan, un Mage de la Guilde d’Utopia.

Dans une partie du monde, dissimulée derrière une épaisse frontière, vivent les Mages de la Guilde d’Utopia, dans une paix et une quiétude apparemment parfaites. Yvan, un jeune Mage de la division Mû, vit une vie tranquille entouré de ses amis, malgré un passé familial assez trouble. Lui et ses amis vouent à la Guilde une loyauté sans failles. Mais, lors d’une mission, lorsque de vieux secrets surgissent du passé, sa loyauté et celles de ses proches sont fortement remises en cause. Que cache la Guilde, et que cache son Capitaine Commandant, l’intrigant Siméon ? Que complote le discret Conseil des Cinq ? Qui était réellement le grand démon dont tout le monde parle depuis des siècles ? Déterminé à percer ces mystères, Yvan ira enquêter dans des lieux dangereux et interdits. De sombres secrets pourraient être révélés, et ils pourraient faire s’effondrer toute une société…

Suivez Yvan et ses proches dans des aventures tissées de dangers, de mystères et de lourds secrets, avec ce roman de fantasy qui vous fera découvrir un univers captivant !

EXTRAIT

— Yvan Meltoro, quel plaisir de te rencontrer. Voilà un esprit bien torturé qui franchit le seuil de ce temple, dit le prophète.
Yvan n’était pas surpris, il se doutait de cette entrée en matière, l’Oracle et le prophète étaient connus pour leur grande clairvoyance.
— Bonsoir, prophète, dit Yvan. Je suis venu vous poser deux questions.
— Je les connais déjà, jeune homme… répondit le prophète. Tu veux savoir ce qui est arrivé à tes parents et tu veux savoir la signification d’un cadeau que tu as reçu. Je me trompe ?
— Non.
— Par quoi veux-tu que je commence ? Je tiens à te signaler que la déesse parle parfois de manière détournée, tu devras sans doute réfléchir aux réponses que je vais te donner. Ce sera à toi de te débrouiller avec ce qu’elle te dira.
— C’est déjà mieux que rien, répondit Yvan. Commencez par mes parents, s’il vous plaît.
— Bien.
Le vieil homme souffla et ses membres tremblèrent. Sa voix devint plus claire et plus aigüe, comme si quelqu’un d’autre parlait à sa place. Un vent s’élevait, sorti de nulle part, faisant trembler les flammes des torches.
— Tes parents ne sont jamais partis loin de toi. Tu les retrouveras, sous les écarlates et les pures. L’ancien t’aidera à comprendre. En ce qui concerne ton médaillon, il est lié à ta première question. Là aussi, l’ancien t’aidera à comprendre. La vérité blesse et réjouit, l’amour tue et rassure, la passion dévore et se cultive. Telles sont les doubles tranchants de ceux qui vivent, torturés dans le secret.
Le vieil homme reprit une respiration et le vent tomba. Yvan n’en revenait pas. Il avait enregistré chaque mot prononcé par le prophète, ou la déesse, ou les deux. Secoué, il se releva, remercia le prophète et voulut sortir pour prendre l’air.
Attend, Yvan ! lui demanda l’homme. Ne laisse pas ton cœur se troubler, repense à ce que je t’ai dit, remplis ta mission et rentre chez toi. Tout devrait s’éclaircir pour toi. Tu es un jeune homme intelligent.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

À 23 ans seulement, Rémy Duriau, de Binche, combine sa carrière de professeur d’Histoire-Géo avec sa passion pour la lecture et l’écriture. Le jeune homme a récemment publié son tout premier bouquin nommé Les Mages d’Utopia, un univers fantastique dans lequel petits et grands s’évaderont. - Maud Wilquin, La Nouvelle Gazette

À PROPOS DE L'AUTEUR

Jeune professeur d’Histoire et de Géographie, Rémy Duriau a toujours été un amoureux des livres et des belles histoires. Fervent défenseur de la lecture chez les jeunes, c’est tout naturellement qu’il s’est lancé dans l’écriture, afin de coucher sur papier le fruit de son imagination, ainsi que ses impressions sur le monde et sur ce qui l’entoure.

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Rémy Duriau

Les Mages d’Utopia

Roman

© Lys Bleu Éditions —Rémy Duriau

ISBN : 979-10-377-0034-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

« Chacun doit conserver et défendre sa conviction »

Saint Ambroise de Milan.

Prologue

Une histoire perdue dans la nuit des temps

Dans notre monde se trouve une zone géographique inexplorée, inconnue des humains qui n’osent pas s’en approcher, car elle est entourée de forêts profondes et infranchissables tellement elles sont denses. La légende raconte que cet endroit, aussi vaste que la France et l’Espagne réunies, serait peuplé d’innombrables créatures étranges, totalement uniques, et également d’humains « spéciaux ». On les dit Magiciens, ou encore Enchanteurs, ou Mages. Mais, tout cela n’est rien de plus qu’une simple légende pour ceux qui vivent dans le monde d’aujourd’hui. Plus aucun être humain ne croit en l’existence de ces personnes extraordinaires, mais tous restent à bonne distance de cette zone mystérieuse, par tradition… et peut-être aussi à cause d’une vieille frayeur qu’eux-mêmes ne savent pas expliquer.

On dit pourtant que, durant les siècles passés, ces Mages seraient sortis de leur royaume pour venir se battre aux côtés des humains lors d’une guerre. En effet, les humains se faisaient attaquer par des forces sombres et malfaisantes. Démunies, leurs armées se faisaient massacrer sur les champs de bataille. Leurs ennemis utilisaient la magie, en plus d’être en supériorité numérique. Leur monde était au bord du chaos. Pris de pitié envers eux, les Mages formèrent une alliance et se battirent pour libérer ces peuples de la menace des ténèbres qui envahissaient le monde. Grâce à ces précieux et puissants alliés, les humains remportèrent la bataille qui eut lieu dans une immense plaine, aujourd’hui changée en désert. On raconte que chaque grain de sable représente un humain ou un Mage tombé au combat. Une manière poétique et politiquement correcte de supporter une vieille histoire trop glaçante, disent les spécialistes actuels des contes et légendes d’autrefois.

La victoire acquise et le monde débarrassé de la menace des forces sombres, les Mages constatèrent que l’humain était par nature imparfait et cupide. En effet, l’attaque des ténèbres aurait dû leur apprendre que l’unité était le seul moyen d’éviter les conflits et que l’union faisait la force. Au lieu de cela, les humains retournèrent à leurs guerres de nations et d’intérêts. Les Mages repartirent donc dans leur royaume, dépités. Déçus par la nature de leurs alliés d’un temps, ils élevèrent une immense muraille de végétation impénétrable autour de leurs frontières, pour s’isoler et rester entre eux, car eux n’avaient pas besoin de souverain, la confiance étant leur guide, et ils ne risquaient pas de tomber dans le conflit. Les Mages prêtèrent serment de faire tomber la barrière le jour où l’humanité serait digne d’eux. En attendant cela, il fut décrété que chaque humain arrivant à traverser les frontières du Royaume devrait être exécuté, car il représenterait un risque de corruption pour leur société parfaite. Forts de cette conviction qu’un jour le monde entier serait parfait comme le leur, ils appelèrent leur Royaume « Utopia ».

Malheureusement, cet état idéal des choses ne devait pas durer. Une guerre civile éclata, à cause de l’ambition d’un Mage cupide et vaniteux, nommé Balenga. Balenga pensait que son peuple ne devait pas se limiter aux frontières de la barrière créée après la grande bataille, mais que celui-ci devait conquérir le monde des humains et les réduire en esclavage grâce à leurs pouvoirs. Il leva des troupes et tenta de prendre l’ascendance sur l’ensemble des Mages, dans sa soif de pouvoir et de domination. C’est alors que les Mages opposés à Balenga s’unirent, s’organisant selon leurs aptitudes en différentes divisions, formant ainsi une armée très organisée et redoutablement efficace. Ils prirent le nom de « Guilde des Mages d’Utopia ».

Une terrible bataille opposant Balenga le rebelle et son armée à la Guilde éclata. Devant l’organisation sans failles de la guilde, le Mage rebelle et ses troupes furent massacrés. La paix revint donc. Mais pour éviter de nouveaux conflits, les Mages de la Guilde signèrent tous une Charte les liant entre eux, et l’organisation de la Guilde fut maintenue en divisions, chapeautées chacune par un capitaine, lui-même chapeauté par un capitaine général. Le but étant de prévenir une nouvelle attaque. La Guilde construisit une immense tour blanche en souvenir des événements douloureux qu’elle venait de traverser, et la baptisa « Integrabianca », tour de la pureté blanche. Symbole d’espoir, elle en fit son quartier général.

Cette histoire appartient aux temps anciens, et seule subsiste, aujourd’hui, l’obligation aux patrouilles de Mages de devoir faire prisonnier et d’exécuter les humains s’introduisant à Utopia, ainsi que l’organisation de la Guilde, inchangée depuis. Tous les membres de la Guilde connaissent cette histoire, transmise de génération en génération. Ne jamais pardonner, ne jamais oublier, attendre avec espoir le moment où l’humanité serait digne de tout connaître sur son histoire… et sur les secrets que gardent jalousement les Mages, ces secrets qui peuvent mener le monde à son apogée… ou à sa ruine.

Chapitre 1

Une journée comme les autres

Jardins de la tour Integrabianca, par une belle journée de printemps.

Le vieil homme marchait lentement et paisiblement dans les allées du jardin en contrebas de la tour. Sa tunique, richement brodée de fils d’or, contrastait avec la brume grisâtre dans la fraîcheur du petit matin. Il aimait beaucoup sortir à cette heure, là où il redevenait simplement Siméon, le Mage fatigué des épreuves de la vie, mais tendre au plus profond de son cœur. Il aimait passer son temps seul, dans ces rares moments où il n’était pas assailli par les capitaines et leurs demandes incessantes, ou les jeunes novices trop enjoués qui lui cassaient les oreilles de leurs jérémiades, ces moments où il n’était pas sans cesse appelé « Capitaine Général Tonitribusque ». Capitaine Général de la Guilde d’Utopia… Même après des décennies, il avait parfois du mal à se faire à l’idée que ce titre lui était revenu, à lui qui, au fond, n’était qu’un homme timide pourvu d’une puissance hors-norme.

— Tu parles. Cette puissance, je n’en ai jamais voulu ! se dit le vieil homme à voix basse, avant de reprendre sa promenade.

Au gré de sa sortie matinale, il aimait s’arrêter dans un bosquet de roses blanches et rouges. Dans le langage des fleurs, la rose blanche est la couleur de l’amour platonique, tandis que les roses rouges expriment la passion dévorante. C’était lui qui avait fait planter ce bosquet, afin d’entourer d’un écrin de couleurs l’un de ses biens les plus précieux. Il s’engagea sous les arches de rosiers grimpants colorés, qui formaient un véritable tunnel floral. En ce milieu de printemps, les fleurs se paraient de leurs plus belles couleurs pour attirer les insectes pollinisateurs, déjà au travail à cette heure anticipée. Ce spectacle aurait dû le réjouir, mais il ne pouvait s’empêcher d’avoir un pincement au cœur. Il continua son chemin et arriva au centre du bosquet, là où se dressaient deux magnifiques monuments. Le plus petit était une tombe d’enfant richement décorée, et le plus grand, fin et délicat, sculpté dans une pierre blanche comme la neige, était un hommage funéraire à sa femme, sa bien-aimée Angela. Il n’avait jamais su comment se comporter avec elle, partagé entre l’amour fou qu’il éprouvait pour cette femme superbe, et les règles de bonne conduite enseignées par ses parents, qui lui réclamaient de modérer ses passions et ses ardeurs. Malgré tout, il trouva les mots et la séduisit. Le mariage fut superbe, bien qu’il ne fût qu’un simple Mage à l’époque. Leur bonheur était intense, et se concrétisa par la naissance d’un enfant, un petit garçon rieur nommé Alexandre. Sa petite famille vivait dans le bonheur le plus parfait, et rien ne semblait pouvoir se mettre en travers de leur bonheur. Mais ce bonheur prit fin le jour de cette funeste cérémonie, qui lui arracha ses deux trésors… et la culpabilité le rongerait jusqu’à son dernier souffle…

— CapitaineGénéral ! cria une voix dans son dos, l’extirpant de ses pensées.
— Je pensais t’avoir déjà dit de ne pas mettre les pieds ici, Yvan Meltoro ! dit Siméon en se retournant brusquement. Cet endroit est sacré pour moi, et cette heure aussi, d’ailleurs. J’espérais un peu de tranquillité avant que ne commence cette journée. 
— Ho, veuillez m’excuser, Excellence. Je ne pensais pas à mal… dit Yvan, conscient d’avoir interrompu le recueillement de son supérieur.
— Je me doute bien, mais bon, passons. Que fais-tu levé à cette heure si matinale ? La plupart des jeunes de ton âge sont encore couchés à cette heure-ci. 
— La plupart des jeunes ? J’ai passé l’âge de ce genre de sermons, Capitaine Général ! J’ai vingt-sept ans depuis hier ! dit le jeune homme, un peu vexé d’être éternellement pris pour un enfant par ses supérieurs.

Siméon Tonitribusque quitta ses pensées maussades et regarda attentivement le jeune homme. Yvan mesurait plus d’un mètre quatre-vingt-cinq. Il avait les cheveux blonds, vigoureux, et de grands yeux bruns. Il avait les yeux de sa mère, et la carrure de son père, des amis du Capitaine Général, disparus voilà plus de vingt ans. Il l’avait connu à sa naissance, et maintenant, il était devenu un fier jeune homme, membre de la division MU, spécialiste du combat à l’épée et grande gardienne de la magie de la glace.

— Vingt-sept ans… Le temps est décidément bien un voleur, dit-il en souriant. Pardonne-moi d’avoir oublié ton anniversaire, Yvan. Je suis un homme très occupé, tu sais. J’espère que tu as bien fêté cela avec tes amis. Profite de ta jeunesse avant…
— …avant qu’elle ne passe. ComplétaYvan. Je sais, je saurai m’en souvenir. Honnêtement, j’ai un peu mal au crâne à cause de la fête que nous avons faite hier dans la division. Le capitaine Portulaca a beau être un homme mûr et exigeant avec nous, il ne rate jamais une occasion d’ouvrir un bon tonneau de bière ou de vin pour l’un de ses meilleurs soldats ! Et ce n’est pas lui le plus raisonnable niveau boisson, croyez-moi ! dit Yvan sans faire attention.

Le vieil homme le regarda, avec une expression entre amusement et embêtement. Il adressa un regard ferme et bienveillant à Yvan.

— N’oublie pas que cet homme est ton capitaine, tout de même. Un peu de retenue, jeune homme. Ce n’est pas parce que je connaissais bien tes parents que tu peux tout te permettre avec moi ! dit l’homme en se relevant.
— Pardonnez-moi, Capitaine Général… dit Yvan, conscient de sa gaffe. Je m’en vais de ce pas vers le terrain d’entraînement. Je dois m’échauffer un peu pour ma mission de demain.
— C’est toi et ton groupe qui vous chargez de la patrouille, c’est bien cela ? demanda Siméon. Avec de si vigoureux et dévoués Mages en patrouille, je peux dormir tranquille, songea-t-il.
— Oui, c’est bien cela. Je vais aller m’entraîner un peu, cela ne me fera pas de mal. Bonne journée Capitaine Général ! dit Yvan en se retournant pour quitter le bosquet de roses.

Une fois Yvan parti, Siméon emprunta le chemin qu’il venait de faire en sens inverse, afin de sortir lui aussi du bosquet où dormaient pour l’éternité ses deux trésors, et se diriger vers la tour, où une autre journée l’attendait. Ses appartements et son bureau étaient situés dans les étages supérieurs de la tour, au-dessus des nuages. Heureusement, les sorts pour se téléporter existaient ! Il prit le temps d’observer la tour et l’agitation qui commençait à en émaner, preuve que presque tout le monde se réveillait. La tour de la pureté blanche. Integrabianca. Ce symbole des souvenirs douloureux d’un temps lointain, et symbole d’espoir dans un futur dont personne ne connaissait quoi que ce soit, excepté ceux qui avaient lu les livres de prophéties, pour peu qu’on accorde un peu de crédibilité à des histoires racontées par de vieux Mages aveugles ayant mâché un peu trop d’herbes divinatoires…

— Il serait bon, je pense, d’offrir un petit quelque chose pour l’anniversaire d’Yvan, se dit Siméon. Après tout, il me sert avec loyauté et foi, je lui dois bien ça. Et puis, ce n’est pas n’importe qui vis-à-vis de moi…

Il vit au loin que des Mages portant de longues tuniques bleu ciel se dirigeaient vers lui d’un pas vif, l’air mécontent.

— Qu’est-ce que je disais ? pensa-t-il. Allez, allons-y pour une nouvelle journée à écouter les capitaines se plaindre. Mais ils feront l’effort de venir dans mon bureau ! se dit-il, avant de disparaître de la vue des capitaines, qui grognaient à l’idée de devoir monter les marches de la tour à pieds, faute de maîtriser la téléportation.

*

Sentier du terrain d’entraînement de la Guilde, sous le soleil.

Tout en se dirigeant vers le terrain d’entraînement, Yvan réfléchissait. Pourquoi le Capitaine Général lui manifestait-il autant d’intérêt ? Pourquoi avait-il avec lui une relation privilégiée ? C’est vrai, il pouvait se permettre des commentaires parfois osés, et le Capitaine ne le réprimandait pas, alors qu’il aurait sévèrement puni n’importe quel autre Mage ou officier de la Guilde, si l’un de ces derniers lui avait parlé comme il l’avait fait ce matin. D’un côté, il se sentait mal à l’aise de cette quasi-complicité qu’il avait avec le vieil homme, d’un autre, il se disait qu’il était bien chanceux de compter un allié de cette puissance dans ses connaissances.

— Toujours cette mine tracassée, l’interrompit une voix féminine en face de lui. Tu ne changeras donc jamais, Yvan.
— Laisse-le, Judith ! dit une autre voix un peu bourrue. Il doit encore se remettre de la veille, hein Yvan ?

Yvan leva la tête et aperçut deux de ses meilleurs amis, Judith et Chris. Ils l’attendaient visiblement à l’entrée du terrain d’entraînement, déjà en tenue de combat. Judith Morios était une jeune femme de vingt-quatre ans, brune aux yeux bleus. Sa petite taille était un atout dans sa vie de Mage guerrière, car elle était très agile et légère, ce qui pouvait lui donner l’avantage sur un ennemi lourd. Elle manipulait le bâton au corps-à-corps et l’eau en magie. D’un caractère bien trempé, elle ne laissait personne lui dicter sa conduite, excepté son capitaine à la division Lambda, Solitas. Chris, quant à lui, était un jeune homme vif de vingt-cinq ans, mesurant plus d’un mètre nonante, aux cheveux roux et aux yeux bleus. Il faisait aussi partie de la division Lambda, et combattait donc également au bâton. Sa magie favorite était celle des plantes et de la terre, qu’il utilisait pour se protéger ou attaquer. Contrairement à Judith, il était très calme et très posé. Yvan pensait que ces deux-là finiraient par se mettre en couple, tellement ils étaient complémentaires. Et il n’était pas le seul à le penser, tous les membres de la division Lambda le pensaient, sans trop oser le dire, de peur de se prendre une raclée par Judith.

— C’est toujours la même chose avec toi, Chris. Tu le défends toujours, même quand il est en tors ! Non, mais, regarde ses yeux, ils sont aussi rouges que les roses du bon vieux Capitaine Général ! Tu aurais dû le surveiller un peu mieux hier soir ! lança Judith à Chris.
— Ho, ça va hein ! Toi, tu ne sais pas t’amuser de toute manière. C’était son anniversaire, et c’est mon ami, alors oui on a bu un peu plus que de raison, mais on est là et on sait assumer le lendemain ! Ce n’est pas comme toi, la dernière fois ! dit Chris, sur un ton de plaisanterie.
— Ce n’est pas pareil, rugit Judith. Je venais d’intégrer la division Lambda, c’était un événement. Et je n’étais pas saoule…
— À peine, j’ai juste dû te porter sur mes épaules et te mettre coucher dans ton lit. Tu m’as même dit « Merci maman, bonne nuit ». Alors, tu n’es pas la mieux placée pour critiquer ! répliqua malicieusement Chris.

Avant que Judith n’ait le temps de répondre à cette énième provocation de la part de son ami Chris, Yvan se mit à applaudir de toutes ses forces avec ses mains.

— Bravo, alors là dans la dispute de couple, vous êtes magistraux, les amis ! dit-il.
— Moi en couple avec lui ?! Tu débloques, très cher ! rugit à nouveau Judith.
— Bien lancé, camarade, lui dit Chris dans un soupir. Tu l’as mise de bonne humeur, elle va être redoutable pendant l’entraînement…
— C’est un peu le but, je l’avoue. Elle est d’autant plus efficace quand elle râle, alors j’ai saisi l’opportunité. Tu ne m’en veux pas, j’espère ? demanda Yvan.
— Non, ne t’en fais pas. Tu as toujours de bonnes idées.
— Alors, cet entraînement, c’est pour aujourd’hui ou pour demain ?! lança Judith, déjà avancée sur le terrain.

*

Amusé du petit tour qu’il avait fait à ses capitaines une petite heure plus tôt, Siméon Tonitribusque rangeait des parchemins sur son bureau, de sorte que la pièce paraisse en ordre. Le décor était un véritable écrin de luxe : tapis précieux au sol, peintures dorées aux murs et aux plafonds, lustres incrustés de pierres précieuses, meubles en bois précieux… Rien n’était trop beau pour le Capitaine Général. Peut-être que cela avait influencé son caractère, se prenait-il parfois à réfléchir. Le luxe, la fonction prestigieuse et essentielle au sein de la Guilde, tout cela l’avait changé. Il était devenu plus dur, plus intraitable, plus autoritaire qu’il ne l’était avant son accession au pouvoir. Le pouvoir change les hommes, se disait-il souvent. Le seul qui avait échappé à ses changements d’humeurs était le jeune Yvan. Oui, jeune, car quand on a cent onze ans, vingt-sept ans vous paraissent bien peu. Comment s’y prendre ? Comment dire à Yvan ce qu’il devait savoir ? Siméon ressassait chaque fois ces questions dans sa tête, à chaque fois qu’il voyait le jeune homme. La vérité était tellement cruelle qu’elle lui paraissait insoutenable et impossible à révéler. Mais il faudrait bien le lui dire un jour.

— Oui, un jour, il saura, murmura-t-il.

La porte s’ouvrit et un serviteur annonça la venue de trois capitaines venus demander une audience.

— Qui sont-ils ? demanda le Capitaine Général.
— Il s’agit des capitaines de la division Alpha, de la division Lambda et de la division Mu, Excellence.
— Faites-les entrer, dit-il.
— À vos ordres, répliqua le serviteur.

Les trois capitaines entrèrent dans l’immense bureau de leur supérieur. Leurs longues tuniques bleues ciel semblaient flotter sur leurs épaules.

— Décidément, songea Siméon, cette tenue est vraiment élégante. J’ai bien fait d’en faire le vêtement des capitaines. Que puis-je faire pour vous ? demanda-t-il.

La seule femme du trio s’avança. C’était une femme aux yeux verts émeraude, la petite quarantaine, à l’allure noble et sereine. Capitaine de la division Alpha, Arielle Curaqua était reconnue dans toute la Guilde pour ses puissants sortilèges de soins. Elle était une référence en matière de magie médicale.

— Excellence, nous sommes venus vous parler d’un fait troublant, et nous voulions nous assurer que cela n’était pas une erreur de la part de l’un d’entre nous.
— De quoi voulez-vous parler, capitaine Curaqua ? s’étonna Siméon.
— Nous parlons du plan de trajet de la patrouille qui partira demain en ronde, Excellence. Dit un jeune trentenaire grand et robuste, à l’allure fière et charismatique.
— Capitaine Solitas, dit le vieil homme. Le capitaine de la division Lambda contesterait-il mes ordres au sujet de ce trajet que j’ai décidé de faire réaliser à la patrouille ?
— En aucun cas, Monsieur, dit une voix douce en retrait. Nous nous demandons donc si le trajet que vous leur avez prévu n’est pas trop… dangereux. Vous voulez vraiment les faire passer par… là ? Dans les grottes du Nord ? Qu’espérez-vous ? Ils ne trouveront rien, et chaque fois que nous avons envoyé une patrouille là-bas, nous avons perdu la trace de nos Mages. Ils sont sans doute tous morts…

Le capitaine de la division Mu, Nicolas Portulaca, était un homme approchant les septante ans, d’une infinie douceur et d’une grande exigence avec ses soldats. Il était aussi redoutablement intelligent, ce qui lui permettait de donner des conseils avisés, qu’on lui en demande ou non.

— Capitaine Portulaca, dit Siméon en se relevant de son bureau, je sais que vous êtes inquiet, mais je peux vous assurer que cette fois, la patrouille survivra. Je l’ai composée de jeunes, mais puissants Mages, et je ne fais jamais de choix à la légère, vous le savez. Au fait, êtes-vous bien remis de la petite fête en l’honneur d’Yvan ?

Il jeta un regard à Arielle Curaqua, qui ne perdait pas un mot de la conversation. Elle aussi était d’une intelligence redoutable, d’autant plus qu’elle ne laissait rien paraître de ses émotions.

— Mes chers capitaines, reprit-il, je peux vous assurer que vos petits protégés ne risquent rien au cours de cette mission. S’ils devaient rencontrer des adversaires, je ne doute pas de leurs capacités à les écraser. Yvan, Judith, Chris et Tilda ne risquent rien tant qu’ils sont ensemble. À ce propos, Tilda était en retard, je ne l’ai pas vu se rendre au terrain d’entraînement aujourd’hui…
— Je ferai plus attention à son respect des horaires, promit Arielle.
— Bien. Ceci conclut donc notre entrevue, messieurs-dame. Veuillez regagner votre division à présent, j’ai du travail qui m’attend, lança Siméon.

Les trois capitaines saluèrent leur supérieur et se dirigèrent vers la porte. Au moment où Nicolas allait sortir, il se retourna et posa discrètement une question.

— Je ne sais pas ce que vous et votre division cherchez dans les grottes du Nord, mais êtes-vous sûr qu’il n’y a rien que je doive savoir avant d’y envoyer Yvan ?
— La division Oméga et moi-même ne voulons qu’une seule chose, à savoir la sécurisation de cette zone, répliqua le vieux commandant.
— Êtes-vous sûr que vous ne nous cachez rien ? Pardonnez mes soupçons, mais je me pose tout de même des questions, Monsieur.
— Il suffit ! Retournez dans votre division, vous avez du travail. Quant à mes intentions, elles sont nobles et pures, je peux vous le jurer. La division Oméga et moi-même ne cherchons qu’à garantir la sécurité de tous ici, au sein de la Guilde.
— Bien, Monsieur, j’en suis fort heureux. Bonne journée.

Nicolas sortit, laissant Siméon seul dans l’immense bureau. Combien de fois avait-il réfléchi à ce qu’il allait faire en traçant l’itinéraire de la patrouille ? Il savait qu’il devait essayer, une nouvelle fois, encore et encore. Mais avec Yvan dans la troupe, cela n’allait pas échouer, il le savait, il en était persuadé. Ou plutôt, il essayait de s’en persuader. Un oiseau brun qui venait de se poser sur le bord de la fenêtre du bureau l’arracha à sa réflexion. Le chant de l’oiseau l’apaisa, puis ce dernier, surpris par l’homme qui l’écoutait, s’envola au loin vers le soleil. Il ne savait pas dire si cela était un bon présage ou, au contraire, un mauvais. Il se plongea dans le travail et la lecture de vieux parchemins pour faire en sorte de penser à autre chose.

Chapitre 2

Un bon entraînement

Le soleil commençait à illuminer le ciel de ses rayons matinaux. Il était environ dix heures, et la tour fourmillait d’activités diverses. Les jeunes novices allaient et venaient pour se diriger vers les salles de classe et les terrains d’entraînement qui leur étaient réservés, les Mages confirmés vaquaient à leurs occupations, tandis que les serviteurs effectuaient leurs tâches avec leur efficacité habituelle. L’organisation était une qualité reconnue des Mages, ce qui leur permettait d’être efficaces et d’économiser leur temps. D’un modernisme flagrant, leur société était un véritable modèle, en apparences. Les femmes avaient les mêmes droits que les hommes et pouvaient prétendre à tous les postes qu’occupaient ceux-ci. Parfois, certaines riaient en pensant aux ragots que l’on racontait sur le monde des humains, un monde où les femmes étaient moins bien considérées que leurs homologues masculins. Ridicule, pensaient-elles, quel drôle d’idée que de différencier les gens selon leur sexe !

Loin de cette agitation et de tout ce monde, devant l’entrée du terrain d’entraînement de la Guilde, Yvan et Chris attendaient patiemment. Judith, elle, s’était déjà avancée et commençait à s’échauffer.

— Tu penses qu’elle va venir ? demanda Chris à Yvan.
— Je l’espère. Normalement, elle sait que nous nous entraînions aujourd’hui. Je lui ai dit de vivevoix hier… répondit le jeune homme.
— Oui, mais hier tu étais dans un état… Tu es sûr de te rappeler à qui tu as parlé ?
— Évidemment, même avec quelques verres de vin dans le nez, je me souviens que j’ai parlé à Tilda. Bon, j’avais aussi quelques verres de bière dans l’estomac, mais… C’est quand même ma meilleure amie, elle était là pour mon anniversaire… D’ailleurs, il faut que je te dise un truc la concernant… En fait…

Il fut interrompu par des appels au loin, provenant d’une voix qu’il connaissait bien. C’était Tilda.

— Attendez-moi, les amis ! s’écria-t-elle.
— Ha, ça y est, tu es enfin tombée de ton lit ? plaisanta Chris.
— Très drôle, Chris, tu devrais te lancer dans l’humour… Je suis en retard parce que j’avais des rapports de soins à compléter. Tu sais que je donne toujours priorité aux blessés que je soigne. Hé, Yvan, ça va ? Bien remis d’hier ? lança Tilda avec un regard malicieux, tout en reprenant son souffle.

Yvan lui fit un petit clin d’œil complice. Il appréciait vraiment Tilda. C’était une jeune fille de vingt-trois ans, rousse aux yeux bleus, de taille moyenne. Tilda Aquasana, de son nom complet, avait été l’une des plus jeunes filles à intégrer la division Alpha, spécialisée dans les soins, à seulement quatorze ans. C’était aussi son amie d’enfance, ils avaient pratiquement grandi ensemble. Depuis la disparition de leurs parents respectifs, ils étaient devenus encore plus proches, se réconfortant dans leur chagrin. Puis, le temps avait passé, et les vieilles blessures avaient cicatrisé. Ils essayaient de passer le plus de temps ensemble, malgré leur emploi du temps chargé.

— Content de voir que tu vas bien, Tilda ! lui dit Yvan. Tu es prête ? Nous allons bientôt commencer.
— Oui, mais je ne comprends pas très bien. Nous allons être dans la même patrouille, et chaque patrouille doit être accompagnée d’un médecin de ma division. Mais, pourquoi je dois assister à votre entraînement ?
— Tu vas observer notre technique de combat, et ainsi tu sauras comment nous porter assistance en cas de problème, répondit Chris.
— Voilà, renchérit Yvan. Il est essentiel que tu comprennes comment nous allons nous mettre en position, qui sera en première ligne, qui sera en position centrale, où te placer… C’est tout un art, et il faut qu’on soit prêts. Et puis, ça sera bien pour toi de voir autre chose que des malades ou des blessés, ça te changera de tes journées à l’hôpital de la tour.
— Pas de soucis, allons-y ! répondit-elle, sur un ton enjoué.

Le trio arriva sur le terrain d’entraînement. Le soleil y distribuait généreusement ses rayons et sa douce chaleur. Le terrain était assez grand, et comportait toutes sortes d’installations. Des bois artificiels, de fausses collines, des bâtiments, des trous dans le sol… tout était fait pour simuler de vrais terrains d’intervention, où les Mages seraient susceptibles de se battre. Le concepteur de ce terrain était un génie. Rien n’avait été laissé au hasard. Tilda n’y était jamais allée, son terrain d’entraînement à elle se limitait aux murs de l’hôpital de la tour. Elle contemplait l’étendue et se disait qu’elle aimerait bien y venir plus souvent, c’était plus agréable d’être à l’air libre que dans un air aseptisé. La vision de Judith au centre du terrain l’arracha à sa contemplation.

— Hé bien, on a failli t’attendre, jeune fille ! lui lança Judith.
— Pardonne-moi, mais j’avais des priorités. Quand allez-vous commencer ?
— Dès que les deux garçons se seront un peu échauffés. Cela leur fera du bien.
— Pas besoin de s’échauffer, répondirent Chris et Yvan. On y va !
— Ne venez pas vous plaindre si vous vous claquez un muscle, alors… répondit Tilda à voix basse.

Tilda se plaça à l’arrière du groupe. Judith se plaça en première ligne, aux côtés d’Yvan. Chris occupait le centre du groupe. Les trois combattants se concentrèrent et dirent en même temps et de vivevoix « Que l’entraînement commence ! ».

Quatre formes apparurent en face d’eux. Peu à peu, les formes prirent une apparence plus précise et se métamorphosèrent en loups translucides. Des hologrammes, mais des hologrammes plus vrais que nature, qui pouvaient attaquer et blesser.

— Décidément, ce concepteur est un génie ! s’écrièrent-ils. En avant !

Judith et Chris sortirent leurs bâtons, Yvan sortit son épée. Ils se regardèrent et esquissèrent un mouvement. Les loups qui venaient d’apparaître devant eux hurlèrent et se lancèrent vers eux, tous crocs sortis.

— C’est parti pour la tactique qu’on a répétée précédemment ! Yvan, à toi ! dit Chris, tandis que Judith affrontait un loup au corps-à-corps à l’aide de son bâton.

Yvan se concentra et l’air devint soudain froid, malgré les rayons du soleil. Il prit une grande inspiration et déclama son incantation d’une voix forte et mystique, tandis que les loups se rapprochaient.

— Du fond des âges, je vous appelle, neiges éternelles. Portez-moi secours en vous mettant entre moi et mes ennemis. Mur de glace, je t’ordonne d’apparaître !

De gros fils de glace vinrent s’entrelacer entre le groupe et trois loups à distance, formant un mur de glace assez haut et large. Le loup que combattait Judith se retrouva isolé des trois autres, qui hurlaient derrière le mur qui s’était soudainement dressé.

— Bien joué, Yvan ! dit Judith en abattant de toutes ses forces son bâton sur le loup. Celui-ci disparut dans un éclat de lumière. Maintenant, à ton tour, Chris ! Tiens-toi prêt, Yvan !

Chris se concentra et, sans prononcer un mot, plongea sa main dans le sol. Le sol trembla, comme si la terre se retournait sous les pieds des Mages.

— Maintenant, Yvan, fais tomber le mur ! ordonna Judith.

Yvan claqua des doigts, et le mur de glace précédemment élevé s’effondra, libérant le passage aux loups. L’un d’eux fut écrasé sous un bloc de glace qui s’était détaché du mur, et il disparut également. Les deux loups restants bondirent vers Judith et Yvan, mais c’était sans compter sur le sort de Chris.

— Racine des profondeurs ! lança-t-il d’une voix puissante et assurée.

De grandes racines sortirent du sol dans un grondement effrayant, et se dirigèrent vers les loups. Ceux-ci tentèrent de les éviter, mais Chris fit un geste de la main et les racines s’emparèrent d’eux, les immobilisant totalement.

— Fouet d’eau ! cria Judith, en esquissant un élégant mouvement du poignet.

Une large bande d’eau claqua dans l’air et s’abattit sur un des loups immobilisés. Le choc fut tel que Judith tomba à terre, tandis que le loup qu’elle avait visé disparut. Yvan bondit et brandit son épée et, se servant d’un petit renflement du sol, sauta pour abattre son épée sur le dernier loup, qui s’évapora. Il grimaça en retombant sur ses pieds de manière un peu maladroite.

— Bravo, les amis ! dit Tilda qui n’avait pas perdu une seule seconde du spectacle s’offrant à ses yeux. La combinaison était parfaite.
— Merci, répondirent-ils tous en même temps.
— Yvan, dit Judith. Tu dois faire davantage attention à ta réception lorsque tu te lances au corps-à-corps. Tu vas bien ?
— Oui, lui répondit-il. Juste un peu mal à la cheville gauche. Mais c’est bon, ça va.
— On va demander à notre soigneuse personnelle de jeter un coup d’œil pour voir si ça va vraiment, répliqua Chris.

Tilda arriva vers Yvan et l’obligea à s’asseoir. Elle toucha la cheville gauche d’Yvan, et fit la grimace.

— Ah oui, tu es bien arrangé, en effet. Encore heureux, je suis là. J’aurai au moins servi à quelque chose… Tu dois faire attention à tes muscles, si tu t’étais échauffé, peut-être que tu n’aurais pas eu cela…

D’un geste de la main, elle appuya sur la blessure de son ami et une lumière brilla au creux de sa paume. Yvan grogna, mais fut immédiatement soulagé.

— Tu as encore progressé, dit-il. Je suis fier de toi, je n’ai plus rien.
— C’est un soin basique, Yvan. Pour qui me prends-tu ?
— Merci, répondit-il.

Il se releva et contempla le terrain. Ils l’avaient un peu abîmé, mais celui-ci se réparait automatiquement. Décidément, le concepteur avait pensé à tout ! Quelle idée de génie ! Les Mages pouvaient s’en donner à cœur joie, leur terrain se régénérait automatiquement !

— Bon, je suppose qu’on est au point sur notre tactique de combat, dit Judith. Rentrons, nous devons préparer nos affaires pour demain. Rendez-vous à neuf heures dans le bureau du Capitaine Général pour recevoir nos instructions et le plan de patrouille. Et ne soyez pas en retard, je vous connais. Compris ?

Les deux garçons et Tilda répondirent par un signe de tête. Judith s’éloigna vers la sortie du terrain, suivie de près par ses trois coéquipiers et amis. Chris et Yvan se séparèrent de Tilda aux portes de la tour blanche. L’hôpital dans lequel elle travaillait se trouvait dans un bâtiment juste à côté de celle-ci.

— Bon, hé bien, à demain neuf heures alors, les garçons. Soyez en forme demain ! dit Tilda avec un sourire.
— À demain, répondirent les deux compères.

Les deux jeunes hommes se dirigèrent vers l’intérieur de la tour. L’immense hall d’entrée faisait penser à une grande place un jour de marché. Des gens y tenaient des échoppes remplies de produits colorés aux parfums délicieux. Les serviteurs venaient y faire leurs courses afin de préparer le repas de leurs employeurs, les mères de famille venaient y rencontrer leurs amies, quand elles n’étaient pas à leur travail. Tous les Mages, de manière générale, aimaient y flâner, afin de s’acheter diverses choses, telles que de la nourriture, des boissons, des vêtements,les marchands étaient des personnes qui avaient voulu devenir Mages, mais qui avaient été recalées à l’examen d’entrée de l’école de la Guilde. Ils avaient quelques pouvoirs magiques, mais rien en comparaison de ce que certains Mages diplômés de la Guilde pouvaient faire. Mais qu’à cela ne tienne, ce monde était en équilibre stable, chacun connaissait son rang et son statut, ainsi que ses rôles. Et leur monde était en paix. Au centre de l’immense hall se trouvait un immense panneau sculpté, entouré de statues de Mages du passé et aux lettres gravées dans la pierre, relevées par de délicates feuilles d’or. Chris et Yvan connaissaient cet endroit, le cœur historique de la Guilde. Chaque jeune passant par l’école de la Guilde devait venir ici et apprendre le texte par cœur, le texte de la Grande Charte. Cette Charte constituait le code d’honneur de la Guilde et rassemblait les règles et les préceptes à respecter.

Les Mages vivent entre eux et ne s’occupent pas des affaires extérieures à la Guilde, excepté en cas de guerre.

Les patrouilles de Mages peuvent être constituées de membre de différentes divisions, avec autorisation préalable des capitaines concernés.

Le capitaine d’une division dispose de tous les droits, excepté de justice en cas de crime de sang. Dans ce cas, il doit en référer à la division Oméga.

Chaque membre de division s’engage à appliquer les décisions prises par le Capitaine-Commandant.

Les combats entre divisions sont interdits, excepté sur les terrains d’entraînement.

Chaque division s’engage à gérer son argent de façon transparente et judicieuse.

Chaque division s’engage à être toujours prête en cas d’attaque soudaine.

Si un humain est surpris par une patrouille sur le territoire d’Utopia, cette patrouille s’engage à le ramener à la Guilde où il sera pris en charge par les autorités compétentes. Tout manquement à cette règle est punissable.

Chaque patrouille se doit d’être accompagnée d’un membre de la division Alpha. Ce médecin pourra intervenir en cas de blessure.

Toute personne venant à ne pas respecter une de ces règles est automatiquement condamnée et sera jugée en fonction de la gravité de son manquement.

— La Grande Charte, s’exclama Yvan. Tu te souviens, Chris ?
— Pour sûr que je me souviens. J’avais un mal fou à retenir par cœur les différentes règles.
— Et tu te souviens de notre vieux prof ? Il en a eu, de la patience avec nous… Mais j’aimais bien quand il racontait l’origine du texte.
— Oui, avec sa voix bizarre. Il parlait toujours dans son nez. « Le rebelle Balenga fut écrasé par notre armée, mais au prix de nombreuses vies sacrifiées. Dès lors, nous avons adopté la Grande Charte comme code de conduite, pour que de tels événements ne se reproduisent plus jamais. Nous l’avons tous signée, et un jour, ce sera à votre tour de la signer ! » dit Chris en imitant la voix étrange de son vieux professeur.
— Ha ha ha ! Tu l’imites toujours aussi bien ! dit Yvan en riant. N’empêche, j’aurais aimé que mes parents puissent être là le jour où j’ai signé ce texte…
— Yvan, ils sont morts… Je sais que tu as du mal avec ça, mais tu dois te faire une raison.
— Ils ne sont pas morts, ils ont disparu ! Ce n’est pas la même chose. Mais un jour, je les retrouverai, Chris, j’en ai fait le serment.
— Je sais. Mais ne te laisse pas ronger par ça, tu dois avancer. Et tu sais que Judith, Tilda et moi serons là pour te soutenir. Et ton capitaine aussi, d’ailleurs. Nicolas Portulaca est un homme de confiance, parle-lui aussi si tu en ressens le besoin. Il n’est pas là que pour boire un verre avec ses soldats.
— Merci, Chris. C’est important de savoir que je peux compter sur vous.
— Je te laisse, je vais préparer mes affaires. Rendez-vous demain !

Tandis que Chris s’éloignait, Yvan restait devant le texte, essayant de retrouver sa signature parmi toutes celles présentes. Chose utile, à chaque fois qu’un Mage mourait, sa signature disparaissait, pour laisser la place aux nouveaux diplômés. Comme si le contrat qui liait un Mage et la Guilde était rompu après la mort. Il cherchait désespérément le nom de ses parents, pour se prouver qu’ils n’étaient pas morts. Mais à chaque fois, devant le nombre incroyable de signatures, il abandonnait.

— Père, mère, un jour, je vous retrouverai… murmura-t-il, avant de se lancer à la conquête des escaliers menant aux quartiers de la division Mu, où il allait devoir préparer ses affaires pour partir en patrouille le lendemain. Une nouvelle expérience, se dit-il. Cela promet d’être enrichissant !

Chapitre 3

Préparation et confessions

Tour de la pureté blanche, quartiers de la division Lambda, en début de soirée.

Chris préparait ses affaires pour partir en mission de patrouille. Sa chambre était relativement petite, les murs étaient décorés avec goût et dans des couleurs chaleureuses de tons jaune, orange et ocre. Son lit, duquel ses pieds dépassaient souvent la nuit du fait de sa grande taille, était couvert d’un tas de vêtements et d’objets divers. Et il ne pouvait emmener avec lui qu’un petit sac, afin de voyager léger.

— Bon, comment vais-je faire pour faire rentrer tout ça, moi ? se demanda-t-il.
— Commence par virer tous ces vêtements et prends juste une tenue de rechange, nous ne partons pas quinze jours ! lui répondit une voix dans son dos.
— Judith ! Tu m’as fait peur ! Et je te signale qu’on frappe avant d’entrer !
— Pourquoi ? Je ne peux même plus rentrer dans la chambre de mon ami, je dois demander la permission ?
— Évidemment ! Et si j’avais été nu ?
— Je te rappelle qu’on se connaît depuis plus de vingt ans. Je t’ai déjà vu tout nu, ce n’est pas une fois de plus qui va changer grand-chose.
— La dernière fois, j’avais huit ans, ce n’est pas la même chose aujourd’hui…

Cette dernière phrase passa dans l’oreille de Judith pour ressortir aussitôt par l’autre oreille. Elle ne l’écoutait déjà plus et s’était avancée dans la chambre, jetant un regard lointain par la fenêtre.

— Judith ? demanda Chris, inquiet d’un silence si soudain de la part de son amie.
— Tu n’es pas effrayé par cette mission, Chris ? Je veux dire… C’est tout nouveau pour nous. D’habitude, les patrouilles sont composées de Mages expérimentés et de jeunes diplômés comme nous, pourquoi ont-ils choisi de ne mettre que des jeunes cette fois-ci ?
— Je n’en sais rien, mais ce que je sais c’est que nous avons fait nos preuves, nous sommes de bons guerriers et nous manipulons bien la magie. Et pour répondre à ta première question, oui j’ai une petite appréhension, comme avant toutes les premières fois. J’ai surtout hâte d’être demain.

Il y eut un long silence, inhabituel chez Judith. Plus le temps passait, plus son regard semblait lointain, absent, pensif. Chris se demandait ce qui pouvait bien se passer dans la tête de son amie.

— Je suis inquiète pour Yvan… Il a l’air distant, et triste par moments. Avant, c’était léger, mais là cela se voit de plus en plus souvent et de plus en plus fort. Il ne t’a rien dit de particulier ? Entre hommes, on aime se dire plus de choses, non ? Il a peut-être plus de pudeur envers moi qui suis une jeune femme.
— Certes, on parle beaucoup… Mais il ne me dit rien de particulier non plus. Mais si ça peut te rassurer, je suis du même avis que toi, il ne va pas très bien…

Chris se rappela ensuite la discussion quelques heures plus tôt, dans le grand hall de la tour. C’était peut-être lié au mal-être de son ami, qui sait ?

— Mais maintenant que tu le dis, il y a peut-être une raison à tout cela. Il devient de plus en plus obsédé par la recherche de ses parents.
— Mais, Chris, ses parents sont morts ! dit Judith d’une voix étouffée.
— Techniquement, ils ne sont pas morts, ils sont recensés comme ayant disparu, ce n’est pas vraiment la même chose…
— Mort ou disparu, c’est une question de termes… Depuis le temps, ils sont sûrement décédés.
— Je suis de ton avis, Judith. Mais tant qu’Yvan n’en aura pas la preuve, il ne pourra pas avancer dans la vie. Je lui ai dit que nous étions là, toi, Tilda et moi, ainsi que son capitaine. Mais j’ai l’impression d’avoir mis un emplâtre sur une jambe de bois.
— Tu as eu raison de le faire, nous ne saurons pas faire grand-chose de plus pour lui. Peut-être que son capitaine trouvera les mots justes. Du moins, je l’espère.

Sortant de sa contemplation distraite du paysage par la fenêtre, Judith retrouva son tempérament habituel, franc et direct.

— Sur ce, dit-elle, je te laisse te débattre avec ton casse-tête de sac de voyage. Ne le remplis pas trop, je ne porterai rien pour toi, tu es prévenu ! Je retourne dans ma chambre. Et évite de lire trop tard le soir, si tu n’es pas en forme demain matin ou que tu es en retard, tu vas le sentir passer ! Bonne soirée !
— Merci, tu es trop aimable, répondit-il avec une pointe de sarcasme. Je t’aime aussi tu sais, chère amie…

Mais cette dernière phrase ne fut pas entendue par Judith, qui avait déjà quitté la chambre et le couloir. Chris resta un moment dans ses pensées, oubliant pour un moment son tracas de sac de voyage. Il se surprit à parler seul.

— Je t’aime aussi tu sais, chère amie… Pourquoi ai-je rajouté « chère amie » ? Cela fait un bon moment que je ne la considère plus vraiment comme une amie. Peut-être que son ton direct et tranchant est une façon de me dire de continuer mes efforts envers elle, qui sait. Enfin bon, on verra.

Et Chris savait qu’il aurait du mal à fermer l’œil cette nuit, bien trop occupé à penser à autre chose, ou plutôt à quelqu’un.

*

Tour de la pureté blanche, quartiers de la division Mu, un étage plus haut, au même moment.

Yvan se trouvait dans sa chambre, dans des tons neutres, un peu de beige, de gris et de vert pâle aux murs. Il adorait sa chambre, malgré sa petite taille. Ce lieu était pour lui un lieu de repos, mais avant tout un lieu de méditation. Lorsqu’il avait trop de choses en tête, ou qu’il devait penser à trop de choses en même temps, il aimait venir dans cette pièce et se poser, reprendre un peu son souffle et réorganiser ses pensées. Son sac de voyage était fait, impeccablement rangé et très fonctionnel. Il n’avait pas pris de tenue de rechange, se disant que, dans le pire des cas, il pourrait demander à Judith de l’arroser avec un de ses sortilèges d’eau, et le tour serait joué. Il avait surtout fait son sac afin de penser à autre chose, mais aussitôt fini, il repensait à sa discussion quelques heures plus tôt avec Chris. Il aurait dû se sentir soulagé de savoir qu’il pouvait trouver du réconfort auprès de ses amis. Mais cela ne le soulageait pas, au contraire. Il ne voulait pas embêter ses proches avec ses histoires, et regrettait d’avoir mêlé Chris à tout cela. C’est alors qu’un bruit l’arracha à ses pensées. Quelqu’un frappait à la porte.

— Entrez, dit-il.

Un homme portant une cape bleu ciel apparut. Yvan reconnut tout de suite son capitaine, Nicolas Portulaca.

— Capitaine, dit-il un peu surpris. En quoi puis-je vous aider ?
— Je vois que tu es déjà prêt à partir, Yvan. Quelle efficacité ! Moi, lors de ma première patrouille, je n’avais pas su faire mon sac à l’avance, tellement j’hésitais pour choisir ce que j’allais mettre dedans. Tu penses être bien équipé ?
— Je le pense, oui. Merci de votre intérêt.
— Je ne suis pas venu que pour te complimenter sur ton efficacité, Yvan. J’ai entendu dire que tu étais un peu tourmenté ces derniers temps. Est-ce vrai ?

Yvan savait que c’était inutile de mentir à son capitaine. Il avait déjà essayé, mais l’homme était un véritable détecteur à mensonges.

— Il est vrai que je suis un peu tracassé, capitaine. Mes parents me manquent… Et je veux les retrouver.
— Je sais, Yvan, je sais. Mais ne te torture pas avec ça. Tu dois avancer, tes parents auraient voulu que tu progresses sur le chemin de ta vie, j’en suis certain. Ne cours pas après les morts… ou les disparus. Occupe-toi des vivants, et de ceux qui tiennent à toi. Nous tenons à toi, tes amis, tes camarades au sein de la division, moi y compris. Evite de te torturer, d’accord ?
— D’accord, monsieur. Je vous remercie, vos paroles me font chaud au cœur.
— Ce ne sont pas que des paroles, Yvan. Ce sont de vraies pensées qui, je l’espère, te soulageront. Je viendrai te saluer demain avant ton départ. D’ici là, dors bien. Tu auras besoin de toute ton énergie pour ta mission. Surtout que c’est une première fois pour toi. Tu n’es pas inquiet ?
— Pas tellement, répondit le jeune homme. Je suis plutôt enthousiaste, c’est une découverte pour moi. J’ai hâte.
— Parfait, alors. Je te recommanderais tout de même d’être prudent, surtout lorsque tu iras vers le Nord. Toutes les terres de notre territoire ne sont pas aussi sécurisées que la zone de notre tour.
— Merci du conseil, capitaine. Et merci de votre soutien, je l’apprécie. Vraiment, dit-il avec un sourire en coin.
— Je suis ravi que tu le prennes ainsi, mon garçon. Je te souhaite une bonne soirée et une bonne nuit.
— Merci, capitaine, vous pareillement.
— Merci, dit l’homme en sortant et en refermant la porte derrière lui.

Yvan se coucha dans son lit et regarda par la fenêtre, d’un regard absent. Il avait été apaisé par les mots de son capitaine, et cela lui réchauffait vraiment le cœur de se sentir soutenu. Oui, il passerait une bonne nuit de repos, du sommeil du juste, se disait-il.

*

Section de soins permanents de l’hôpital de la tour blanche, division Alpha, début de soirée.

Tilda aimait se retrouver seule en soirée. Non pas qu’elle n’aimait pas discuter avec les autres membres de sa division, mais elle aimait la compagnie de ses patients, et surtout elle aimait se sentir utile. Et elle n’était pas dupe : beaucoup dans sa division étaient jaloux de son talent et de sa promotion rapide à la division Alpha. En effet, elle avait manifesté depuis son entrée à l’école des novices de la Guilde un véritable don pour les sortilèges de soin. En revanche, elle n’était pas très douée pour les autres sorts d’attaque ou de défense. Son affectation aux troupes de soin des soldats paraissait être une évidence pour elle et pour les directeurs des écoles. Elle pensait être bien accueillie au début, mais peu de gens lui parlaient, étonnés de voir une adolescente de seulement quatorze ans entrer dans une division de la Guilde. Beaucoup la prenaient pour une gamine, sans savoir qu’elle était d’une redoutable intelligence et d’une incroyable efficacité sur le terrain. Sa capitaine, Arielle Curaqua, l’avait rapidement repérée comme sortant du lot et l’avait prise sous son aile, en faisant son assistante personnelle, ce qui augmenta la jalousie de certains, et en calma d’autres. La capitaine lui avait appris quelques techniques de soin supplémentaires, ce qui avait fait de Tilda une personne incontournable dans le domaine médical.

Occupée à soigner un Mage qui s’était blessé en faisant exploser sa propre boule de feu dans ses mains (il y en avait certains qui n’étaient pas doués, quand même !), elle ne remarqua pas la présence derrière elle, qui l’observait. Affairée dans les bandages et les sorts de désinfection, elle ne l’entendit pas se rapprocher d’elle. Elle sursauta quand une main lui agrippa l’épaule. Elle reconnut le visage de l’intrus, et sa frayeur disparut.

— Jack, je peux savoir ce que tu fais ici, à cette heure ?! demanda-t-elle avec autorité.

Jack était un petit homme aux cheveux gris poisseux, et des joues grosses comme celles d’un hamster qui avait fait des réserves. Ou d’un écureuil difforme, au choix. Dès l’arrivée de Tilda dans la division, il avait fait partie de ses plus farouches adversaires.

— Tiens donc, tu prends la liberté de venir soigner tes malades seule, sans personne pour te surveiller, fillette ? lui cracha-t-il au visage.
—