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Nelson Roger Cram vit, depuis quelque temps déjà, sur le pilote automatique. Son entrevue d’un beau matin de juillet sonne le glas de son inertie, il voit alors son destin basculer en croisant le regard d’une femme pas comme les autres, Lyuba Clement. La présence de cette idéaliste slave, âme hypersensible aux rayures profondes, n’est cependant pas hasardeuse. Que réserve-t-elle à cet homme et sa fille ? Jusqu’où les entraînera-t-elle ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Dans
Les rayures du zèbre,
ChrisTo Balh mêle la réalité des relations humaines à la fiction fantastique. Il couche sur le papier ce qui, pour lui, résume mieux l’être humain : l'amour et la violence.
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Seitenzahl: 196
Veröffentlichungsjahr: 2022
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ChrisTo Balh
Les rayures du zèbre
Roman
© Lys Bleu Éditions – ChrisTo Balh
ISBN : 979-10-377-6583-3
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Vous ne savez jamais quand votre vie bascule,
parfois il suffit de lever les yeux.
Brest, le jeudi 15 juillet 2021, 7 h 30
Un jour comme un autre, un réveil de plus. Nelson se lève comme chaque matin, comme chaque semaine. Dans 2 h 45, il sera foudroyé.
Nelson enlève son t-shirt vert Santa Cruz rapporté d’un voyage en Californie, allume la radio pour écouter les auditeurs en colère déverser leur haine de la France postcovid et se glisse sous la douche. Il s’assied à la table de la cuisine, boit comme chaque matin un thé vert à la menthe en mangeant des tartines de pain grillé. Comme chaque matin, il consulte ses applis préférées sur son smartphone. À 8 h 00 tapante, il quitte sa maison bourgeoise du quartier de Recouvrance, le plafond est bas et le tonnerre de Brest gronde au-dessus de la mer. Dans 2 h 15, il sera foudroyé.
Après quinze minutes de voiture, Nelson arrive à son agence en plein cœur de la ville. Son bureau est élégant, spacieux avec vue sur le port de plaisance et la rade. Nelson à l’air triste, vidé d’énergie, ses collègues de travail ne s’inquiètent pas, les vacances arrivent bientôt pour le patron et lui feront du bien. Nelson regarde son agenda, une montagne de travail à régler pour demain. Il est déjà en vacances normalement, mais la crise de la Covid et la reprise économique qui frémit l’obligent à revenir gérer sa boîte de communication. Il faut solder les dossiers avant de prendre quelques jours de vacances.
Café à la main, il ne remarque même pas son entrevue de 10 h 00 sur son agenda, un entretien placé par son assistante avant de partir en congé, comme un cadeau de départ avec une inconnue. Nelson prend son téléphone pour le décaler à son retour de vacances, quand il aura les idées claires et les sens en éveil. Il veut juste clôturer ses dossiers et filer en vacances. Une alerte Teams sonne sur son PC pour le prévenir de sa première réunion de la matinée, Nelson repose son téléphone.
À 10 h 00, on tape à sa porte pour le prévenir que son rdv est arrivé. Nelson se lève, traverse le couloir et passe un œil dans la salle pour voir à qui il allait faire semblant de parler. Il aperçoit une crinière et un masque noir, il rentre dans le bureau, salue la personne en face sans la regarder vraiment. Après un échange de politesse, Nelson lui pose une question, la réponse fuse, Nelson est foudroyé pour la première fois.
Un courant électrique lui parcourt le corps de la tête aux pieds. Il lève le menton et ses yeux percutent le regard mutin de la femme assise en face de lui. Il devine son sourire derrière son masque. Nelson se redresse sur son siège et enchaîne les questions, rapides, précises sur ses expériences, ses valeurs, sa vision du travail. Au bout de dix minutes, la femme en face de lui le foudroiera une seconde fois. Nelson n’a déjà plus vraiment de souvenir de cet entretien, il ne se souvient que d’une chose, il n’avait pas ressenti cette chaleur lui traverser le corps depuis bien longtemps.
Nelson reconduit cette femme jusqu’à la porte et en s’asseyant à son bureau, il sait déjà que quelque chose a changé en lui. Il se rend compte qu’il ne connaît même pas son nom. Il reprend son CV, Lyuba Clement est entrée dans sa vie.
Lyuba Clement a 31 ou 32 ans, ça dépend des jours, entre dans son bain. Elle n’en a pas pris depuis 2 ans pour sauver la planète. Elle allume des bougies, rajoute des bâtons d’encens et lance le Back to Black d’Amy Winehouse dans sa salle de bain minuscule. Lyuba enchaîne les petits boulots depuis beaucoup trop longtemps. Demain, elle a un nouveau rdv pour un nouveau boulot de plus. Elle a derrière elle des années d’hésitations professionnelles. Elle a décidé de s’en sortir, de remonter la pente. Elle est arrivée à Brest sans trop savoir comment, il fallait quitter sa région parisienne toxique pour revivre au bout de la terre, un vrai choc de culture iodé.
Lyuba enlève la buée de la vitre de sa salle de bain, elle laisse apparaître les traits tirés de son visage fatigué et un regard de fauve. Elle enfile son t-shirt des « Sex Pistols - never mind the bollocks ». Elle étale sa crème de nuit sur le visage, ouvre son meuble de salle de bain et aperçoit la brosse à dents de son ancien amant. Elle la jette à la poubelle d’un geste de rage suivi d’un fuck de son doigt tatoué.
Après avoir joué du piano pendant une heure sans mettre la sourdine pour emmerder les voisins, elle décide de ranger un peu son appartement. Lyuba peint, joue du piano, écrit de la poésie. Elle sait tout faire et parfois tout en même temps. Elle a toujours vécu en marge, dans sa famille, à l’école ou en amitié. Elle n’a vraiment jamais compris pourquoi elle ressent toute cette différence, Miss Clement jouit d’une personnalité atypique, magnétique et solaire.
Son parcours est plus que chaotique, à la frontière du borderline. Des parents aimants mais qui ne savent pas trop comment élever cet enfant et délèguent beaucoup de choses. Un système scolaire inadapté et des fréquentations douteuses. Lyuba traînait avec ses animateurs au centre de loisirs car elle s’ennuyait avec les camarades de son âge. Elle discutait avec ses professeurs car elle ne savait pas forcément quoi dire à ses potes de lycée. Pas les mêmes centres d’intérêt, pas les mêmes besoins. Les envies d’ailleurs l’ont entraînée dans des endroits dont certains ne sont jamais revenus. Lyuba est une survivante, son extraordinaire instinct de survie l’a menée jusqu’à ce mois de juillet.
En posant ses valises en Finistère, elle ne fuit pas vraiment, elle suit son intuition. Elle a atterri ici comme par magie et la ville l’a accaparée tout de suite. Les ondes sont plutôt bonnes et les mauvaises sont balayées par le vent du Ponant. Lorsqu’elle se couche ce mercredi 14 juillet au soir dans son petit appartement du Cours Dajot, un concert bat son plein sur le port de Brest et demain sera une bonne journée, si elle veut bien s’en rendre compte.
Elle se lève vers 9 h 00, putain de réveil à la con qui ne se met jamais en route quand on en a besoin. Elle saute dans son jean bleu, enfile son t-shirt camouflage qui laisse apparaître son épaule dénudée. Elle attache ses cheveux avant de prendre son café rallongé du matin. Un détour par la salle de bain où elle décide de laisser ses cheveux libres pour cet entretien dont elle se fout un peu, un job de plus, une galère de plus. Lyuba fait des ménages le matin, des courses le midi pour les vieux, tout en travaillant sur l’ouverture de son magasin de photographie l’après-midi. Quand elle a le temps le week-end, elle mixe dans des clubs jusqu’au bout de la nuit.
En s’installant dans cette salle de recrutement, elle remplit un formulaire de plus tout en déposant son CV sur le bureau de l’homme qui doit prendre place en face d’elle. Un homme qu’elle imagine déjà car elle ne peut faire autrement., elle le devine blasé, en costume sombre, bien rasé et suffisant. L’homme s’assied devant elle sans presque la regarder. Il est à l’opposé de ce qu’elle pensait. Son sweat la fait rire, ses tatouages l’intrigue et dans cette salle à la déco vintage, elle le foudroie deux fois en dix minutes.
En rentrant dans son appartement, elle se fait un thé vert à la menthe et branche son ordinateur. Elle lance du Matt Houston sur sa playlist de chansons pourries. Un mail est déjà arrivé sur sa boîte. Elle le lit en travers, certaine de son contenu négatif. Ça ne peut pas être positif, comment peut-on lui faire confiance ? Après la troisième lecture, elle laisse échapper pour la première fois depuis longtemps un large sourire sur son visage pâle. Le mail est rempli de positivité, de confiance et d’espoir. Elle est invitée dès le lendemain pour étudier les termes de son contrat.
Nelson a 42 ans, veuf et père d’une fille de 15 ans. Depuis le décès de son épouse, voilà 7 ans, Nelson vit par procuration. Il vit à travers les bons et les mauvais moments de sa fille Leslie. Sa vie consiste à l’élever et gérer sa société de communication, créée voilà 11 ans et qui survit tant bien que mal à la pandémie. Finis les relations sentimentales, certaines passions et les voyages. Il le sait mais a décidé de mettre sa vie entre parenthèses le temps de l’éducation de sa fille chérie.
Il s’est donné une date butoir ou il pourra enfin revivre. Il a décidé de mettre sa vie affective en stand-by pour le bien-être de sa fille. Il est conscient du sacrifice mais comme tous les gens de peu talent, il se doit d’être organisé et concentré pour réussir alors il a trouvé ce moyen, comme un autre en tout cas c’est le sien et pour l’instant cela semble lui convenir.
Tous ses proches lui conseillent de revivre, de passer à autre chose pour son bien et celui de sa fille mais lui n’a pas le courage alors il refuse de lâcher prise pour l’instant, il contrôle tout et garde tout pour lui. Les moments de bonheur avec sa fille sont les plus intenses qui soient, les moments de cafards sont traversés à deux. La vie de Nelson est organisée, millimétrée, le fun n’a plus sa place depuis quelque temps déjà. Mais il semble heureux ainsi, il trouve dans son travail la convivialité et la reconnaissance dont il se dit avoir besoin. Les jours défilent et les sourires disparaissent au fil de temps.
La Covid-19 est venue stopper le plein essor de son agence de communication. Les budgets se sont faits plus rares et les prix plus tirés. Les résultats rendent les dividendes légers mais l’ambiance est restée bonne et les projets à court et moyen terme intéressants. L’avenir semble de nouveau ensoleillé après des mois de trauma. Nelson a repoussé ses vacances de deux jours pour solder ses dossiers et partir en vacances l’esprit tranquille avec sa fille. Une montagne de dossiers à remplir, une réunion et quelques entretiens à expédier, rien de bien original, rien qui ne semble devoir bouleverser sa vie. Cette pause de trois semaines lui fera du bien après de longs mois de travail intense et de stress à gérer sans laisser transparaître quoi que ce soit à l’équipe. Tout contrôler, toujours, tout le temps.
Après avoir été licencié d’une grosse boîte de com' à Paris, Nelson a recommencé tout seul dans un local de vingt mètres carrés, il était commercial, secrétaire-comptable, il gérait la communication et l’informatique. À force de travail, son équipe a grossi. Il a d’abord recruté Gérard pour gérer la com', puis Béatrice à l’informatique, Stefan au commercial, Nolwenn à la comptabilité puis Tyfen à la formation et la qualité, etc.
Il est temps de lancer la dernière réunion de l’année, toute l’équipe est autour de la table dans la salle de réunion. Chacun a sa place, bien définie en fonction des affinités et des exigences. Une entreprise est un petit hémicycle, avec ses courants et ses influences. Gérard est sûr de lui, il surfe chaque samedi à la Torche, blond au teint hâlé par le soleil. Une maîtrise des méandres des logiciels informatiques et une bonne écoute font de lui un bras droit bienveillant et à l’affût. Si vous demandez à Nolwenn ce qu’elle pense de Gérard, elle ne vous en dira pas du bien. Son passage sur le canapé blanc du Dgé fut agréable mais furtif. Il lui est impossible de s’engager, ses histoires d’amour ne s’écrivent pas dans le temps, elles sont courtes, compactes et passionnelles. Gérard veut une vie d’aventures. Tyfen et Béatrice ne vous diront pas le contraire.
Nolwenn est une vraie DAF, rigoureuse quand elle n’est pas pointilleuse. Grande, cheveu châtain et peau couleur ébène, un œil perçant et un franc-parler en font un bras gauche solide et rassurant.
Nelson s’appuie beaucoup sur Béatrice, la responsable informatique de l’agence. Brune aux cheveux courts, elle est une vraie working girl qui jongle entre ses deux enfants, sa mère en Ehpad et sa passion pour le paddle-tennis. Elle a touché à tout dans l’agence, elle a une vision globale de la société, quand le patron n’est pas là, c’est vers elle que tout le monde se tourne. Son duo avec Gérard fait parfois trembler les murs mais du chaos ressort en général des idées originales et inédites.
Stefan est le commercial par excellence, un fin limier amoureux de la prospection directe. Dans son emploi du temps, le vendredi s’arrête à midi au restaurant, le reste est une affaire de digestifs, de contrats signés sur un coin de table et de stage de renouvellement de points.
Le secret de Nelson est de faire fonctionner tout ce beau monde, de mettre de l’huile dans les rouages parfois bien grippés. Nelson est plus psychologue qu’autre chose. Il sait qu’il ne peut pas tout contrôler, il ne fait qu’orienter les uns et les autres dans la même direction, la sienne. Chaque mois une réunion regroupe toute l’équipe où chacun défend ses intérêts. Une réunion comme celle-ci se passe toujours de la même façon. Nelson donne le tempo et le cahier des charges. Tyfen a déjà adressé à l’équipe le thème de la réunion en mettant en avant le travail de chacun afin de booster tous les participants.
Le commercial pense toujours que sans lui rien ne se passe, qu’il est la pompe qui amorce tout le reste. Cela lui donne le droit de parler plus fort et avant tout le monde. Il souffre évidemment d’un sentiment de supériorité allié à une pointe d’aigreur envers ceux qui restent le cul sur leurs chaises au bureau toute la journée.
Le service com’ pense que sans lui point de salut, c’est le showroom de l’agence. L’appui du service informatique crée alors une bête à deux têtes, certains d’être alors la pierre angulaire de tout le système. Un double ego qui les rend parfois insupportables vis-à-vis du reste de l’équipe.
Les services comptabilité et qualité sont plus discrets lors des échanges, leurs réponses sont brèves et précises. Il y a ce que l’on veut faire et ce que l’on peut faire et ils n’en démordent jamais. Les tensions sont parfois vives entre d’un côté les créatifs, offensifs et un peu suffisants et de l’autre les objectifs, sûrs de leurs tableaux Excel, qui de temps en temps prennent un malin plaisir à énerver leurs collègues car souvent excédés par le comportement du camp d’en face.
Au milieu de ce champ de bataille se trouve Nelson, arbitre attentif des arguments de chacun. Il adore cette lutte interne, signe pour lui de motivation et d’investissement. Ce qui lui plaît le plus, c’est que lui aussi sait qu’à la fin des fins, après avoir fait le tri entre le possible et le probable, entre la jalousie et la mauvaise foi, c’est lui qui décidera et personne d’autre. Il le sait, tout le monde le sait et cela met fin au débat à chaque fois. Sa décision est toujours juste et argumentée, il ne s’est pas souvent trompé. Nelson est un homme de repères, chacune de ses réunions se finit inlassablement au restaurant à midi, toujours la même cantine évidemment.
Le temps est venu d’expédier enfin le rendez-vous inattendu de son assistante. Nelson profite de ce moment comme d’un break entre deux réunions. Sans conviction mais un peu intrigué par cette chevelure bouclée entrevue dans la salle d’entretien.
Ce matin, Nelson s’est habillé à la cool, sweat made in Brest, pantalon 7/8 qui laisse ressortir ses tatouages aux chevilles. C’est un peu les vacances au bureau, un air de friday wear à la veille des vacances. L’ambiance est bonne car les projets sont porteurs et la fête de demain soir au restaurant promet d’être belle.
Nelson s’assied au bureau et sa vie va basculer…
Vendredi 16 juillet 2021, 7 h 30…
Le réveil de Nelson sonne, il se lève après une nuit perturbée par des pensées qui n’étaient pour une fois pas négatives. Il est de bonne humeur ce matin, y a des matins comme ça, se dit-il presque surpris par ce surplus d’énergie inattendu, encore quelques heures et il sera en vacances pour trois longues semaines.
Pour une fois, il choisit de la musique en rentrant dans la salle de bain, il se rase et se parfume pour la première fois depuis des lustres. Il n’a pas faim, décide de se contenter d’un thé et de faire un jeûne intermittent après ces mois à petit-déjeuner comme un robot. Il sait que la journée qui se présente sera longue, il a eu du mal à se concentrer tout l’après-midi d’hier, son cerveau papillonnait en permanence. Sa séance de méditation n’a servi à rien, la pleine conscience n’a pas accepté l’invitation, trop perturbé sans vraiment comprendre pourquoi. Il n’a bouclé qu’une partie de ses dossiers et va devoir cravacher pour cela toute la journée. Malgré tout, il a bloqué plus d’une heure pour son entretien de 11 h 30.
Demain, il va récupérer sa fille partie en vacances chez ses beaux-parents depuis huit jours, il se surprend à ne pas avoir pensé à elle depuis 24 heures. Cette pensée lui fait du bien, le soulage, cette journée s’annonce légère. Sur son appli musicale, il cherche un morceau doux et inspirant, Joao Gilberto l’inspire, va pour Ipanema se dit-il. Les rues sont calmes et la météo est ensoleillée. En arrivant au bureau, il se gare à sa place habituelle et pour une fois salue tout son monde. Lors de la réunion du matin, tous les membres du personnel sont invités au repas du soir. Il entre dans son bureau sans refermer la porte et se jette sur sa pile de dossiers en retard. À 11 h 30, sa future collaboratrice frappe à la porte du bureau. Il se lève pour la faire entrer et referme la porte derrière lui. Ils décident mutuellement d’enlever leur masque pour se découvrir pleinement. Il la dévisage furtivement, intrigué par ce visage à la Camille Cottin.
Ils passent une heure ensemble à parler de son futur poste, il n’a aucun doute sur les capacités de sa nouvelle employée. Il fonctionne au feeling et son ressenti lui dit qu’il peut lui faire confiance. Il lui propose de travailler en direct pendant les trois semaines qui viennent, malgré ses vacances, elle pourra le déranger deux fois par jour si besoin. C’est sa façon de faire, il donne sa confiance si son intuition est bonne. En fin d’entretien, il l’invite au repas du soir, à venir boire un verre au moins pour faire connaissance avec son équipe dans un cadre plus convivial et intimiste. Elle accepte avec un large sourire. Il la conduit jusqu’à la porte de l’agence, il ne veut pas trop la voir partir mais apprécie la voir s’en aller. Il est intrigué de savoir si elle va venir ce soir. Nelson est surpris de ce qu’il ressent en sa présence, une sorte de connexion difficile à décrire.
Comme tout bon patron de la Breizh Tech, Nelson dispose d’une salle de méditation qui jouxte son bureau. La salle est toute blanche et capitonnée, à l’abri de l’agitation extérieure. Il enfile son casque de réalité virtuelle afin de se plonger rapidement dans sa relaxation mentale. Mais très rapidement ses pensées s’éparpillent, il n’arrive pas à bloquer son esprit sur une fleur, un arbre ou tout autre point censé apaiser son mental. Il enlève son casque, perturbé et mal à l’aise mais l’envie est trop forte et il le replace doucement sur ses yeux. La tentation est telle que pour une fois, il se laisse aller complètement et son imaginaire se mue en songe fantasmé. C’est la première fois depuis la perte de son épouse qu’il se laisse aller à un tel moment d’égarement sensuel. Nelson se retrouve plongé dans une salle de bain. Une femme, aux cheveux mi-longs attachés, sort de la baignoire simplement couverte d’un kimono satiné. Nelson ne porte qu’une serviette blanche qui a du mal à cacher ses intentions. Elle fait un pas vers lui, ouvre le peignoir qui tombe à ses pieds et laisse apparaître un corps nu et offert à son regard. Nelson porte sa main droite au niveau de la joue de cette femme inconnue, il accompagne une mèche de cheveux châtains derrière son oreille puis descend doucement le long de son cou et de son épaule moite. Le chignon de sa partenaire met en valeur sa nuque sensuelle qu’il lèche du bout des doigts. Il se glisse derrière sa partenaire, leurs regards se croisent dans le miroir embué de la salle de bain. Ses mains descendent vers sa poitrine, il effleure les tétons gorgés de désir et l’embrasse du bout des lèvres. Elle passe ses mains dans son dos, détache la serviette qui le ceinture et touche du bout des doigts son sexe renaissant. Caresses après caresses, les deux amants se retrouvent alors face à face dans la moiteur de la salle d’eau, Nelson visualise enfin le regard vert et intense, un visage subtilement dessiné, des lèvres fines et sensuelles. Il la porte sur le meuble et la pénètre dans un gémissement profond et doux. Aucune parole n’est échangée, cette scène de sexe dans une atmosphère suave n’est ponctuée que des gémissements des deux amants. L’intensité des regards suffit à prendre conscience du plaisir partagé. Les yeux dans les yeux, les deux amants s’abandonnent.
La sonnerie en mode vibreur de son téléphone tire Nelson de son expérience troublante. Il est seul dans cette salle immaculée et prend conscience de la rêverie incorporelle qu’il vient de vivre. Il enlève son casque virtuel et se retrouve seul sur son fauteuil relaxant, à la fois perturbé de ne pas avoir reconnu Lyuba dans son songe virtuel mais heureux de cette résurrection tant espérée.
Vendredi 16 juillet 2021, 10 h 00…
Ce matin-là, Lyuba branche deux réveils pour être certaine de ne pas être en retard. En se réveillant bien avant la sonnerie, elle est un peu anxieuse à cause de cet entretien. Elle se demande ce qui va bien pouvoir faire capoter ce deal soudain. Elle décide de s’habiller presque normalement, sans chichis, grâce à ce qu’il y a de plus élégant dans sa mini garde-robe.