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Dans l’œuvre immense qui nous reste d’Aristote (385 env.-322 av. J.-C.), ou qui est publiée sous son nom, on peut distinguer trois ensembles : les écrits qui relèvent directement de la connaissance scientifique (dont
De l’âme) ; ceux qui traitent plutôt des conduites humaines (dont l’
Éthique à Nicomaque) : vie de la cité, principes de l’action, et ce que nous pourrions appeler culture (ainsi le théâtre, objet principal de la
Poétique) ; enfin les écrits qui s’intéressent non aux contenus en tant que tels mais à leurs modes d’expression.
Une fiche de lecture spécialement conçue pour le numérique, pour tout savoir sur Organon d'Aristote
Chaque fiche de lecture présente une œuvre clé de la littérature ou de la pensée. Cette présentation est couplée avec un article de synthèse sur l’auteur de l’œuvre.
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Seitenzahl: 118
Veröffentlichungsjahr: 2015
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ISBN : 9782852296145
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Ce volume présente des notices sur des œuvres clés de la littérature ou de la pensée autour d’un thème, ici Organon, Aristote (Les Fiches de lecture d'Universalis).
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Dans l’œuvre immense qui nous reste d’Aristote (385 env.-322 av. J.-C.), ou qui est publiée sous son nom, on peut distinguer trois ensembles : les écrits qui relèvent directement de la connaissance scientifique (dont De l’âme) ; ceux qui traitent plutôt des conduites humaines (dont l’Éthique à Nicomaque) : vie de la cité, principes de l’action, et ce que nous pourrions appeler culture (ainsi le théâtre, objet principal de la Poétique) ; enfin les écrits qui s’intéressent non aux contenus en tant que tels mais à leurs modes d’expression. Cette répartition est grossière : par exemple l’éloquence peut être envisagée comme technique de persuasion ; ou du point de vue d’une éthique de l’orateur ; ou enfin dans le cadre d’une science – que ce soit la science des passions ou bien celle de l’argumentation. En outre, l’étude formelle du raisonnement peut être considérée comme un préalable à toute connaissance : c’est le sens du titre d’Organon, qui signifie « instrument ». La tradition rassemble ainsi des textes en réalité très divers, écrits à des époques différentes et qui ne sont probablement pas tous de la main du Stagirite ; tels quels, ils n’en constituent pas moins l’acte de naissance de la logique – autre titre sous lequel on les a réunis.
Le premier des six traités de l’Organon : les Catégories (Katègoriai) se présente comme une analyse du langage (ordonner en classes tout ce qui peut être prédiqué d’un sujet), mais aussi, par voie de conséquence, comme une investigation des sens de l’être (la substance, ousia, et ses attributs). De l’interprétation (Peri hermeneias) passe à une étude de la proposition, préalable aux Analytiques (Analutica), qui étudient la proposition démonstrative. Les Premiers Analytiques ayant permis de dégager la structure formelle de toute démonstration (le syllogisme), le traité majeur, les Seconds Analytiques, explore ce qui apparaît comme la condition d’une véritable science, assurée de ses modes de déduction : la vérité des prémisses du syllogisme. La connaissance scientifique se définit comme connaissance des causes, son approche formelle vise à distinguer le démontrable (théorèmes) et l’indémontrable (axiomes), ce qui relève de l’enchaînement causal et ce qui relève des principes premiers.
Les deux derniers traités, les Topiques (Topika) et les Réfutations sophistiques (Sophistikoi elenchoi), se rapprochent plus de la Rhétorique, c’est-à-dire d’une étude de l’argumentation en situation : la maîtrise du syllogisme y apparaît plutôt comme un art, une technique qui permet de triompher d’un adversaire. Il y a ainsi des « lieux » du dialogue (topoï, d’où le titre de Topiques), des réserves d’arguments dont la connaissance ordonnée permet de réfuter plus aisément son contradicteur : les Réfutations sophistiques étudient en particulier les faiblesses des arguments employés par les sophistes.
On n’a pas manqué de se demander, au regard de l’évolution de la logique (qui ne recourt plus aujourd’hui aux langues dites naturelles mais à des écritures mathématiques), si la logique aristotélicienne pouvait être qualifiée de « formelle ». Les linguistes de leur côté ont souligné le lien étroit des catégories d’Aristote avec les « catégories fondamentales de la langue dans laquelle il pense » (Benveniste), c’est-à-dire le grec ancien, caractérisé notamment par un usage très extensif du verbe « être » (il sert également de copule) et des substantifs qui en sont dérivés. Mais la linguistique comprise comme science tente à son tour de formaliser les langues – et même l’ensemble des langues qu’elle étudie : tel est l’enjeu de la « grammaire universelle » chez Chomsky. Quant à l’effort d’Aristote pour isoler la dimension proprement logique du raisonnement (abstraction faite du « sens »), sa nature « opératoire » ou logistique, outre qu’il a été déterminant dans l’histoire de la pensée (le long conflit au Moyen Âge entre dialecticiens et théologiens en porte témoignage), y compris parfois par la méconnaissance et le rejet (les Modernes identifiant l’aristotélisme à un « galimatias » – avant de retrouver, notamment dans la tradition analytique, son souci de rigueur déductive), il apparaît bien aux yeux de l’historien comme authentiquement créateur : Aristote est « le premier qui ait écrit mathématiquement en dehors des mathématiques », a pu écrire Leibniz – c’est-à-dire le premier à avoir pris au sérieux les « négligences de forme » comme cause de l’erreur.
François TRÉMOLIÈRES
Aristote n’est sans doute pas le philosophe le plus séduisant de l’Antiquité, celui auquel on se reporte le plus volontiers quand on veut remonter aux sources de ce que les Grecs ont nommé la « sagesse ». Mais nul n’a marqué autant que lui la philosophie et la science des siècles suivants, peut-être même – et cela jusqu’à nos jours inclusivement – la civilisation qu’il est convenu d’appeler « occidentale ». Son principal titre de gloire a été de fonder la logique, c’est-à-dire cet ensemble de règles contraignantes qui permettent de faire du discours (logos) l’usage le plus cohérent et, par là, le plus efficace. Plus préoccupé que Platon de définir et d’administrer le langage, il a su en faire l’instrument (organon) d’une pensée capable de se dominer elle-même et, par là, d’imposer sa loi à la nature. Penseur encyclopédique, il a su à la fois reconnaître la spécificité des différents savoirs, au progrès desquels il a lui-même contribué, et l’unité proprement humaine du discours qu’ils mettent en œuvre. Esprit organisateur et classificateur, il a énoncé les catégories qui structurent le langage et la pensée de l’homme.
On pourra estimer, au cours des siècles, que le système aristotélicien, devenu au Moyen Âge l’armature de toutes les scolastiques chrétiennes et musulmanes, a figé le progrès de la pensée. Mais il reste que ce système, en dépit de ses imperfections, a été le modèle de toute systématisation future. Et l’on n’a pas assez remarqué que, dans un domaine essentiel et souvent mal compris de sa philosophie, la métaphysique, Aristote a lui-même démontré l’impossibilité dernière de ramener l’être à l’unité, reconnaissant ainsi les limites de tout système, le caractère inachevé de toute synthèse et l’irréductibilité de la pensée de l’être à la pure et simple administration, scientifique et technique de ce qu’il y a en lui d’objectivable.
Aristote est né en 385 ou 384 à Stagire, petite ville de Macédoine, non loin de l’actuel mont Athos. Son père Nicomaque était le médecin du roi Amyntas II de Macédoine (le père de Philippe) et descendait lui-même d’une famille de médecins. Cette origine explique peut-être l’intérêt d’Aristote pour la biologie et, en tout cas, ses relations avec la cour de Macédoine.
En 367 ou 366, Aristote va faire ses études à Athènes et devient à l’Académie l’un des plus brillants disciples de Platon. Sorte de répétiteur ou d’assistant, réputé pour sa passion de la lecture (Platon l’appelait, peut-être avec quelque condescendance, « le liseur »), il collabore un peu plus tard à l’enseignement et publie lui-même des dialogues comme le Gryllos ou De la rhétorique (dirigé contre l’école rivale d’Isocrate), qui développent, en les exagérant même parfois (comme dans Eudème ou De l’âme), des thèses platoniciennes.
En 348, Platon meurt. Il a désigné comme successeur à la tête de l’école son neveu Speusippe. Dès l’Antiquité, des biographes malveillants ont attribué à ce choix de Platon la véritable cause de la rupture d’Aristote avec l’Académie. Aristote en gardera du moins une rancune solide contre Speusippe. La même année, peut-être sur l’instigation de son maître, Aristote avait été envoyé avec Xénocrate et Théophraste à Assos, en Troade, où il devint le conseiller politique et l’ami du tyran Hermias d’Atarnée. Parallèlement, Aristote ouvre une école, où il affirme déjà son originalité. Il y entreprend, entre autres, des recherches biologiques. En 345-344, Aristote, peut-être sur l’invitation de Théophraste, se rend dans l’île voisine de Lesbos, à Mytilène.
En 343-342, il est appelé à Pella, à la cour du roi Philippe de Macédoine, qui lui confie l’éducation de son fils Alexandre. C’est là qu’Aristote apprend la fin tragique d’Hermias, tombé en 341 entre les mains des Perses, et lui consacre un hymne. Du préceptorat lui-même et du séjour à Pella, qui s’étendent sur huit années, on ne sait pratiquement rien.
À la mort de Philippe (335-334), Alexandre monte sur le trône. Aristote retourne à Athènes, où il fonde le Lycée, ou Peripatos (sorte de péristyle où l’on se promenait en discutant), école rivale de l’Académie. Il y enseigne pendant douze ans.
En 323, Alexandre meurt au cours d’une expédition en Asie. Une réaction antimacédonienne se produit à Athènes. Aristote, en réalité suspect de macédonisme, est menacé d’un procès d’impiété. On lui reproche officiellement d’avoir « immortalisé » un mortel, Hermias, en lui dédiant un hymne. Aristote aime mieux quitter Athènes que d’encourir le sort de Socrate : il ne veut pas, dit-il, donner aux Athéniens l’occasion de « commettre un nouveau crime contre la philosophie ». Il se réfugie à Chalcis, dans l’île d’Eubée, pays d’origine de sa mère. C’est là qu’il mourra l’année suivante, à l’âge de soixante-trois ans.
Les écrits d’Aristote se divisent en deux groupes : d’une part, des œuvres publiées par Aristote, mais aujourd’hui perdues ; d’autre part, des œuvres qui n’ont pas été publiées par Aristote et n’étaient même pas destinées à la publication, mais qui ont été recueillies et conservées.
Le premier groupe d’écrits fait partie des « œuvres exotériques », expression employée par Aristote lui-même pour désigner des œuvres destinées à un public plus large que celui du Lycée. Ces œuvres ont été perdues, comme beaucoup d’œuvres antiques, dans les premiers siècles de l’ère chrétienne. Nous en connaissons néanmoins les titres par les listes conservées des œuvres d’Aristote, et nous avons une idée de leur contenu par les citations ou les imitations qu’en font les auteurs anciens postérieurs.
Ces œuvres sont, par leur forme littéraire, comparables à celles de Platon, et plusieurs d’entre elles semblent avoir été des dialogues. C’est sans aucun doute à elles que faisait allusion Cicéron lorsqu’il célébrait la « suavité » du style d’Aristote et en comparait le cours à un « fleuve d’or » (Topiques, I, 3 ; Acad., II, 38, 119). Mais leur contenu, qu’on travaille à reconstituer depuis un siècle, n’est pas sans poser des problèmes aux historiens. Car cet « Aristote perdu » n’a rien d’« aristotélicien » au sens de l’aristotélisme des œuvres conservées ; il développe des thèmes platoniciens et renchérit même parfois sur son maître (ainsi, dans le dialogue Eudème ou De l’âme, il compare les rapports de l’âme et du corps à une union contre nature, semblable au supplice que les pirates tyrrhéniens infligeaient à leurs prisonniers en les enchaînant vivants à un cadavre). Constatant qu’Aristote, dans ses œuvres non destinées à la publication, critique ses anciens amis platoniciens, on a pu se demander s’il ne professait pas deux vérités : l’une « exotérique », destinée au grand public, l’autre « ésotérique », réservée aux étudiants du Lycée. Mais on pense généralement aujourd’hui que ces œuvres littéraires sont aussi des œuvres de jeunesse, écrites à une époque où Aristote était encore membre de l’Académie, donc encore sous l’influence platonicienne. On s’est même servi de ces fragments pour déterminer ce que l’on croit être le point de départ de l’évolution d’Aristote.
Les principales de ces œuvres perdues sont : Eudème ou De l’âme (dans la tradition du Phédon de Platon), De la philosophie (sorte d’écrit programmatique, où se laissent déjà reconnaître certains thèmes de la Métaphysique), le Protreptique (exhortation à la vie philosophique), Gryllos ou De la rhétorique (contre Isocrate), De la justice (où s’annoncent certains thèmes de la Politique), De la bonne naissance, un Banquet, etc.
Le second groupe est constitué par une masse de manuscrits d’Aristote, représentant pour la plus grande part, semble-t-il, les notes dont il se servait pour professer ses cours au Lycée. Ces œuvres sont dites ésotériques ou, mieux, acroamatiques (c’est-à-dire destinées à l’enseignement oral). Dès l’Antiquité se répandit un récit des plus romanesques sur la façon dont ces manuscrits sont parvenus à la postérité (Plutarque, Vie de Sylla, 26 ; Strabon, XIII, 1, 54). Les manuscrits d’Aristote et de Théophraste auraient été légués par ce dernier à son ancien condisciple Nélée ; les héritiers de Nélée, gens ignorants, les auraient enfouis dans une cave de Skepsis pour les soustraire à l’avidité bibliophilique des rois de Pergame ; longtemps après, au Ier siècle avant J.-C., leurs descendants les auraient vendus à prix d’or au péripatéticien Apellicon de Téos, qui les emporta à Athènes. Finalement, au cours de la guerre contre Mithridate, Sylla s’empara de la bibliothèque d’Apellicon, qu’il transporta à Rome, où elle fut achetée par le grammairien Tyrannion : c’est de lui que le dernier scolarque (chef d’école) du Lycée, Andronicos de Rhodes, acquit les copies qui lui permirent de publier, vers 60 avant J.-C., la première édition des œuvres acroamatiques d’Aristote et de Théophraste.