Pourquoi moi ? - Mélanie Roblin - E-Book

Pourquoi moi ? E-Book

Mélanie Roblin

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Beschreibung

« J’ai passé 8 ans d’errance de diagnostic pour une maladie génétique rare. Mais mon combat n’est pas terminé, je suis toujours dans l’attente de diagnostics et de traitements efficaces. Je continuerai à faire mon possible pour que l’on parle de la maladie et du handicap, pour que la bienveillance fleurisse un peu partout. Et pour que le plus grand nombre prenne conscience qu’être malade n’est pas un choix.

 
AVENEL Christophe, écrivain public
« Mélanie Roblin relate les faits de façon assez brute et quand elle parle de ses souffrances physiques et morales, elle s’épanche mais ne s’appesantit jamais. »
« Au fil du texte, on perçoit le regard de plus en plus distancié qu’elle porte sur la médecine, sur l’entourage, sur les amours et sur elle-même. Cet effet de lecture rend le texte attachant. »



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Mélanie ROBLIN

POURQUOIMOI ?

Avant-propos

Tous ceux qui connaissent la maladie de près ou de loin, parce qu’ils sont concernés eux-mêmes ou parce qu’un proche l’est, savent, tout ce qu’elle peut impacter dans nosvies.

Mais qu’en est-il de notre entourage ? Collègues, amis, famille…

Pas toujours facile de se sentir compris ou de ne pas essuyer de reproches. C’est pourtant tellement important.

Je vous partage dans ce livre, à travers mon parcours, l’impact de la maladie, de l’incompréhension de mon entourage et du corps médical, sur moi et sur ma vie sociale.

J’aspire, en me dévoilant à vous, à mettre à jour la complexité d’exister avec des différences, des problématiques, afin d’aider à s’accepter, à s’affirmer, ou encore à mieux appréhender la situation d’un proche.

À tous, bienvenue dans mon intimité.

À Sylvie,1963 – 2018Maladie de Charcot

Le chamboulement

Je m’appelle Mélanie, j’ai 37 ans et je viens de passer 8 ans d’errance de diagnostic et bien plus de symptômes en tous genres.

J’ai eu l’impression de ne plus me connaitre, de devenir transparente, de devenir folle. Je me suis heurtée à l’incompréhension de mon entourage, au manque de considération du milieu médical, aux galères administratives, et financières. J’ai été forcée à puiser au plus profond de moi pour trouver coute que coute une force que je ne soupçonnais pas. J’ai aussi beaucoup appris sur moi. Je m’explique ;

En 2008, je quitte temporairement le milieu médical, où j’exerçais le métier d’aide-soignante dans un hôpital près de Versailles, pour vivre avec mon compagnon Léo à une vingtaine de kilomètres de là.

N’ayant pu obtenir une mutation, j’ai cherché du travail hors milieu médical pour trouver un poste dans un grand magasin de jouets de la banlieue parisienne.

Léo travaillait dans cette enseigne de magasin quand nous nous sommes rencontrés. Il m’amusait, car il était toujours dépassé et hors délai. Cette année-là, pour être dans les temps pour l’inventaire, il est retourné au travail les nuits précédentes pour rattraper le retard se cachant des caméras et sans rien dire à ses collègues.

En parallèle je me forme par correspondance au métier de secrétaire médicale. Cela me permet de garder un pied dans le domaine qui me plait sans avoir l’impression de perdre mon temps dans ce magasin.

À cette époque, j’ai plein de projets en tête. Après cet emménagement à deux, nous pensions acheter quelques années plus tard, évoluer dans nos métiers respectifs et nous étions désireux d’avoir des enfants.

Classiques comme projets… malgré tout, pas si simple car la vie en a décidé autrement.

Depuis l’adolescence, je vis avec des douleurs d’estomac, des RGO (Reflux gastro-œsophagien) et des problèmes de transit. Cela m’a valu une gastroscopie à l’âge de 15 ans, qui a montré plusieurs petits ulcères à l’estomac. Je me sais donc fragile à ce niveau-là et y suis habituée, mais ces derniers temps ils prennent une autre dimension avec l’apparition de nausées soudaines et très fortes, d’aérophagie, de maux de tête et de malaises. Mes collègues m’alertent régulièrement pour m’informer que j’ai le teint jaune ou blanc selon les moments. Ils m’attribuent le surnom de Caméléon.

Léo m’accompagne à des rendez-vous avec un gastro-entérologue et des médecins généralistes qui ne trouveront aucune anomalie à part un trouble du nerf vague. Jusqu’à ce jour de janvier 2011 où je suis de repos suite à une grosse journée d’inventaire de quatorze heures. La journée a été chargée, quand mon compagnon rentre du travail le soir, je n’ai exceptionnellement pas fait le repas et nous décidons de nous faire livrer. Je vais me coucher en ayant mal à l’estomac, mais à une intensité qui ne m’était jamais arrivée jusque-là. Je pense à ce moment-là que c’est à cause du fastfood livré. Je me relève afin de ne pas réveiller Léo et m’installe avec ma petite chienne Fidji sur le canapé. Normalement rien de tel pour me détendre et trouver du réconfort. Une heure plus tard, la douleur est de plus en plus intense, je ne sais plus quoi faire et réveille Léo qui veut que l’on se rende aux urgences. Quatre heures plus tard et après quelques examens, à 5h du matin, je suis hospitalisée pour passer un scanner à 9h. Celui-ci révèle une cholécystite. Ma vésicule est remplie de lithiases et je dois être opéré dans la journée en urgence. Je préviens ma mère, mon employeur et Léo qui m’annonce qu’il va partir travailler et que je l’appelle le lendemain pour lui donner des nouvelles. Heureusement ma mère trouve le moyen de venir à l’hôpital grâce à mon frère avant que je ne descende au bloc. Je reste une bonne semaine hospitalisée, car la vésicule avait en réalité éclaté et il y a eu plusieurs complications pendant la cholécystectomie (ablation de la vésicule biliaire).

Léo vient me rendre visite trois fois. Deux fois, car je lui ai demandé de m’apporter des affaires et une fois pour m’apporter un courrier de mon employeur qui me colle un blâme pour non-présentation de mon arrêt de travail sous 48 heures. Il ne savait apparemment pas qu’en cas d’hospitalisation nous n’acquérons tous ces documents qu’à notre sortie. Ce jour venu, c’est Jacques le père de Léo qui est venu me chercher, car je vais en convalescence chez ses parents. Ils ont été d’une grande gentillesse avec moi, comme toujours, mais trois semaines plus tard, je fais part à Léo de mon souhait de rentrer à la maison. Il trouvait des raisons pour que je reste chez ses parents. Comme « j’ai une gastro » ou encore « je n’ai pas pensé à faire le ménage depuis ton absence et tu es allergique aux poussières ». Je rentre finalement chez moi 7 semaines après ma sortie de l’hôpital.

J’avais beaucoup de difficultés à m’occuper des tâches quotidiennes et Léo n’a pas plus participé qu’à l’accoutumée. Il a mangé fastfood pendant un mois.

Il faut dire que l’opération se réalise en célioscopie, il y a donc plusieurs petites ouvertures, cinq pour ce qui me concerne et la plus grosse étant au niveau du nombril. Je cicatrise difficilement et avec les fils qui tirent j’avais des difficultés à porter, à marcher ou même à me tenir droite.

À la reprise du travail, ce n’était pas plus simple. Je ne devais toujours pas porter de charges lourdes ayant encore des fils et j’avais des difficultés pour m’habiller convenablement étant donné que les jeans ou les pantalons me serraient le ventre.

Avant cette intervention chirurgicale, j’avais réussi à quitter le secteur caisse pour travailler dans les rayons. Je m’occupais des jeux de société et des articles de fêtes et anniversaires. Ce qui me convenait trèsbien.

Nous faisons le point sur les restrictions demandées par le chirurgien et par la médecine du travail.

Mais mon employeur ne le voit pas de cette façon.

Il m’attribue des taches différentes, mais en me demandant de porter des charges lourdes. Suite à une demande d’entretien pour refaire le point, je découvre que mon secteur a été attribué à quelqu’un d’autre et que je suis rebasculée sur le secteur caisse. Une sorte de punition pour mon arrêt maladie. J’ai également eu quelques remarques comme celle-ci « j’ai un ami qui a eu cette opération et il n’a pas eu un arrêt aussi long que toi, et il n’est pas resté une semaine à l’hôpital ». Comme je n’ai pas à me justifier auprès de lui, je ne relève pas. Ma santé ne regarde quemoi.

Le subissement

Peu de temps après cette ablation de la vésicule, mes symptômes deviennent invivables. Mon quotidien change d’un coup. Ou plutôt notre quotidien, car quand on est malade notre vie est impactée, mais celle de notre compagnon l’est forcément aussi.

Je n’arrive plus à m’alimenter sans subir de fortes douleurs abdominales et me précipiter aux toilettes, j’ai toujours ces maux d’estomac, une dyspepsie, les malaises, etc. …

Je ne peux plus manger le matin afin de pouvoir aller travailler, idem le midi pour assurer l’après-midi au travail, je peux manger le soir à la maison quand je suis enfin tranquille, mais je n’ai plus de soirées. Je ne peux plus sortir, manger en extérieur, ni même manger avant de sortir. Je suis contrainte de rester chez moi. Bien sûr ce n’est pas une vie pour moi, mais je dois penser à Léo qui, lui, n’ayant pas de symptômes, accepte encore moins que moi ces contraintes et me le reproche.

Un soir de juillet, jour de l’anniversaire de sa sœur, nous sommes invités à une grande soirée pour l’occasion. Ces moments attendus d’ordinaire deviennent pour moi une grosse contrainte. Après m’être longtemps pris la tête, je décide, pour Léo, d’accepter de m’y rendre. En plus de ne pas manger le matin et le midi, je dois encore patienter après ma journée de travail. C’est le cas pour chaque invitation, évènements personnels ou professionnels. Il m’est difficile de voir tout le monde manger, des sandwiches aux merguez mayo ketchup, de voir toutes ces belles salades sur la table sans oublier le gâteau et l’odeur du BBQ qui m’ouvre encore plus l’appétit. Vers minuit, je demande à Léo pour rentrer lui expliquant que j’ai vraiment faim, que le temps de rentrer, de manger et les douleurs qui vont s’en suivre, il sera déjà tard et que je travaille le lendemain matin. Malheureusement il ne s’est pas mis à ma place et a refusé sans oublier son lot de reproches à mon égard. Je n’y suis pourtant pour rien et subis bien plus que lui tout ça. J’accepte de moins en moins son attitude et ses paroles.

J’aurais tellement aimé qu’il se mette à ma place, qu’il me comprenne… Cependant je ne peux m’empêcher de culpabiliser de tout compliquer et d’être en accord avec lui, secrètement, quand il me dit que je suis devenue chiante.

Je prends rendez-vous avec un gastro-entérologue pour essayer de comprendre ce qu’il m’arrive. Celui-ci me dit que c’est psychologique, que j’ai surement mal accepté l’opération qui n’était pas prévue, car réalisée en urgence.

Je n’y crois pas du tout. En tout cas ça n’arrange rien avec Léo qui me dit que je cherche les problèmes puisque je n’ai rien et que je pourrais faire un effort.

Tout est compliqué, les journées de travail, les sorties, mais aussi les vacances. Fin août nous partons deux semaines dans le sud comme d’habitude dans un camping.

Nous choisissons toujours une semaine à un endroit et l’autre ailleurs pas très loin pour découvrir de nouveaux lieux. Nous suivons la cote. Je ne connaissais pas le sud avant de connaitre Léo, quel plaisir d’être au camping, le soleil, la mer, les restaurants grâce aux tickets du CE, les balades du soir en mangeant une glace, en appréciant, en visitant, en refaisant le monde et en prévoyant nos futurs projets pour l’année à venir.

Cette année les choses sont différentes. Nous partons oui, mais rien n’a de saveur pourmoi.

J’essaie de passer des vacances normales, ou au moins faire semblant, car je fais comme le reste de l’année pour les repas, je ne mange pas le matin ni le midi pour profiter de ma journée. Les tentations sont grandes, Léo ne se prive pas et c’est bien normal. Je mange le soir sans excès en espérant moins souffrir, mais comme d’habitude ce n’est pas le cas. Léo me fait des reproches, parce que nous n’allons plus au restaurant, alors je m’y suis rendue presque les larmes aux yeux. A peine je commence à manger, que les douleurs arrivent avant la fin de l’entrée et j’ai passé mon temps dans les toilettes du restaurant, Léo s’énervait dans les SMS que je recevais. Le retour au camping, je l’ai passé allongé sur la banquette arrière. Il m’a aidé à marcher, il prenait de mes nouvelles, mais il m’en voulait. Pour ne pas gâcher toutes nos vacances, j’ai fini par prendre avant chaque repas un cocktail de médicaments antispasmodiques et antidiarrhéique en combo. Pas moins de 4 médicaments pour être bien certaine d’être enfin tranquille. Énorme bêtise que je ne conseille pas. Autre reproche, j’ai perdu trop de poids. Forcément difficile de faire autrement. Soit je travaille soit je mange… D’après lui c’est moche comme ça, je suis trop maigre. Surement vrai, mais blessant. Que puis-je y faire ?! Au retour des vacances, le quotidien reprend et rien ne change entre moi et Léo. Des choses n’allaient déjà pas dans notre couple. Je m’occupais intégralement de notre logement seule (ménage, repas, liste de courses, linge, papiers…) en plus de mon emploi à temps plein et de ma formation. Pendant ce temps en dehors de son emploi, lui, profitait de jouer sur PC, prenait le temps de voir des amis, dormait jusqu’à 15h me laissant son bol du matin sur la table, son courrier par terre en tas à garder et tas à jeter. Je trouvais qu’il profitait de notre foyer quand moi j’y travaillais et réclamais souvent qu’il allège un peu ma charge en prenant sa part. Nous avions déjà dès le début de notre relation des conversations à ce sujet. Avec ces difficultés supplémentaires, cela me coutait encore plus. À chaque discussion il mettait ma santé en avant, c’était devenu sa seule réponse, à tout. Ça tournait en rond. Les reproches ne pouvaient avoir l’effet d’un électrochoc puisque je n’y pouvais rien. À l’inverse le sentiment d’être « moche », chiante, nulle, prenait bien sa place.

Vous l’aurez deviné, nous avons fini par nous séparer. Son argument à notre séparation auprès de nos voisins et connaissances… « avec sa santé, je n’en pouvais plus ».

Il est normal de ne pas accepter un changement brutal et vouloir que les choses redeviennent comme avant. Il est normal pour un proche de nous en vouloir de changer leurs habitudes, ils s’inquiètent et ne veulent tellement pas nous savoir malades qu’ils rejettent l’idée, il faut du temps pour accepter. Surtout si les médecins ne trouvent pas la ou les raisons, il est normal aussi de se conforter dans cette idée qui convient plus que la réalité. Nous sommes les seuls à savoir, à ressentir et il n’est pas toujours facile d’exprimer une douleur ou un ressenti comme il est compréhensif de ne pas comprendre une douleur quand on ne l’a soi-même jamais connue. Mais que c’est difficile de souffrir, de ne pas s’angoisser, d’encaisser des reproches, de constater que nous compliquons tout sans le vouloir, sans rien pouvoir y faire, de vouloir comprendre, d’entamer un combat pour savoir ce qui nous arrive, en étant seul, sans écoute, sans soutien, sans quelqu’un pour nous entendre, pour nous croire.

Nouveau départ

Octobre 2011, je repars àzéro.

J’ai réussi ma formation avec 16 de moyenne, je pense donc exercer dans ce domaine afin de ne pas perdre le bénéfice de ce diplôme. J’ai aussi démissionné et nous avons rendu notre logement avecLéo.

Ma grand-mère m’héberge avec ma petite chienne. Pas facile de tout recommencer et seule, mais je me sens soulagée. J’ai le sentiment que ce sera plus simple de subir et gérer mon quotidien sans avoir à penser pour deux. Sans culpabiliser, sans que l’on me compare à d’autres femmes avec qui tout est plus facile, de vivre et de faire des projets.