Sous les sables d'Afghanistan - Jack Chaboud - E-Book

Sous les sables d'Afghanistan E-Book

Jack Chaboud

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Beschreibung

L'incroyable récit des aventures du jeune Ayoub, à lire dès 11 ans.

Parce qu'il aime une nomade aux yeux dorés,
parce qu'il veut la revoir au mépris de toute prudence,
parce qu'un lien étrange les unit,
parce que des aventuriers l'entraînent dans leur quête d'un trésor enfoui dans une cité souterraine,
Ayoub affronte une suite d'épreuves hors du temps et du monde, dans l'éblouissement de la rencontre d'extraordinaires femmes immortelles.

Le jeune Afghan viendra-t-il à bout de son périple ? Retrouvera-t-il celle qu'il aime ? Plongez sans attendre dans ce roman jeunesse captivant.

EXTRAIT

– Une fille du vent ! murmura Roya, en pressant la main d’Ayoub.
Un bruit diffus s’insinua dans l’esprit du garçon, se transforma en une rumeur, soudainement couverte par un insoutenable roulement de percussions. Plié en deux par la douleur, Ayoub tenta de seboucher les oreilles. Nour semblait ressentir les mêmes effets. Roya avertit le garçon :
– Les voilà.
Le silence se fit dans la tête d’Ayoub et aussitôt, des profondeurs de la salle, monta cette plainte monocorde que le groupe avait entendue dans la nuit.
– Fermez les yeux ! s’écria Nour, l’apparition des filles du vent est un spectacle que vous ne pourrez soutenir !
Tous obéirent et détournèrent la tête, y compris Roya. Une lumière intense inonda cependant l’obscurité de leurs paupières closes. Ayoub sentit la main de la jeune fille qui cherchait à le rassurer. Il entrouvrit les yeux et se retourna. Un groupe de femmes s’approchait d’eux.

CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE

Le plaisir du texte reste intact, et ce côté oriental teinte d’une touche « Mille et une Nuits » Sous les Sables d’Afghanistan. - Sophie Pilaire, Ricochet

A PROPOS DE L'AUTEUR

Né à Lyon en 1943, Jack Chaboud est diplômé en sciences politiques et en lettres. Après avoir travaillé durant de nombreuses années dans l'industrie pétrolière, il se consacre à l'écriture et à l'édition, tout en s'investissant dans différentes activités associative.

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Couverture

Titre

Copyright

COLLECTION
ROMAN JEUNESSE
1.
Un loup dans la vitre
Philippe de Boissy
2.
Cloche
Clotilde Bernos
3.
Le cri
François David
4.
La promesse du bonhomme de neige
Eugène Trivizas
5.
Chat qui vole
François David
6.
Sous les sables d’Afghanistan
Jack Chaboud
Illustration de la couverture : Stéphane Girel
Tous droits de reproduction, de traduction
et d’adaptation réservés pour tous pays.
© Éditions duJasmin,2004.
4, rue Valiton 92110 Clichy
www.editions-du-jasmin.com
ISBN 978-2-35284-574-4 Avec le soutien du
En souvenir de Mohamed Akram, Sayed Bohaouddine Majrouh, Jean-Pierre Carbonnel.
Pour : Nasser, Maimouna, Fawzia, Hosseini et leurs enfants ; Khaled et Roya Hosseini ; Haroun, Homeira, Gulalaï, Assefy et leurs enfants ; Homayoun Assefy et sa famille ; madame Assia Akram, ses enfants et sa soeur Nadjia ; Assem Akram ; Evelyne et Enayat Rona ; Sha Zaman et Nadjiba Arachosie ; Fahim Youssofzaï ; Nasreen Naorouz ; Homayoun Tandar ; Youssef, Sadjia et « Afghani » ; Dost Mohamad et les blessés soignés à Paris en 1988 ; Zalmen Ali ; Atiq Rahimi ; Roseline Carbonnel et ses enfants ; Roland et Rosen Bezenval ; Cristina L’Homme ; Jean-José Puig, Isabelle d’Alès de Boscaud, Alain Thiollier, Etienne Gilles et tous les autres fondateurs d’Afrane.

1

Le soleil se cachait entre deux hautes vagues de dunes, qu’il incendiait de rouge. Une caravane n’en finissait pas de défiler, au rythme des cris des chameliers qui fusaient d’un nuage de poussière. Le martèlement des sabots tambourinait sur les pierres de l’entrée du caravansérail.
Assis devant son échoppe, maître Hosseini, le bijoutier, souriait à la vue de son apprenti Ayoub, le meilleur des jeunes chenapans qu’il ait formés, mais pas le plus modeste. Le garçon le quitta soudain en toute hâte pour rejoindre ses admirateurs : Daoud, petit et fluet, qui soignait les chevaux d’un éleveur, et Shir Ali, le dodu, qui servait dans « la maison de thé ». Excités par l’irruption de la caravane, ils se plantèrent devant le flot des arrivants.
Les nomades s’installèrent. Des feux s’embrasèrent. Les flammes révélaient les dominantes rouges, jaunes ou noirs, des robes portées par des femmes grandes et belles. Dans le cliquetis de leurs bijoux doucement balancés, deux d’entre elles déroulèrent des tapis aux décors de fleurs. Des pipes à eau sortirent des tuniques. On déchargea les ballots d’étoffes et les couffins. On détacha les jarres de beurre des flancs laineux des chameaux. Bientôt, l’odeur de la viande de mouton cuisant dans le riz imprégna l’air figé de la cour. Ayoub cherchait, dans la troupe des cuisinières, la fine silhouette d’une fille de son âge. Une fille aux yeux dorés.
L’année précédente, elle lui avait offert une orange, avant de s’enfuir dans un éclat de rire. Mais il s’était passé autre chose, dont il n’avait jamais parlé à personne, pas même à son maître respecté. La fille lui avait parlé dans sa tête. Il avait d’abord reconnu son rire léger, puis il avait entendu :
– Tu es comme moi, tu peux écouter les voix de l’intérieur. Elles nous parlent de loin.
Il l’avait alors cherchée des yeux, mais, ne la trouvant pas, il avait tenté de lui répondre de la même façon. Sans autre résultat que de déclencher à nouveau son rire cristallin :
– Pas si vite ! Tu peux entendre, c’est déjà bien. Tu parleras plus tard, quand nous serons réunis. Parce que nous serons réunis. Sois-en certain.
À ce moment là, comme un flot de parasites dans une émission de radio, des paroles indistinctes et le bruit croissant d’un tambour avaient couvert la voix de la fille. Il était demeuré longtemps à attendre d’entrevoir sa silhouette au bord d’une tente, ou d’entendre à nouveau l’appel de sa voix. Mais plus rien n’était venu.
La fille aux yeux dorés n’était pas là. Ayoub abandonna ses amis pour retourner auprès de son maître. Le bijoutier n’avait pas bougé. Le garçon lui demanda :
– Maître, d’où viennent les caravanes ?
– Elles sont issues d’un passé lointain et de cités merveilleuses dont les noms nous font rêver : Loulan, Turfan, ou Taklamakan… Elles viennent du temps où les hommes et les femmes ont commencé à échanger des regards, des paroles, des promesses, des étoffes, et bien sûr… des bijoux.
Maître Hosseini avait prononcé ses derniers mots sur un ton amusé, qui fit baisser le regard de son apprenti. Le vieil artisan pensait à la broche aux pétales de rose qu’Ayoub avait passé des heures à marteler, ciseler et sertir d’une améthyste. Un bijou que l’apprenti tournait et retournait dans sa poche de chemise, depuis que la caravane était arrivée.
Ayoub insista en désignant la cour :
– Et cette caravane ?
– Ceux qui la composent sont libres comme l’air ; ils vont sans hâte, loin des villes et des guerres. Ils forment les maillons d’une chaîne qui les unit à tous leurs semblables du passé et de l’avenir.
Maître Hosseini eut pitié de son élève. Il considéra un moment la silhouette mince et nerveuse de son apprenti, son visage fin au nez légèrement busqué, ses yeux aussi sombres que ses cheveux. Enfin, le vieil homme ajouta :
– Celle que tu attends ne viendra pas. Sa famille a suivi un groupe qui campe cette nuit dans la vallée. Sois patient, elle reviendra l’année prochaine !
Ayoub ébaucha un vague geste d’indifférence. La patience et la douceur n’étaient pas ses points forts. Il répondit soudain :
– Et si j’allais là-bas ?
– Aucun véhicule ne prendra la route de la vallée aujourd’hui, demain ou après-demain.
– Et si je coupe par la montagne ?
– Tu n’y penses pas, Ayoub djan* ! Il faut passer par la cité du diable ! As-tu envie de devenir une âme errante.
– Je n’ai pas peur.
– Voyez-moi ce jeune vantard !
Ils restèrent longtemps sans parler, loin des rumeurs environnantes, jusqu’à ce que la pétarade de son échappement libre annonçât l’arrivée d’un camion. Dans les grincements du changement de vitesses, le véhicule bariolé fit irruption dans la cour. Sa carcasse fatiguée s’arrêta avec peine, ployant sous sa surcharge d’hommes et de marchandises.
Ayoub s’amusa un instant à observer les voyageurs qui descendaient du toit du camion, courbés sous le poids de leurs bagages, dans le balancement de leur turban blanc.
L’apprenti abandonna bien vite ce spectacle. Il traversa la cour et convoqua Daoud et Shir Ali d’un claquement de doigts impérieux.
La découverte des décorations des camions faisait l’objet d’un divertissement de choix pour eux. Ils s’assemblèrent devant le nouveau venu pour admirer les peintures ornant ses flancs. Sur un côté, des versets du Coran s’intercalaient entre la mosquée de Mazâr i Sharîf, des oiseaux multicolores et le minaret de Djâm. Sur l’autre, un train à vapeur comme il y en avait encore en Inde rivalisait avec des fleurs, un combat entre des tanks et des hélicoptères, et un landaï** :
Je me suis faite belle dans mes habits usés,
comme un jardin fleuri dans un village ruiné.
Comme à chaque fois qu’il y avait une telle affluence, on faisait moins attention à eux. La petite bande allait pouvoir s’adonner en cachette à son jeu favori : un bouzkashî***. La compétition les opposait toujours aux trois fils d’Abdul Khan, le « marchand de tout », qui vendait aussi bien de l’essence que des munitions ou du thé.
La partie se jouait au lever du soleil, avec des chevaux que Daoud « empruntait » à l’écurie de son patron. L’arbitre était Youssof, qui ne pouvait pas jouer car il avait eu une main arrachée par une de ces mines en plastique semblables à des jouets, parachutées autrefois dans les campagnes par les hélicoptères soviétiques. Bien entendu, le champion était toujours Ayoub, car Daoud, meilleur cavalier que lui, se sacrifiait souvent pour son chef.
Dès les lueurs hésitantes du jour, arbitre et joueurs se retrouvèrent sur le petit plateau distant de quelques kilomètres du caravansérail. Comme d’habitude, les adultes étaient au courant. Mais seul l’aîné des fils d’Abdul Khan le savait. Le marchand leur passait tous leurs caprices, et s’il y avait un problème, il était toujours prêt à payer.
Daoud sortit les chevaux, aidé de Youssof et Shir Ali. Les fils du commerçant apportèrent des boissons et la masse de sable cousue dans une étoffe matelassée, qu’ils allaient se disputer comme s’il s’agissait de la dépouille utilisée par les champions turkmènes.
Mais ce jour-là, Ayoub joua avec une maladresse incroyable. Plus grave encore, il montra une absence totale d’agressivité. Il fut presque mis à bas de sa monture par le plus frêle de ses adversaires. Il fallut la vitesse et l’audace d’un Daoud libéré de la domination de son chef, pour que le garçon d’écurie vînt souffler au dernier moment la victoire à l’aîné des fils du marchand, à moins de dix mètres de la cible.
Quand ils prirent le chemin du retour, Ayoub sut que ce matin-là il avait perdu de son autorité et de son prestige. Ça le laissait presque indifférent, et, comme s’ils le ressentaient, ses compagnons étaient plus inquiets que méprisants. Shir Ali finit par lui demander :
– Qu’est-ce qu’il y a ? Tu n’étais pas avec nous ce matin !
– C’est vrai, admit Ayoub à contrecœur. Mais venez ce soir derrière le camion, je vous en dirai plus.
Et la petite troupe regagna le caravansérail dans la joie et les rires, sous un soleil complice.
* « Cher Ayoub ». (djan placé à la fin d’un mot signifiecher en dari, langue parlée en Afghanistan.)
** Petit poème pashtou, parlant le plus souvent d’amour et de guerre. Les Pashtou constituent une des plus anciennes populations de l’Afghanistan.
*** « Attrape-chèvre ». C’est un peu le sport national afghan, originaire du nord du pays. Deux équipes de quelques dizaines de cavaliers s’y affrontent sur un espace de plusieurs centaines de mètres de long, pour essayer de prendre la carcasse décapitée d’une chèvre ou d’un veau emplie de son, et de la déposer à l’intérieur d’un cercle tracé à la chaux. Tous les coups sont permis, en particulier les coups de cravache.

2

Après leur journée de travail, les trois garçons se retrouvèrent près du véhicule peint, rejoint par un autre camion dans la journée. Mais au lieu de commenter le match ou de se moquer des fresques naïves du dernier arrivé, Ayoub demanda à ses amis de se rapprocher de lui.
Il leur montra la lune, visible dans le ciel diurne, et leur confia à voix basse la décision qu’il avait prise depuis la veille. Puis il s’éloigna aussitôt sans montrer la satisfaction que lui procuraient leurs mines effarées. Ce soir-là, il allait accomplir la folie dont il venait de se vanter.
Les deux amis du jeune apprenti bijoutier n’eurent guère le temps d’essayer de le faire revenir sur sa décision, car un appel furieux sortit de la maison de thé : «  Shir Ali, espèce de paresseux, veux-tu venir travailler ! »
À l’intérieur, on sortait les tabatières et les chiques de tabac vert, on passait les aiguières, les bassins et les serviettes pour les ablutions avant de se restaurer. Il n’y avait ce soir-là que de la soupe, des beignets de pomme de terre ou d’aubergine, du pain et ce flan à la cardamome qu’adoraient préparer Homaïra et Gulalaï, la femme et la fille du patron. On allait parler des vivants et des morts, de la sécheresse, de la reconstruction du pays meurtri par tant d’années de guerre. Shir Ali comptait aller écouter les adultes, pour filer ensuite raconter à ses amis ce qu’il avait entendu. Leur réunion secrète quotidienne se tenait à une heure tardive dans les écuries, où Daoud les attendait.
Lorsque le soleil disparut, maître Hosseini s’éloigna vers la maison de thé, traversant le caravansérail de son allure lente et élégante de vieux sage. Il allait entamer une de ces interminables parties d’échecs qui l’opposaient à Fahim, un forgeron de ses amis. Ayoub se dirigea alors vers l’échoppe du bijoutier.
Dans un coin de la cour, quelques lueurs s’échappaient de braises rougeoyantes. Sans un regard du côté de l’adolescent, un nomade impassible cousait avec un fil grossier une crevasse dans la corne épaisse de son pied gauche. Ayoub pénétra dans la boutique plongée dans l’obscurité et alla préparer un baluchon, dans lequel il mit un morceau de pain et une gourde, remplie au chaudron contenant la réserve d’eau de la boutique.
Soudain, au dehors, une série de coups de klaxon insistants annoncèrent un visiteur tardif. Dévoré de curiosité, Ayoub sortit et vint se poster dans un angle de la maison de thé. Un homme ouvrit la porte à un pick-up, qui entra à grande vitesse dans la cour. C’était une de ces voitures longues à l’arrière recouvert d’une bâche utilisées par les soldats étrangers, ou bien quelques « commandants » encore puissants dans la région. Le véhicule décrivit une courbe serrée avec assurance pour se garer dans la partie arrière du caravansérail, loin des nomades et des camions. Coulissant en souplesse le long des murs, le garçon s’approcha des arrivants. Deux hommes descendirent, tous deux vêtus à l’afghane : tunique sur un pantalon bouffant, sandales aux pieds. Le plus petit était un Occidental d’une quarantaine d’années. Ses cheveux blonds, couronnant un visage aussi rond que ses lunettes, s’échappaient d’un pakol** rejeté en arrière. La silhouette immobile d’un troisième individu se découpait à l’avant de la voiture. Tandis que les hommes se dirigeaient vers la maison de thé, Ayoub s’avança tout contre leur véhicule, et sans qu’il l’eût touché, il perçut brutalement une sorte d’onde douloureuse qui lui transperça la tête, comme si on lui fouillait l’intérieur du cerveau. Instinctivement il se recula, retourna dans l’ombre du mur et, sans prendre aucune précaution cette fois, il courut vers l’écurie pour y trouver refuge. Mais à mi-chemin, constatant que la douleur l’avait abandonné et que nul ne s’intéressait à lui, sa curiosité fut la plus forte. Il se faufila dans la maison de thé. La fumée, les rires, les conversations l’engloutirent. On parlait beaucoup des talibans*