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Laura a perdu l’usage de ses jambes suite à un accident de voiture. Elle vit recluse dans son appartement depuis cinq ans. Au moment où elle décide d’en finir, Léo débarque en cambrioleur maladroit, mais en sauveteur habile. Deux paumés de la vie en face à face pour recomposer leur existence comme on recolle un vase cassé. Un fauteuil pour deux comme un jeu pour aborder la question du handicap au quotidien. Quand une rencontre impromptue devient le déclic qui change la vie.
Qui ne s’est jamais amusé à se projeter dans un scénario du pire, en se demandant ce qui se passerait si sa vie basculait du jour au lendemain ? Le pire, il est arrivé à une des amies d’Ange Lise. Un accident de voiture, une mauvaise prise en charge, des douleurs chroniques et une paralysie, aggravée par les méandres d’une administration sans pitié pour les personnes handicapées. Cinq ans d’enfermement dans un appartement inadapté et une résilience qui force l’admiration jusqu’à donner envie de lui écrire un texte sans pathos, qui tente de retranscrire ses difficultés au quotidien, mais aussi son indéfectible humour, le meilleur rempart pour lutter contre l’absurde et la fatalité.
Durée de la pièce : environ 1h10
Pièce en trois actes
Acte 1 – 4 scènes
Acte 2 – 4 scènes
Acte 3 – 6 scènes
À PROPOS DE L'AUTEURE
Journaliste depuis plus de vingt ans dans le domaine de la santé et de la culture, Ange Lise écrit en fourmi qui accumule les manuscrits dans les tiroirs, en boulimique qui savoure les mots comme des gâteaux, en naufragée qui compte bien construire un radeau avec ses lignes pour éviter de se noyer trop vite.
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Seitenzahl: 55
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Ange Lise
Un fauteuil pour deux
Comédie en pied
ISBN : 979-10-388-0539-2
Collection : Entr’Actes
ISSN : 2109-8697
Dépôt légal : janvier 2023
© couverture Ex Æquo
© 2023 Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle, réservés pour tous pays
Toute modification interdite
Éditions Ex Æquo
6 rue des Sybilles
88370 Plombières Les Bains
www.editions- exaequo.com
Pour Nabéla
Personnages
Laura : la trentaine, handicapée moteur, un caractère trempé dans l’eau-de-vie et un physique de petit oiseau tombé du nid.
Léo : la trentaine hésitante de ceux qui ne savent pas quel chemin choisir, un peu soupe au lait, mais qui reste bonne pâte.
Scène 1
(Dans le salon de Laura. Il fait nuit. Léo, une cagoule sur la tête, crochète la porte pour s’introduire en douce. Une lampe de poche à la main, il avance dans la pièce et n’aperçoit pas tout de suite Laura, étalée au pied de son fauteuil roulant. Sur la table basse, une bouteille de vin à demi vide et une boîte de somnifères, elle aussi à moitié vide. Léo fait le tour du propriétaire à pas de loup. Il rafle les objets qui lui paraissent intéressants et les plonge dans un grand sac de sport. Il vient finalement buter contre le corps inanimé de Laura.)
LÉO
Merde, c’est quoi ça ?
(Il pointe la lampe de poche sur Laura et réalise assez vite la situation. Il cherche l’interrupteur pour éclairer la pièce. Il reste quelques instants à regarder la jeune femme. Son regard se pose sur les somnifères. Il se précipite sur Laura.)
Madame, réveillez-vous ! Madame, vous m’entendez ?
(Il s’agenouille et la secoue gentiment. Pas de réaction de Laura. Il prend dans ses mains la boîte de somnifères.)
Il y a de quoi dormir longtemps avec ça !
(Il reprend un peu plus fort ses tentatives pour la ramener vers l’autre rive.)
Madame ? Allez, on arrête de jouer… Ouvrez les yeux ! C’est promis, je ne vous volerai rien.
(Laura commence à grommeler comme un dormeur qui ne veut pas sortir du lit.)
Oui, oui, c’est bien… Allez un effort, ce n’est pas le moment de dormir.
(Laura s’agite un peu plus.)
LAURA
(Dans un murmure.)
Fini, c’est fini…
(Léo, à genoux, la prend dans ses bras pour mieux la réveiller.)
LÉO
Mais non, ce n’est pas fini !
(Un temps d’hésitation de l’homme qui ne sait plus quoi dire…)
Ça commence.
(Silence. Laura prend le temps de dessiller ses yeux.)
LAURA
Aaaaah ! Je suis en Enfer ! Le diable porte une cagoule !
(Léo, vexé, enlève sa cagoule.)
LÉO
Mais non, vous n’êtes pas encore en Enfer.
LAURA
Aaahhh ! Dieu est noir !
(Sidération des deux côtés. Léo brise le silence le premier.)
LÉO
Désolé de vous décevoir. Je ne suis pas Dieu et vous n’êtes pas morte.
LAURA
Mais où je suis ?
LÉO
Chez vous apparemment.
LAURA
Mais qu’est-ce que vous faites chez moi ?
(Léo penaud ne répond pas…)
LAURA
Vous faites partie du Samu ?
LÉO
Non, mais je devrais peut-être les appeler…
LAURA
(Comme une petite fille qui veut croire au père Noël.)
Vous êtes mon ange gardien ?
LÉO
Pas tout à fait en fait…
LAURA
J’y crois pas ! Vous étiez en train de me chouraver pendant que j’agonisais !
LÉO
(Pris en faute qui tente de s’excuser.)
Rassurez-vous, pour le moment, je n’ai rien pris de valeur.
LAURA
Je vous remercie ! Trop aimable ! Les bijoux sont dans la chambre. Servez-vous pendant que je récidive.
(Elle tente d’attraper la boîte de somnifères. Léo arrête son geste pour la raisonner.)
LÉO
Non, non, non ! On arrête les bêtises pour ce soir ! Je vous laisse vos bijoux, mais je confisque les somnifères.
(Laura, tout à fait réveillée à présent, commence à perdre patience.)
LAURA
C’est une blague ! Mais vous êtes qui pour m’empêcher d’en finir? Je suis tranquille chez moi. Je ne demande rien à personne et vous débarquez par effraction. Vous me piquez sans remords et après vous voulez m’interdire de mourir ? Espèce de bourreau ! Remettez votre cagoule ! Vous êtes mieux avec.
LÉO
(Piqué au vif.)
Non, mais j’y crois pas. Vous devriez me remercier au lieu de me gueuler dessus. Je viens de vous sauver la vie, je vous signale !
LAURA
Mais je ne vous ai rien demandé, superman ! Je suis chez moi ! Je fais ce que je veux ! Je n’ai pas besoin de la permission d’un voleur à la sauvette. Alors, prenez votre butin et lâchez-moi !
(Léo la prend au mot, se lève et ramasse son sac. Sous les yeux de Laura, il entreprend de remettre en place tous les objets subtilisés. Laura commente avec l’œil de l’inspectrice des travaux finis.)
LAURA
Le chat en porcelaine, à côté du téléphone.
(Léo s’exécute et corrige le tir avec mauvaise foi.)
LÉO
C’est d’un laid ce truc.
LAURA
On a tous les deux mauvais goût alors, parce que pour piquer ça, ou vous êtes aveugle ou vous êtes complètement idiot.
(Léo avale la couleuvre et continue avec minutie. Il pose un bouddha doré au hasard dans la bibliothèque.)
LAURA
Trop bas, le bouddha. L’élévation spirituelle ça commence par une position élevée dans la bibliothèque.
LÉO
(Agacé.)
Vous n’avez qu’à vous lever pour le remettre à sa place.
(Avec cette remarque, Laura vient de prendre conscience pour la première fois depuis son réveil qu’elle est handicapée.)
LAURA
Je ne peux pas, abruti ! Je suis paralysée !
(Léo se tourne vers elle et pose son regard sur le fauteuil roulant. Il capte sa gaffe d’un coup d’œil.)
LAURA
(Retrouvant son mordant.)
Le fauteuil, c’est pas de la déco. Vous comptiez le voler lui aussi ? Là, pour le coup, vous auriez eu raison. Ça coûte une fortune au marché noir.
Scène 2
LÉO
(Se transformant en bon samaritain.)
Vous voulez un coup de main pour vous relever ?
LAURA
Allez, ça y est, le regard de condescendance. Dites-moi, si je vous avais surpris avec votre cagoule de sniper sur la tête, vous m’auriez éliminée ou vous m’auriez proposé de pousser le fauteuil ?
LÉO
(Embarrassé.)
Non, mais je ne tue pas moi. Je vole pour vivre, c’est tout.
LAURA
(Moqueuse.)