A mon ami Tom - Annick Imbou - E-Book

A mon ami Tom E-Book

Annick Imbou

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Beschreibung

Hiro est une mère de deux enfants. Elle vient d'Afrique, et arrive en France pour poursuivre ses études.Mais avec le temps, les difficultés à trouver un emploi en lien avec sa formation, l'ont amené à s'adapter en faisant des petits boulots pour subvenir à ses besoins.Dans sa quête de travail, elle va obtenir un emploi dans un Institut medico-éducatif, qui est en charge des jeunes ayant une déficience intellectuelle et physique. Elle arrive dans cet établissement avec des appréhensions, mais très vite, une amitié va naître entre elle et le jeune, Tom. La souffrance de ces jeunes, leur différence, ne la laisse pas indifférente. Elle comprend au fil du temps que la différence n'est pas exclusivement l'apanage de ces jeunes, mais elle serait plutôt une identité universelle. Car chacun est porteur d'une différence: physique, intellectuelle, identitaire, sociale, économique, sentimentale, etc.L'auteure Annick IMBOU tente à travers l'histoire de Hiro faire comprendre à tous que nous baignons dans un même fleuve qui porte un seul nom: le différence.

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Seitenzahl: 107

Veröffentlichungsjahr: 2021

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Sommaire

Le début de l’aventure

L’Université

La terre de mes ancêtres

Les angoisses d’un père

De la pauvreté à la précarité

Lettre à TOM

Le regard des autres ?

Salle de repos

Regarde cet avion là-bas

Un métier

Reste avec nous

I Le début de l’aventure

Mon premier jour à l’IME

L’aventure commence par une rencontre avec une monitrice-éducatrice quelques jours après mon arrivée à l’IME. C’est au cours de l’échange que j’ai eu ce jour-là alors que j’attendais comme elle le bus, qu’elle m’avoua qu’« il y a beaucoup de demandes, malheureusement il y a très peu de structures qui accueillent des personnes en situation de handicap. Aussi, la France serait en retard par rapport aux autres pays comme le Canada».

Hormis le nombre insuffisant de structures d’accueil, le problème des budgets en constante baisse n’a échappé à personne comme l’ont affirmé les professionnels avec qui je partageais souvent les repas de midi. Malheureusement, ces derniers sont la plupart du temps obligés de s’adapter en permanence.

L’institut médico-éducatif (IME) où j’ai atterri, accueille des enfants handicapés atteints de déficience intellectuelle. Pour me rendre à l’IME, chaque matin, je devais emprunter un premier bus de chez moi, puis le métro, ensuite une autre ligne de métro et enfin un deuxième bus qui m’amenait jusque là-bas. Une fois, sortie du bus, il fallait une minute environ pour atteindre le grand portail en bois de cet établissement. Un premier portail avec code d’accès débouchant sur une première cour ; puis on arrive devant un enclos métallique peint de plusieurs couleurs dont le bleu, le jaune, le rouge, le vert. Là, à ce niveau, il y a un second portail. Une fois traversé ce portail, on accède à une grande cour boisée, fleurie, avec une pelouse verdoyante qui couvre une bonne partie de ce vaste domaine. Tellement spacieux que je le ferai remarquer plus tard à ma collègue, en lui disant qu’on aurait pu construire un autre bâtiment qui pourrait accueillir d’autres jeunes.

Mais elle me rétorqua qu’il n y aurait plus assez d’espace pour les jeux. Cette réponse ne m’avait pas trop convaincue, car j’étais persuadée qu’il y avait assez d’espaces pour le faire. À l’entrée de ce vaste domaine, à gauche, on aperçoit un premier bâtiment appelé semi-internat, dont la construction ne date que de quelques années environ, composé de plusieurs unités nommées de A à H. Diverses activités et ateliers sont proposés aux enfants. On y sert aussi les repas de midi. Du même côté, on distingue le château, un ancien édifice.

Ce bâtiment accueille les bureaux du directeur, le secrétariat, une classe réservée à l’enseignement des internes et des externes en journée pour un temps d’apprentissage et d’éducation. Chaque bâtiment dispose d’un local ménage où sont stockés le chariot et les produits pour le bio nettoyage qu’assurent les agents des services hospitaliers (ASH), dont je faisais partie. À droite de cette grande cour, on pouvait apercevoir une piscine, fermée l’hiver. En face, il y a un grand bâtiment avec au moins trois entrées : les ASH rentrent par la porte située au milieu de ce bâtiment après avoir tapé un code d’accès.

De l’autre coté du château, on pouvait entendre le coq chanter. Plus tard, j’ai su qu’il y avait une petite animalerie avec deux chèvres. Le premier jour, ce chant me permit de voyager quelques minutes dans le pays de mon enfance. À l’instant où j’avais franchie le seuil de ce bâtiment, je suis rentrée dans un univers inconnu. Si je pouvais vous épargner les détails de ce que j’ai ressenti, je le ferais volontiers, mais la suite de l’histoire ne sera pas belle. Mon pauvre cœur qui, souffrant déjà autant, devra encore être éprouvé.

Je crois que le bras est heureux d’être ce qu’il est, le pied aussi ; disons les autres membres du corps. Mais je plains le cœur qui doit souvent voir son rythme de fonctionnement être modifié plusieurs fois par jour. La veille, le sommeil avait du mal à s’imposer. J’ai beaucoup réfléchi, du moins ma tête aussi était en ébullition toute la nuit. Mon cœur a pris le relais une fois devant ce grand portail en bois. Je me suis demandé ce qui allait m’arriver une fois traversé cette porte. Ce n’était pas la première fois, mais je ne comprends pas pourquoi la peur m’a gagnée ce jour-là. Une question que je n’ai pas arrêté de me poser toute la nuit. Vous imaginez jusqu’au matin, je n’avais toujours pas trouvé la réponse.

Ce matin de bonne heure, à 5 heures environ je me levais de mon lit, j’avais veillé toute la nuit et le réveil n’avait pas été difficile. Habillée en tenue de saison avec le temps qu’il faisait, un temps hivernal avec des matinées froides en sachant que j’avais plus d’une heure de trajet pour arriver là-bas, y être pour 7 heures.

Une grosse pression. Difficile d’anticiper les aléas, surtout ceux dus aux transports, avec les perturbations de cette grande métropole. À la sortie du premier bus, une dame descend précipitamment et se met à marcher à grands pas, elle courait presque. J’ai compris qu’elle avait, comme moi, à effectuer une course contre la montre. Elle me motive à la course. Bizarrement, celle-ci allait dans la même direction que moi ; nous avons pris le même métro, puis arrivés à une station de métro, je descends et la dame aussi. Je me dirige vers une autre ligne de métro, elle fait de même. Et c’est là que nos chemins se séparent parce qu’elle allait dans le sens opposé au mien. Les autres matins, je rencontrais toujours la même dame avec le même empressement qui me stimulait davantage, avant que je prenne moi-même le rythme.

Il fallait maintenir ce rythme dans le seul souci d’arriver au terminus où je devais prendre la dernière correspondance jusqu’à l’IME. Tous les matins, j’avais une montée d’adrénaline avec tous ces transports. J’avais toujours peur de rater le bus et d’arriver en retard. Donc, tous les matins, il fallait se presser.

Le chauffeur du bus de 6h20 partait à l’heure « suisse » sans attendre une minute, avaient constaté mes collègues et moimême. Alors que pour celui de 6h40, le chauffeur pouvait patienter une à deux minutes supplémentaires. Dans le bus, je reste vigilante. Mes yeux rivés sur l’écran d’affichage pour surveiller les arrêts afin de descendre à celui que le directeur m’avait indiqué le jour de l’entretien.

J’avais noté sur un papier _une vieille enveloppe blanche_l’arrêt où je devais descendre ainsi que les numéros de téléphone en cas de besoin. Je suis restée vigilante, jusqu’à ce qu’une personne appuie sur le bouton. Coup de chance, c’est l’arrêt où je dois également descendre. Le bus s’arrête, je descends, quatre autres personnes descendent aussi. L’une d’entre elles va dans la direction opposée, et les trois autres dans la même direction que moi.

Arrivée devant le portail en bois, l’une des filles se voit interpeller par une femme qui se trouvait à bord d’une voiture ; cette dernière lui demande d’accompagner la stagiaire qui débutait son stage ce matin-là même. Je réalise subitement que je ne suis pas la seule à commencer ce jour. J’ai vite emboité le pas jusqu’à arriver à leur niveau et c’est alors que je me suis présentée d’une petite voix en disant :

« Je suis agent technique, c’est mon premier jour, pour un remplacement ».

La dame à qui je me suis adressée ne m’avait pas comprise, elle me demande en s’exclamant :

Agent technique ou ASH ?

Je suis là pour l’entretien des locaux, je lui réponds

Ah, ASH tu voulais dire, me reprend-elle

Je connaissais à peine ce terme, par le simple fait que ma nièce qui avait déjà travaillé en maison de retraite me parlait de cette formation. Elle voulait bien la faire, mais dommage elle n’avait pas été admise lors de la séance de présélection par l’organisateur de cette formation.

Je lui dis :

« Oui, c’est pour ça que je suis là »

Elle me dit de la suivre jusqu’aux vestiaires, en ajoutant que je serai formée par une autre collègue.

Puis, elle me fait un signe de la main en disant :

Allons d’abord !

Je me suis retrouvée à faire du nettoyage les premières années de mon arrivée en France pour subvenir à mes besoins. J’étais une étudiante sans bourse, avec une petite aide familiale venant de mon père retraité les premiers mois de mon arrivée, sans aucune garantie de durée.

Pour moi, j’ai toujours fait de l’entretien des bureaux, des crèches, des piscines municipales. J’accomplissais simplement les tâches que l’on me confiait; tout ça pour moi, ce sont des agents d’entretien qui le font. Dans les structures où j’avais travaillé avant d’atterrir à l’IME, comme ce fut le cas en crèche, ceux qui font le nettoyage là-bas sont appelés « agents techniques ». Jusquelà, je n’avais encore jamais travaillé en milieu médico-éducatif.

Donc même sur mon curriculum vitae, j’avais l’habitude de marquer agent technique/employé polyvalent. Ce qui voulait simplement dire que j’avais fait du nettoyage et que j’étais aussi apte à effectuer d’autres tâches. Le seul but est de trouver un emploi pour m’assurer une sécurité financière. Sur mon CV, je mentionne souvent quelques-unes de mes formations à savoir la licence ou le master, dans le but d’amener les employeurs à m’embaucher. Surtout pour qu’ils soient rassurés qu’il n y aura pas de difficulté de communication.

Il faut dire que j’avais un CV pour chaque candidature, tout dépendait de l’offre d’emploi. Toutes ces formations représentent pour moi un atout, mais certains employeurs étaient intrigués et se demandaient comment une personne aussi diplômée pouvait-elle postuler dans un tel corps de métier qui n’avait rien à avoir avec sa formation de base.

Ce fut le cas du directeur de l’IME qui m’avoua lors de l’entretien qu’il était stupéfié. Et par curiosité, il a voulu en savoir plus sur moi. Il faut dire que le jour même où j’avais déposé mon CV auprès de l’organisme employeur, l’après-midi même je recevais un appel celui du directeur de l’IME pour un entretien.

La fameuse question du « pourquoi ici ? », alors que vous avez beaucoup étudié, s’est aussi posée avec lui. Au fil du temps, cette question devenait gênante pour moi. J’avais envie de leur dire : « Donnez-moi le poste et le reste ne vous regarde pas. Que je postule chez vous et pas ailleurs, ne regarde que moi. Ce que j’en fais de tout ce que j’ai appris, c’est mon problème. Je suis en face de vous et je sais que mon CV en dit beaucoup, mais je voulais simplement un travail qui allait me permettre de continuer à subvenir à mes besoins immédiats. »

Mon histoire, débute dans cet établissement si différent des autres à cause du public qu’il accueille. Les entretiens d’embauche étaient des moments que je redoutais, car la même question revenait toujours. Je tentais malgré moi de me défendre ou l’éviter, mais la stupéfaction de mes futurs employeurs était là.

Au final, avais-je envie de les persuader sur mon orientation dans de tels métiers plutôt que dans celui qui me correspondait le mieux ? Oui, dans la forme, mais dans le fond, je pense que personne ne comprendrait pourquoi je travaillais dans ce corps de métier, que la préfecture qualifia d’emploi précaire, lors de ma première demande de naturalisation.

Cependant, ils avaient tous le choix de m’embaucher ou ne pas le faire. Au final, je n’étais pas seule à faire un choix déraisonné. Loin d’imaginer que les circonstances me l’imposeraient un jour, et que mes rêves ne seraient qu’illusion.

C’est un mercredi à 14 heures 30 qu’un rendez-vous pour un entretien avec le directeur m’avait été proposé. Ce qui me semblait correct. Par un temps pluvieux, accompagnée de ma famille, je suis arrivée à l’IME, trente minutes plus tôt. Devant le portail en bois, je décline mon identité, et une dame me communique le code pour y accéder.

Je fais quelques pas, déboussolée, j’aperçois quelqu’un, et lui demande le bureau du directeur ; celui-ci me l’indique en me montrant du doigt le château. Je me dirige devant cet édifice et je remarque que deux jeunes dames étaient sur le point d’entrer dans le bâtiment. J’en profite, et j’entre en me dirigeant vers une porte en verre audessus de laquelle, il est écrit secrétariat.