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Exprimer l’indicible et faire chanter les mots pour approcher l’instant fugitif, voici les défis que relève Chris Quarroz. Sur le chemin des poètes, il nous invite à assister à « l’éclosion de la poésie du saisir ».
Sa voix nous fait vibrer. Au travers d’un voyage qui nous mène de l’extérieur vers l’intérieur, des ténèbres à la lumière, du hurlement au silence, il nous entraîne au profond de nous-mêmes et apaise nos blessures secrètes par la grâce des images et des sons.
Il faut lire, écouter, clamer cette poésie pour ranimer notre sensibilité, notre potentiel synesthésique et plonger dans la quête de l’inaccessible.
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Seitenzahl: 56
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© 2022, Chris Quarroz.
Reproduction et traduction, même partielles, interdites.Tous droits réservés pour tous les pays.
ISBN 9782940723317
Pour Calia
Il ne faut jamais que ces étoiles s’étiolent.
Jamais il ne faut qu’elles s’envolent.
Cette lueur émanée de tes yeux rend espoir aux ténèbres
Qui, quand tu les fixes, voilent leurs projets funèbres.
Reste et regarde-moi. Cet instant éternel anéantit
Toute responsabilité de roi ; plus de mot, plus de loi,
Plus de règle dans un théâtre sans foi.
Juste toi et moi au milieu d’un monde qui noircit.
Je donne à cet instant le reste de mes ans.
– Bien peu de choses pour tant d’amour que mon temps.
L’échange est honteux et indigne de toi,
Mais reste et regarde-moi.
Voile les noirceurs qui entourent et infestent.
Jette-les dans la nuit ; éteins le reste.
Garde cette lumière uniquement pour moi ;
Reste et regarde-moi.
Laisse-moi fortifier mon égoïsme tenace
Et, de ce qui vient de toi, ne partager rien.
Abandonnons les miettes de crasse
Au monde qui n’a la chance d’avoir ton œil dans le sien.
Non. File et va par les Cieux ; éclaire ceux qui ont besoin de toi.
Oublie ma bassesse qui tache le plus beau fruit.
Enseigne-leur l’amour et, quand l’univers sera guéri,
Reviens et regarde-moi.
SOMMAIRE
PREMIÈRE PARTIE
Prologue
I Chute des soleils
II Orange amer
III Ombres et lumière
IV Une heure
V Désillusion
VI Prémonition
VII Porte de l’Enfer
VIII Résurrection I
IX Écœurement
X Filature
XI Jardin perdu
XII Désir noir
XIII Éclats de roses
XIV Crémation
XV Cancer général
XVI Aliénation
XVII Voie finale
XVIII Déchéance
XIX Résurrection II
XX Étreinte
XXI Dépôt du fardeau
XXII Retraite sans clairon
XXIII Sobriété
Épilogue
SECONDE PARTIE
Erratum
I Poésie intérieure
II Rêve lucide
III Bal de l’artiste
IV Présence nocturne
V Le cygne
VI Envergure
VII Contemplation
VIII Derniers mots
Záô
PREMIÈRE PARTIE
PROLOGUE
Ô lectures qui sondez l’infini, à vous qui étirez les esprits. C’est en partie à vous que nous devons qui nous sommes, et c’est dans votre puits que nous trouvons tous les hommes. Tantôt vous reflétez la structure de nos chairs, tantôt vous les sculptez à vos bonnes manières. Jamais vous ne passez sans laisser votre emblème, et parfois vous nous offrez de brefs instants de nous-mêmes.
Tour à tour, vous êtes l’ellébore de notre esprit aliéné et la graine qui fait germer nos plus grandes folies. Vous servez de panacée à nos maux sans remède et de souche fertile à tous les germes maudits. À vos mamelles nous tétons sans relâche toutes les vies ; nous fouillons l’héritage immortel pour y percer les secrets enfouis. Vos témoignages sont le trésor qui nous aide à creuser pour enfin découvrir les cartes et les clefs.
Nous cherchons tous, sans même le savoir. Nous ne trouvons rien, même en cherchant bien, et votre ambroisie prend alors le goût amer de la nuit. Si vous daignez parfois nous régaler d’un soupçon d’existence, bien trop souvent vous ne semez que miettes de contingence. Mais vous êtes là – toujours ! –, chères compagnes bienveillantes, chères accusatrices sans scrupule.
La langue manipulée avec adresse est le nectar dont s’abreuvent dieux et déesses. Sa puissance est pourtant limitée : jamais les transcendances ne sont exactement reflétées ; jamais les mouvements de l’âme parfaitement imités. Dans chaque éclair brut, dans chaque énergie qui transperce, dans chaque instant de vérité, l’expression malheureuse ne fait qu’hésiter.
Évasifs, les mots dansent avec dédain sur le papier, et leur impuissance rieuse nargue les sens frustrés. Leur aphasie – brume légère mais constante – drape tendrement la spontanéité pure et primitive. Ils se débattent néanmoins de manière honorable – ils sont finalement le seul outil des poètes : à la fois guide avéré et fardeau encombrant. C’est dans leur bouche que prennent vie les instants ; c’est dans leur souffle qu’ils s’éteignent pourtant.
Mais essuyez vos doutes, braves lecteurs avisés : l’espoir est bien ici. Dans chaque fragment se trouve un hymne à la vie. Creusons ensemble les profondeurs de l’éther et marchons côte à côte sur la route des Enfers – nous en sortirons quelque peu étourdis, mais aguerris et emplis de lumières. Tentons encore de rendre justice aux ondes invisibles. Offrons-leur de nouvelles voies dans des cœurs impassibles. Transcrivons enfin ces mélodies aux notes aériennes, celles que l’on hume parfois sans pouvoir les contenir. Capturons-les un bref instant ; imprimons-les pour l’éternité.
Ô lectures qui sondez notre esprit. À vous qui étirez l’infini.
Ô lecteurs, osez ces lectures-ci.
I
CHUTE DES SOLEILS
Un jour sur l’horizon vous vous êtes levés pour dissiper le néant. Vous avez finement caressé les alentours de vos premiers rayons et mes yeux naïfs ont alors bu le monde encore vierge. Mon cœur, battant des rythmes infantiles, s’est goulûment abreuvé – sans tri. Il a respiré dans votre souffle ; il s’est baigné dans votre haleine – avide et vide de tout. Grâce à vous, il s’est allongé, serein, sur de solides discours faits de maximes rigides.
Vos droites et montantes statures illuminaient alors mon ciel et éclipsaient la profondeur des nuées. Votre pieux savoir cachait la toile qui flottait au vent de l’incertitude. Sur vos bras forts, je m’appuyais pour offrir mon torse et mon front fiers aux bourrasques maladroites. L’invisible socle s’enracinait insidieusement pour asseoir vos convictions ; rien ne fraîchissait assez pour vaciller.
À contre-jour, je ne voyais pas, mais je savais – déjà. Telle une bulle de verre teintée de noir, vous atténuiez la blancheur des plus brillantes étoiles. J’accompagnais. D’une assurance certaine et la rétine noyée par vos mots sans faille, je m’en allais dansant sur le rigide fil tendu par vos mâchoires serrées.
Dès lors, mes os, modelés par vos voix agiles, ont séché dans l’ivresse des béatitudes. Vous avez su taire les appels envoûtants des danses de l’existence. Puis l’argile de votre œuvre et les émaux à l’unique nuance ont durci dans la chaleur culminante. Ma bouche n’a fait que répéter.
Mes soleils au regard certain ont poursuivi leur ascendance. Un jour malheureux, d’un soudain claquement d’atmosphère, comme un éclair dans un ciel bleu, j’ai aperçu vos cils trembler et vos globes saccader. Au zénith de la création, j’ai vu l’inconsolable : votre pied sûr a buté sur la crête de la marche suivante. Horreur ! Mon cœur a crié au mirage, voulant convaincre mes yeux de balayer l’image. Mais la bribe éphémère – la déchirure – s’est imprimée sur la pellicule.
Dans votre lente descente vers les monts amers, j’ai senti le Temps caresser mon malaise : vite, éponge les dogmes de pierre et romps les murs peints de chimères. Tes astres chutent et bientôt par la nuit seront éteints. Je défile ; ouvre la cage et avale maintenant l’antidote !