Chaos express vers le bonheur - Serge Karp - E-Book

Chaos express vers le bonheur E-Book

Serge Karp

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Beschreibung

Une nuit. Une fête chic et dépravée orchestrée par JMdR, affairiste et prédateur sexuel, se transforme en machine infernale à régler des comptes. Ressurgissent les fantômes du passé. Ses héros : Sacha, magicien de la libido, juif, secret et gigolo, Marisol, tonitruante businesswoman, héritière d’une lignée de collabos, et une horde d’hurluberlus survoltés émergents au petit jour, rincés mais enfin libres d’aimer.

 À PROPOS DE L'AUTEUR

Serge Karp entame son voyage dans l’écriture par l’exploration des univers de Rimbaud, Dostoïevski, Zweig, qu’il met en scène dans ses créations. Peu à peu, la langue et son pouvoir d’influence deviennent un matériau de travail, le conduisant autour du monde. Confronté, à l’occasion de la vente de son agence de communication, au chantage et à l’extorsion, il en fait de la littérature. Ainsi naît "Chaos express vers le bonheur", une œuvre aux thèmes sociétaux, grotesques, érotiques et sentimentaux.

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Serge Karp

Chaos express vers le bonheur

Roman

© Lys Bleu Éditions – Serge Karp

ISBN : 979-10-422-1997-0

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

That he not busy being born

Is busy dying

Celui qui n’est pas occupé à naître

Est occupé à mourir

Bob Dylan

Préface

C’est l’histoire d’une soirée folle, d’un théâtre obscène et sexuel, où Sacha, petit-fils de la Shoah, une oreillette vissée dans l’oreille, va en mission pour Anne-So, redoutable prédatrice, alors qu’il est au service de son mari, l’ignoble JMdR. L’idée est de trouver le carnet secret de JMdR, pour qu’Anne So puisse s’affranchir à son avantage de ses liens conjugaux, mais aussi de transformer Marie Solange de la Roche, qui doit signer un contrat avec le prédateur, en putain obscène. On le comprend tout un programme, où strings mouillés côtoient godemichés flamboyants, sans compter que d’autres personnages hauts en couleur rejoignent la fête. Il est possible que le style de Serge Karp rebute certains. Il est outrancier, un peu baroque, déborde volontiers. Personnellement, il pourrait me faire penser à Clovis Trouille, ce peintre qu’André Breton qualifiait affectueusement de « Grand maître de cérémonie où tout est permis. » C’est de cette façon qu’il faut appréhender la lecture de Chaos express vers le bonheur, un moment où vous pouvez tout vous permettre.

Vincent Ravalec

1

Mon cul posé sur un rocher, je ferme les yeux. Premiers rayons du soleil. Une légère brise marine caresse mon visage. Parfum des pins et murmure de la Méditerranée. Je m’abandonne, dans l’espoir que cet instant s’étire hors du temps, indéfiniment. Qu’il suspende son vol ! Je sais, Lamartine, tout le monde la connaît, celle-là, mais j’aime les citations, le rapprochement qu’elles permettent avec d’autres âmes. Mon corps goûte cette quiétude. Mon esprit, lui, s’est envolé. Trop tard pour le rattraper.

Virage à 180 degrés.

Retour 12 heures en arrière…

Je montre patte blanche à l’entrée de la superbe villa Rosebud, surplombant la mer. C’est la propriété de Jean-Marie Deshayes, alias « appelez-moi JMdR ! » C’est comme ça qu’il aime à se présenter, genre tycoon. Il est le mari détesté de ma maîtresse du moment, Anne Sophie du Grimoir, prestigieuse ambassadrice du luxe à la française, alias « appelez-moi Ann So ! »

Ce soir, JMdR donne une réception. Son ambition : faire pâlir de jalousie les oligarques russes passablement maffieux des alentours. Faire passer leurs folles soirées pour d’aimables goûters de jeunes filles.

Qui suis-je en vérité ?

Un bouffon mondain dont l’usage immodéré des citations est l’une des marques de fabrique.

À ce sujet, cette chère Ann So et sa petite clique de happy few aiment à parler d’aspérité, de uniqueness. Ça les flatte. Ainsi m’invitent-ils à poser une demi-fesse à leurs côtés.

Outre ce rôle de bouffon cultivé, j’occupe surtout dans leurs intimités, sans discrimination de sexe, une éminente place de baiseuse mondaine. On m’y prête une arme fatale : la langue !

Dès qu’il s’agit de cul, de près ou de loin, avec passage à l’acte ou pas, mes mots, ma voix, mon phrasé, mon toucher les enflamment. Je ne me prive pas d’en jouer. Macadam cowboy 2.0 des salons mondains, doté à leurs yeux d’un super pouvoir, je suis leur sulfureux chaman du sexe. Et d’une demi-fesse posée à leur table, voici mon corps tout entier, maître de leurs couches – façon de parler.

C’est riche de cette sulfureuse réputation, sous une identité d’emprunt usurpée à quelque descendant de la noblesse princière russo-polonaise, que je franchis le seuil de la villa Rosebud.

Qui suis-je aussi ?

Sacha Bleskowicz, petit-fils de la Shoa, hanté par les fantômes d’un passé qui se matérialise par quelques photos et deux reliques, exilées dans un coin de mon grand appartement haussmannien désert, d’où je risque sous peu de me faire virer.

Les photos :

Ma grand-mère, jeune fille blonde aux longs cheveux, habillée en homme. Elle tend fièrement son fusil au milieu des partisans, avec la forêt pour arrière-plan. Mes arrière-grands-parents, petits vieux plantés devant leur maison en bois d’un Shtetl des Tatras. Nina, ses yeux immenses, ses lèvres magnifiquement ourlées, que je n’ai pas su aimer.

Les reliques :

Un vieux disque de l’Armée rouge datant de la guerre. Un violon abîmé, avec un mot griffonné sur un bout de tissu : « Violon de la Shoa, violon magique… Écoute son âme, elle guidera la tienne. »

Quand je ne suis pas occupé à faire le brillant mariole ou la putain, je passe des heures dans la pénombre de cet appartement, bercé par la voix sombre et caressante de Léonard Cohen ; les adresses tendres, cinglantes, poétiques de Dylan ; l’andante du concerto pour violon de Tchaïkovski ou les mélodies gipsy rock enivrantes de la fanfare des mariages et des enterrements de Goran Bregovic. Tels sont mes compagnons de solitude. Ils ne sont pas de ma génération. Souvent des traces de mon père, disparu sans laisser d’adresse.

Monsieur Henri, un vieux juif russe à l’accent merveilleux, est au contraire une vraie présence dans ma vie. Il a croisé mon père encore enfant sur les chemins de l’exil. J’ai fait de lui mon père de cœur. Il est un des rares à qui j’ouvre les portes de cet appartement.

Sinon tout va bien. Rattrapé par les magouilles et les dettes de mon géniteur – son modèle c’était Madoff, Picasso des escrocs ! j’ai vingt-quatre heures pour payer une somme astronomique aux propriétaires de l’appartement ou je suis à la rue.

C’est là qu’intervient cette chère Ann So.

Nous sommes une semaine en arrière. Les deux Sacha ne font plus qu’un.

Détendue, nue, heureuse de s’être fait sucer, Ann So se lève nonchalante, se rhabille, me regarde d’un air provocant. Avec la froideur d’un exposé mathématique, elle m’énonce :

— Je t’ai fait inviter à la fête que donne ma pourriture de mari. Ta réputation t’ayant précédé, je n’ai pas même pas eu besoin de faire l’article. Tu seras l’attraction de la fête, l’archange du sexe qui fera de sa partouze ordinaire l’orgie la plus mémorable de l’histoire de la Côte ! D’ici à ce qu’il se prenne pour Néron ou Caligula… mais je l’aurai détruit avant ! Tu vas m’y aider. Et voilà comment :

Mon époux très cher tient un carnet noir. Je l’ai surpris à se faire jouir, lisant à haute voix le tas d’insanités qu’il y consigne sur le dos de ses fréquentations et prétendus amis. Ce carnet, il le cache dans la villa où sera donnée la fête. Trouve-le, remets-le-moi. Je ferai une bouchée de ce mari parfait, homme d’affaires à succès et prédateur de caniveau.

Donnant, donnant… Tu réussis, je t’offre une place de choix dans le grand monde et paye immédiatement les dettes de ton appartement. Tu échoues, je ruine ta réputation. Te détruis. Te jette à la rue. Simple comme bonjour, mon chéri, n’est-ce pas !

Je suis resté sans réaction.

Elle m’a souri, comme si elle venait de me proposer un deal ordinaire.

Retour à hier, 18 heures. Le soleil décline.

En smoking et d’un pas félin, j’avance dans l’allée centrale de la luxueuse propriété de monsieur son mari – JMdR !

2

Je suis discrètement équipé d’une oreillette invisible d’un côté et d’un gros diamant caméra placé sur l’oreille, de l’autre. Grâce à ce dispositif, Ann So surveille et dirige les opérations, planquée dans une villa du voisinage.

Elle ne fréquente jamais les fêtes de JMdR. « Nous n’avons pas gardé les cochons ensemble ! Question de valeurs, pas de pudeur »,ironise-t-elle avec délice.

Cette suffisance au rabais me donne envie de lui rire au nez. Je n’en fais rien.

Au rythme d’une techno chill-coucher de soleil, les invités papillonnent dans le bruissement des soies et étoffes précieuses dont sont faites les tenues de ces dames. Extravagantes, provocantes, tentatrices, elles se veulent élégantes et sexy. Les hommes en smokings noirs ou blancs la jouent virils. Tout ce joli monde se tourne autour et se renifle le cul.

Ça pose, ça minaude dans un brouhaha de rire, de gloussements, de tintement de verres et de paroles qui s’envolent. Ça boit, ça fume, ça sniffe, servi par une petite armée de beaux jeunes gens, mini jupes à ras de cul et tee-shirts très échancrés pour les filles, pantalons hyper moulants et marcels pour les garçons. La notion de service a dû leur être présentée dans une version très étendue. Ici et là, des messieurs aux carrures d’athlètes veillent. Indifférents à cette excitation montante et du genre pas commodes.

Moi j’avance vers le grand perron de la villa, avec JMdR en ligne de mire, entre les têtes.

Visiblement ma réputation m’a précédée.

À mon passage, tous les regards se tournent vers moi. Et Ann So n’a pas l’intention de me laisser chômer.

— À ta droite ! intervient-elle impérative, dans l’oreillette.

Il s’agit d’une femme en robe fourreau, fendue très haut sur l’avant, qui fait semblant de s’offusquer, pendant qu’un homme secolle à elle par-derrière en lui mordillant l’oreille.

J’affiche un regard concupiscent, avance vers la dame, refaite mais jolie. La voix d’Ann So m’éperonne comme si j’étais son cheval.

— À l’ouvrage, mon cher, pas de manière ni de mesquinerie !

Par la fente de sa robe, je glisse la main entre les cuisses de la dame – string tout mouillé, ça commence bien. Je me penche sur son oreille libre, hume son parfum poudré, y introduis la langue en imitant un vague bruit de reptile tentateur. Ma devise : faire confiance à l’imagination de la cliente. Son « ohhhh nooon », préalable à une petite pâmoison, me donne raison.

Je ne laisse pas monsieur en reste, lui saisis l’entrejambe, le flatte d’un regard complice de mâle à mâle. Il bande dur. Lui et sa dame se trémoussent comme parcourus par un courant électrique. Mission apéritive accomplie, je m’éloigne.

— Eh bien voilà ! approuve Ann So.

— Madame est-elle satisfaite ?

Je provoque. Ann So me rappelle à l’ordre.

— Tu fais ce pour quoi tu as été invité, cher magicien de mes fesses. Ne l’oublie jamais !

Et elle m’assigne aussitôt une autre tâche :

— Celle-ci ! Elle te mange des yeux.

C’est sans appel. Vite fait, bien fait : un baise-main, un regard de braise, un effleurement le long du bras de cette blonde peroxydée échappée d’une story Instagram à prétentions sexy.

— Vous êtes le fameux Sacha ! soupire-t-elle tout émoustillée, en plongeant son regard dans le mien.

Je réponds par un long murmure, ponctué d’un interminable « pour vous faire Jjjjj… ouiiii…rrrr… »

La blonde peroxydée est aux anges.

— Et les hommes ! ordonne Ann So qui ne me lâche pas d’une semelle.

J’active ma plasticité libidinale. Saisis le premier homme venu pas trop ventripotent. L’entraîne dans une passe de tango lascive, tout en lançant un regard enjôleur à sa cavalière, sèche comme une trique, au make up d’influenceuse vulgaire repiqué sur Tik Tok et dévêtue d’une robe du soir au dos immensément nu.

Elle me répond d’un « huuum… » libidineux et émerveillé qui n’en finit pas.

Un éclat de rire retentissant stoppe net mes petites affaires.

À ce rire tapageur, répond une bordée de gloussements évoquant une envolée d’oiseaux après un coup de fusil – JMdR et sa cour !

M’intronisant à grand renfort de gestes « clou érotique de la soirée », JMdR attire sur moi l’attention générale.

— Mon con de mari ! claironne Ann So dans l’oreillette.

Je n’ai plus qu’à avancer vers lui, au milieu des invités excités qui se collent à moi.

JMdR a l’allure élégante, féroce, charmeuse. Flatté de la comparaison avec Daniel Craig en James Bond, il évoque un fauve sur le qui-vive. Il caresse, plaisante, affiche un sourire parfois aussi cinglant et vénéneux qu’une morsure de serpent. Tous savent qu’il peut griffer, piquer ou mordre sans crier gare.

3

Dans sa villa refuge du voisinage, Anne Sophie suit avec satisfaction le déroulement des opérations sur un immense écran.

Ceci ne l’empêche pas de me rappeler systématiquement à l’ordre, persifle Sacha.

— Ça lui fait du bien, à ma petite catin ! se gausse-t-elle.

Elle adore avilir ses jeunes amants. Sinon, l’interpellation dont Sacha vient de faire l’objet la rassure. « Clou érotique de la soirée » c’est exactement ce qu’elle a vendu à JMdR.

La première étape de son plan fonctionne. Elle peut se détendre.

Elle se laisse aller dans un moelleux récamier. Prends la pose. Dans sa main, un long fume-cigarette. Elle souffle la fumée. Même sans miroir, elle se regarde. Anne Sophie du Grimoir s’aime et se plaît dans le magnifique déshabillé de soie, revêtu pour la circonstance. Dans son monde, les autres sont des objets dont elle jouit puis qu’elle jette. Accessoirement des parures flatteuses qu’elle exhibe dans les soirées.

Si Sacha est sa parure préférée du moment, cette nuit, il doit se rendre utile à toute autre chose :

— Anéantir mon cher mari, avant que ce salaud ne fasse de moi sa proie. Je connais son talent de prédateur. Je l’ai vu à l’œuvre. Et qu’il m’ait refusé le divorce n’est pas une bonne nouvelle.

La lumière du soleil couchant pénètre par les grandes fenêtres de la pièce.

Être dans la même lumière qu’eux, même à distance, me permet de mieux ressentir les choses. C’est ce dont Ann So est persuadée.

Branchée, ésotérisme, énergie, synchronicité, elle s’est fabriqué un véritable petit autel vaudou voué à la réussite de son entreprise : un guéridon nappé de velours violet, des bougies, de l’encens, un phallus entouré de fleurs et deux photos : JMdR et Sacha. La photo de JMdR adossée au phallus est transpercée par un magnifique couteau au manche en abalone.

— Un Laguiole au féminin, cadeau de ce cher Sacha lui-même, sourit Ann So, féroce, invariablement élégante.

Ann So regarde les images de la caméra-espionne posée sur Sacha. Observe son avancée vers JMdR, sa distribution de baise-mains, de mains aux fesses, aux entrejambe… les visages qui se tendent vers lui, les bouches aux sourires salaces.

— C’est ça, fais-le mariner mon cher mari. Exhibe ton talent. Fais-le bander. Énerve-le. Provoque-le. C’est un porc ! glisse-t-elle dans l’oreillette.

— Sans jamais perdre de vue pourquoi tu es là. Sinon,

— Sinon je suis fini ! coupe Sacha. Soudain étouffé par la pression d’une main qui lui écrase sauvagement les couilles.

Sacha n’a rien vu venir. La bouche de JMdR est maintenant collée à lui, comme s’il allait me rouler une pelle en me broyant les parties ! J’ai son haleine menthol et son Sauvage de Dior plein les narines. Choix banal et évident : top ten des parfums masculins et Johnny Depp. Pas le temps de philosopher sur les goûts du Monsieur ; le fauve me crache son venin dans l’oreille.

— Un rappel avant que je ne vous la présente : vous êtes là pour transformer Marie Solange de la Roche en putain obscène, devant la caméra cachée de la bibliothèque. Ma salope de femme m’a assez fait l’article : votre pouvoir, votre langue, votre regard hypnotique, vos aptitudes suggestives, votre queue magique et tout le toutim ! Vous allez vous en servir pour faire ce que je vous dis. Le reste ne vous regarde pas. Ensuite la nuit est à vous. Carte blanche pour me ravaler les partouzes ruskofs au rang de matinées récréatives pour gamines prépubères ! Votre seule option : réussir.

Je sais être reconnaissant, ajoute -t-il avec un sourire carnassier qui fait la paire avec celui affiché par sa tendre épouse.

Pour Sacha ça se complique. Monsieur lui met le grappin dessus et Madame a tout entendu.

— Je vais l’anéantir. Et tu vas m’y aider, c’est ta seule option, réagit-elle aussitôt.

Sacha n’a pas le temps de se perdre en conjectures.

Un éclatant « c’était plié. Jeu, set et match ! » quirésonne au milieu des rires et des applaudissements, le ramène sèchement à l’ici et maintenant.

— Marisol et ses groupies ! trompette JMdR.

Et relâchant subtilement son étreinte, il désigne d’un geste théâtral une créature qui me scotche à distance.

Jamais vu une telle détermination émaner d’un visage aussi radieux que celui posé sur les épaules de cette femme. Impossible de m’en détacher.

Et son regard ! Des yeux gris, bleus, gris-bleu, bleu-gris, je n’en sais rien ! C’est brillant, coupant comme le diamant. Je ne sais pas qui d’elle ou de moi peut découper l’autre, mais je n’ai qu’une envie : m’y coller.

Et son allure ! Cheveux court à la garçonne. Porno chic, néo-punk, allez savoir !... Mitaines de dentelles noires, magnifiques bottines vernies qui donneraient presque envie de se faire botter le cul. Minijupe et un haut comme une armure qui fait pigeonner une poitrine admirablement proportionnée. Je devine le cœur qui palpite derrière le vernis.

C’est hardcore. Admirable ! une femme de pouvoir dans la plénitude de ses pas quarante ans, qui tranche violemment sur cette faune où pourtant on s’est donné le mot pour se faire remarquer.

Soudain, il n’y a plus qu’elle. Si c’est ça Marie Solange de la Roche, ça promet !

— Marie Solange de la Roche dite Marisol ! confirme Ann So. Une tueuse de la com ! Mais une de plus qu’il est en train de baiser, en lui faisant croire qu’il va lui racheter sa boîte.

— Fais-t’en une alliée, ajoute-t-elle froidement.

JMdR me conduit vers Marisol. Il me serre le cou, pour bien me faire sentir son pouvoir.

Une fois arrivé à sa hauteur, il ouvre la bouche.

— Je vous présente Marie Solange de la Roche alias Appelez-moi Marisol sinon je mords ! La petite cour pouffe. JMdR poursuit.

— Marisol est la prestigieuse patronne de M Sol.Com. Reine de l’influence avec laquelle j’ai le privilège d’être associé.

JMdR adresse un sourire fielleux à Marisol.

— Elle me fera bientôt l’honneur de me vendre le solde de ses parts.

Marisol répond d’un sourire impénétrable, suivie d’un long silence.

Un ange passe.

Un sourire acidulé de Joconde, pour lui jeter son mépris en pleine tronche… Magnifique ! pense Sacha.

Derrière le masque à l’expression élégante et condescendante, les idées défilent à 300 à l’heure dans la tête de Marisol.

Me servir le coup du carrossier… Quel bouffon ! « J’achète la voiture, puis je lui trouve tous les vices cachés pour pulvériser son prix… »