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Bien avant le commencement du temps, vous vivez dans un environnement terne, ennuyeux et sans beauté. Vous faites partie d'êtres étranges qui ont un souhait, celui de créer un univers synonyme de diversité et que vous pourrez voir évoluer. Mais vous laissera-t-on réaliser votre rêve ? Un télescope spatial géant va permettre aux humains de découvrir les débuts de l'univers et peut-être son créateur s'il existe. Mais ceci risque d'ébranler les croyances les plus solidement établies. Réaliseront-ils leur rêve ? Ces deux ambitions, si éloignées l'une de l'autre se croiseront-elles ?
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Seitenzahl: 243
Veröffentlichungsjahr: 2024
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« Je crois que l'univers est indivisible, qu'il est construit comme une immense symphonie dans laquelle j'ai le sentiment parfois que le genre humain, avec sa frénésie et sa violence, représente une douteuse dissonance. »
(Pierre Rabhi – Philosophe, agriculteur, écologiste)
« Les étoiles sont les yeux de l'univers et l'univers nous observe avec curiosité. »
(Bernard Werber - Écrivain)
« L'univers m'embarrasse, et je ne puis songer que cette horloge existe et n'ait pas d'horloger. »
(Voltaire - Philosophe)
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PoésieEt un jour j’ai écrit (2020) Escales poétiques (2022)
RomanLes anneaux de lumière (2022) L’ensemencement (2023) Des esprits et des hommes (2024)
A mes parents,
L’auteur du roman
Une courte nouvelle relatant un voyage dans un lointain passé de notre Terre se transforme quelques mois plus tard en un projet de roman.
« Les Anneaux de Lumière » voit le jour après une année d’écriture. Le passé en est donc le thème principal, dépassant le cadre de la nouvelle.
La dernière partie du roman, s’intéressant à la situation dégradée de la Terre, m’incite à écrire une suite.
« L’ensemencement », explorant le futur de la Terre, se préoccupe du sort de l’humanité et du monde vivant dans son ensemble.
Dans ces deux romans, la présence d’être étranges, créateurs de notre univers, protecteurs de l’humanité, interviennent régulièrement.
« Des Esprits et des Hommes » relate donc leur création de notre univers. Conjointement, cet ouvrage raconte l’histoire de scientifiques qui souhaitent découvrir les débuts de l’univers, l’instant zéro.
Ces initiatives engendrent des oppositions fortes, parfois violentes. Chaque ambition réussira-t-elle à atteindre son but ?
Entrez dans cette passionnante histoire de fiction, offrant aventure, action, suspens, humour et un peu d’érotisme.
Écrit après les deux premiers ouvrages, il se situe chronologiquement en amont.
Le rideau se lève sur le premier acte.
CARTE
PLUS LOIN DANS L’HISTOIRE…
L’UNIVERS DES ESPRITS
AU PETIT MATIN
QUESTIONNEMENT
JAMES WEBB 2
JEUNES ESPRITS ETUDIANTS
SABOTAGE
ESPIONS
TIR
LA GRANDE COMMUNICATION
ABUS DE FAIBLESSE
REBELLION
ABUS DE FAIBLESSE (Partie 2)
LA BATAILLE DE L’ERE DU GRAND NEANT
PREMIERES IMAGES
PREPARER LA CREATION
FAUSSE PISTE
LE GRAND SAUT
CHASSÉ CROISÉ
NOEL AU BALCON
ORIGINES
REPOS DIFFICILE
SPHERES LUMINEUSES
ADIEU LES DEBUTS DE L’UNIVERS
ÎLES COSMIQUES
LE GOUVERNEMENT MONDIAL
CAILLOUX DE L’ESPACE
BEL ESPOIR
VIVE LA VIE
INTERCEPTION
L’ERE DES GEANTS
TEL EST PRIS, QUI CROYAIT PRENDRE
LES PREMIERS HOMMES
VOYAGE, VOYAGE
IL ALLUME LE FEU
USURPATION
VERS LA MODERNITÉ
VERS LE MUR DE PLANCK
DU POUVOIR DES ARMES AU POUVOIR DES LETTRES
SECRET BIEN GARDÉ
AU PIED DU MUR
CONQUETE, POUVOIR, RICHESSE
LA VERITE EST AU-DELA DU MUR
DESTIN FRAGILE
EPILOGUE
PROLONGEZ VOTRE LECTURE
(Pour vous aider à suivre l’histoire)
Guyane Française
— Pourquoi vouloir tout changer ? s’exprime violemment Grand Anti-esprit. Nous sommes très bien ainsi.
— Notre environnement, hormis notre présence, n’est fait de rien, répond Grand Esprit. Il n’y a que le néant. Nous souhaitons découvrir de nouvelles expériences.
— Nous irons surtout droit au-devant de problèmes, rétorque tout aussi agressivement Grand Anti-esprit.
— Pourquoi cela ? demande Grand Esprit.
— Parce que nous ne savons pas ce que nous allons créer, commente nerveusement Grand Anti-esprit. Tout doit rester tel quel.
— Tous nos jeunes esprits étudiants sont excités à l’idée de créer un univers, justifie Grand Esprit.
— Ce sont de jeunes esprits un peu fous qui n’ont pas la sagesse de se rendre compte qu’ils se créent surtout des problèmes, dit Grand Anti-esprit.
— De toute façon, vous êtes toujours contre la nouveauté, répond Grand Esprit, agacé. Ce que je ressens de notre entourage c’est qu’il est terne, sans surprise, tristement toujours le même.
— Et créer un univers changera quelque chose ? demande Grand Anti-esprit. A part se créer des soucis, qu’en retirerons nous ? Vous, les esprits, êtes toujours à vouloir faire bouger ce qui est immuable.
— Et vous les anti-esprits, vous souhaitez que nous restions dans ce cadre morne, répond Grand Esprit. Nous ne vous laisserons pas nous empêcher de mener à bien cette expérience. Nous allons créer un univers. Nous le laisserons évoluer et découvrirons avec joie ce qu’il devient.
— Nous ne vous laisserons pas agir selon votre seule volonté, rétorque Grand Anti-esprit, menaçant.
— Que ferez-vous pour nous en empêcher ? s’exprime Grand Esprit, tout aussi menaçant.
— La guerre ! La guerre !
Au petit matin de cette journée d’été, Kourou se réveille sous un ciel chargé de nuages gorgés d’eau et dans le tintamarre de l’orage qui sévit depuis une bonne demi-heure, chaque coup de tonnerre précédé de quelques secondes par des éclairs qui zèbrent les cieux.
La pluie battante frappe le toit de la maison ou cogne contre les vitres. La forte chaleur des jours précédents est responsable de ce déluge.
Ce mauvais temps pourrait angoisser le couple qui occupe la chambre, du fait de la mission importante qui va se dérouler dans deux jours.
Mais c’est une tout autre musique qui emplie cette pièce, celle du plaisir. Les corps évoluent dans de sensuelles ondulations provoquées par les mains et les lèvres qui préparent l’union final, le moment où les deux corps n’en font plus qu’un, traversés par les éclairs de leur jouissance commune.
Passées ces secondes où plus rien n’existe, les corps, repus, ruisselants, s’enlacent tendrement et s’échangent de doux baisers. La tempête est passée, le calme reprend ses droits. Les regards se croisent, les sourires s’expriment.
— Faire l’amour par temps d’orage, c’est du sport quelque part, dit Roberto Mancini en souriant.
— Je confirme, chéri, répond Jennifer Carter. Une bonne douche fraiche s’impose.
— Je t’accompagne ?
— Sage, chéri. J’y vais seule.
Roberto Mancini a cinquante ans, avoisine le mètre quatre-vingt, brun, cheveux courts, d’allure mince mais pas réellement sportive. Jennifer Carter est une femme de quarante ans, mesurant un mètre soixante, avec des petites rondeurs, brune aux cheveux longs ondulés, aux yeux verts, au sourire craquant et à la poitrine flatteuse, souvent mise en évidence par de jolis décolletés.
Ils se connaissent depuis une dizaine d’années, se retrouvant régulièrement pour travailler sur le projet James Webb 2. Une grande amitié est née de leurs différents séjours, amitié allant parfois jusqu’à passer ensemble quelques nuits torrides, mais sans volonté de part et d’autre de s’engager dans une histoire d’amour.
Jusqu’au jour où une petite fille pointe le bout de son nez. Ils se sont alors mariés et partagent leur foyer avec leur petite princesse, née en 2084, qui répond au prénom de Claire.
D’ailleurs des pas se font doucement entendre, descendant l’escalier, alertant les parents qui viennent de s’unir. Vite fait, ils se couvrent d’un pyjama pour le papa et d’une chemise de nuit pour la maman.
Les bruits cessent et un petit « toc toc » frappe à la porte. Derrière celle-ci, une voix douce interpelle ses parents.
— Je peux dormir avec vous, je crains l’orage, dit Claire apeurée.
— Bien sûr chérie, vient dans notre lit avec moi, ton père se lève, répond Jennifer.
L’adolescente de quatorze ans ouvre la porte. Blonde aux cheveux longs, visage juste sorti de l’enfance, les yeux bleus avec un sourire qui remplace son visage inquiet car elle va se faire dorloter par sa mère. Elle s’endort rapidement, du moins le pensent-ils.
— Tu crois que le temps va s’améliorer dans deux jours ? demande à voix basse Jennifer.
— Normalement oui, répond Roberto. Il y a déjà eu des reports, ce serait navrant d’en connaître un autre.
— Je suis pressée de pouvoir analyser les images de ce télescope spatial, dit Jennifer, emballée.
— Moi aussi, surtout si l’on peut voir ce que nous recherchons tous, confirme Roberto.
— Le début de tout ! s’exclame Jennifer.
— Vous ne pouvez pas arrêter de parler, je n’arrive pas à m’endormir, s’agace Claire.
Roberto et Jennifer sourient, de s’être fait gronder par leur fille. Ils sortent du lit, quittent la chambre et descendent dans la cuisine prendre leur café. A peine la tasse chaude en main, l’holophone2 de Roberto émet une musique signifiant qu’un interlocuteur le demande. Roberto, bien que chagriné de ne pas prendre son café tranquille, accepte l’appel et l’hologramme de Paul De Chambord apparaît.
— Bonjour Roberto, je ne te dérange pas trop, de si bon matin ? demande Paul De Chambord.
— Non Paul, l’orage nous a réveillés, la petite aussi, répond Roberto Mancini. Mais elle redort. Nous sommes au café, insiste bien Roberto pour montrer qu’il n’aime pas être dérangé à ce moment-là.
— Ah ton sacré café ! Je te contacte car le décollage est toujours prévu pour le vingt-deux, la météo étant clémente à partir de demain.
— C’est une bonne nouvelle !
— Alors je vous attends pour assister au lancement. Au revoir, et bon café !
— Merci Paul. Au revoir.
Paul De Chambord est le directeur technique, responsable du lancement à venir. Il est dans la cinquantaine, cheveux grisonnants coupés très court, de taille moyenne et légèrement enrobé. Le lancement à venir revêt une importance très particulière et la pression est au maximum.
Roberto et Jennifer doivent s’organiser car ils savent que pendant plusieurs jours ils vont être accaparés par leur travail. Ils vont emmener leur fille chez la maman de Jennifer qui vit à Sinnamary, sur la côte atlantique, à soixante kilomètres de Kourou.
— Allons extirper du sommeil mademoiselle, dit Roberto.
Une fois Claire réveillée, vers dix heures, les parents prennent la route. Ne pouvant pas longer la côte, ils passent par l’intérieur du pays. Au loin ils aperçoivent les sites d’observation Toucan, Agami et Colibri.
— C’est là que tu vas faire partir la fusée, papa ? demande Claire.
— Non ma chérie. Un jour tu viendras avec moi, répond Roberto.
— Youpi !
— Et puis ce n’est pas moi qui fais décoller la fusée, précise Roberto. Le travail de ta maman et de moi-même sera d’analyser les images que nous transmettra le télescope spatial qui sera envoyé dans l’espace par la fusée.
— Vous me ferez voir les photos du ciel ?
— Oui ma chérie, répond Jennifer.
— On arrive bientôt chez mamie, commente Roberto.
— Youpi, on va bien jouer ensemble. J’aime beaucoup mamie.
Arrivés chez la maman de Jennifer, qui s’appelle Roselyne, d’origine française, Claire court afin de se blottir dans ses bras. Roselyne, malgré ses soixante-cinq ans est dynamique. Femme élancée, cheveux mi-longs grisonnants, un visage doux et souriant, très soignée dans ses tenues, elle aime énormément sa petite fille. Les parents de Claire savent qu’elle sera heureuse. Ils déjeunent ensemble.
A la fin d’un après-midi passé à jouer et discuter en famille, Roberto et Jennifer repartent. Ils croisent à nouveau les sites d’observation, lieu d’où il est possible de voir les lancements de fusée depuis la Guyane.
D’autres lieux sont aussi connus pour y assister comme le site de Carapa ou la plage des roches à Kourou, la place des amandiers à Cayenne. Le lancement étant proche, il y a déjà beaucoup de touristes qui les occupent.
— Regarde tout ce monde venu voir s’élever la nouvelle fusée Ariane 93, s’étonne Roberto.
— Un lancement de fusée Ariane attire toujours du monde. Cependant celui-ci représente un événement très important pour la connaissance de notre Univers, commente Jennifer.
Au niveau du site d’observation Toucan, ils aperçoivent les centres de lancement des différentes générations d’Ariane, appelé « Carbet4 Toucan ». Ils y revoient dans leurs têtes toute l’histoire de cette fusée dont le programme a été initié à la fin du vingtième siècle5.
— La fusée sera sur son pas de tir demain, commente Roberto.
— C’est un endroit bien sécurisé ? demande Jennifer.
— Une sécurité maximale. Mais on ne peut pas être sûr à cent pour cent.
— Ce lancement représente un enjeu scientifique très important, il ne faudrait pas qu’il y ait un incident, commente Jennifer.
— Pas seulement scientifique, répond Roberto.
— Que veux-tu dire ?
— Si ce lancement remplit sa mission principale, un grand nombre de certitudes ou de croyances pourraient s’effondrer comme un château de cartes, ce qui ne serait pas l’intérêt de tous.
— Tu crois que le danger est si important ?
— Les populations vivent des temps bien difficiles dus au climat changeant, aux conflits croissants, aux pandémies nombreuses et au coût excessif de la vie. Elles souhaitent se raccrocher à quelque chose qui leur donne envie de vivre, se raccrocher à des croyances.
— Que l’on pourrait bousculer, si je te suis dans ton raisonnement.
— Oui, ce qui demande que l’on protège ce lancement.
— Je n’avais pas vu les choses sous cet angle.
La voiture traverse une forêt. Le visage de Jennifer s’illumine, un regard malicieux vers Roberto, arborant un sourire séducteur.
— Tu peux t’arrêter dans ce petit bois tranquille, chéri ?
— Pour quelle raison, nous ne sommes pas très loin de la maison.
— Je voudrais profiter de ta fusée, chéri ! Maintenant !
— Oh !
— Hum, elle est prête pour une mise en orbite.
— Tu es impossible !
Et dans cette végétation, à l’abri des regards indiscrets, la voiture est animée de mouvements qui ne laissent aucun doute sur l’activité qui occupe les passagers.
1 Une carte de la Guyane française vous est proposée en page 14 afin que vous puissiez situer les villes nommées.
2 L’holophone, téléphone du futur, a la particularité d’afficher une représentation holographique des interlocuteurs lors d’un appel en cours.
3 En 2024, devrait décoller pour la première fois la fusée Ariane 6.
4 Un carbet est un abri de bois, sans murs, surtout rencontré en Amérique du Sud. Il est conçu pour y attacher des hamacs.
5 Le programme Ariane est lancé en 1973 par le CNES afin de donner les moyens à la France de mettre en orbite ses satellites sans dépendre des autres puissances spatiales.
Grand Esprit souhaite s’entretenir par la pensée avec Esprit Intendant. Ce dernier est son « collaborateur » le plus proche. Outre qu’il détecte les éventuelles mauvaises pensées des esprits qui souhaitent un entretien avec Grand Esprit, il est un conseiller et un confident pour ce dernier.
Mais la notion d’esprit est-elle bien claire ?
C’est simple et complexe à la fois. Ce sont des assemblages de particules liées entre elles par des forces. L’utilisation de certaines particularités quantiques de ces forces leur permet d’avoir une conscience6et de pouvoir communiquer entre eux, par la pensée.
Tentative de représentation d’un esprit
Dans quel environnement vivent ces esprits ? Communiquant uniquement par la pensée, c’est le silence qui se remarque le plus. Outre cela, leur environnement ne comporte rien d’autres qu’eux-mêmes. Des particules solitaires apparaissent de-ci de-là, mais pas de belles et complexes structures à observer.
L’esprit guide de tous les autres, se nomme donc Grand Esprit. Il dirige cette communauté. Au fait, combien sont-ils d’esprits ? Des centaines ? Des milliers ? Des millions ? Personne ne le sait et cette question n’a même pas vraiment de sens pour eux.
Ils s’interrogent sur le but de leur existence depuis peu, même s’ils sont là depuis un temps qu’ils ne peuvent définir, cette notion n’ayant aucune signification pour eux.
A côté de ces esprits, il existe des anti-esprits. S’ils sont animés des mêmes forces, ils résultent d’un assemblage d’antiparticules. Ils sont dirigés par Grand Anti-esprit. De même, tout le monde est dans l’ignorance de leur nombre. Leur existence est aussi monotone que celle des esprits, mais ils sont d’un tempérament différent, si cette notion a un sens dans leur environnement.
Les esprits ont envie de changement, de nouveautés, emplis de leur envie de créer. Les anti-esprits souhaitent que les choses restent ce qu’elles sont, craignant l’inconnu et l’incertitude. Ce pourrait juste être une philosophie différente, cependant cela va plus loin. Les anti-esprits sont belliqueux et ne tolèrent guère que leur point de vue ne soit pas retenu. Les esprits sont de nature pacifique, plus conciliants, mais n’hésitent pas à défendre leurs idées, en recherchant la concertation principalement.
Les esprits et les anti-esprits peuvent communiquer entre eux par la pensée mais ne doivent pas se rencontrer physiquement. Ce serait trop dangereux. Particules et antiparticules s’annihilent lors d’une telle confrontation, les deux disparaissant, se transformant.
La notion d’esprit et d’anti-esprit étant clarifiée, revenons à notre histoire.
— Êtes-vous en connexion, Esprit intendant ? demande Grand Esprit.
— Tout à fait, Grand Esprit, répond Esprit Intendant. Vous souhaitez que nous conversions ?
— J’aurais besoin de votre ressenti et avis.
— A quel sujet ?
— Comment trouvez-vous notre environnement ?
La question déstabilise quelque peu Esprit Intendant. Il craint plutôt Grand Esprit et hésite assez souvent à exprimer ses pensées réelles quand elles sont amenées à contrarier son interlocuteur. Il est très difficile de dissimuler des pensées à Grand Esprit qui peut les scruter attentivement. Toutefois l’expérience d’Esprit Intendant lui permet d’établir de temps en temps des réponses sibyllines.
— Il est intéressant du fait de votre présence en son sein.
— Autrement dit, hormis ma présence, il est terne.
— Plutôt, il est vrai.
— C’est ce que je pense aussi. Quelle est notre raison d’être, à part discuter de sujets variés, et vous de contrôler que personne n’envisage de me nuire ?
— Qu’aimeriez-vous faire pour égayer cet environnement ?
— Créer ! Créer ! Créer ! martèle par la pensée Grand Esprit.
— Noble envie. Mais que créer ?
— Quelque chose qui évolue, qui créera également des structures évolutives, qui elles-mêmes créeront d’autres entités, ainsi de suite.
— C’est très ambitieux et assez flou en même temps.
Esprit Intendant n’a pas réussi à temps à retenir cette pensée qui a quelque peu agacé Grand Esprit. Il n’a pas l’habitude de lancer une idée sans y avoir bien réfléchi. L’impatience de son interlocuteur l’a empêché de développer son propos, qui serait alors apparu beaucoup moins flou. Toutefois, souhaitant exposer son idée, il conserve tout le calme nécessaire dans les pensées à suivre.
— Bien que nous soyons constitués de particules dotées d’une durée de vie importante, Il faut que ce projet se réalise sur une longue période, afin que plusieurs générations de Grand Esprit, d’Esprit Intendant et d’esprits en général s’activent sur celui-ci.
— Vous avez surement un projet bien construit à m’exposer.
Grand Esprit est ravi de voir que son interlocuteur s’est ressaisi et a compris que le maître des lieux ne s’exprime pas sans raison et réflexion.
— Tout à fait, bien que je l’avoue, il y aura des évolutions que nous avons du mal à prévoir dès maintenant.
— Cela donnera du sens à notre existence.
— Exactement. Mais quelque chose m’embête.
— De quoi s’agit-il ?
— Nous, les esprits, voulons créer de la diversité. Nous souhaitons avoir une activité plus prenante qu’aujourd’hui.
— C’est tout à notre honneur, et au votre, de nous mettre sur le chemin.
— Mais ne voyez-vous pas des opposants à ce projet ?
— Les anti-esprits, je présume. Leur amour pour l’immobilité est grand.
— C’est surtout la peur de l’inconnu, des problèmes potentiels qui les paralysent.
— Il va falloir parlementer.
— Si la diplomatie les intéresse.
— Mais que voulez-vous créer ?
— Un U N I V E R S ! Le premier ! L’Univers Premier !
6 L’esprit quantique ou conscience quantique est une hypothèse qui suggère que des phénomènes quantiques (par exemple l’intrication ou la superposition d’états) sont impliqués dans le fonctionnement du cerveau, et en particulier dans l’émergence de la conscience. Cette hypothèse fait l’objet de controverses.
Autrefois connue comme sa voisine Cayenne pour son bagne, Kourou, ville de plus de vingt-quatre mille habitants est aujourd’hui célèbre pour son centre spatial. En effet sa situation fait qu’il ne peut y avoir de secousses sismiques fortes, ni de vents violents, ni d’ouragans.
Quittant une de ces longues plages au sable clair qui bordent la côte atlantique, un jeune homme, la trentaine, grand et svelte, journaliste de son état se dirige vers le centre spatial. Il va suivre un lancement de la plus haute importance, celui du télescope James Webb 27.
Télescope James Webb lancé en 2021
Une fois les contrôles passés, il entre dans une salle bardée d’ordinateurs et dotée d’un immense mur d’écrans. Il en est tout ébahi.
Un homme s’approche de lui pour le saluer. Il s’agit de Paul De Chambord, le directeur technique, responsable du lancement en cours. Le journaliste tend la main et le salue.
— Bonjour monsieur De Chambord. Je suis Eddy Lanson de « Sciences actuelles ». Nous sommes bien dans la salle de contrôle ?
— Bonjour. Nous sommes dans la salle de contrôle Jupiter V8 d’où nous vérifions le déroulement du lancement.
— La salle est remplie. Qui assiste au lancement de la fusée ?
— Aux premiers rangs se trouvent ceux qui travaillent sur le lancement de la fusée Ariane 9. Ce sont les opérationnels. Comme un orchestre, ce groupe a son chef, moi-même. Ensuite il y a les clients du lancement qui veulent assister, en espérant que tout ira pour le mieux. Après se trouvent les journalistes, comme vous, dans des cabines dédiées à chacun.
— Vous avez évoqué le nom d’Ariane 9. C’est la dernière fusée de la série ?
— Oui, la dernière génération. C’est une fusée gigantesque. Elle mesure quatre-vingt-dix mètres de haut pour huit mètres de large. Elle comprend deux étages propulsés par des moteurs-fusées à ergols-liquides9 brûlant tous deux de l'hydrogène et de l'oxygène liquide. C’est un des derniers lancements à se faire depuis la Terre.
La base permanente existant sur la Lune construira les nouvelles fusées et les lancements se feront depuis notre satellite naturel, demandant ainsi moins d’énergie.
— C’est impressionnant à voir, cette fusée, s’exclame Eddy Lanson. — Et à faire décoller, croyez-moi.
— Je vois que vous surveillez constamment ces voyants au-dessus des consoles informatiques.
— Ils nous indiquent l’état des points de contrôle.
— Il y en a beaucoup !
— Oui, il faut sécuriser au mieux le lancement. Si un ou plusieurs de ces voyants passent au rouge, nous annulons la procédure de décollage et effectuons des vérifications.
— Tout est au vert, donc tout va bien ?
— Tout est parfait pour le moment, dit Paul De Chambord. Le lancement va se faire à l’heure prévue, la météo étant très clémente.
Deux scientifiques, enthousiasmés par ce lancement, interviennent dans la conversation, coupant la parole à Paul De Chambord.
— C’est une excellente nouvelle, répond Roberto Mancini. Nous allons pouvoir analyser de belles images.
— A nous les débuts de l’Univers, s’enthousiasme Jennifer Carter.
— Ne vous emballez pas trop tôt, répond Paul De Chambord. Un incident peut vite arriver.
— Nous avons le droit d’être optimistes, répond en souriant Roberto Mancini.
— Je suis désolé, intervient Paul De Chambord, s’adressant au journaliste. Il faut que je me consacre au lancement. Je reviendrai vers vous après.
— Pas de soucis, répond Eddy Lanson. Bon lancement.
Paul De Chambord, accompagné de Roberto Mancini et Jennifer Carter, les principaux intéressés par le lancement du télescope géant, rejoignent les écrans de contrôle pour suivre le compte à rebours.
Roberto Mancini et Jennifer Carter sont parmi les opérationnels qui attendent avec le plus d’impatience le lancement de la fusée. Ils auront le privilège d’analyser les images qu’enverra le nouveau télescope spatial James Webb 2, successeur de la première génération.
C’est dans cet endroit surprenant, le temple des lancements de fusées, que tous observent un silence au moment crucial. Arrivé à la séquence irréversible, six secondes avant le décollage de la fusée, c’est la mise à feu des charges d’allumage. Trois secondes après, c’est le calcul de la trajectoire de la fusée qui est transmis aux moteurs. Au top, vient ensuite l’allumage de ceux-ci. Dix secondes plus tard la fusée décolle et c’est l’angoisse qui saisit tous les acteurs de ce projet fantastique, celui du plus grand télescope spatial, capable de voir le début de l’Univers.
La montée de la fusée se fait vacillante d’abord, de gauche à droite, pour rapidement se stabiliser à la verticale. Six minutes après, les moteurs et les réservoirs se détachent, et retombent dans les océans terrestres. C’est toujours un moment qui génère une grande dose de stress. Quinze minutes après, le télescope est propulsé dans l’espace, plié, et se dépliera par la suite. Encore quelques minutes pour bien vérifier que tout est correct.
Comme le lancement est réussi, la salle s’emplit de cris de joie, de hourras et d’applaudissements. Une scène de liesse qui fait suite à des jours interminables de stress. Un tel budget en jeu, un tel intérêt scientifique, tout concourrait à rendre cet instant si important.
Roberto Mancini et Jennifer Carter se prennent dans les bras, tout sourire, s’embrassent même furtivement sur les lèvres. Ils savent maintenant qu’ils vont pouvoir travailler sur les images que transmettra le télescope. Ils s’imaginent déjà de belles émotions.
Il faut dire que dans ce projet tout est superlatif. Ce télescope propose un diamètre du miroir de treize mètres, composé de trente-six segments. Il a été envoyé dans l’espace par la gigantesque fusée Ariane 9. Comme prévu, Paul De Chambord revient vers le journaliste.
— Le lancement du télescope James Webb 2 s'est bien déroulé apparemment, dit Eddy Lanson.
— Oui, sans aucun problème, répond Paul De Chambord avec joie. Heureusement, car il y avait déjà eu deux reports du fait d’une mauvaise météo.
— Quel est le but de ce nouveau télescope spatial ?
— Il y en a plusieurs. En premier lieu détecter les premiers moments de l’Univers. Ensuite étudier la formation et l’évolution des galaxies et des étoiles, mieux que le télescope de première génération. Pour terminer, scruter les exoplanètes.
— Voir les débuts de l’Univers, c’est possible ?
— Avec ce nouveau télescope nous pourrons nous approcher du début de notre Univers. Si tout se passe bien nous pourrions voir l’instant 0.
— Et voir Dieu ? ironise le journaliste.
— Je ne sais pas du tout ce que nous verrons.
— Et concernant les exoplanètes, comptez-vous détecter de la vie à leur surface ?
— Nous analysons les informations provenant de ces planètes lointaines, par exemple par la méthode de spectroscopie de transmission.
— Houlà, c’est surement obscur pour ceux qui vont nous lire. Vous pouvez expliquer cette méthode ?
— Bien sûr. Quand une exoplanète passe devant son étoile, la lumière de l'étoile traverse l'atmosphère de celle-ci. Les scientifiques étudient cette lumière afin d'en savoir plus sur la composition chimique de l'atmosphère de la planète. Avec ce nouveau télescope nous pourrons voir la surface de ces planètes, directement.
— Et peut-être voir des petits hommes verts ? ironise encore le journaliste.
— Détecter un indice sur l’activité d’une forme vivante, répond sérieusement Paul De Chambord. Excusez-moi mais il faut que j’y retourne, mon directeur adjoint me fait de grands gestes.
— Un problème ?
— Nous sommes à trente minutes du lancement, le déploiement du télescope doit commencer.
— Le déploiement du télescope ?
— Le miroir a un diamètre trop important pour être intégré dans la fusée tel quel. De chaque côté des panneaux composés de miroirs sont repliés et se déploieront dans l’espace dans les jours qui suivent. Ça commence par le déploiement des panneaux solaires maintenant. Désolé, il faut vraiment que j’y aille.
— Merci pour vos réponses, monsieur le directeur.
Paul De Chambord rejoint son adjoint, Juan Da Cruz qui s’agite, craignant un incident majeur.
— Les panneaux ne sont pas déployés ? interroge Paul De Chambord.
— Si, ça se déroule parfaitement, répond Juan Da Cruz. Il va falloir surveiller la suite du déploiement dans les jours à venir.
— Bon, ça suit son cours. Alors pourquoi ces grands gestes ? interroge Paul De Chambord.
— Regardez sur l’écran, Paul, répond son adjoint.
— Je vois le point qui représente le télescope qui se dirige vers le point de Lagrange L210.
— Vous avez raison, mais regardez mieux.
Paul scrute l’écran en détail. Il cherche ce que veut lui montrer Juan Da Cruz. Il balaye attentivement des yeux l’écran radar face à lui. Après une bonne minute d’observation il voit un second point.
— Qu’est-ce que c’est, demande Paul De Chambord, pointant le point sur l’écran.
— Justement, je n’en sais rien, répond Juan Da Cruz. Mais cela ne me paraît pas normal.
— Il y a une autre mission dans les parages du télescope spatial ?
— A ma connaissance non.
Paul De Chambord, intrigué, sait à qui s’adresser pour avoir une réponse plus claire. Il saisit son holophone, compose un numéro. Au bout de la cinquième sonnerie, le correspondant appelé apparaît sous forme d’hologramme.
— Bonjour Bob, tu vas bien ? demande Paul De Chambord.
— Salut Paul, ça va, répond Bob Gordon. Et toi ? tu dois être content du lancement du télescope. J’ai eu des informations par ton équipe.
Bob Gordon est le directeur du Service de Surveillance de l’Espace (SSE). Il est chargé, avec son équipe de contrôler la sécurité lorsqu’il y a des missions spatiales.