Descendance - Tome I - Olscar Borcan - E-Book

Descendance - Tome I E-Book

Olscar Borcan

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Beschreibung

Qui sont ces hommes qui traquent Albot, ce jeune adolescent devenu orphelin ? Ils semblent convoiter l'objet que son père lui a légué avant sa mort. Albot n'a pas d'autre choix que de fuir en mettant sa vie entre les mains de parfaites inconnues. Son voyage le mènera dans des lieux étranges et hostiles, que l'être humain ne peut imaginer. Il sera confronté à des choix qui changeront sa vie. Sortira-t-il indemne de ces épreuves ? La première pierre du transhumanisme est posée, une nouvelle évolution pour l'espèce humaine est en marche.

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Seitenzahl: 290

Veröffentlichungsjahr: 2020

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Le plus grand des accomplissements de la science du XX ème siècle fut la découverte de l'ignorance humaine… (Thomas Lewis)

Table des matières

PROLOGUE

CHAPITRE I : L'accident

CHAPITRE II : Seul au monde

CHAPITRE III : Le réveil

CHAPITRE IV: Le cylindre

CHAPITRE VI: Descendance History

CHAPITRE VII : Le cristal

CHAPITRE VIII : Cache-cache

CHAPITRE IX : L’attaque

CHAPITRE X: L’extraction

CHAPITRE XI : La traque

CHAPITRE XII : Le tunnel

CHAPITRE XIII : Sauvetage

CHAPITRE XIV : La porte

CHAPITRE XV : La base

CHAPITRE XVI : Des choix non cartésiens

CHAPITRE XVII : Dernières volontés

CHAPITRE XVIII : Le passage

CHAPITRE XIX : La meute

CHAPITRE XX : Noël dans les bois

CHAPITRE XXI: Guet-apens

CHAPITRE XXII : Recueillement et voyage retour

CHAPITRE XXIII : Porte de sortie

CHAPITRE XXIV : Un repos bien mérité

CHAPITRE XXV : Départ précipité

CHAPITRE XXVI : Voyage retour

PROLOGUE

Une réunion de la plus haute importance se déroulait dans une vaste pièce close qui baignait dans une pénombre mortifère. Les personnes présentes à cette réunion représentaient les plus hautes instances de ce consortium. Les problématiques que posait Gaialinea, appelée plus communément Terre, ne représentaient jusqu’à présent qu’un insignifiant grain de sable sur l’échelle de leurs préoccupations.

Mais ce grain de sable était en train de se transformer en caillou et s’ils ne faisaient pas rapidement quelque chose, il risquait de devenir un rocher.

L’androgyne qui avait pris la parole et qui s’adressait au consortium se prénommait Eldmanaym, il n’avait qu'une seule et unique pensée : réussir à résoudre un problème sur lequel tous les autres avaient échoué. Cette réussite lui garantirait à coup sûr le poste suprême, vacant depuis près d’un siècle : celui de Regastral.

— Messieurs, on vient de m’informer que l’on a trouvé la trace de l’objet dérobé par le passé. Cet objet se trouve dans le continuum Gaialinea. Vous connaissez tous l’incidence que pourrait avoir cet objet s’il venait à être assimilé par un individu. Même si les chances que cela puisse arriver sont infinitésimales, nous ne pouvons courir ce risque. Pour le bien de notre civilisation, je vous demande de voter pour une intervention immédiate afin de récupérer cet objet et d’éliminer toute personne ayant été en contact avec celui-ci.

Les douze consuls qui composaient le consortium acquiescèrent de la tête, montrant leur total accord. La confirmation par voie télépathique valida cette décision.

Malgré cette apparente unanimité, en réalité, Krejlien, un des douze consuls, avait été contraint d’accepter cette proposition en contradiction avec ses valeurs et ses idées. Mais dans l’immédiat, il ne pouvait en aucun cas prendre le risque d’attirer l’attention sur lui.

Eldmanaym poursuivit son petit laïus :

— Puisque la décision est unanime et pour ne pas perdre de temps, je me suis permis de devancer votre accord. En faisant appel à notre élite pour mener à bien cette mission.

Et sur cette phrase, la porte s’ouvrit, laissant entrer une dizaine d’hommes armés.

— J’ai sélectionné moi-même l’unité d’élite qui est devant vous. Ces hommes rempliront cette mission avec succès, je m’en porte garant.

Les hommes expérimentés qui composaient l’unité d’élite avaient tous subi une modification de leur cortex cérébral. Ils étaient maintenant démunis de la fonction la plus humaine qui soit, celle de la compassion. Et afin de s’assurer de la complète dévotion de ces hommes, un petit ajout processoral avait été greffé à leur insu dans leur cerveau.

Krejlien se demandait s’il avait eu raison d’accepter cette proposition. N’aurait-il pas mieux valu faire opposition au vote et espérer que certains consuls se joignent à lui ? Mais des bruits de couloir laissaient entendre qu’Eldmanaym n’attendait que cela pour prendre le pouvoir, qu’il avait réussi à faire passer une loi obligeant les militaires à subir cette intervention chirurgicale. Krejlien ne connaissait pas le pourcentage d’unités déjà opérées, mais cela ne laissait rien présager de bon pour l’avenir.

Eldmanaym prit un ton solennel pour s’adresser aux soldats :

— Messieurs, nous comptons tous sur vous pour mener à bien cette mission. Nous mettons à votre service nos dernières technologies temporelles que nous avons développées dans nos laboratoires. Vous avez carte blanche en termes d’élimination: chaque humain ayant eu un contact avec le cristal doit être immédiatement éliminé. Ce cristal est primordialpour l’équilibre de notre civilisation, car il n’est pas tolérable qu’un groupe de décideurs puisse nous trahir et mettre en danger tout ce que nous avons construit. La mission débute dès que vous aurez quitté cette pièce, et ne vous représentez pas à cette assemblée sans ce cristal.

Chaque soldat mit un genou en terre, la main gauche dans le dos, le poing droit au sol et la tête levée pour montrer leur totale obéissance, et ils prononcèrent leur devise :

— Corps et esprit ne font qu’un avec notre nation et mourir nous le pouvons.

Eldmanaym fit un signe de la main et les hommes se levèrent pour quitter la pièce. Il jouissait dans son for intérieur de voir son plan se dérouler à la perfection, car plus rien ne pouvait venir maintenant contrer son ascension.

CHAPITRE I : L’accident

Un de ses souvenirs récurrents, qui lui revenait sans cesse quand il fermait les yeux, était celui de la voiture sortant de la route, son père braquant le volant vers la gauche tout en pestant contre ce sanglier planté en plein milieu de ce virage corse. Que pouvait bien faire cet animal à cet endroit ?

Les vacances d’été touchaient à leur fin. Ses parents avaient loué dans les hauteurs de Propriano une magnifique villa qui appartenait à un diplomate de leurs amis. Une villa qui avait réussi à échapper au sport national corse : le plasticage.

Cette demeure était composée d’une magnifique piscine et d’un accès à une superbe plage au sein d'une crique restée sauvage.

Sa famille ne se lassait pas, chaque soir, de regarder le coucher de soleil sur la mer Méditerranée après le repas mijoté par leur cuisinière, composé de spécialités locales pour le bonheur de leurs papilles.

Suite à un message de la veille au soir leur demandant de rentrer au plus vite, ils étaient sur la route du retour afin de prendre l’avion à l’aéroport d’Ajaccio pour rejoindre le continent.

Il était un peu déçu de devoir rentrer une semaine plus tôt que prévu, mais ces deux semaines passées en famille avaient été vraiment géniales.

Albot regardait la route et le ravin par la fenêtre. Il se retourna rapidement en direction de sa sœur qui s’était mise à pleurer et à crier en voyant cette foutue bête.

La voiture était partie en tête-à-queue, poursuivant sa course dans un dérapage incontrôlé avec pour seule destination : le vide.

Son père essaya tant bien que mal de retrouver un semblant de contrôle du véhicule, en tournant ou en braquant le volant, mais sans succès. Le crissement des pneus amplifiait la peur qui les submergeait.

Puis le bruit cessa d’un seul coup, comme on coupe le son d’une chaîne hi-fi ou d'un film durant son visionnage. Pendant un court laps de temps, ils se regardèrent tous, surpris par ce silence, et restèrent figés comme des statues.

Même sa sœur, qui n’avait pas arrêté de crier depuis l’apparition de cet animal, se tut.

La voiture avait terminé sa route dans un arbre qui avait poussé au gré des vents. Un arbre penché au-dessus d'un profond précipice, près duquel on pouvait apercevoir, en contrebas, une rivière. La moitié du véhicule sur le tronc de l’arbre et l’autre moitié pratiquement dans le vide.

Ils pensèrent s’en être tirés à bon compte, avec en tout et pour tout une grande frayeur familiale. C’était une histoire à raconter à leurs amis, une mésaventure de fin de vacances qui finissait bien. La comparaison qui lui vint à l’esprit était l’avion qui amorce sa descente, avec ce bruit de pompe hydraulique résonnant dans tout l'appareil pour sortir ce foutu train d’atterrissage. La plupart des passagers se passent un scénario catastrophe et prient pour sortir de ce cauchemar.

Et d’un coup, le bruit caractéristique du circuit de pression d’huile en plein travail se fait entendre. On peut alors apercevoir sur leur visage un certain sourire qui en dit long sur le niveau de stress. Un sourire qui exprime un certain soulagement et toute la gratitude pour leurs prières entendues.

Comme pour les passagers de l’avion, l’intensité des regards en disait long sur leur frayeur. Et, comme pour conjurer ce sort qui s’abattait sur leur famille, ils se mirent à sourire.

Il régnait dans l’habitacle du véhicule une certaine sérénité et une certaine joie tandis qu’ils croyaient avoir réussi à échapper, cette fois-ci, à la Faucheuse.

Mais apparemment, le destin avait d’autres projets plus funestes.

L’arbre, qui avait réussi à pousser à un endroit si peu propice et si inconfortable du fait de la nature du terrain, se mit à légèrement bouger, presque imperceptiblement, mais suffisamment pour casser l’équilibre précaire de la balance de la vie. Il était le dernier rempart qui les séparait d’une mort certaine.

La voiture accompagna le mouvement de cette nouvelle secousse et bascula dans le vide, brisant ainsi le lourd silence qui s’était installé, leur rappelant les montagnes russes d’un parc d’attractions. Avec cet effet de vitesse et de précipitation dans le vide.

La chute dura quelques secondes, suffisamment pour voir sa vie dérouler devant ses yeux comme une bobine de film qui tourne à vitesse rapide. Bobine pour laquelle nous sommes seuls capables de comprendre et de traduire les scènes qui s’y déroulent.

La mère se retourna et rompit le silence pour lui dire cette dernière phrase, dont il ne comprit pas le sens :

— Seuls nos élus pourront les sauver. Ne te sépare jamais du cristal.

Son père s’était également retourné, pour sourire à sa sœur avant de le dévisager et de lui dire d’un ton plus que solennel :

— Prends bien soin de ta sœur, Albot !

Sa sœur qui criait à tue-tête qu’ils allaient tous mourir, son père cherchant désespérément un objet dans sa poche, sa mère répondant qu’il était trop tard.

Le véhicule toucha une première fois le sol rocailleux trente mètres plus bas avant de rebondir tel un ballon, accompagné du bruit de la tôle froissée, du verre cassé, de l’airbag qui se gonfle à la vitesse du son, mélangé à des cris stridents.

Comment garder un semblant de concentration ? Dans cette succession de tonneaux, ils poursuivirent leur interminable descente vers une mort certaine.

Tout son corps était ballotté de gauche à droite, le siège conducteur devant lui avait écrasé une de ses jambes et sa tête avait à plusieurs reprises frappé la vitre côté passager.

C’est alors qu’il aperçut une sorte de lueur, comme un flash venant éclairer ses pupilles, avant de s’évanouir après un dernier choc à la tempe.

CHAPITRE II : Seul au monde

Combien de temps était-il resté inconscient ? Il ne le savait pas.il avait du mal à se rappeler où et comment il en était arrivé là.

Il ouvrit lentement une paupière, mais la seconde, malgré l’ordre de s’ouvrir, persista à rester fermée. Il ne voyait plus que de son œil droit.

Affalé sur un rocher, il essaya de jauger la gravité de ses blessures. Car hormis son œil, il avait une douleur insupportable à la jambe droite, et son épaule gauche s’était retournée.

Une douce chaleur de liquide coulait le long de sa joue. Et il n’arrivait plus à bouger ni à émettre le moindre son.

Son attention fut attirée par un bruit d’eau et de gargouillis, et quand il essaya de se redresser malgré la douleur, ce fut pour assister, totalement impuissant, à une scène digne d’un film d’horreur. Leur voiture s’enfonçait lentement dans la rivière avec ses parents sans connaissance à l'intérieur. Il n’apercevait plus sa sœur. Mais elle devait sûrement être couchée sur le siège arrière.

Ses forces l’abandonnèrent tandis qu’il essayait de se lever pour leur porter secours, et il finit par perdre connaissance... Il revint de nouveau à lui avec une nouvelle perte de repères et de notion du temps. Le soleil était maintenant à son zénith, indiquant un horaire probable aux alentours de midi. Et la douleur qui s’ensuivit lui fit très rapidement se rappeler ce qui lui était arrivé.

Non loin de lui, des corbeaux jetant des croassements de mauvais augure le fixaient de leurs yeux rouges avec pour seule envie : gober les siens. Albot aperçut également deux sangliers sauvages qui mâchaient des vêtements éparpillés un peu partout et un sac en cuir qui avait dû être éjecté de la voiture comme lui.

On disait que ces bestioles étaient capables d’avaler n’importe quoi, même des roues de voiture si l’occasion s’en présentait. Le garçon était dans un état d’impuissance, incapable de bouger.

La voiture n'était plus visible, elle avait disparu dans la rivière avec sa seule et unique famille à l'intérieur. Des larmes lui montèrent aux yeux, accompagnées d'une douleur insoutenable provenant de son œil gauche.

Il sentit un bec venir taper sur sa jambe qui saignait, mais impossible de sortir le moindre son de ses cordes vocales, ce qui lui aurait permis de hurler sa douleur et par la même occasion défaire fuir ces charognards dignes d’un film d’Alfred Hitchcock. Il se sentait faible et une fois de plus complètement impuissant face à tout ceci.

Ses neurones tournaient à plein régime afin de trouver une solution pour se sortir de ce guêpier. Les remontrances de sa mère lui revinrent alors à l’esprit, elle l’avait maintes fois sermonné sur le fait qu’il risquait de ne pas pouvoir lui donner des petits-enfants s’il s’obstinait à mettre son téléphone portable dans la poche de son jean. Il se demandait si son téléphone portable était encore en étatde marche ou bien s’il avait rendu l’âme.

Après plusieurs tentatives, qui lui semblèrent durer une éternité, il finit par le retirer de sa poche. L’écran noir avait subi un impact. Il appuya sur le bouton marche de l’appareil en priant et en se promettant de brûler un cierge au format magnum s’il réussissait à l’allumer et à sortir de cette galère.

Le son reconnaissable de démarrage de son téléphone fit immédiatement fuir ces vautours européens. Mais allait-il pouvoir composer le code PIN d'un seul œil et sur un écran à moitié fêlé ?

L’un des sangliers, d’une centaine de kilos, afficha son mécontentement en tapant lourdement sa patte sur le sol, tête en avant et en le menaçant lourdement de ses défenses affûtées. Il ne lui fallut pas longtemps avant de charger.

De mémoire, certains sangliers sauvages sont carnivores, ou bien était-ce juste la peur qui lui faisait imaginer des choses ?

L’animal stoppa net à un mètre de sa tête, émit un son strident et le renifla.

L’odeur du sang qui émanait de sa plaie avait l’air d’attirer sa curiosité. Le blessé ne savait pas quoi faire, des larmes d’impuissance lui vinrent aux yeux. Et d’un coup, le sanglier se retourna, car un second sanglier — qui devait être une laie — l’avait interpellé. Il émit un nouveau “groin groin”, puis partit la rejoindre et disparut dans le maquis corse.

Albot put enfin revenir à son problème de téléphone, car pour le moment il en était toujours au même stade. Son premier essai fit apparaître un message d’erreur rouge suivi d’un message indiquant “ deux tentatives restantes ”.

La douleur, devenue insoutenable, le faisait transpirer, accentuant sa peur de bloquer l’appareil. Plus qu’une chance pour sortir vivant de ce ravin.

Il fallait absolument qu’il retrouve un peu de calme pour réussir à taper ce foutu code à quatre chiffres.

Il avait, par moments, des troubles de la vision. Ajoutons à cela la sueur qui brûlait son unique œil capable de s’ouvrir. Taper sur les touches tactiles du téléphone avec la main qui le tient et faire attention au chiffre qui n’apparaît que quelques secondes n’était pas une chose facile.

Mais on ne sait par quel miracle, l’appareil démarra, l’invitant à se connecter sur le réseau de son opérateur téléphonique via un code de déverrouillage. Heureusement qu’il avait gardé le code basique d’origine de quatre zéros.

Une barre de réseau ! En bas de ce précipice, les ondes de l’émetteur avaient du mal à passer. Mais cela était suffisant pour appeler. Etait-il capable de se rappeler le numéro des secours ? Son cerveau était complètement embrumé et ramolli.

C’est alors qu’il eut un flash. Il avait téléchargé des applications représentées par des grosses icônes, dont l’une permettait d’appeler le poste de police le plus proche via sa géolocalisation.

Il appuya sur l’icône d’appel d’urgence, mit son téléphone sur haut-parleur, et après quelques sonneries, le message signalant que la conversation serait enregistrée déboucha sur une voix indiquant que toutes les lignes étaient occupées, qu’il fallait attendre ou bien rappeler plus tard.

Après quelques minutes qui lui parurent une éternité, une voix féminine se présenta pour lui demander la raison de son appel. En état de choc, il fut dans une incapacité totale de sortir la moindre syllabe, et commença à paniquer. La voix dans l’appareil insistait, avec un “allô” de plus en plus insistant, ce que l’on pouvait déduire de son intonation.

Après une énième tentative de prononciation, il finit par réussir à sortir le seul mot qui lui vint à l’esprit : “ Secours !” La personne au bout du fil comprit immédiatement l’urgence de l’appel et lui demanda de ne pas raccrocher afin de pouvoir le localiser. Mais avec tout cet effort et cette énergie, il perdit de nouveau connaissance.

Quand il ouvrit son unique œil valide, il vit des gens s’agglutinant autour de lui telles des fourmis autour d’un pot de miel. Enveloppé dans une coquille, avec une minerve autour de son cou, il était sous perfusion. On lui posait des questions qu’il était incapable de comprendre et d’interpréter.

De toute façon, ses cordes vocales étaient trop douloureuses pour prononcer le moindre mot.

Il entendit le bruit de l’hélicoptère stationnant au-dessus de lui, avant de se sentir soulevé dans les airs. Ce fut la dernière chose qu’il saisit avant le trou noir qui suivit.

CHAPITRE III : Le réveil

Après environ quatre semaines de coma, le réveil à l’hôpital fut assez douloureux aussi bien physiquement que moralement. Opéré et plâtré, Albot était incapable de s’alimenter tout seul et on l’assistait pour tous les actes les plus basiques de la vie courante.

Les réponses concernant sa famille l’avaient effondré. Seuls les corps de ses parents avaient été retrouvés. Celui de sa petite sœur restait introuvable, et ce malgré le drainage pendant plusieurs jours de la rivière par des plongeurs de la gendarmerie nationale.

D'après les gendarmes, il avait eu une chance inouïe d’avoir été éjecté de la voiture au moment même où celle-ci tombait dans le précipice.

L’hypothèse la plus probable était que sa ceinture de sécurité avait été mal bouclée, que sa portière s’était ouverte lors du choc avec le sol, et qu’il avait été éjecté hors du véhicule lors d’un des nombreux tonneaux. Tout ce dont il était capable de se souvenir et dont il était sûr, c’était que ses parents n’auraient jamais conduit une voiture avec des enfants non attachés. Ils étaient très attentifs à tout ce qui concernait la sécurité de leurs enfants et la sécurité dans la voiture arrivait en tête de la liste.

De plus, cette voiture était neuve et équipée de toutes les options et de tous les gadgets que son père s’était empressé de prendre: airbags avant, arrière, latéraux, détection de ceinture non attachée et de porte mal fermée, GPS, direction assistée, toit ouvrant, roue anti-crevaison. C’était la première voiture connectée à Internet via un ordinateur embarqué connecté au serveur se trouvant chez lui.

Son père avait expliqué à sa mère que tout cela venait en série et qu’il n’y avait pas de coût supplémentaire ; qu’avec tout ça, les enfants seraient en sécurité.

Il était donc inconcevable que son père n’ait pas été alerté par l’électronique embarquée dans cette navette spatiale à quatre roues, une aimable voix féminine n’aurait pas manqué de lui signaler des ceintures arrière non bouclées, appuyée par la voix plus ferme de sa mère pour leur redire de boucler leur ceinture.

En y pensant, la voiture aurait même tout simplement refusé de démarrer avec une porte ouverte…

Le garçon s’en sortait avec une double fracture du tibia droit, un déboîtement de l’épaule gauche, trois côtes fêlées, sans oublier des contusions et des hématomes un peu partout sur le corps, le tout accompagné d’une opération chirurgicale pour son œil gauche : suite à l’impact de son crâne contre une souche d’arbre, le nerf optique avait été touché.

On avait réussi à sauver son œil, mais il avait perdu une partie de sa vue. Il se trouvait ridicule avec sa coque, qui ressemblait à un cache-œil comme dans les vieux films de pirates.

Les pronostics des médecins étaient assez réservés etpessimistes. Nul ne pouvait dire s’il allait retrouver complètement la vue à moyen ou à long terme.

À son réveil, un inspecteur de police vint l’interroger.

Il avait essayé d’expliquer qu'il avait bien bouclé sa ceinture de sécurité et que la voiture aurait émis une alerte sonore et visuelle pour signaler qu’une porte était mal fermée. L’inspecteur lui sourit gentiment, puis essaya de le réconforter aussi poliment que possible. Mais il n’y avait rien à faire, la parole d’un adolescent de quatorze ans faisait pâle figure face aux spécialistes de la sécurité routière et aux enquêteurs aguerris par leur expérience de terrain.

Son séjour à l’hôpital l’avait empêché d’assister à l’enterrement de ses parents. On lui expliqua que le corps de sa sœur n’ayant pas été retrouvé, on avait tout simplement placé des vêtements et quelques objets personnels dans le cercueil.

L’inspecteur posa beaucoup de questions, mais l’une d’elles fut posée avec plus d'insistance et formulée de différentes manières. L’inspecteur voulait savoir si les enregistrements vidéo des trois mini- caméras — une au niveau de chaque rétroviseur filmant l'habitacle et celle à l’extérieur filmant l’avant et l’arrière du véhicule — étaient uniquement sauvegardés dans la mémoire du serveur du véhicule.

Encore un des nombreux gadgets embarqués dans cette voiture. Pour imager, on aurait dit une sorte de boîte noire, comme dans les avions.

Il avait répondu qu’il n’en savait rien, mais qu'il pensait que oui. À aucun moment ses parents n’avaient fait allusion à un serveur de sauvegarde qui serait chez eux. Le jeune en profita pour demander s'ils avaient réussi à visualiser les vidéos de l’accident, mais c’était impossible. Toutes les données étaient corrompues et irrécupérables. Albot allait dire quelque chose, mais sa bouche resta fermée. À quoi bon polémiquer ? Certaines choses n’étaient pas claires et il n’avait aucune envie de donner des informations supplémentaires à un parfait inconnu, même si ce parfait inconnu était inspecteur de police.

Avant de prendre congé, celui-ci lui tendit sa carte de visite et l’invita à le contacter dans le cas où la mémoire lui reviendrait. Il lui grommela un petit oui inaudible avant qu’il ne passe la porte.

Malgré toutes les drogues qu’on lui donnait, il avait un mal de chien. La seule chose qui lui permettait partiellement d’oublier ses souffrances était de penser à sa sœur et à ses parents : le chagrin prenait le dessus sur la douleur…

On le transféra de l’hôpital de la Timone à Marseille vers l’hôpital de Berck-sur-Mer dans le nord de la France, spécialisé pour les handicapés, afin d’y suivre une rééducation de deux mois. Deux longs mois de rééducation, mais également de reconstruction psychologique. Son moral était au plus bas. Il avait deux séances de rééducation par jour, une le matin et une autre l’après-midi, avec une séance de psychothérapie intercalée entre les deux.

L’hôpital, situé en face de la mer, lui permettait de faire de longues promenades vivifiantes en fauteuil roulant. Quoi de mieux que l’air salin pour lui redonner des forces, et le bruit de l’océan pour se détendre?

Le thérapeute essayait de lui redonner goût à la vie, mais la tâche n’était guère aisée. Admettre ce qui s’était passé, c’était admettre la disparition de sa seule famille.

Il ne pouvait pas s’empêcher d’imaginer ses parents et sa petite sœur passant la porte de sa chambre, apportant ses chocolats préférés, au lait fourrés praliné. L’odeur du chocolat le faisait saliver rien que d’y penser.

Comme il était mineur, ce temps passé à Berck permit de trouver une solution à sa garde. Ses parents étaient orphelins, il n’avait donc aucun proche pour le prendre en charge. Il était incapable de se déplacer, mais l’avocat de ses parents se chargea de tout, et passa un jour à l’hôpital afin de lui faire la lecture de la lettre testamentaire.

Leur désir était que leurs enfants soient placés à l’orphelinat Descendance en cas de disparition et nulle part ailleurs. Ce lieu avait une grande signification, ils y avaient grandi et s’y étaient rencontrés. Décidément, la vie est un éternel recommencement…

L’avocat lui donna également une sorte de tube avec l’inscription

— À l’attention de mes enfants, Albot et Catiana Coldi.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda-t-il à l’avocat.

— Je n’en ai pas la moindre idée. Quand j’ai posé cette même question à votre père, il m’a répondu que je n’avais pas à le savoir, que je devais seulement vous le donner en cas de disparition.

Il rangea le tube dans le tiroir suspendu qui se trouvait à gauche de son lit, en se disant qu’il regarderait cela tranquillement plus tard. Mais cet objet avait éveillé sa curiosité.

Ses parents possédaient des parts dans pas mal d’entreprises éparpillées un peu partout dans le monde. Il se rappelait tout particulièrement une entreprise œuvrant dans les microtechnologies, dont ils étaient les seuls actionnaires.

Leur assurance vie et tous leurs biens devaient lui garantir un pécule suffisant pour pouvoir faire de grandes études et démarrer confortablement sa vie.

Ce qui l’intriguait, c’est que ses parents avaient égalementstipulé en gras dans leur testament qu'en aucun cas et sous aucune condition, la maison familiale ne devait être vendue sans le consentement du dernier descendant, arrivé non pas à l’âge de la majorité, mais à la date anniversaire de ses vingt et un ans, et qu'en cas de décès prématuré des parents, les enfants devaient absolument garder la maison en leur possession, à n’importe quel prix.

Cela paraissait assez bizarre, cette maison n’étant pas à proprement parler une maison familiale qui aurait été léguée de génération en génération. C’était une maison plutôt moderne, avec une architecture assez avant-gardiste et innovante, appelée également maison intelligente, communicante et autonome. Son père l’avait fait construire, après l'avoir lui-même dessinée une dizaine d’années plus tôt.

Une autre clause stipulait qu'une partie de l’héritage resterait bloquée pour l’entretien intérieur et extérieur de la maison, mais également pour payer les factures courantes.

Albot ne pourrait prendre possession de ses biens qu’à sa majorité, mais d’ici là, il devait vivre à l’orphelinat Descendance.

Il caressa le doux espoir qu’une famille bienveillante veuille bien l’accueillir sous son toit, mais à un âge aussi avancé que quatorze ans, il était peu probable que cela arrive un jour.

Dès que son avocat eut tourné le dos, il ne put s’empêcher d'aller consulter l’ordinateur qui était en libre-service à l’entrée de l’hôpital. Il souhaitait s’imprégner de toutes les informations nécessaires à sa détention. Car dans son esprit, cela ne pouvait être nullement assimilé à autre chose qu’une prison.

Mais il avait eu beau surfer pendant des heures, aucun moteur de recherche n’était capable de remonter la moindre information susceptible de l’aider, mis à part qu’il s’agissait d’un orphelinat.

La guérison n’était pas entièrement acquise, il était encore incapable de se déplacer sans fauteuil roulant. Mais chaque jour, il voyait une petite progression qui lui donnait du courage et de l’espoir. Un soir, un médecin passa dans sa chambre pour lui annoncer qu’il pourrait sortir avant la fin de la semaine. Il précisa qu’une infirmière allait venir dans la soirée pour lui expliquer les exercices qu’il devrait pratiquer afin de poursuivre la rééducation chez lui.

Il aurait bien aimé, justement, pratiquer ces exercices chez lui, mais il ne savait pas à quoi pourrait bien ressembler son nouveau chez-lui.

La veille de sa sortie d'hôpital, une dame d’une quarantaine d'années se présenta. C’était une certaine Mme Helena Foxter, qui faisait partie du conseil d’administration de l’orphelinat Descendance. Elle l’informa qu’elle connaissait très bien ses parents et qu’elle espérait pouvoir lui donner un cadre de vie agréable au sein de la communauté de Descendance.

Elle comprenait ses difficultés à se projeter aussi rapidement dans son nouvel environnement, mais il fallait qu’il reprenne le dessus.

Ses parents avaient l’intention de l’emmener à Descendance cette année, afin de lui faire visiter le lieu où ils avaient grandi. Mais apparemment, la tournure des choses avait fait que cette visite devint permanente.

Mme Foxter lui avait expliqué qu’un chauffeur viendrait le récupérer le lendemain en fin de matinée et qu’il l’accompagnerait chez lui pour récupérer quelques affaires avant de partir le soir même pour l’orphelinat.

Il ne fallait que le strict minimum, juste de quoi s’installer, une seule valise suffirait. L’orphelinat fournissait les vêtements et le nécessaire de toilette.

Elle lui tendit sa carte de visite en accentuant bien le fait qu’il pouvait l’appeler de jour comme de nuit, et qu’il ne devait pas oublier qu’à présent Descendance était son unique famille.

Une fois qu’elle eut pris congé, il resta un long moment pensif. Que pouvait bien être cet objet cylindrique ? Après s’être assuré qu’il ne serait plus dérangé, il ouvrit le tiroir de sa table de nuit pour prendre ce drôle d’accessoire entre ses mains, et commença à l’examiner.

CHAPITRE IV : Le cylindre

Le cylindre était de couleur anthracite, il mesurait environ vingt-cinq centimètres de longueur et quatre centimètres de diamètre. Le matériau qui le composait était d'une matière quelque peu bizarre et paraissait assez léger. Mais ce qui l’embêtait le plus était qu’il ne voyait pas comment l’ouvrir. Car il n’y avait absolument aucune trace aux extrémités permettant d’enlever ou de dévisser un quelconque bouchon.

Il était bientôt vingt-trois heures, et l’infirmière allait faire sa ronde de nuit et passer pour vérifier si tout allait bien. Il mit le cylindre sous son oreiller et se coucha, faisant semblant de dormir. L’infirmière arriva quelques instants après, accompagnée d’une personne.

Elle vérifia qu’il dormait, et l’homme commença à fouiller dans sa table de nuit, sous son lit, dans le petit placard où étaient ses vêtements, pour finir par la salle d’eau. Il paraissait contrarié car il n’arrivait pas à trouver ce qu’il cherchait.

Albot décida de se réveiller pour leur demander ce qu’ils pouvaient bien chercher comme ça, mais il se ravisa au dernier moment : une petite alerte dans sa tête lui disait de n’en rien faire.

L’infirmière et son accompagnateur finirent par quitter la chambre. Le garçon réussit à entrevoir l’homme pendant seulement quelques instants, juste avant que l’infirmière ne referme la porte. Il avait la trentaine. Habillé d’un costume noir et d’une cravate, les cheveux blonds bien coiffés, il devait mesurer au moins un mètre quatre- vingt-cinq. L’homme avait l’air assez mécontent, car, quand il quitta la chambre, Albot entendit une phrase qui le fit paniquer : l’homme avait l’intention de regarder les enregistrements de la caméra située dans sa chambre, et cela dès l’ouverture du poste de sécurité. Il comptait comprendre où était passé l’objet.

Albot attendit dix bonnes minutes avant de s’asseoir sur son lit dos au mur. Et de réfléchir à la scène qui venait de se dérouler devant lui, car mille questions se percutaient à l’intérieur de son crâne. Qui était cet homme ? Où était cette caméra censée le filmer ? Pourquoi en avoir mis une dans sa chambre ? Et surtout, pourquoi l’homme voulait-il l’objet que son père lui avait laissé ? Autant de questions dont les réponses pouvaient se trouver au creux de ce cylindre qu’il venait de sortir de sous son oreiller et qu’il tenait maintenant entre ses mains.

Cela faisait plus d’une heure qu’il regardait l’objet sous toutes les coutures, mais il ne remarqua rien. Pas le moindre interstice, bouton caché ou mécanisme. Tout ce qu’il y avait était cette phrase gravée sur le cylindre : “À l’attention de mes enfants Albot et Catiana Coldi”. Il avait prononcé la phrase sans se rendre compte qu’il la lisait à voix haute et non pas dans sa tête.

Un imperceptible petit clic attira son attention. Ce clic serait passé totalement inaperçu dans d’autres circonstances et d’autres lieux. Mais la pièce était plongée dans un silence de monastère, où le moindre bruit de moustique aurait été immédiatement perçu comme un coup de tonnerre.

Le cylindre laissa paraître un interstice de quelques millimètres sur toute sa longueur. Une feuille translucide apparut par l’interstice sur une hauteur d’environ quinze centimètres. Au bout de quelques instants, Albot vit y apparaître un carré, un rond et un triangle.

Tout d’abord, le triangle devint bleu, puis au bout de quelques secondes il devint rouge et enfin vert. Le rond prit la couleur bleue et un logo en forme d’empreinte digitale y apparut. Il positionna son pouce droit par réflexe sur l’écran, et le rond devint également vert.

C’est alors que l’image de son père apparut sur le carré de l’écran :

— Bonjour, mes enfants. Si vous prenez connaissance de ce message, c’est que nous ne sommes plus de ce monde, votre mère et moi.

— Tout d’abord, nous tenions à vous dire que nous sommes sincèrement désolés de vous avoir laissés orphelins. Nous espérons que nos amis de Descendance pourront vous apporter toute l’aide et tout l’amour que nous ne pouvons plus vous donner. Vous pouvez avoir une confiance aveugle en ces personnes, car elles sont toutes dignes de confiance et elles pourront vous accompagner jusqu’à votre majorité.

— Ce dispositif sécurisé a détecté que la pièce où vous êtes est surveillée. Mais si le rond est passé par la couleur rouge puis verte, c’est que cet objet a réussi à brouiller tout système de surveillance qui pouvait se trouver à proximité de vous. Je sais que cela fait un peu James Bond, mais la fin fera plutôt Mission impossible, car ce message s’autodétruira et ne pourra pas être de nouveau écouté.

Son père lui fit un clin d’œil:

— Je vais vous confier quelque chose et un objet dont vous ne devrez jamais vous séparer. Tout d’abord, vous devez retourner à la maison et aller dans mon bureau. Vous n’avez pas les clés pour y entrer, mais Albot connaît le passage dans ma chambre. Vous devez utiliser l’ordinateur portable qui se trouve sur mon bureau avec le cristal qui se trouve à proximité.

Mettez le cristal dans l’interstice du côté droit du portable, suivez les consignes de l’ordinateur et vous verrez la bibliothèque s’enfoncer dans le mur, laissant place à une entrée qui descend dans mon laboratoire qui se trouve au sous-sol.