Duo Sudarenes : Erotique Bdsm - Adeline Lemoine - E-Book

Duo Sudarenes : Erotique Bdsm E-Book

Adeline Lemoine

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Beschreibung

Elle s'est enfuie. Elle a réussi l'impossible et c'est presque un miracle. Liberté retrouvée, néanmoins, elle n'arrive pas à oublier ces mois où elle a appartenu à H.K. Kidnappée par l'homme, elle a été conduite à l'Institution, grande maison où l'on éduque des esclaves sexuels. Elle y a été sa chose et maintenant qu'elle ne l'est plus, elle repense à ces jours, elle les raconte pour mieux s'en affranchir. Car lorsqu'on a été si longtemps possédée, il est difficile d'apprécier sa liberté.


À PROPOS DES AUTEURES


Du haut de ses 21 ans, "L'Esclave Libre..." n'est pas le premier roman qu'elle écrit, mais il est le premier qu'elle partage. Adeline Lemoine écrit depuis toujours et elle possède de multiples projets d'écriture.


Originaire des Hauts de France, Amandine Declercq, étudiante de 19 ans, écrit depuis l'âge de 13 ans. Elle découvre Waltpad et son premier roman Nightmare y est publié, sous le pseudo de HapinessFictions. Ses deux passions sont l'écriture et la lecture.

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Les Duos Sudarenes

L’esclave Libre

Adélie Lemoine

CHAPITRE UN

LA CAPTURE

Je me suis réveillée en sursaut. C'est ainsi que j'ai compris immédiatement, malgré tout le noir qui m'entourait, malgré la confusion de tous mes sens, que j'étais liée, tenue immobile, en chaque point de mon corps. Ma peau collait au cuir plastique d’un lit dénudé de draps. J’étais en nage, suffoquée.

J'ai regardé, haletante, les larges sangles de cuirs qui cerclaient mes membres. Je ne les voyais pas très bien, l'obscurité alentour étant dense, m’entourais comme un brouillard angoissant. Je sentais que mes pensées étaient lentes, visqueuses, incapables de comprendre ce qui venait de se passer.

Première constatation solide : j’étais vêtue d'une robe de coton. Blanche, moulante, fluide et très douce. On m'avait retiré mes autres vêtements. Qui, comment, pourquoi ? Où était mon téléphone ? Un courant de panique me fit gesticuler dans tous les sens. J’ai frémi à l'idée des tourments qui m'attendaient.

Ayant ainsi fait le constat de l'état dans lequel je me trouvais, je me remémorais brusquement ma capture. Quelle étrange histoire.

J'allais ce jeudi matin, comme à mon habitude, rejoindre mon université. Sur le chemin désert, un homme au visage étrangement familier m’a souri franchement. Il était comme apparu de nulle part. Je lui ai rendu son sourire, flattée, les joues rosies parce que je l'avais trouvé très aimable. Il était très beau et je m'étonnais de retenir ainsi son attention. Il était de l'autre côté de la longue rue sans passants, étroite et sinueuse.

Il a innocemment traversé la route alors qu'une voiture s'est arrêtée plus bas. Deux hommes masqués en sont sortis et ils ont couru vers moi. L'homme qui était derrière moi s'est précipité avec force et j’ai été prise en étau entre ces deux menaces.

Comprenant rapidement que l'on essayait de m'attraper, j'ai poussé sur mes jambes pour fuir. Je leur ai échappé de justesse, sentant une main me frôler le bras pour finalement se fermer dans le vide. Il faisait jour, mais il n'y avait personne dans la rue, le froid gardait les humains communs loin de l'extérieur.

J'ai détalé, cœur battant jusqu'à une autre rue qui donnait sur une artère passante. Les deux hommes ont continué à me poursuivre tandis qu'un troisième avait pris le volant de la voiture pour suivre la course.

Ils allaient très vite et j'étais trop hébétée pour réfléchir à un moyen efficace de les semer. J'allais ainsi tout droit vers l'artère mais je ne me mouvais pas assez rapidement. Très vite, l'homme sans masque avait réussi à saisir ma veste. Il la tira fort et je me retrouvais à terre. Il plaqua immédiatement un tissu sur mon visage. Une odeur forte me prit tous les sens et je me suis retrouvé dans un état de mollesse incroyable.

Ils ont saisi mon corps abandonné de ses forces et l’ont jeté dans le coffre déjà ouvert.

J'ai senti la voiture démarrer et je tentais de toutes mes forces de résister à la faiblesse qui m’immobilisait, sans voix.

Je voulais crier, taper contre les parois de cette prison, mais c'était impossible.

Quelques minutes plus tard, le véhicule s’est arrêté et le coffre s’est rouvert. Je me suis redressée vivement, prise d'une force nouvelle. J'essayais de sortir mais les trois hommes, à présent tous masqués m’ont tenu en place. Nous étions dans une forêt où aucune âme ne semblait vivre. L'un d'entre eux me pressa la mâchoire et y engouffra une pilule.

- Aller, avale ! Maugréa-t-il.

Il m’a pincé le nez et a gardé sa main en pression sur ma bouche. Ainsi étouffée, envieuse de reprendre mon souffle, j'eus un mouvement de déglutition inconscient. Il m’a lâché et je tombais immédiatement dans un sommeil sans rêve.

Jusqu'à cet instant où j'étais bel et bien éveillée. Que faire ? Crier ? Non, je ne voulais pas qu'ils arrivent. Je ne voulais pas être fixée sur le destin qui m'attendait. Me défaire de mes liens, qui étaient cadenassés, était hors de ma portée. Impossible. J'avais été victime d'une machine particulièrement bien huilée.

La lumière s'alluma soudainement. Je me redressais légèrement vers une porte qui grinçait. La pièce était petite, il n'y avait aucune fenêtre. Les murs étaient blancs. Allure bloc chirurgical, les commodes d’acier scintillaient sous les néons.

- Alors, on est levée ? Demanda une voix grave.

Je n'osais pas bouger, j’ai gardé mes paupières closes, mais ma respiration paniquée me trahissait.

On me caressa le visage, doucement, délicatement.

- J'ai bien cru que tu allais nous échapper tout à l'heure. Mais te voilà.

J'ouvris les yeux sur le visage de l'homme qui m’avait souri dans la rue. Il était penché sur moi, un grand sourire sur le visage.

- J'en suis ravi.

Il avait les cheveux bruns, des dents d'ivoires, des lèvres fines et un visage délicatement long. Une barbe mal taillée lui maquillait les traits. Des yeux sans couleurs me faisaient face. J’essayais vainement de me souvenir d’où je l’avais vu.

- Que… Qui… Vous…

Ma bouche était pâteuse, sèche et ma voix y trouvait mille difficultés pour sortir. Et mes pensées flasques, molles, m’empêchais d’entamer la négociation que je cherchais à formuler.

- Ça passera, la drogue mettra encore un peu de temps pour ne plus faire d'effet.

Je me suis légèrement débattue contre les sangles grinçantes, fuyant ses mains sur mon visage.

- Non… Soufflais-je.

- Ça ne sert à rien. Reste calme, tu vas te faire mal.

Il se leva et se dirigea vers une petite commode métallique. Il y prit un flacon et une seringue pleine d'un liquide transparent. J'ai bougé vivement, murmurant, désespérée un « non ».

- Ne t'inquiète pas, il ne va rien t'arriver de mal. C'est pour que tu dormes encore un peu.

Il s'assit sur un tabouret à roulettes qui était à hauteur de mon bras qu'il tapota à la recherche d'une veine. Je me suis débattue avec force :

- Pitié ! Laissez-moi ! Non…

- Impossible. Je t'ai attrapé, tu n'as plus de recours.

- Qu'est-ce que vous voulez ?

Je ne pouvais m'empêcher de penser aux trafiquants d'organes et à toutes ces histoires sordides de tueurs.

- Je fume vous savez, il m'arrive même de…

- Je sais tout ça. Ce ne sont pas tes organes qui m'intéressent, c'est drôle, vous pensez toujours à ça. Il ne t'arrivera rien de mal, je te l'ai dit. Tu dois me faire confiance.

Il trouva finalement la veine recherchée et il y enfonça l'aiguille. Je bougeais alors assez vivement pour déchirer la veine. Il grogna et me pinça l'oreille méchamment.

- Reste tranquille ou je vais te faire mal. Ce n'est pas ce que je veux.

Il serra alors les sangles plus fort, immobilisant douloureusement mon avant-bras avant de planter à nouveau l'aiguille. Je pleurais à grosses larmes. Il injecta le produit et retira la seringue.

- Ce ne sera pas long. Apprends qu'il ne sert à rien de résister.

Il caressa encore mon visage que je sentis engourdie. J’essayais de gesticuler, n’arrivant pas à prendre la mesure de ce qu’il était en train d’arriver.

- Quelles jolies lèvres…

Il m'attrapa la main et la serra dans la sienne.

- Tout va bien se passer. Je vais t'emmener à l'Institution. Je suis sûr que tu t'y plairas.

Je me suis battue contre le sommeil, mais ce fut une lutte vaine.

J'arrête d'écrire. C'est difficile. Je me remémore souvent ma capture. Je la cauchemarde souvent. J'y pense avec regret. Ah si j'avais réussi à atteindre la rue passante… Je n'aurai jamais rien vécu de tout ça. Je n'aurai pas eu besoin de vivre ce retour à la liberté difficile. Je n’aurai pas eu à subir ce cœur lourd et ce sentiment atroce d'être tout le temps perdue.

Car on m'a menée dans un endroit que l'on appelle l'Institution, lieu où l'on goûte au bonheur de n'avoir plus aucune responsabilité, d'être chérie et guidée par quelqu’un. On y trempe dans l'abandon total de soi. C'est une douce sensation que personne ne peut seulement imaginer. J'ai pris des risques pour y renoncer. Parfois, je pense tristement que j'ai été folle de m'enfuir.

Aujourd’hui, j'ai repris mes études. Je cherche un métier qui ne m'ennuie pas. Je suis mes amis retrouvés dans des fêtes que je connais par cœur à force de les avoir fréquentées. J'ai retrouvé mon prénom et il est souvent prononcé avec peine, compassion, par mes proches qui voient les stigmates de ma capture sur mon corps, sur mon visage et dans mes yeux.

C'est très chiant. Je ne frissonne plus de rien, si ce n'est de la peur ou de l'envie, je ne sais pas trop, de revoir H.K au coin d'une rue. De le voir me sourire, de le sentir m'attraper à nouveau. Il m'avait pourtant dit un jour, que même une évasion réussie ne me sauvera pas. Cela fait pourtant un an que je suis seine et sauve, libre.

Peut-être pensait-il que je ne valais pas la peine d'être rattrapée ?

Enfin, toutes ces pensées sont insensées. Je n'ai jamais rien raconté à personne, ni à la police à qui j'ai narré une brumeuse version, ni à mes parents qui voulaient savoir, ni même à mes amis. Alors je me dis qu'écrire pourrait aider. Revivre un peu ma vie dans l'Institution pour m'en affranchir. Car après tout, même si les jours sont durs, même si les responsabilités ont tendance à m'écraser, rien ne vaut la douleur de faire des choix, d'être à soi, de vivre pour soi, d'être responsable.

Reprenons.

---

Je me souviens bien de mon deuxième réveil, il avait été le plus dur de tous. Je me réveillais dans la chaleur des draps. Ils sentaient la lessive à plein nez. Dans la brume d'où je sortais, il n'y avait eu que du calme et un chaud sentiment de bien-être. J’avais l’impression d’être rentré chez ma mère, d’avoir eu une nuit complète et sans trêve.

Je le ressentis encore un petit temps, avant de comprendre que je n'étais pas chez moi. En sursaut, je me suis levée. Aucun lien ne me tenait cette fois-ci, mais j'étais encore dans le noir. Je courais jusqu'à la porte fermée à clé. Laissant parler ma colère et mon sentiment d'impuissance, j'ai crié en donnant des coups de pied de la porte. Aucune fenêtre, rien que ce lit et cette pièce dont je ne voyais rien.

La fureur passée, des vertiges me prirent en repensant à ce qu'il s'était passé. Je me laissais glisser au sol et j'ai pleuré longtemps. J'étais terrorisée. Tous mes membres tremblaient.

La lumière s'alluma, je n'avais pas entendu la porte s'ouvrir. L’homme, toujours le même, arriva vers moi en souriant.

Je me jetais sur lui avec la force du désespoir, prête à défendre ma vie. Il parut surpris mais mit peu de temps avant de me maîtriser. En deux mouvements de sa part, je me trouvais immobilisée, bras tenus dans le dos. Son corps se colla de tout son long contre moi. Je sentis la dureté de ses muscles, la largeur de ses épaules, l’angoisse me saisit au ventre. Il chuchota dans mon oreille :

- Maintenant, je vais te lâcher. Et tu vas aller t’asseoir sur le matelas.

- Lâchez-moi, sifflais-je.

Il augmenta la pression sur mes articulations et me donna un méchant coup sur l'arrière du genou. Je sentis ma clavicule craquer méchamment, un petit cri s’échappa d’entre mes dents. Je me retrouvais à terre, serrant mon épaule qui avait fortement souffert.

- Tu ne peux rien contre moi, me susurra-t-il.

- C'est très prétentieux, crachais-je.

Il rit. Il semblait franchement amusé.

- Vas t'asseoir sur le lit, ou reste comme ça, à genoux.

Je ne bougeais pas, repliée sur moi-même.

- C'est bien, je te préfère ainsi.

Je lui ai jeté un regard enflammé et je me suis précipitée sur lui pour tenter de le frapper de toutes mes forces. Il m’a esquivé et je me suis retrouvée sur le sol. Il gifla l'arrière de ma tête avant d’aller s'asseoir sur le lit.

- Fais ça encore une fois et je te promets que les conséquences dépasseront ton imagination.

Je déglutis et il continua :

- Je pense que tu as envie de savoir ce qu'il va t'arriver.

- Oui, dis-je en me levant.

- Je t'ai amenée dans une demeure que l'on appelle « L'Institution ». Une grande bâtisse magnifique, fréquentée par beaucoup de gens très fortunés. Une fondation très respectée pour les soumises et soumis qu'elle procure.

Je pâlis, frémis. Soumise ? Ça n’avait aucun sens. Il m’observa lutter contre l’idée, regarder autour de moi pour chercher une issue, pour comprendre.

- Laissez-moi rentrer, je ne dirais rien à personne, je vous le jure.

Il ricana :

- Oublis ta vie d'avant, tu es à moi maintenant. Je ferai de toi ce que je veux. Je t'ai choisi parmi beaucoup, je t'ai observé, longtemps, pour savoir si tu étais celle qu'il me fallait, celle que j'avais envie d'éduquer.

Je ne comprenais pas, n'entendais rien. La terre se dérobait sous mes pieds, j’étouffais devant l’énormité de ce qu’il était en train de me dire, voix posée et regard droit. C’était complètement con, décalé ; presque burlesque.

- Lorsque tu as compris que tu étais traquée, tu as couru, tu as cherché un abri. Nous t'avons tout de même ferré, tu as laissé filer ta seule chance d'être libérée de ma volonté. C'est le jeu. Maintenant, tu es à moi et même une fuite réussie ne te sauvera pas. Quoi qu'il arrive, nous te retrouverons. D'ailleurs, conseil d'ami, n’essaies pas de t'enfuir, la moindre tentative te vaudra un châtiment terrible.

Mes yeux se fronçaient davantage à chacun de ses mots. Je lançais d’un ton digne :

- On me retrouvera. La police, mes parents…

Il me coupa :

- Aucune des filles que j'ai choisie n'ont jamais été retrouvées. Enfaîte, aucune n'en a jamais eu envie.

Je déglutis.

- Laissez-moi partir, je ne dénoncerai rien, ni personne.

- Tu te répètes. Mais non. Quel braconnier ouvrira la cage à l'oiseau qu'il a traqué et désiré longtemps ?

- Je ne suis pas un oiseau. Vous n'êtes pas un braconnier.

- C'est une image, petite. Reste que je t'ai attrapée, tu as perdu tes droits sur toi-même.

- Non.

- Silence. Oublis ce mot-là, il t'est interdit ici. Apprends également que pour toi, je n'aurai pas d'autre nom que « Maître », puisque c'est ce que je suis. Tu t'adresseras à moi avec les politesses que mon rang oblige. Pas de tutoiement, c'est évident. Moi, je te nommerai comme bon me semble, mais peut-être que je finirai par te donner un nom fixe. Qui sait ?

« Pour me saluer, ce que tu te dois de faire à chaque fois que j'entre dans une pièce après toi, tu viendras t'agenouiller devant moi et tu baiseras le dos de ma main droite, ainsi que son creux, pour me remercier de l'éducation qu'elle te fait lorsque je te punis. Ensuite, tu embrasseras ma bite pour lui rendre grâce du plaisir que je t’accorderai, parfois. Enfin tu poseras un baiser sur chacune de mes chaussures pour chérir la place que tu y occupes. Si tu oublies de le faire, ou si tu es dans l'incapacité d'opérer ce rituel, tu seras sévèrement châtiée. C'est plutôt simple.

Je recule. Jamais, jamais je ne ferai ça. Tout allait si vite, tout lui paraissait si évident. Qu’attendait-il de moi ? Que j’obéisse ? Quelle humiliation. Jamais. J'avalais ma salive avec difficulté. Mais dans quel monde de fou étais-je arrivée ? Ce ne pouvait être qu'un rêve, je ne pouvais pas y croire.

- Ça te semble difficile, pas vrai ? Ne t’inquiète pas, ce le sera moins à la fin de mes premières leçons. Je t’entraînerai jusqu’à l’excellence, jusqu’à ce que j’obtienne ce que je veux de toi.

- Et qu’est-ce que vous voulez de moi ?

Il sourit mais ne me répondit pas.

Pourquoi cet homme, qui est plutôt attirant, me forçait-il ainsi ? Il ne devait pourtant avoir aucun problème pour trouver des filles consentantes. Je me suis avancée vers lui et à genoux, je l'ai supplié de me laisser partir, de ne pas me forcer à faire ce genre de chose. Il resta inflexible et m'ordonna encore une fois le silence. La colère grimpant au fond de moi, je lâchais :

- Espèce de connard, si tu crois que je vais me laisser faire…

Il me gifla :

- Je ne tolère pas ce genre de discours. Est-ce une façon de s'adresser à son maître ?

- Vous délirez, ce n’est pas possible.

Il me gifla une seconde fois, puis il se leva et s'avança vers la sortie :

- Je t'ai énoncé les principales règles. Maintenant, tu vas les méditer et les accepter.

Il claqua la porte derrière lui et ce fut aussi violent que la gifle qui brûlait encore ma joue.

Chapitre II

LA SURVEILLANTE

Je ne repense jamais aux heures qui ont suivi son départ. Elles sont une source d'angoisse traumatisante. J'en rêve encore parfois et je crois bien qu'il s'agit là du pire de mes souvenirs.

Je ne sais pas combien de temps je suis restée seule dans cette chambre. Deux jours, trois ? Une semaine ? C'était juste atrocement long. L'ennui, la peur, la colère, terreur et insomnie se battaient dans mon estomac, dans ma tête. C'était atroce. Le pire, c’était l’incertitude qui pesait sur mon sort. Je n’avais pas bien compris ses desseins pour moi. Leçon ? Dressage ? Soumission ?

J’avais vomi la bile qui restait dans mon estomac. J'avais tapé sur la porte jusqu'à ce que j'aie des plaies aux doigts. J'avais tenté de retenir mes larmes jusqu'à l'étouffement.

Aucune fenêtre, aucun moyen de savoir où j'étais. L'endroit dénudé de toute décoration m'apparu cancérigène. Une tombe, voilà ce qu'il m'évoquait.

Puis, tentant de reprendre mon sang-froid, j'ai fouillé dans les placards, ils étaient pleins de robes identiques à celle que je portais : coton fluide, blanc et doux. Il y avait des sous-vêtements noirs en dentelles aussi, pareil à ceux que je trouvais sur moi. Je devinais une sorte d'uniforme, comme ceux que les prisonniers portent.

En fouillant, j'ai trouvé deux caméras de surveillance qui avait vu sur toute ma chambre. J'avais essayé de les arracher. Mais à peine les avais-je effleurés qu'une sorte d'alarme sonna.

Prise de panique, je me suis éloignée et je me suis réfugiée dans la petite salle de bains au fond de la chambre. Il y avait une douche, un lavabo, des toilettes, un placard plein de serviettes… Et la lumière rouge d'une caméra qui avait un œil sur toute la pièce. J'en vomis de dégoût, de haine…

Après un temps insupportablement long, la faim arriva soudain. J'ai donc bu de grandes gorgées d'eau pour la calmer. Puis, je m'allongeais sur le lit et m'engouffrai sous la couette pour pleurer sans que la caméra ne me voie.

J'eus ensuite envie d'aller aux toilettes. Narguant la caméra d'un œil mauvais, je saisis une serviette et obstruais sa vue en la lançant dessus. Une alarme sonna aussitôt, je retirai la serviette et une voix sonna d'une enceinte que je n'avais pas vue.

"Mademoiselle, veuillez ne pas faire cela, c'est interdit. Vous êtes nouvelle, alors je ne ferai pas de rapport, en revanche vous aurez le droit à une inspection."

Une voix de femme. Je restais immobile, ne sachant que faire.

"Je… Je m'excuse, je ne savais pas…" bégayais-je, surprise.

On ne me répondit pas, mais la porte ne tarda pas à s'ouvrir sur une femme en tailleur, plutôt âgée, suivi d'une autre femme, plutôt jeune, en robe moulante noire.

- Bonjour, Mademoiselle, mettez-vous debout devant le lit. Alinéa, fouillez cette chambre.

La jeune femme se dirigea alors vers mes placards.

- Qui êtes-vous ? Soufflais-je.

- Je suis la cheffe des Surveillantes. Vous avez enfreint énormément de règles. Je viens vous les énoncer et vérifier que vous n'avez rien amené avec vous de l'extérieur.

La femme en robe noire se dirigea vers la commode de la chambre et en vida les tiroirs. Je la regardais faire, médusée.

- On ne touche pas les caméras, ni la porte d'entrée, surtout pas la poignée. On ne vandalise pas les murs. On se change tous les jours et on pose ses habits sales à côté du lit. On prend une douche tous les soirs. On fait son lit tous les matins. On ne ramène rien dans sa chambre, ni fourchette, ni nourriture, ni quoi que ce soit que votre maître n'ait pas explicitement autorisé. On se soumet avec bonne volonté aux contrôles des Surveillantes.

Elle marqua une pause et reprit :

- Si vous enfreignez une de ces règles, votre maître en sera informé et choisira une punition adéquate pour vous. Je vais maintenant effectuer un contrôle de votre corps. Déshabilliez-vous.

- Quoi ? M’étouffais-je.

- Dépêchez-vous.

Il en fallait du cran pour obéir à ce genre d'ordre sans rougir.

- Vous êtes sourde ? Ne tardez pas ou vous aurez le droit à un rapport.

Tremblante, je soulevais ma robe. Je l'ai laissé tomber sur le sol.

- Et les sous-vêtements ? Grinça-t-elle.

Immobilisée par sa demande, elle s’était agacée et s’est avancée méchamment vers moi pour dégrafer mon soutien-gorge. J’ai crié et reculé, soudainement seins nus. Elle m’a ensuite attrapé puis a retiré ma culotte.

- Il va falloir vous faire à la nudité, petite idiote.

Je cachais mes attributs et je lui lançais un regard mauvais. Assez pour qu'elle crache une menace :

- Baissez les yeux ou je vous coupe l'eau chaude. Si vous refusez d'obéir encore une fois, je vous retire votre couette. Croyez-moi, le froid n'aide pas à dormir.

Je n’ai pas pu m'empêcher d'accentuer l'hostilité sur mon visage. Elle ricana.

- Vous allez en avoir, du fil à retordre avec votre maître si vous osez le regarder ainsi. Tous les événements lui seront rapportés, soyez-en sûre. Et comme je le connais, il n'hésitera pas à sévir lourdement. Sachez également que vous agissez très bêtement, car mieux vaut m'avoir dans son camp ici.

J'ai alors jeté mes yeux dans les siens et j'ai lâché mes seins pour lui faire face de toute ma carrure.

- J'en ai rarement vu des comme vous. Penchez-vous en avant. Touchez le bout de vos pieds.

De mauvais cœur, je me suis exécutée. J'ai alors senti ses mains glacées parcourir mon corps, jusqu'à mon entre jambes qu'elle fouilla sans douceur, pénétrant sans scrupule mon intimité. Ses ongles étaient longs, j'ai couiné de douleur.

- Bien. Tout est en règle. Veuillez ranger votre chambre correctement. Soyez sage. Alinéa, venez.

Je me suis redressée, mordant mes lèvres rageusement, pour ne pas pleurer. La porte claqua encore et je dus me faire violence pour ne pas laisser couler mes larmes.

Je me suis couchée sur le lit et j'ai fixé le plafond, encore sous le choc de ce qu'il venait d'arriver. Je n'ai pas bougé pendant des heures, jusqu'à ce que le sommeil me vienne et m'emmène dans un somme très léger.

Comme je l'ai déjà souligné, je n'ai aucune idée du temps que j'ai passé seule dans cette pièce. La lumière ne s'éteignait jamais. Je n'arrivais pas à dormir plus d'une heure, même si j’essayais vaillamment de penser que j'étais ailleurs. J'imaginais mon appartement, un soir calme, un lendemain de cuite. Un thé au bord de mon lit…

En vérité, cette pensée serra mon cœur et me tint éveillé. Allais-je seulement revoir ma chambre un jour ? C'était insupportable.

On m'apporta finalement un repas. Une femme en robe noire, semblable à celle qui avait accompagné la surveillante, posa une assiette sur le petit bureau de la chambre. Je le dévorai malgré le nœud d'angoisse dans le creux de mon ventre. Allait-on me laisser mourir là ? Je pensais avec douleur au film Old Boy, dont le personnage principal avait été enfermé 15 ans. Je ne voulais aucunement du même sort. Je me tuerai avant, je trouverai un moyen.

D'autres heures. Je pris ma douche et fis mes besoins, forcée par la sueur et l'envie pressante d'uriner. Je changeais de vêtement trois fois. Je me sentais faiblir, le manque de sommeil, le manque d'obscurité, l'humiliation constante de voir chacun de mes mouvements scrutés.

L'ennui, la fatigue, c'était très dur. J'en vins même à prier pour que l'homme revienne. Qu'il m'éclaire, que quelque chose se passe enfin.

J’avais fini par me sentir seule au monde. N’importe quelle voix humaine aurait sonné douce à mes oreilles. C’était une souffrance constante, le silence, l’incertitude.

« Faites qu’il arrive vite… » soufflais-je doucement.

Je trouverai un moyen de lui faire entendre raison. Mais pour que cela arrive, il fallait qu’il soit là, en face de moi. Je ne supportais plus la passivité, cette sensation du temps qui passe, lourd sur le corps. Chaque jour que je passais ici, était un autre jour d’angoisse pour ceux qui m’étaient chers. Mes parents, mes amis… J’imaginais leur panique, leur tristesse. C’était insupportable, je n’avais même pas la force de pleurer.

Chapitre III

ACQUÉRIR LES BASES

 

Mes prières furent exaucées puisque la porte s'ouvrit finalement. C'était lui.

Du fond du couloir, je le voyais avancer avec souplesse, comme un fauve qui revient déguster sa proie. Il se pâmait d'une élégance incroyable, son costume avait l'air d'avoir été fait sur-mesure pour lui. Il était impressionnant de beauté. On croise rarement un homme pareil. Avant ma capture, je pensais souvent que le diable devait être très beau, puisque dans la Bible, tant de femmes s'en remettent à lui. Maintenant je le sais, le mal est séduisant, le mal est magnifique. Cet homme était magnifique, ses gestes oscillaient constamment entre une élégance calculée et une sauvagerie pure.

- Bonjour, dit-il.

Je me jetais vers lui et lui lançais un regard franc :

- Sortez-moi d'ici, je vous en supplie.

Il rit et mon cœur se cassa un peu.

- Non.

- Je ne plaisante pas, ce n’est pas trop tard pour revenir en…

- Si.

- Pitié, je ne pourrai jamais être ce que vous voulez que je sois. Vraiment, ce…

- Silence, petite conne. Tu glapis, tu glapis, c’est assez.

Je me laissais tomber au sol, secouée de sanglots lourds. Il se pencha sur moi pour me relever. Il fit alors quelque chose d'étrange. Il me serra dans ses bras et caressa doucement ma tête. Je me laissais aller à cette tendresse qu'il fit durer quelques instants, jusqu'à ce que je sèche mes larmes.

- Tout ira bien, ne t'inquiète pas. Tu dois me faire confiance, chuchota-t-il à mon oreille.

J'osais finalement le serrer contre moi, sa chaleur sembla apaiser le feu qui me tordait de douleur. Il s'éloigna finalement et fit :

- Suis-moi en silence, tête basse.

J’allais pouvoir sortir. Je regardais l’espace inexploré du couloir et j’y vis un espoir de trouver mon salut.

Je le suivis donc dans les couloirs moquettés éclairés par des lampes à la lumière orangée. Mes jambes cédaient régulièrement à la terreur que j'éprouvais. J'avais du mal à avancer. Cela agaçait l'homme qui m'attrapa le bras, me forçant ainsi à marcher à son rythme. Nous prîmes un ascenseur, jusqu'au niveau deux. J'étudiais les différents étages. La bâtisse en avait quatre et je me trouvais au dernier niveau.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent sur un couloir identique à celui qui abritait ma cellule. Allait-il me transférer ? Je remarquais que l'espace entre les portes était amplement plus large qu'à l'étage 4. Cela suggérait de plus grandes chambres. Celles des maîtres peut-être ? Nous nous arrêtons devant l’avant-dernière entrée. Il ouvrit la porte et me dit d'avancer. Il faisait complètement noir. Il ferma la porte à clé avant d'allumer la lumière. Une forte odeur de vernis neuf me prit les sens.

J'ai gémi devant la vision qui s'offrait à moi. Des murs bleu pâle et un sol de marbre blanc. Un lit sans couette, une grande commode, un bureau, une chaise d'une étrange forme pourvu de sangles, diverses chaînes au plafond, divers anneaux fixés au mur. Je compris que c'était ici qu'il me dispenserait ses « leçons ». Que c'était la salle de mon « dressage ».

- Tu as oublié de faire quelque chose tout à l'heure, quand je suis rentré dans ta chambre. Je ne peux pas vraiment te le reprocher, je ne t'ai pas encore soumise à moi. Mais cela va changer aujourd'hui. Avances au centre de la pièce.

Je lui ai lancé un regard de détresse.

- Je…

- Tu veux vraiment faire ça à la dure, hein ? Dit-il tendrement. Obéis ou je t'y traîne.

J'avalais ma salive et je fis ce qu'il me demandait. J'avançais chancelante dans la pièce, comme si je faisais l'équilibriste sur un fil de fer. Lorsque je me suis arrêtée, il s'est mis en action à son tour. Il déposa sur le lit non loin de moi un coffret noir au verrou d'argent. Puis, il alla jusqu'à la commode. Il ouvrit un tiroir et en tira une cravache noire.

Je reculais à cette vue.

- Si tu es fière, tu ferais mieux de résister autant que tu peux, parce qu'une fois que je t'aurais mis à mes pieds, tu seras entièrement à moi. Mais si tu es intelligente, tu sais déjà que ton intérêt est d’obéir.

J'entendais mon cœur battre fort à mes oreilles. Je ne m'entendais plus penser, j'étais confuse au possible. Je voulais pleurer, mais j'étais fière. Il le savait, c'est ce qu'il lisait dans mes yeux.

- Baisse les yeux. Mets-toi à genoux, énonça-t-il en me gratifiant d'un coup violent sur la cuisse gauche.

Je lui ai lancé un regard éberlué, surprise par la douleur et la force qu'il venait d'employer. Je n'imaginais pas cela ainsi. Comment imaginer cette violence ?

- Plus vite, fit-il en faisait claquer une deuxième fois le cuir contre ma jambe.

Il enchaîna trois autres coups. Il valait mieux pour moi que je m'adapte et que j'obéisse.

- Tu n'as aucune grâce. Aucune. Il va falloir prendre ça en main.

Il claqua la cravache sur ma joue, puis trois fois dans mon dos. Le pincement était supportable, mais l'humiliation l'était beaucoup moins. Il prit mes cheveux dans sa main et les souleva en un chignon rapidement noué.

- Embrasse ma main.

Je savais ce qu'il me demandera ensuite. Je secouais la tête, il me gifla et enchaîna six coups du corps de la cravache sur ma nuque, découverte par le chignon. J'étouffais mes cris, mes pleurs et mes mouvements de recul. Sans doute ne s'attendait-il pas à mon absence de réaction. Je n'avais pas même laissé passer un gémissement.

- Résister ici n'est pas preuve de fierté, apprends-le. C'est plutôt synonyme de douleur et d'humiliation. J'aurai ta capitulation, quoi qu'il arrive.

De la colère ? Du défi ? Je ne sus pas lire dans la tonalité de sa voix.

Il retourna à la commode et cette fois-ci, il sortit du tiroir une badine longue et fine. Il la serrait dans sa main gauche tandis qu'il me tendait sa main droite.

Fortement intimidée, j'allais m'exécuter quand la badine me frappa subitement. C'était vraiment douloureux et je ne pus pas m'empêcher d'esquiver le second coup.

- Non, non, non ; gronda-t-il en attrapant mes cheveux. Fuir les coups t'en vaudra d'autres.

Il tira mes cheveux pour que je me relève et il me brusqua jusqu'à l'étrange chaise aux sangles. Je comprenais ses intentions aussi bien que l'utilité de ce banc et je me suis débattue fermement.

- Non ! Ai-je crié.

- N’aggrave pas ton cas, petite garce.

Il finit par me pousser dessus et avec une rapidité hors pair, il coinça mes poignets dans les bracelets prévus à cet effet. J'étais immobilisée. Il tendit à nouveau sa main devant moi. Je savais qu'il serait très sage de l'embrasser, mais l'orgueil me paralysait aussi sûrement que les liens. Il gifla ma joue une seconde fois et commença :

- Bien. Apprends que tu aurais pu éviter ce qu'il va t'arriver. Si tu avais obéis, tu serais déjà en train de déjeuner. Mais parce que tu es idiote au possible, voilà où tu te retrouves : sur le banc, les fesses en l'air. Tu vas apprendre ce qu'est une punition et tu vas te rendre compte qu'il vaut mieux les éviter.

Il remonta ma robe, découvrant tout mon dos et exposant amplement mes fesses. Il retira ma culotte. Des tremblements me prirent, je mordis ma main pour ne pas crier, ni le supplier. Les secondes qui s'écoulèrent avant le premier coup parurent durer des heures. Et puis il tomba férocement. Les suivants s'enchaînèrent très rapidement. J'ai lâché le premier cri au onzième ou au douzième, je ne sais plus, mais j'ai crié encore de nombreuses fois avant qu'il s'arrête. Entre deux longues séries, il me demanda :

- Quelles sont tes fautes ?

- J'ai fui les coups, sanglotais-je.

- Et ?

- J'ai refusé de faire le rituel.

- À qui t'adresses-tu ? Parle-moi correctement.

Cinq coups me coupèrent la parole. Je ne compris pas tout de suite où il voulait en venir. Un dernier coup sur mon corps douloureux m'aida à me souvenir.

- Pardon… Maître.

- Répète tes fautes et excuse-toi, ordonna-t-il en abattant la badine une fois de plus.

- Excusez-moi d'avoir fui les coups et d'avoir refusé le rituel… Maître.

- Bonne fille, sourit-il. Vingt coups ne seront pas de trop pour expier ces fautes-là, qu'en penses-tu ?

Un sanglot lui répondit, je pensais que je ne supporterai pas vingt coups de plus.

- Pitié…

Il me gratifia d’une volée sèche :

- Pitié qui ?

- Pitié, Maître…

Il abaissa son arme et vint se placer devant moi, bras croisés.

- Tu vas les compter dans ta tête et quand je te demanderai le compte, je veux que tu sois capable de me le donner. Compris ?

J'essayais de reprendre ma respiration. Il était implacable, c’en était presque aussi violent que sa badine.

- Oui… Soufflais-je.

Il claqua la badine sur mon dos.

- Oui qui ?

- Oui, Maître.

Il commença alors la punition et je comptais. J'étais tentée de tricher, de lui donner un compte déjà plus avancé, mais je ne doutais pas qu'il comptait, lui aussi.

- Combien ?

- 9.

- 9, qui ? Cria-t-il en frappant.

- 10, Maître.

- Celui-là ne compte pas, petite garce. Quel culot. Combien ?

- 9, Maître.

Il me posa la question deux autres fois, et je n'oubliais plus de l'appeler comme il le voulait.

Il alla finalement poser la badine sur la table et vint me libérer des liens.

- À genoux.

Chancelante, abrutie par la souffrance, je fis ce qu'il me demandait en essuyant mes larmes.

Je ne devais pas être très belle à voir, mais il ne me le fit nullement sentir. Je savais ce qu'il attendait de moi, alors j'ai pris sa main pour embrasser son dos et son creux. Secouer de davantage de sanglots, je baisais également son entrejambe que je sentis gonflée, puis je m'abaissais jusqu'à ses pieds. Un baiser sur chacune de ses chaussures de cuir brun et voilà que j'étais à lui.

- Restes comme ça, commanda le maître.

J'étais prosternée aussi bas qu'on pouvait l'être. La tête presque au sol, à genoux, les bras devant moi.

Il alla chercher le boîtier noir. Il l'ouvrit et saisit son contenu. Je n'osais pas lever les yeux pour voir ce qu'il tenait en main. Je compris lorsque je sentis une lanière me cercler le cou. Il referma sur moi un collier de cuir rigide couleur chair. Je le trouvais très étroit et je ne pus m'empêcher de porter la main jusqu'à cette pression nouvelle. Il saisit délicatement mon menton pour m'encourager à me redresser.

- Te voilà à moi, tu portes ma marque. Je sais, il est très serré. Et il sera vite douloureux. C'est pour que tu n'oublies pas que tu n'es plus à toi.

Il me prit doucement dans ses bras et me blottit contre lui.

- Tout va bien, maintenant. C'est fini.

Je recommençais à pleurer contre son torse chaud. Il me réconfortait d'une manière qui me troublait. Je devrais le repousser, détester cette étreinte, mais mon corps se détendit petit à petit, noyé dans son odeur, contusionné par ses caresses.

Puis, il m'aida à me lever. Il me tint adossée contre lui, et attrapa mes poignets pour y passer deux bracelets du même cuir que mon collier. Il m'amena ensuite jusqu'à au miroir près de la salle de bains.

- Regarde comme tu es belle, vaincue.

Je voyais mon reflet, mes cuisses rougies et bleuies, mes yeux gonflés de larmes, mais surtout, comme un éclair dans le ciel, le collier qui me serrait le cou. Il avait une petite boucle de métal brillant sur le devant, la même que celles sur les bracelets. Les initiales H.K étaient gravées subtilement dans le cuir, à côté de l'anneau de métal. Je vis aussi que tout mon équilibre reposait sur le maître, que c'est lui qui me maintenait debout. J'avais l'air très faible.

Il passa sa main sur ma tête et la laissa tomber le long de mon visage, jusqu'à mon cou où il joua un peu avec le collier. Il le tira en avant, en arrière. Je grimaçais, c'était désagréable de sentir ma tête suivre chacun de ses mouvements. Encore plus de me voir ainsi, à la merci de l'homme derrière moi.

- Va t'allonger sur le lit, je vais soulager tes fesses.

Je me retournais contre lui pour lire ses intentions dans ses traits.

- Pss. Pas d'hésitation, dépêche-toi ou je serai forcé de te punir encore.

- Non. Non… Pardon… Maître.

C'était encore si difficile d'appeler l'inconnu comme il l'exigeait. Il le savait. Il s'en délectait. J'allais donc jusqu'au lit, où je m'allongeai difficilement.

- Soit plus délicate, grinça l'homme.

Il tira un autre tiroir de la commode, mon cœur fit un bond. Il remarqua ce sursaut et s'en moqua :

- Du genre nerveuse, hein ?

Tu m'étonnes que je sois nerveuse. Bâtard.

Il remonta ma robe, encore et commença par désinfecter les plaies, ce qui n'était pas agréable. Puis il posa sur mes cuisses dénudées une crème fraîche à l'odeur d'enfance. Il me massa lentement, délicatement, jusqu'à ce que la crème pénètre. J'ai très vite somnolé. Les évènements précédents avaient au moins le mérite de m'avoir épuisé, je dormirai tranquillement cette nuit, enfin.

- Ne t'endors pas, il faut encore que tu manges, ma chérie.

 

Il alla sonner une cloche à l'entrée et je restais immobile. Il s'assit à la table en face du lit et me fit venir près de lui.

- Mets-toi à genoux. Les mains dans le dos.

Il clipsa les deux anneaux des bracelets ensemble, immobilisant mes bras. La position était inconfortable compte tenu de la punition que je venais de subir.

- Tu as faim ?

Je fis signe que non.

- Réponds-moi correctement.

- Non, Maître.

- Tu n'as pourtant pas mangé depuis longtemps. C'est la peur qui te coupe l'appétit ? Quelles angoisses te tordent le ventre, dis-moi ?

Je baissais la tête, je ne savais pas ce qu'il voulait que je réponde.

- Parle sans crainte.

- J'aimerais que vous me laissiez partir… Je ne veux pas vivre comme ça… Je ne comprends pas ce que vous voulez de moi… Je veux rentrer chez moi.

- Ce ne sont pas des angoisses ça. Ce sont des désirs et des non-désirs. Je me fiche de ce que tu veux, tu es à moi et une esclave n'a pas d'autres envies que celles de son maître. Je sais néanmoins que tu as peur, c'est normal. Tu dois m'en parler, ne pas me cacher ces pensées-là.

- J'ai peur de ce que vous allez me faire, de ce que je vais devenir, de cet endroit, de vous, des surveillantes…

- Tu es à moi, maintenant. Si tu fais ce que je te dis, tu n'as rien à craindre. Sache que je suis juste et loin d'être aussi brutal que certains de mes collègues. Je ne te toucherai pas avant que tu sois prête pour cela, je ne brusquerai jamais les choses. Tu n'as qu'une seule chose à redouter et c'est mon déplaisir. Je suis là pour te protéger du reste. Quant à ton avenir, il est de mon ressort et plus du tien, tu n'as donc aucune raison de t'en faire. Plus tu t'abandonneras, plus les choses seront faciles.

Je voulais baisser la tête, mais il m'attrapa le menton pour scruter mes yeux et ce qu'ils criaient. Un refus, une révolte. Qui était-il pour avoir cette prétention absolue sur moi ? Je ne serais pas à lui, je ne m'abandonnerais pas. C'est ce que je voulais croire. Mais je devinais dans son regard un murmure qui me cloua sur place : « j'en ai déjà brisé d'autres. »

On toqua à la porte. Une surveillante que je ne connaissais pas entra et disposa un plateau bien garni sur le bureau. Elle salua l'homme :

- Bonjour, Monsieur.

- Qu'y a-t-il au menu, Nougat ?

- Un filet de tofu, un caviar d'aubergine, une compotée de lentille et une tarte à la mirabelle.

Elle s'inclina très bas et s'en alla sans un bruit ni un regard pour moi.

- Pourquoi ont-elles toutes des noms si étranges ? Demandais-je.

Il leva un sourcil coléreux et j'ajoutais :

- Maître.

- Est-ce que je t'ai donné la parole ?

Non mais…

- Silence. Je te le laisse passer pour cette fois, mais ne recommence pas ou le banc aura à nouveau le plaisir de t'accueillir. Parler sans mon autorisation tu es interdit, au même titre que de me regarder dans les yeux. Ne l'oublie pas. Je ne répéterai pas mes avertissements.

Il saisit les couverts et découpa le filet de tofu avec soin. Il piqua l'un des morceaux et glissa quelques lentilles sur la fourchette.

- Ouvre la bouche, fit-il en amenant à moi la bouchée.

- Non. Pas comme ça. Je ne voulais pas qu'il me diminue autant.

- Je n'ai pas faim, Maître.

- Tais-toi. Ce n'est pas mon problème. Tu dois manger. Ne m'oblige pas à te faire avaler cette assiette par la force. Ce serait davantage humiliant, crois-moi. Tu veux voir ?

- Non, Maître.

Il m'ignora et posa la fourchette sur la table et prit une cuillère qu'il garnit de lentilles et de caviar d'aubergine.

Il m'attrapa par le cou sans prévenir et me serra contre lui assez fort pour que ma respiration soit diminuée. Immobilisée par sa force et par mes mains liées, mes tentatives de me défaire furent de violents échecs. Il força ma mâchoire à s'ouvrir en appuyant sur mes joues sans délicatesse et glissa la cuillère jusqu'au fond de ma gorge. Je manquais de m'étouffer quand il plaqua sa main contre ma bouche, m'empêchant de recracher.

- Mâches.

Je me suis appliquée à faire ce qu'il me dit, larmoyante et je finis par déglutir avec difficultés. Enfin il m'a lâché et je suis tombée de tout mon long, le corps tremblant, secouer par de violents haut-le-cœur.

- On peut continuer comme ça si tu veux, j'ai tout mon temps. Apprends que tu ne mangeras plus que de ma main, c'est une de mes règles. Alors tu ferais mieux de t'y habituer.

Je me remis à genoux, cherchant la force au fond de moi-même de paraître sereine.

- Seras-tu docile ? Demanda-t-il finalement après quelques secondes de silence.

- Ouais, Maître, soufflais-je.

- Bien.

Il me caressa la tête d'une flatterie insultante. Je baissais davantage mes yeux tandis qu'il préparait une nouvelle fourchetée. J'ouvris la bouche quand il l'approcha de moi. C'était horriblement humiliant, il me rabaissait à ma prime jeunesse, à l'incapacité de subvenir à l'un de mes besoins vitaux. Et je pensais qu'affamée, il doit insupportable de devoir attendre aussi longtemps entre chaque bouchée. Cette règle, je le devinais, renforcerait fortement son emprise sur moi.

En plus de gouverner ma vie, il prenait en main tous les liens de ma survie et m'ôtait une liberté fondamentale.

- Bonne fille, sourit-il quand l'assiette fut enfin vide. Ne bouge pas.

Il se leva et me libéra les mains. Je restais à genoux tandis qu'il alla chercher un nouvel objet dans la boîte noire. Une longue chaîne fine muni d'un mousqueton aux deux bouts. Il l'accrocha à la boucle de mon collier et m'indiqua que je devais me relever en tirant sur la chaîne.

- Je vais te lier au lit, tu vas pouvoir t'y reposer. Je reviendrai ce soir pour le dîner. Demain, si tu es sage, tu auras le droit de visiter l'Institution. Tu commenceras également un entraînement physique, il faut garder ce jeune corps ferme et j'y veillerai.

Il m'attira vers la couche et passa la chaîne de la laisse dans les boucles de mes bracelets, liant mes mains entre elles sur le devant. Il clipsa ensuite une boucle de la chaîne au mousqueton déjà accroché à mon collier, ce qui me força à garder les mains jointes et levées près de mon cou. Il lia le reste de la chaîne à l'un des poteaux qui cerclait le lit à baldaquin à l'aide d'un cadenas.

- Allonge-toi.

J'obéis.

Il s'accroupit alors près de moi.

- Je te laisse dormir sur le lit aujourd'hui, c'est une récompense pour ta soumission. Ta place est normalement au sol. Il en sera ainsi dès demain, alors profites-en.

Quelques secondes de silence passèrent, j'avais du mal à respirer, oppressée par sa présence et par le futur qu'il me déployait.

- Tu ne me remercies pas ? Finit-il par dire, la voix glaciale.

Pourquoi le remercier ? Une colère sourde vint m'abîmer les entrailles, comment avais-je pu me rendre si facilement ?

- Merci, Maître, grinçais-je.

- Ne m'offense pas de ces airs-là.

- Excusez-moi. Maître, crachais-je.

- Insolente. Je vais t'apprendre les bonnes manières.

Il se leva et fouilla dans la commode. Il sortit des pinces étranges et me poussa sur le dos avec une colère et une violence qui me terrorisa. À l’aide de ciseaux qu'il prit dans la table de nuit, il coupa le haut de ma robe et rompit mon soutien-gorge.

- Non… Murmurais-je, les larmes aux yeux.

Je détournais ma tête pour ignorer le regard lubrique qu'il portait à mes seins.

- Non quoi ? Hein ? Fit-il en caressant mes seins.

Je frissonnais sous ses doigts, en levant à nouveau les yeux vers lui je me rendis compte d'à quel point il était beau avec cet air sur le visage, d'à quel point je l'avais désirée quand je l'avais aperçu dans la rue, quand j'avais surpris son regard sur moi. Si j'avais su…

- Laissez-moi tranquille, soufflais-je.

- Voilà des seins qui pointent vite. Ça t'excite que je te touche comme ça ?

Je fis « non » de la tête.

- Ne me mens pas, petite. J'ai vu le regard que tu as posé sur moi. Et je sais le reconnaître, ce regard, je l'ai croisé souvent.

J'ai gémi :

- Ne me fais pas de mal…

- Pas avant que tu le désires autant que moi.

Il pinça plus fort mon sein droit. Il posa une des pinces sur le téton dressé. La douleur était diffuse et obsédante, il plaça la deuxième pince sans prévenir. Je ne pus retenir un gémissement. Douleur, plaisir, douleur. Je me sentais confuse, terrorisée par cet étrange sentiment.

Sans plus de procès, il se leva et remonta une couverture sur mes épaules. Il me posa un baiser sur le front et murmura à mon oreille : « Repose-toi maintenant. Et médite bien ceci quand les crampes prendront tes membres : c'est par ma volonté que tu es ainsi lié, par elle et rien d'autre. »

Il s'en alla.

 

CHAPITRE QUATRE

LA VOLONTÉ SUR LE CORPS

 

Impossible de m'endormir. Je me sentais suffoquer. Je luttais contre les liens, contre les tiraillements des stigmates de ma flagellation, contre le pincement qui irritait mes seins, contre son odeur que je sentais dans les draps. C'était encore une fois au-dessus du supportable. L'humiliation d'avoir été nourrie comme une enfant n'était pas passée, je me sentais sale. J'ai crié de rage.

J'eus très rapidement des fourmis dans les bras. Je gesticulais pour trouver une position confortable mais chacun de mes mouvements tirait sur mon cou ou faisait douloureusement tanguer les pinces qui pendaient sur ma poitrine.

Je pris de l'air. J'ai cherché une pensée capable de m'apaiser. Étrangement, je me surpris à évoquer l'étreinte que l'homme m'avait faite quelques instants plus tôt. Parce que, même si je m'étais sentie humiliée, rabaissée au moment de faire ce rituel, il n’avait eu pour moi qu'un regard doux, qu'un regard de satisfaction, qu'un regard de désir. Je pensais qu'il serait primordial de ne pas perdre de vue qu'ici, toutes ces choses sont normales et même encouragées, récompensées… Cela me révolta d'avantage. Je voulais m'enfuir. Je trouverai un moyen, pensais-je,je rentrerai chez moi.

Le sommeil étant hors de portée, j'observais mes liens d'un œil mauvais. Les paroles de l'homme prirent alors sens.

"Et médite bien ceci quand les crampes prendront tes membres : c'est par ma volonté que tu es ainsi liée, par elle et rien d'autre."

Je me suis rendu compte que je pouvais me détacher. Il suffisait de décrocher le mousqueton de mon collier et de déclipser les anneaux de mes poignets.

Je n'osais même pas imaginer la punition qu'il m'infligerait si je me détachais. Combien de coups ? Avec quel genre d'instrument ? Je ne doutais pas une seule seconde qu'il y avait pire que la badine. J'ai frissonné. Il n'y avait rien à faire.

Alors j'ai attendu en jouant avec le mousqueton. J'étais curieuse de savoir si la porte de la chambre était verrouillée ou non. Je n'avais pas entendu le bruit de la serrure. Sans doute ne l'était-elle pas. Je pourrai donc arriver à l'ascenseur, atteindre le niveau 0 et avec un peu de chance, j'arriverai à sortir de L'Institution.

 

C'était tentant. Mais je ne savais encore rien de l'endroit dans lequel on m'avait mené et je devinais au nombre de chambre que j'avais aperçu, ainsi qu'aux surveillantes, que nous n'étions pas que l'homme et moi. De plus, si la porte n'était pas verrouillée c'était sans doute parce qu'il n'avait pas peur que j'arrive à m'enfuir.

Calmée par ces quelques pensées structurées, mon corps se détendit et la fatigue me rattrapa. Je tombais dans un sommeil noir.

Il me réveilla sans douceur, en claquant des doigts tout près de mon oreille. Je sursautais et cachais mon visage dans les draps, pour contourner ce bruit qui m'empêchait de reprendre mes forces. Il tira alors la couette :

- D'aussi culottée que toi, j'en ai rarement vu. Debout !

Je me redressais timidement, tenue par la chaîne, les yeux encore aveugles d'assoupissement. Il me libéra, de la chaîne et des pinces.

Je repris délicieusement possession de mes membres. Il croisa alors les bras et un mécontentement se mit à brûler dans ses yeux. Je le dévisageais sans comprendre.

- Une seule punition ne te suffit pas ?

- Oh… Soufflais-je.

Je compris qu'il voulait que je fasse le fameux rituel. Étant à présent nue, il me sembla impossible à exécuter. Il le fallait pourtant. En avalant ma salive, je me mis à genoux et tentais de saisir sa main. Il la retira immédiatement et s'écarta de moi.

- Tu te dois de m'honorer du rituel à chaque fois que j'entre dans une pièce après toi. C'est pourtant clair, c'est pourtant simple. Deux baisers sur ma main droite, sur son dos et son creux pour me remercier de l'éducation que je te fais ; un baiser sur ma queue pour me rendre grâce du plaisir que je t'accorderai parfois. Un sur baiser sur chacun de mes pieds pour chérir la place que tu y occupes. Répète !

Je rougis, toujours à genoux :

- Un… Deux baisers sur votre main droite… Pour… En son dos et son creux… Je suis désolée maître, je…

- Oh oui, tu vas l'être. Répète je t'ai dit. Et sans bégayer.

- Deux baisers sur votre main droite, en son dos et son creux pour… Vous…

- Recommence.

Il avait la voix très dure, effrayante. Mon cœur battait fort, des larmes coulèrent.

- Deux baisers sur votre main droite, pour vous remercier de l'éducation que vous me faites… Un baiser sur…

J'enfouis mon visage dans mes mains, incapable de dire la suite. Ma gorge était douloureuse, trop serrée. Il attrapa mon chignon plus qu'en désordre et me releva la tête.

- Tu aggraves ta punition à chaque fois que je dois te faire répéter, me menaça-t-il.

- Deux baisers sur votre main droite, un au creux, un au dos, pour vous remercier de l'éducation que vous me faites. Un baiser sur votre entrejambe pour vous… Vous rendre grâce du plaisir que vous m'accorderez… Un baiser sur chacune de vos chaussures pour y… Pour chérir la place que j'y occupe… Pardonnez-moi de l'avoir oublié…

- Pardonnez-moi qui ?

- Maître ! Pardon !

Il se détourna et s'en alla vers la commode, celle d'où il avait sorti la cravache et la badine. Je fermais les yeux, tremblante, apeurée. Il sortit plusieurs objets et les disposa sur la table.

- Approches. Dépêche-toi.

J’obéis, paniquée à l’idée de devoir subir une autre punition. Quand j'arrivais près de lui, il m'enserra le cou de son bras gauche.

- Tu connais déjà la badine et la cravache, dit-il en effleurant les deux longues baguettes.

Il saisit ensuite une lanière de cuir épais.

- La prochaine que tu vas côtoyer, c'est la ceinture. Trempée dans de l'eau, elle devient presque aussi terrible qu'un fouet. Nous l'utiliserons sèche aujourd'hui.

Il prit ensuite un bâton plutôt souple.

- Il y a aussi la canne. Sensation toute autre mais qui n'est pas des plus agréables. À vrai dire, je m'en sers rarement, tu comprendras tout de suite pourquoi. Elle n'est pas aussi molle que les autres, les os souffrent donc aussi.

Il parlait avec un cynisme glaçant. Mes jambes croulèrent sous mon poids. Il me redressa et me tint debout, serrant plus fort sa prise.

- Tu as déjà vu un fouet, petite ? Réponds.

- Non, Maître, fis-je d'une toute petite voix.

- Je ne t'en montrerai donc pas, je ne veux pas que tu fasses des cauchemars. C'est assez impressionnant la première fois qu'on en rencontre un. Mais tu y auras le droit et sans doute plus vite que prévu, si tu ne fais aucun progrès.

Il me lâcha.

- Poses tout ça sur le lit.

Il se dirigea vers la porte qu'il ouvrit sur un chariot. Une surveillante entra et posa mon repas sur la table.

- Monsieur, dit-elle en s'inclinant.

Elle détourna rapidement son regard vers moi, elle avait sur le visage une drôle d'expression, entre l'amusement et le mépris. J'ai froncé les yeux tandis que mon maître se racla la gorge pour l'inciter à s'en aller. Elle s'excusa immédiatement et claqua la porte.

- À genoux, ici ! Dit-il en s'asseyant sur la chaise. Une soupe, ce soir. Il faut toujours dîner léger.

Sa voix s'était soudainement apaisée, il avait repris son calme.

- Lorsque tu auras fini de manger, tu débarrasseras le plateau. Tu le mettras sur le chariot. Puis, tu poseras ton buste sur cette table, les mains devant toi, le front contre le bois. Je te punirai alors. Trois coups de ceinture, dix coups de canne. Pour finir tu me remercieras pour cette correction.

Je pâlis.

- Compte tenu de la punition que tu as subie cet après-midi, c'est très sévère. Je vais donc te laisser une chance de te rattraper, de réduire le compte à sept coups de canne, seulement. Je veux que tu médites, pendant que tu manges, à… Comment appeler ça… Un serment de soumission. Une preuve de ta bonne volonté. Si je le juge correcte, j'allège ta peine.

 

Je ne sais plus trop bien toutes les choses qui me sont passées par l'esprit tandis qu'il m'offrait cuillère sur cuillère de la soupe que j'avais beaucoup de mal à avaler. Pas de luttes intérieures, je voulais fuir les coups. Pas de méditation sur mes mots non plus, j'avais la tête vide, l'estomac retourné par la peur, la colère ou dieu sait quoi. Impossible à dire. Je pense que la seule chose qui m'animait à cet instant précis, c'était l'instinct de survie.

Le bol fut enfin vide. Alors je me suis levée. Mes mains tremblantes étaient plus que voyantes, tenir le plateau me fut difficile. Quand je l'eus posé sur le chariot, je revins me mettre à genoux, je ne savais pas quoi faire d'autre. J'ai commencé mon "serment de bonne volonté."

- Je vous promets de faire de mon mieux pour suivre vos règles. J'obéirai. Je ferai mon possible pour être ce que vous désirez que je sois.

J'espaçais chacune de mes phrases d'un silence. Je cherchais mes mots. Je me jurais intérieurement que je ne pensais rien de ce que je disais. J'espérais ainsi rendre les choses plus faciles.

- Je n'oublierai plus de faire le rituel, ni de vous appeler comme vous le désirez.

Je l'interroge du regard. Il ne dit rien, ne bouge pas. Ses bras sont croisés, ses yeux exigeants. Il était impressionnant. De beauté et d'autorité. Je me sentis soudainement très timide.

- Maître… Ajoutais-je en baissant la tête.

- Rien de très convaincant, tu ne trouves pas ?

Je gardais la tête baissée et ajoutais :

- Je remets mon sort entre vos mains. J'accepterai votre punition.

Il caressa ma tête et me fit relever le visage pour que j'affronte ses yeux secs de mes yeux pleins de larmes.

- Redis-le. Mais sans oublier le titre que tu me dois.

- Je remets mon sort entre vos mains, Maître. J'accepterai votre punition, Maître.

- Bonne fille. Sur la table maintenant.

Je me relevais et posais mon torse sur le bois froid. Je sentais mes fesses exposées. Il les caressa doucement, suivant quelques-unes des marques qu'il y avait laissées traîner. Il le fit longuement, jusqu'à ce qu'un sanglot s'échappe d'entre mes dents.

- Tu n'es pas trop timide sur ta nudité, j'en suis content. Cela aidera bien des choses.

Il alla chercher quelque chose sur le lit.

- Je ne suis pas complètement convaincu par ton petit serment. Tu auras le droit à un coup de ceinture, tout de même. Et huit coups de canne. Je commence par la canne. Compte a haute voix.

- Oui, Maître.

Cette fois je criai dès le premier coup. Les plaies de l'après-midi se ravivaient de douleur. Il prit son temps entre chaque volée. Assez pour que je puisse un peu récupérer et craindre davantage le prochain. Je détestais la sensation qu'offrait la canne, j'avais l'impression d'être cognée avec beaucoup plus violence. Quand il eut fini, j'eus beaucoup de mal à ne pas me laisser tomber à terre. Je l'entendis chercher la ceinture sur le lit.

- Pitié, Maître, pitié, non… Sanglotais-je.

- Silence.

Il se plaça derrière moi. Il laissa quelques secondes passer, quelques secondes où l’on entendait plus que ma respiration sifflante. Et puis il l'abattit sur moi. La brûlure me laissa bouche bée. Et la douleur n'est pas disparue tout de suite. Je gémis et me laissais tomber au sol, passant ma main sur ma peau meurtrie.

Il se rapprocha de mon corps enroulé sur lui-même.

- Tu ne crois pas que tu as oublié quelque chose ?

Je me raidis et crachais de mauvaise grâce :