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Adalmar est un Royaume prospère où différents peuples - Elfes, Nains, Sorciers, Druides, Hommes - vivent en paix depuis la Guerre Jamais Oubliée. La vie s'écoule au fil des saisons quand une nuit, surgissant de nulle part, des cavaliers vêtus de noir attaquent un petit village. L'horreur, alors, se déchaîne. Sur place pour affaires, Sokorie, une aventurière reconnue pour ses exploits, parvient à sauver une fillette. Ainsi, elle la prend sous son aile, et, avec son amie Rafiqa, elle la conduit auprès d'une Dryade qui vit dans un étrange palais au coeur de la Forêt d'Orielle. Car c'est elle qui doit révéler son destin à l'enfant. Mais Sokorie et ses amies se rendent vite compte qu'un terrible mal ronge peu à peu le Royaume. Pour vaincre le Sombre Sorcier et sauver leur monde, elles devront entreprendre un périlleux voyage sur les chemins d'Adalmar. Bien plus que de retrouver trois Objets Sacrés pour leur mission, il leur faudra aussi se souvenir que, parfois, il est des Légendes qui n'en sont pas... Le roman inspiré du conte : "La Princesse du Fond des Temps".
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Seitenzahl: 286
Veröffentlichungsjahr: 2022
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À mes filles Solène et Amandine, À mes sœurs Emmanuelle et Aurore, À ma nièce Justine, Toi, qui aimais tant lire mes livres. À mes nièces, Marion et Chloé À mon neveu, Paul.
À toutes les Princesses et les Princes qui sommeillent dans nos cœurs d’adultes...
La plume d’un ange s’envole au vent Légère, virevolte au gré du temps. Tremblotant timidement dans une main, Inscrit sur les pages jaunies d’un parchemin : « Il était une fois » : l’histoire a commencé… C’est cela l’âme d’un écrivain : imaginer.
Prologue : Le Rayaume d'Adalmar
Chapitre 1 : Une aventuriere au grand cœur
Chapitre 2 : Le Lagan Émeraude
Chapitre 3 : Les Cavaliers Nairs
Chapitre 4 : La petite Pretresse
Chapitre 5 : Le secret de Qamra
Chapitre 6 : Rafiqa
Chapitre 7 : En chemin vers le palais
Chapitre 8 : Une apparition Féérique
Chapitre 9 : La Princesse Papillon
Chapitre 10 : Paursuivies
Chapitre 11 : La Taverne de Yanrick
Chapitre 12 : Yanrick
Chapitre 13 : La carte
Chapitre 14 : Aprés une nuit agitée
Chapitre 15 : La rencantre
Chapitre 16 : La table des Druides
Chapitre 17 : Ami au ennemi ?
Chapitre 18 : Dverdei Sylvia - La Farêt aux Deux Verdures -
Chapitre 19 : TaHaa Mœrä - Lee Marécage Tayeux -
Chapitre 20 : Une main peu secaurable
Chapitre 21 : En mauvaise campagnie
Chapitre 22 : Beathain
Chapitre 23 : Cauchemar
Chapitre 24 : Un aigle dans un saleil
Chapitre 25 : Le maléfice
Chapitre 26 : Un secret bien gardé
Chapitre 27 : Une vue imprenable
Chapitre 28 : L' attaque des Gnames Guerriers
Chapitre 29 : L' Ombrine
Chapitre 30 : Lafäe Maiiga - La Mantagne des Amaureux -
Chapitre 31 : L'Épée Sacrée
Chapitre 32 : Un baiser traublant
Chapitre 33 : Le lien des âmes
Chapitre 34 : Canfidences
Chapitre 35 : Le Mirair de la Mart
Chapitre 36 : L'Enchanteur
Chapitre 37 : Le Sambre Sarcier
Epilogue : La fin d' une Légende
Adalmar était un Royaume prospère, aux étendues aussi luxuriantes que variées. Ses peuples y vivaient en paix et harmonie, dans un respect sincère et mutuel. De noble lignée ou usurier, humain ou de toute autre naissance, chacun y trouvait sa place.
Sveltes, les traits gracieux, d’une étonnante longévité, sages dans leur connaissance de l’univers ou de la magie, les Elfes étaient des guérisseurs des corps et des âmes, ainsi que de redoutables guerriers, habiles dans le maniement des arcs. Proche de la nature dont il était le fervent gardien, ce peuple vivait en marge des autres, dans sa citadelle sylvine, au cœur de la Forêt d’Orielle.
Les Elfes étaient des êtres mystérieux, au langage et aux mœurs étranges. Ils murmuraient aux rivières qui, lors de leur passage à l’âge adulte, leur révélaient leurs noms véritables. Ils pouvaient communiquer avec la faune et la flore, lire dans les étoiles et bien d’autres choses encore. Leurs sens hyperdéveloppés leur donnaient un avantage certain, dans de nombreux domaines.
Barbus, sourcils broussailleux, tant pour les hommes que pour les femmes, les Nains étaient de fameux joailliers, fins brasseurs d’hydromel et artisans de haches. Si ce peuple, autrefois gouverné par son propre roi, possédait toutes les mines ou presque du Royaume, il avait, au fil du temps, quitté ses montagnes afin de se mêler à celui des Hommes.
D’ailleurs, il n’était pas rare que, dans de nombreux hameaux, bourgs ou cités plus importantes, les rôles de Maîtres Forgerons ou Taverniers leur reviennent. S’ils savaient se montrer généreux ou joviaux, ces êtres bourrus pouvaient également vous faire la démonstration de leur art combatif. Principalement après quelques chopes remplies d’hydromel. Fort heureusement, cela ne se produisait que rarement et se finissait toujours bien. Sauf si vous aviez le malheur de vous moquer de leur taille ou déshonoriez le nom de leur ancien roi, ou encore si vous manquiez de respect à l’une de leurs femmes. Une mort rapide et brutale vous était alors assurée.
Bien de nombreuses autres peuplades cœxistaient, comme les Nixes – êtres des fleuves –, quoique personne n’en ait plus vu depuis la Guerre Jamais Oubliée ; les Gnomes Guerriers (il ne fallait surtout jamais se fier à leur taille) ; les Fàras – chevaux qui avaient les dons de parole et de magie.
Mais le peuple le plus répandu en Adalmar était celui des Hommes. Plus divisé que les autres, plus corrompu également, il restait celui qui, autrefois, avait donné le plus de mal aux autres, celui qui avait vu naître l’être le plus maléfique que le Royaume n’ait jamais connu : Brabakk, le Sombre Sorcier, aussi connu sous les noms de Sorcier Noir ou Maître des Ténèbres.
Fort heureusement pour la paix, ces temps étaient révolus. Aujourd’hui, les Hommes vivaient en harmonie avec les autres, bien que la plupart d’entre eux soient des mercenaires, aventuriers, à la solde du plus offrant.
Les Druides et les Sorciers naissaient parmi les Hommes. Toujours. À l’instar des Elfes, ils avaient acquis de nombreux savoirs : l’espace et le temps, les parchemins sacrés, la magie runique ou élémentaire, la sagesse contenue dans les mots, ainsi que les sciences diverses. Leurs connaissances ne se transmettaient pas systématiquement de père en fils, mais de maître à élève.
Chaque souffle insufflait vitalité au Royaume, chaque effort assurait sa prospérité. Ainsi, au gré des aléas, la vie s’écoulait le plus paisiblement possible. Et ces Légendes, ancrées dans le cœur de tous, apportaient le réconfort et la détermination nécessaires qui venaient à manquer de temps à autre. L’une d’entre elles plus particulièrement suscitait force, courage et espérance.
Mais alors que de nouveau les Temps Sombres approchaient, chacun en Adalmar allait se souvenir que, parfois, il est des Légendes qui n’en sont pas.
Les bruits de la bataille s’éloignaient tandis que ceux de leur folle course à travers la forêt semblaient résonner de partout et nulle part à la fois.
Les feuilles et branches mortes craquaient sous leurs pieds, leurs souffles exhalaient une vapeur tiède qui ne parvenait pas à réchauffer ce froid omniprésent laissé par Brabakk.
Les animaux de toutes tailles s’étaient réfugiés – pour les plus chanceux – dans leurs nichées. Les moins chanceux gisaient au sol, sans vie. La flore flétrissait à vue d’œil.
Il fallait lui mettre la main dessus et vite!
Ses compagnons et elle avaient délaissé leurs montures loin derrière eux : la touffeur de la Forêt d’Orielle aurait empêché toute progression rapide, autrement qu’à pied. Un regard vers l’homme sur sa droite, dague ornée de gemmes vertes en main, lui renvoya la même détermination que la sienne ou celle de leurs amis.
Plus agile que n’importe lequel d’entre eux, Koadeg, déjà loin devant eux, voltigeait souplement de branche en branche, prenant de l’avance sur leur groupe. Ainsi, l’Elfe Sylvain servait d’éclaireur.
Bheathain, le Nixe, se tenait bien évidemment aux côtés d’Élyria, princesse Elfe – ou Princesse Papillon à cause de son lien avec les insectes en question. Plus grand, plus fort que tous les autres Nains, Dalziel assurait leurs arrières. Quant à ses deux meilleures amies, l’une en lien avec les esprits, l’autre ayant juré de veiller sur elle jusqu’à sa mort, elles se tenaient toutes deux juste derrière elle.
C’est alors qu’ils déboulèrent dans la clairière. Devant eux, Koadeg faisait face au Sombre Sorcier…
La jeune femme s’éveilla en sursaut, la main sur le cœur.
Paupières closes, elle tentait de se souvenir du rêve qui s’effaçait déjà. Il ne restait de celui-ci que cette impression vague de « déjà-vu » qui la frustrait nuit après nuit.
Elle soupira d’exaspération quand les dernières brumes du sommeil se dissipèrent. Une mèche de la couleur du feu coula sur l’arrondi de son épaule, chatouillant sa peau nacrée. Lorsque Sokorie ouvrit enfin ses yeux noirs, ce fut pour se trouver nez à nez avec un petit écureuil. L’animal tenait une noix entre ses pattes et l’observait.
— Bonjour, toi.
Le rouquin à la queue touffue se détourna aussitôt dans un petit couinement, laissant la jeune femme seule. Sokorie, un sourire sur ses lèvres pleines, se redressa et s’étira pour dérouiller ses muscles. Les odeurs sylvines remontèrent jusqu’à ses narines en même temps que ses prunelles sombres considéraient le lieu de son bivouac.
Le Bosquet du Petit Cerf était justement l’endroit parfait pour passer une nuit tranquille, à l’abri des regards et des dangers variés de la vie aventurière qu’elle et sa meilleure amie – absente depuis deux jours – pouvaient mener.
Encore somnolentes (ou presque), la faune et la flore paraient peu à peu le bosquet de leurs sérénades, bruissements en tous genres, lapements râpeux, parfums délicats, couleurs timides ou joviales, crissements divers.
Une goutte de rosée mourut dans le cou de Sokorie, la faisant frissonner.
Elle l’essuya négligemment du bout des doigts, fit craquer sa nuque puis se leva. Son plaid dégringola dans le mouvement, dévoilant une tunique blanche, surmontée d’un plastron de cuir, par-dessus un pantalon noir serré et aux nombreuses lanières (cachettes idéales pour des armes blanches). Des bottes grimpaient à mi-mollet.
La femme à la longue chevelure fauve s’étira encore une fois, roula sa couverture, rangea ses affaires avant d’attraper, posés contre le tronc du pin derrière elle, arc et carquois plein.
Paquetage sur l’épaule, arme en main, elle effaçait ses dernières traces du plat du pied quand un nouveau son stoppa net son mouvement. Elle tendit l’oreille. Son froncement de sourcils se dérida au fur et à mesure que ses lèvres s’ourlaient.
— Qamra, marmonna-t-elle.
Un martèlement encore étouffé par le tapis de feuilles au sol se fit alors entendre, suivi d’un hennissement. L’instant suivant, un équidé à la robe immaculée faisait son apparition à quelques mètres à peine d’elle.
Sokorie se précipita vers lui. Le cheval inclina le museau, laissant s’échapper quelques flux d’air tiède par ses naseaux dilatés. Elle passa ses doigts dans le soyeux du toupet avant de poser son front contre le sien.
— Bonjour, Prince. Je suis heureuse de te revoir, mon ami.
Un nouveau hennissement en guise de réponse accompagna un mouvement léger de sa noble tête. Sokorie laissa sa paume parcourir l’encolure jusqu’au garrot. Elle alla à la rencontre de la selle (posée sur une couverture sombre mettant parfaitement en valeur le blanc éclatant de sa robe), toujours harnachée sur son dos et de laquelle pendait une besace. Elle l’ouvrit, en attrapa quelques vivres qu’elle avala rapidement. Elle en sortit ensuite une gourde d’eau afin de se désaltérer.
Connaissant parfaitement le lieu où elle avait dormi et afin de ne pas attirer la moindre attention sur elle, l’aventurière avait jeûné la veille, évitant ainsi d’allumer un feu qui l’aurait fait repérer.
Les affaires étaient les affaires!
Pas question de laisser qui que ce soit marcher sur ses plates-bandes. Qamra tourna le cou vers elle comme s’il venait de deviner ses pensées.
— Ça va, mon beau. Tu sais que je ne suis pas sans défense. Si qui que ce soit avait osé ramener son postérieur ici, il aurait passé un sale quart d’heure.
Un petit hennissement moqueur plus tard et la belle avait accroché tout son barda à ses flancs.
— Écoute, Qamra : je dois me rendre au village de Sareï récupérer notre paquet. Oui, ce n’est pas tout près, ajouta-t-elle en croisant le regard désapprobateur de son compagnon équin. C’est pour cela qu’on fera une halte au Lagon Émeraude.
Sur ces mots, elle passa un pied dans l’étrier, prit appui et se hissa sur son dos. Une fois en selle, Qamra se mit en route sans qu’elle lui demande quoi que ce soit.
Qamra galopait depuis plusieurs heures à travers une vaste plaine.
Derrière eux, le Bosquet du Petit Cerf n’était plus qu’un lointain souvenir. Sokorie aimait ces vastes étendues verdoyantes qui vallonnaient le paysage. Les nuages couvraient l’horizon comme un doux manteau cotonneux protecteur duquel perçaient les têtes bienveillantes des Monts Smaragdins.
Les deux compagnons filaient droit vers eux, désirant atteindre au plus tôt le point de leur halte. La matinée touchait à sa fin et si Sokorie n’était pas une femme douillette, elle commençait à ressentir quelques crampes dans les cuisses. Sans compter qu’elle devait ménager sa monture, même si l’équidé, plus résistant qu’un cheval « ordinaire » par sa naissance, commençait lui aussi à montrer des signes de fatigue. Alors qu’elle tirait légèrement sur les rênes pour l’inciter à ralentir l’allure, la jeune femme repéra un petit fourré, perdu au milieu de la campagne.
— Là, mon Prince.
Le cheval bifurqua aussitôt dans cette direction. Ils atteignirent leur but en quelques foulées et se mirent à l’abri sous de basses branches feuillues. Sokorie mit pied à terre et presque immédiatement, l’équidé frappa le sol trois fois de suite avec son sabot. Il réitéra la même opération plusieurs fois sous l’œil attentif de l’humaine qui, arc en main, patientait. Le rituel terminé, la rouquine échevelée par leur matinée à galoper caressa le chanfrein de Qamra.
— Pas de Gnomes Guerriers?
Le hennissement négatif lui assura la réponse.
— Ne t’en fais pas : si un seul d’entre eux avait ramené sa sale face de rat des champs, je lui aurais planté une flèche dans le crâne. Leur espèce a assez fait de mal à la tienne.
Le cheval resta silencieux, mais son regard vague parlait pour lui. Une nouvelle caresse le fit revenir de ses pensées.
— Ta conversation me manque, mon ami. Allez, viens! Allons trouver de quoi te rafraîchir.
Le fourré n’était certes pas très étendu, mais cachait en son sein un ru prenant sa source dans les Monts Smaragdins, suffisamment large et profond pour permettre à Qamra de s’abreuver. L’aventurière en profita pour se désaltérer à son tour et sortir de sa besace un peu de viande séchée qu’elle s’empressa d’avaler : son ventre criait famine. Une fois sustentée, elle laissa l’équidé, dont la robe contrastait avec la verdure du lieu, relâcher la tension cumulée dans ses muscles puissants.
Elle patienta encore un peu, le temps pour l’animal de digérer les herbages qu’il avait avalés. Hors de question de le rendre malade! De toute façon, elle avait encore le temps. Son rendez-vous avec Sareï, chef du village des autochtones, n’était prévu qu’en début de nuit. Si Sokorie n’avait pas compris les raisons d’une telle demande, elle respectait son choix.
Le temps de repartir à l’aventure venait d’arriver. Sokorie grimpa sur le dos de Qamra (jamais il ne lui viendrait à l’esprit de dire ou penser « son » cheval) et les deux compagnons quittèrent leur abri pour reprendre la direction des montagnes. Les heures filèrent rapidement, au rythme assuré des foulées équines. Les Monts Smaragdins se présentaient à leur vue, usés par les années à veiller sur la plaine qu’ils quittaient.
Ils suivirent un sentier rocailleux, large, facile d’accès qui leur permettait une progression certes lente, mais surtout sans danger. Les minutes se succédèrent ainsi, tandis que Sokorie et Qamra pénétraient dans l’antre montagneux. Comme plus tôt dans la journée, la jeune femme tira sur les rênes pour stopper leur avancée.
— Écoute, chuchota-t-elle.
Le cheval tendit l’une de ses oreilles, puis la deuxième avant de reprendre son chemin jusqu’à une bifurcation qu’il emprunta. Au bout de quelques mètres à peine, une végétation luxuriante, aux tons et parfums aussi variés que les espèces qui la composaient, s’offrit à leurs yeux.
Qamra trotta allègrement avant de s’arrêter devant le spectacle qui émerveillait à chaque fois la cavalière. Le lagon aux eaux émeraude s’étendait sur une longueur et une largeur incertaines. Quelques roches saillaient, parsemées de-ci de-là, quand d’autres, érodées, auraient pu offrir une assise confortable aux baigneurs aventureux. Plus loin, une dizaine de cascades à l’écume d’un blanc pur dévalaient les flancs de la montagne dans un bruit sourd. Sokorie sauta à terre, défit mors, brides et rênes. Qamra poussa un hennissement de satisfaction.
— Si tu n’y vois pas d’inconvénients, je te laisse la selle et te confie mon arc. On ne sait jamais. Je pourrais avoir besoin de fuir.
Petits hochements de tête.
— Quant à l’arc, Sareï ne veut pas d’armes dans son village.
Bruit indistinct.
— Ouais, moi aussi je trouve ça idiot et dangereux. Mais ne te t’inquiète pas, poursuivit-elle, je garderai quelques atouts avec moi.
Elle lui montra alors des lames qu’elle dissimula dans ses bottes.
— En attendant l’heure du rendez-vous, je vais me reposer. Profites-en pour gambader un peu.
Le cheval s’inclina vers elle, quémandant une caresse. Elle passa délicatement la paume sur le chanfrein. Les yeux noirs de Sokorie rencontrèrent les globes pétillants d’intelligence de l’animal.
— Arrête de te faire du souci pour moi, je ne risque rien.
Rasséréné, il se détourna d’elle pour disparaître dans ce coin de paradis. Sokorie s’installa le plus confortablement possible, passa ses bras derrière la nuque, observant cette végétation dense, les parois rocheuses de la montagne serties d’émeraudes (d’où l’appellation des Monts Smaragdins) qui se reflétaient dans les eaux cristallines du Lagon du même nom.
Elle restait là, sans bouger, à l’écoute du moindre son, respirant les effluves délicats des fleurs colorées, des feuillages gras dispensant leur ombrage, du musc des arbres étirant leurs branchages à travers ce dôme chatoyant. Les insectes bourdonnaient, sifflotaient pour certaines espèces rares, les cascades s’écoulaient.
Ses paupières s’alourdissaient lorsqu’elle sursauta, les sens soudainement à l’affût. Sa nuque la picotait, une drôle de sensation dégoulinait le long de son échine. Elle en était certaine : quelqu’un ou quelque chose l’observait.
Son bras glissa lentement, silencieusement, vers l’une de ses bottes d’où elle extirpa un long couteau. Tout en faisant attention de limiter ses mouvements ainsi que ses bruits au strict minimum, elle s’assit sur ses chevilles, se tenant en appui dessus, prête à bondir au moindre signe de danger. Les secondes défilèrent, mais rien ne se produisit, si ce n’était que la sensation d’être observée s’estompa totalement.
Finalement, elle finit par reprendre sa position initiale, d’abord méfiante avant de se détendre au fil du temps égrené. Sa respiration se fit plus lente, son corps plus lourd. Quelques instants plus tard, Sokorie se perdit enfin dans les brumes du sommeil.
Lorsque Sokorie s’éveilla, la journée touchait à sa fin. Combien d’heures avait-elle dormi, bon sang?!
Heureusement, le village se situait non loin du Lagon. Elle pouvait s’y rendre à pied. Comme le plan était « discrétion à tout prix » au vu de la mission, c’était, de toute façon, ce qui était prévu dès le départ.
Se rendre sur les lieux, récupérer la Prêtresse du village incognito (d’où le rendez-vous nocturne) puis la conduire au palais de la Princesse Papillon. Noble tâche qui en vérité ne lui rapporterait rien. Pas la moindre petite pièce. Cependant, quelque chose de mystérieux, énigmatique, l’avait incitée à accepter. D’où sa présence ici et maintenant aux Monts Smaragdins, à une petite demi-heure à peine du village.
Ses prunelles sombres pointées vers le ciel qui revêtait ses dernières teintes aussi fauves que sa chevelure, Sokorie lissa machinalement sa tunique blanche. Puis, elle enfila à la va-vite une capeline sur ses épaules : il était temps de partir.
Elle couvrit son chef avec la capuche, longea le Lagon sur quelques mètres. Le bruit des chutes d’eau se fit plus assourdissant et l’atmosphère, plus fraîche, se chargea d’humidité jusqu’à ce qu’elle diverge pour emprunter une trouée dans une futaie. Le passage, maintes et maintes fois utilisé, se fit plus large au fil de sa progression.
Ce dernier, d’abord feuillu et foisonnant, se fit rocheux à mesure qu’elle traversait les Monts Smaragdins. Au bout d’un moment, l’air frais à l’extérieur courut sur son visage : elle était enfin sortie du tunnel.
La nuit enveloppait lentement le domaine céleste, signal pour l’astre lunaire de faire resplendir sa clarté d’argent. Alors que ses compagnes s’allumaient tour à tour, Sokorie entama sa marche dans la petite clairière précédant le Grand Breuil.
Elle accéda rapidement au bois dormant. La faune disparate et invisible à cette heure avait rejoint ses différentes tanières ou autres appellations du genre. Sokorie, capuche toujours sur la tête, se faufila à travers le fourré d’arbres et de végétation haute, dense. Oreille tendue, à l’affût, elle reconnut aussitôt la musique familière.
Le son d’un tambour se propageait dans l’ambiance feutrée. Des voix chuchotaient. Sokorie approcha à pas silencieux, pour deviner (plus que découvrir) le village de Sareï recouvert par la chape nocturne. Ici, même la lune et ses filles ne semblaient plus que de pâles veilleuses lointaines. Seul le feu autour duquel les autochtones s’étaient regroupés dispensait ses maigres lueurs orangées.
La jeune femme se raidit.
Encore une fois, elle se sentait observée. Elle écarta son regard de l’attroupement, pivota souplement, tenta de percer l’obscurité de la frondaison. Rien. Il n’y avait personne. Sans doute s’était-elle fait des idées?
Elle se détourna, tout de même suspicieuse, faisant de son mieux afin de monopoliser son attention sur sa mission : entrer en contact avec Sareï, debout au milieu des siens. Il semblait leur expliquer quelque chose, dans leur dialecte.
À l’abri derrière les broussailles, elle prêta l’oreille. Une brise légère souleva délicatement une mèche fauve, sans que Sokorie s’aperçoive que sa capuche avait glissé sur ses épaules. Mais, tandis qu’elle tendait la main pour écarter une branche basse, les mots inconnus de Sareï prirent tout leur sens. Chacun tournait et dansait dans sa tête au rythme enivrant de la voix grave :
— Il existe une Légende, celle d’une Princesse. Elle viendrait du Fond des Temps. Elle arrive parmi nous toutes les mille lunes pour veiller sur la paix. Nul ne connaît son visage, mais on raconte qu’elle est d’une grande beauté. On la dit dotée d’une force exceptionnelle et d’un grand courage.
C’est alors que, surgissant de nulle part, un orage éclata avec une violence insoupçonnée. Le tonnerre grondait, des éclairs déchiraient le voile nocturne quand un cri puis un autre et encore un se mêlèrent au brouhaha. Et là, sous la lumière vive d’un nouvel éclair, Sokorie les aperçut.
Des cavaliers encapuchonnés, sur des montures aussi noires que leurs tenues, chevauchant à vive allure, déboulèrent d’elle ne savait où. Épées en avant, ils traversaient le village, semant la panique. Hommes, femmes, enfants couraient en tous sens.
Tout se passa si vite que Sokorie ne put rester que la spectatrice impuissante du massacre. Les lames fendaient la nuit autant que le ciel déchargeait sa colère. Le sang coula, les hurlements, les pleurs redoublèrent.
C’était le chaos.
La jeune femme saisit l’une des armes cachées dans ses bottes, la lança, rata sa cible proche. Elle se réprimanda mentalement, se déplaça rapidement pour ne pas se faire repérer, renouvela l’opération, blessa un cavalier. Mais ils étaient trop nombreux. Même avec son arc, qu’aurait-elle pu faire? C’est alors qu’au beau milieu de tous ces cris lui déchirant le cœur, Sokorie entendit :
— Cachez Numaë!
Presque immédiatement, une ombre se mit en mouvement, contournant la scène d’horreur. Comme elle se dirigeait vers elle, la silhouette se précisa : il s’agissait d’une enfant! Paniquée, la respiration saccadée par sa course folle, la fillette ne vit pas la racine de l’arbre sur son chemin. Elle trébucha à quelques pas à peine de la femme embusquée.
L’esprit vif, elle l’aida à se redresser et plaqua aussitôt une main contre sa bouche, étouffant ainsi la plainte qui s’échappait de sa gorge. Sokorie, bien que compatissante, le savait : elles ne devaient pas faire de bruit. Sous aucun prétexte.
Elle entraîna l’enfant avec elle, à l’abri de broussailles hautes et drues. Elles patientèrent, aux aguets, pendant que, un à un, les hurlements et les pleurs cessèrent. L’aventurière savait ce que cela signifiait : la mort.
Toujours les sens en alerte, Sokorie avait parfaitement conscience que tout danger n’était pas écarté. Les sabots martelaient le sol ; les cavaliers noirs se rapprochaient de leur cachette. Les mains se levèrent puis s’abattirent. Les épées fouettaient le breuil, tentant de débusquer quelconque survivant. Les lames passèrent juste au-dessus de leurs têtes. Sokorie retint difficilement un cri d’inquiétude.
À deux pas, les montures haletaient tant qu’elle et l’enfant pouvaient sentir leur souffle chaud. Plaquée tout contre elle, la fugitive transpirait, tremblait, paniquait. Leurs regards se croisèrent alors, se lièrent par la même crainte d’être découvertes.
L’estomac noué, il leur fallut attendre, encore et encore.
Une discussion.
Les cavaliers noirs parlaient avec quelqu’un. Qui? Aucune idée. Sokorie ne parvenait pas à comprendre le moindre mot.
Au bout d’interminables minutes, les assaillants s’éloignèrent avant de disparaître comme ils étaient venus. Le silence s’installa, pesant. Finalement, Sokorie relâcha l’unique survivante du village.
À présent debout, hors de leur cachette, la jeune femme, l’œil avisé, ne put que constater toute l’étendue de l’horreur : les corps gisant sans vie, les huttes dévorées par les flammes. Un cri. Des pleurs. La petite tomba à genoux. La décision s’imposa alors. Il fallait partir, fuir, mettre le plus de distance possible entre elles et le funeste lieu.
Sokorie attrapa délicatement la main de la petite fille, l’entraîna à sa suite dans une course folle à travers le breuil. Elles progressaient à l’aveugle, ralenties par l’obscurité et la végétation sauvage, dense, quand la rouquine repéra une nichée abandonnée. Elle n’hésita pas une seconde et s’immobilisa devant, le souffle court.
La fillette restait figée d’effroi, les yeux remplis de larmes. Sokorie s’assura de leur sécurité et, avec des gestes vifs et précis, déplaça rapidement branches et feuillages pour ne pas se faire repérer de l’extérieur. Elle mena ensuite l’enfant au creux de la nichée, la força à s’allonger pour se reposer.
Ainsi, tapies à l’abri de tout danger, elles glissèrent dans un sommeil agité de rêves étranges : des visages inconnus suivis des silhouettes des cavaliers noirs. Une encre, aussi obscure que les ténèbres, s’amusait à peindre les scènes du massacre. Elle s’enchevêtrait aux taches rouge rubis, dégoulinant sur d’autres encore plus informes.
Les plaintes, les geignements étouffés de la fillette rejoignirent alors ces songes, comme une funèbre ritournelle, jusqu’à ce que, petit à petit, l’une comme l’autre s’apaisent.
La fraîcheur d’une brise matinale chuchotait dans les feuillages.
Une goutte de rosée caressa le velours d’un pétale, suspendit un bref instant sa course pour se laisser tomber sur les fougères épaisses et mœlleuses. Un petit piaillement dans les arbres, un mouvement d’un côté, un autre plus loin : la nature s’éveillait en même temps que l’aube pointait.
Les premières lueurs solaires percèrent tranquillement la cache feuillue agencée à la va-vite la veille pour venir caresser le velouté du visage de Sokorie. À la lueur du jour, son épaisse chevelure de feu flamboya. À présent poussiéreuse, la longue pèlerine qui les couvrait, elle et l’enfant, avait glissé. Les rayons tièdes batifolèrent sur ses paupières. Sokorie bâilla avant d’ouvrir ses prunelles sombres et profondes.
Ses lèvres s’étirèrent dans un sourire franc, honnête, un peu bravache – tout comme elle après tout – signe annonciateur d’une humeur si ce n’est reposée des affreux évènements de la veille, au moins tempérée.
Comme elle observait la petite fille endormie à ses côtés, la tristesse l’envahit, tout comme les remords. Mains tremblantes, elle effleura les longs cheveux noirs, attachés savamment par de petits rubans de couleur. Trois bracelets en forme de serpent autour de ses bras, un collier en or autour du cou, et, suspendue au front par une petite chaîne, une pierre améthyste en forme de lune ; l’enfant devait être âgée d’une dizaine d’années, tout au plus. Le visage de la fillette portait encore les stigmates de la nuit cauchemardesque : égratignures, gros cernes sous les yeux, pâleur inquiétante.
Son estomac se comprima, lui coupant un instant le souffle. L’air lui manqua tandis qu’elle réalisait son impuissance à aider Sareï et les siens. Les souvenirs affluaient comme autant de leurs coups d’épées dans le ventre. Ces satanés cavaliers avaient décimé tous les villageois. Tous. Hommes, femmes, enfants, aucun n’avait survécu. Aucun. Sauf cette gamine.
La flamboyante aventureuse en avait déjà vu des horreurs… mais ça!
Elle réprima un haut-le-cœur. Devait-elle retourner au village et les enterrer? Elle porta ses doigts glacés par l’effroi sur sa bouche alors que la réalité, plus atroce encore que ce bain de sang, la frappait. Non. Elle ne pouvait pas. C’était bien trop périlleux. Elle ne pouvait pas prendre le risque de croiser de nouveau la route de ces barbares.
Sokorie était inquiète : l’attaque de ces chevaliers ne présageait rien de bon. Sa mission était compromise, voire carrément fichue! Toutefois, elle avait besoin d’explications. Pourquoi s’en prendre aux autochtones? Aux enfants! Ils ne représentaient aucune menace! Et la Prêtresse? Non! C’était idiot! Décidément, tout cela n’avait aucun sens! Il lui fallait des éclaircissements et vite.
À ses côtés, la petite fille dormait toujours. Presque paisiblement. En fait, la fatigue, la peur, ce sentiment d’horreur, avaient eu raison de ses dernières résistances. Le corps parcouru de tremblements incontrôlables, elle avait fini par s’assoupir tout contre elle… pauvre petite! Qu’allait-elle devenir?
Lenfant s’éveilla enfin.
Apercevant celle qui se tenait devant elle, la fillette paniqua. Sans doute les images de la veille lui revenaient-elles à l’esprit? Quoi de plus normal, après toutes ces horreurs? Mue par son instinct de survie, elle se leva d’un bond puis sortit de leur cache à une vitesse qui prit de court Sokorie. Le temps de réagir et de la suivre à l’extérieur, la petite s’était mise à courir à travers le breuil qui s’éveillait.
Sokorie pesta dans sa barbe. Elle ne pouvait pas la laisser. Pas après tout ce qu’elle avait vécu. Si la faune qui délaissait les différentes tanières pouvait se révéler dangereuse, ce n’était rien comparé à ces étranges cavaliers qui s’étaient retrouvés comme par enchantement dans le village. Ils n’avaient pas besoin de prouver qu’ils étaient capables du pire. S’ils tombaient nez à nez avec la fugitive, il n’y avait aucune chance pour qu’ils la laissent tranquille après leurs actes immoraux.
Et puis, elle se sentait responsable de la gamine, de la mort des siens. Seule contre tous, elle n’avait rien pu faire. À présent, la culpabilité la rongeait. Elle devait la protéger. Forte de cette décision, Sokorie se mit à cavaler derrière elle. Elle la rattrapa en quelques foulées seulement et l’agrippa par le bras. Se dégageant d’un geste brusque, la fillette fit volte-face en s’écriant :
— Qui es-tu?
— D’abord, bonjour.
— Que me veux-tu?
Le sourcil droit de Sokorie s’arrondit de stupéfaction. Elle ne s’attendait pas à ça. La galopine 1 la dévisageait de la tête aux pieds, la mine revêche. Elle voulait bien croire que la petite venait de vivre des moments terrifiants, mais tout de même! Sans elle, elle ne serait plus de ce monde, ne devrait-elle pas se montrer un brin plus reconnaissante? Et aussi : c’était quoi ce ton?
— Et toi? Ne devrais-tu pas être plus polie! Je t’ai sauvé la vie! Mais peut-être ai-je eu tort?
L’effrontée pâlit, se mordit les lèvres pour réprimer probablement un sanglot. Sokorie s’en voulut de raviver ainsi sa douleur ainsi que sa peine. Elle aurait dû se montrer davantage compatissante. Après tout, la miraculée ne la connaissait pas et n’avait aucune raison de lui accorder sa confiance. Surtout avec ce qu’il s’était produit la veille au soir.
Celle-ci lui lançait des œillades obliques pour évaluer la situation. Jugeant ne pas être en danger immédiat, elle finit par dire :
— Je m’appelle Numaë.
— Moi, c’est Sokorie, répondit-elle, la voix radoucie. Tu n’as rien à craindre avec moi, précisa-t-elle pour la rassurer.
Numaë venait de perdre tous les siens. Elle était effrayée, devait sans aucun doute possible se sentir complètement perdue. Mais, malgré toutes ces épreuves, la fillette essayait de garder la tête froide. Elle tendait le menton, la jaugeait, encore soupçonneuse.
— Je te remercie de m’avoir sauvée, articula-t-elle finalement entre ses dents. Mais il faut que je parte.
— Ce n’est pas très prudent. Tu ne devrais pas voyager seule. Surtout avec ces hommes dans les parages.
— Tu ne comprends pas : je dois partir.
— Pour aller où?
Numaë plissa les yeux. Elle semblait réfléchir à toute vitesse, peser le pour et le contre.
— Je m’excuse, mais cela ne te regarde pas.
Sokorie souffla d’exaspération.
— Désolée de te contredire, mais maintenant, il semblerait que si!
La petite se figea. Puis, d’un coup, sans que la jeune femme puisse y faire grand-chose, les larmes perlèrent au bord de ses paupières. Ses lèvres se mirent à trembler. Elle se laissa glisser au sol en bredouillant :
— Je dois… je dois aller voir…
Sokorie se maudit. Elle qui ne cherchait qu’à l’aider, elle se trouvait maintenant dans une situation délicate. Elle s’agenouilla, prit Numaë dans ses bras pour la réconforter. Elle caressa ses cheveux, la berça. Quand les pleurs de l’enfant s’apaisèrent, la jeune femme expliqua d’une voix douce :
— Tu ne peux pas retourner chez toi, c’est trop risqué. S’ils revenaient, tu serais en danger. Tu comprends?
— Mais…
— Tu n’as nulle part où aller?
Numaë réfléchit un court instant. Pour une raison qu’elle ignorait totalement, elle hésitait encore. La rouquine effleura sa joue, monopolisant son attention. Ses yeux sombres rencontrèrent le bleuté des siens. Comme liées par le regard, elles laissèrent défiler les secondes. Par ce contact visuel, Sokorie tentait de tisser un lien de confiance.
— Il y a bien un endroit.
— Lequel?
Elle se racla les lèvres, mais finit par avouer :
— Au palais de la Princesse Papillon.
Les prunelles de l’aventurière s’arrondirent sous l’effet de surprise.
— C’est justement là-bas que je devais me rendre!
— Comment ça? C’est… c’est impossible! Tu ne peux pas! Seules les Prêtresses ont l’honneur de pouvoir s’y rendre!
Sokorie se redressa, moitié souriante, moitié soucieuse. Cette gamine avait du courage et n’avait pas sa langue dans sa poche non plus! Mais il y avait trop de coïncidences! Trop de détails totalement suspicieux! Quelque chose se tramait dans l’ombre. Elle n’aimait pas ça du tout et allait devoir tirer ça au clair. Dans l’immédiat, elle crut bon de ne pas étaler son inquiétude. Elle expliqua tout simplement les raisons de sa présence aux abords du village :
— Sareï m’a confié une mission. Je devais conduire la Prêtresse de ton village au palais. Mais apparemment, tu es la seule survivante, je vais donc…