La Tourière des carmélites - Anne-Gabriel Meusnier de Querlon - E-Book

La Tourière des carmélites E-Book

Anne-Gabriel Meusnier de Querlon

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Beschreibung

"La Tourière des Carmélites, écrit par Anne-Gabriel Meusnier de Querlon, est un roman captivant qui plonge le lecteur dans l'univers mystérieux et envoûtant d'un couvent de carmélites au XVIIIe siècle.

L'histoire se déroule dans un contexte historique tumultueux, marqué par les bouleversements de la Révolution française. Au cœur de ce tourbillon, nous suivons le destin de Sœur Marie-Angélique, une jeune femme au caractère fort et à l'esprit indépendant, qui devient la tourière du couvent des Carmélites.

La tourière est celle qui a la charge de la porte du couvent, elle est le lien entre le monde extérieur et la communauté des religieuses cloîtrées. Sœur Marie-Angélique se retrouve ainsi confrontée à de nombreux défis et dilemmes, oscillant entre sa foi profonde et les bouleversements politiques qui secouent la France.

Au fil des pages, nous découvrons les secrets et les intrigues qui se cachent derrière les murs du couvent. Les relations entre les sœurs, les rivalités, les amitiés et les trahisons se tissent dans un huis clos oppressant. Sœur Marie-Angélique devra faire face à des choix difficiles, mettant parfois en péril sa propre sécurité.

Anne-Gabriel Meusnier de Querlon nous offre une plongée fascinante dans la vie quotidienne des carmélites, avec une attention particulière portée aux détails historiques et aux descriptions minutieuses des lieux. L'auteur nous transporte dans cet univers clos et silencieux, où les prières et les méditations rythment les journées des religieuses.

La Tourière des Carmélites est un roman qui interroge sur la place de la religion dans une époque troublée, sur la force de la foi et sur les limites de la liberté individuelle. Anne-Gabriel Meusnier de Querlon nous offre un récit captivant, empreint de mystère et de suspense, qui ne manquera pas de captiver les amateurs de romans historiques.


Extrait : ""Ma naissance annonçait ce que je serais un jour et ce que je suis, je veux dire, mon goût pour le plaisir et ma vocation pour la retraite."""

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Seitenzahl: 81

Veröffentlichungsjahr: 2015

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Épitre dédicatoire

À sœur Geneviève, supérieure de la Salpêtrière

Ma très chère sœur,

Les vies édifiantes ne sont pas toujours les plus utiles, il est bon d’avoir devant les yeux des modèles de vertu pour les suivre ; mais il n’est pas moins important de voir quelques tableaux du vice, pour en concevoir de l’horreur. Persuadée de ce principe, dont j’ai l’expérience, j’ai formé le projet le plus singulier qui puisse être dans la tête d’une fille : c’est d’écrire mon histoire. Grâce à la Providence, après tous mes égarements, je suis dans un asile paisible où j’ai tout le temps qu’il me faut pour repasser dans les vifs regrets de mon cœur tous les moments de ma voluptueuse jeunesse ; dévouée autrefois toute entière aux sales plaisirs du public, et maintenant inutile au monde. J’ai cru devoir travailler à son instruction ; je ne cacherai rien des circonstances de ma vie ; je veux me montrer telle que j’ai été, et l’on verra mon âme toute nue ; je rougirai sans doute moi-même des excès que je vais décrire ; mais je ne dois point m’épargner cette confusion salutaire, et plus la peinture de ma vie lubrique aura de force et de vérité plus je m’imagine de la rendre utile, à moi premièrement, et ensuite aux autres. Si l’on trouve que je n’ai point assez ménagé l’imagination du lecteur, j’ai du moins respecté les yeux et les oreilles, c’est tout ce qu’on demande aujourd’hui, et pourvu que les objets soient voilés, la gaze n’est jamais trop fine, même au gré de notre sexe. Au surplus, il en est de cette naïve histoire, comme d’une infinité d’autres livres, dont tout le danger ne consiste que dans les dispositions de ceux qui les lisent. Quant à moi, dans l’état de pénitence où je suis, je me devais cette espèce de confession publique. Je prie mes lecteurs de l’entendre avec toute la simplicité d’intention que j’ai eue en l’écrivant, et c’est dans ce même esprit, ma chère sœur, que j’ai pris la liberté de vous dédier cet écrit.

Je suis avec un profond respect,

Ma très chère sœur,

Votre très humble et très obéissante servante,

Agnès P….

Histoire galante de la Tourrière des Carmélites

Ma naissance annonçait ce que je serais un jour et ce que je suis, je veux dire, mon goût pour le plaisir et ma vocation pour la retraite. Ma mère, née de fort honnêtes gens, mais d’une médiocre fortune, et la cadette de trois sœurs, était fort jolie, et à l’âge de dix-sept ans, ne songeait à rien moins qu’à être religieuse, lorsque des arrangements de famille la forcèrent à prendre le voile chez les Ursulines de la ville de N… On ne consulta dans cette disposition, ni son goût, ni son tempérament. Elle était extrêmement éveillée, et pour peu qu’on eût examiné sa complexion, tout protestait contre la violence qu’on lui faisait ; elle n’était même plus maîtresse de son penchant, et un jeune homme du voisinage possédait entièrement un cœur tout profane que l’on voulait donner à Dieu malgré soi. On devine aisément les suites de cet engagement forcé.

Sœur Radegonde, ce fut le nom que prit ma mère au couvent, eut une maladie de langueur qui épuisa inutilement toute la science des médecins, et qui la conduisit au bord du tombeau ; on ne savait plus quoi lui faire, quand un médecin de Paris s’avisa pour dernière ressource, d’ordonner les eaux de Forges ; on se porta d’autant plus volontiers à ne pas lui refuser ce secours, que la prieure de la maison, percluse d’une partie de son corps, était condamnée depuis longtemps à faire ce voyage.

L’amant de Radegonde qui avait toujours entretenu un commerce de lettres avec elle en fut averti, et ne manqua pas de le trouver sur la route. Il se virent à Forges tout à leur aise, et leurs fréquentes entrevues furent plus efficaces que les eaux : sœur Radegonde se trouva guérie, et la prieure vint reporter ses os au couvent.

Ma mère (reprend l’historienne) qui n’avait guère goûter avec Duvilly les premières douceurs de l’amour, que pour les regretter plus vivement, crût être inconsolable de cette séparation, et roulait mille projets de sortir du couvent, lorsqu’elle y trouva un consolateur plus énergique que son amant. Le père Arlot, vigoureux mathurin, âgé de 40 ans, avait succédé au père Colard, qui était hors de combat depuis un an. Bien tôt il démêla la sœur Radegonde, et lui connut du tempérament, dont il résolut de profiter. Amours de Radegonde et du mathurin : ma mère (continue la Tourière) ne s’en tint pas là. Le jardinier de la maison, gros garçon très rustre, mais qui promettait encore plus que le père Arlot, lui parut propre à remplir le vide, que les besoins de quelqu’autres sœurs et la charité du bon mathurin rendaient inévitables ; elle s’en servit avec succès. Je fus formée dans le cours de ces divers incidents, car ma mère devint grosse de moi six semaines après son retour de Forges ; en sorte que la paternité est restée depuis indécise entre Duvilly, le père Arlot, et le jardinier. Quoiqu’il en soit, j’appartiens sûrement à un des trois, à moins qu’on ne me veuille donner trois pères : je ne poursuis point la vie de ma mère, il ne s’agit ici que la mienne.

Accouchement de sœur Radegonde. On mit l’enfant sur le compte du mathurin, qui se crut en conscience chargé de son sort, et ajusta tout avec la prieure.

Agnès (c’est le nom de la Tourière) est mise en nourrice. Soins paternels du père Arlot. Première éducation d’Agnès. À dix ans on trouve à propos de lui faire prendre l’air natal, et elle entre dans le couvent de sa mère sur le pied de sa nièce. Portrait d’Agnès.

La nature, dit§elle, m’avait formée de la figure la plus trompeuse, et la plus propre à cacher tous les excès du vice sous l’apparence de la vertu. Un air de candeur et de modestie, pour peu que j’eusse aidé mon visage, m’aurait fait passer pour un ange, et l’on m’appelait saint Nitouche, nom que j’ai toujours retenu depuis ; et je l’avouerai le seul trait que j’ai conservé du couvent.

La faut de ma mère avait été oubliée, tout avait été conduit dans un grand secret : elle entra dans les emplois de la maison, et j’y fus regardée comme une fille à qui on voulait inspirer le goût du cloître.

Sainte Nitouche reste deux ans dans l’habit séculier : elle entrait dans sa treizième année, quand un incident lui découvrit le secret de sa naissance. Le père Arlot s’était retiré, et s’était déchargé du soin de sa fille sur la mère qui était alors prieure. Nouvelle intrigue de Radegonde avec le chapelain de la maison, gros séminariste, qui avait succédé au mathurin.

Je me défais (dit la Tourière) de ce qu’elle alait faire si souvent avec le chapelain dans la salle des hôtes ; et comme la curiosité n’a jamais été mon moindre défaut, je m’y cachais un jour, à dessein de l’épier, sous une table couverte d’un grand tapis. La prieure et le chapelain ne tardèrent pas à s’y rendre. Une bergère des plus commodes était le théâtre de leurs plaisirs. Bien tôt je vis le saint homme dans la posture où le prophère Élisée se mit pour ressuciter l’enfant de la veuve.

Ménage-moi, cher ami, disait-elle ; ne gâtons rien par votre imprudence, il m’en a déjà coûté cher… À ce mot, le chapelain s’arrêta, il voulut la faire expliquer sur ce qu’il ne savait que déjà trop ; elle s’en défendit, et enfin elle lui raconta sa faiblesse pour Duvilly et toute l’aventure des Forges. Elle voulut poursuivre l’histoire de ses amours avec le père Arlot : le chapelain avait tout appris de ce religieux, et la prévint, rappelant nombre d’anecdotes dont à peine elle se souvenait. Il ajouta qu’il lui avait résigné sa personne avec le confessionnal ; mais le bon père Arlot, reprit-il, était un peu jaloux de votre jardinier, il me reste à savoir ce qui s’est passé entre vous. Vous me devez la vérité à ce tribunal encore plus qu’à l’autre.

Ma mère avoua à M. Adam l’usage qu’elle avait fait du mazette, et ils reprirent leur premier entretien. Ma mère, tout en exhortant le prêtre à la ménager, le secouait vivement ; sa bergère s’agitait, craquait et pliait. M. Adam voulait se retirer : je vis dans ce moment ma mère le serrer vigoureusement et former, pour le retenir, une double chaîne de ses bras passés à son col et ses jambes entrelacées dans les siennes, elle lui disait d’une voix mourante : mon cher, achève… ah ! plus doucement, achève donc vite… achève avec moi… Je ne sais point ce qu’acheva le prêtre, du moins je l’ignorais alors. Je peins ce qui me donna les premières idées de l’amour ; je fis dans cette heureuse journée deux découvertes importantes ; l’une que j’étais fille de la prieure, que j’avais prise jusque-là pour ma tante ; l’autre les moyens auxquels je devais ma naissance.