Le Casier au fond du couloir - Alice Dumas - E-Book

Le Casier au fond du couloir E-Book

Alice Dumas

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Beschreibung

Gaston, un garçon bègue et asthmatique, appréhende sa rentrée en sixième, et plus encore, les brutus, une bande de gamins insolents qui ne le lâcheront pas d’une semelle… Harcelé sans cesse par ces trois brutes, Gaston ne se voit épargner aucune humiliation. Un jour, lorsqu’il se retrouve enfermé et abandonné dans son vieux casier au fond du couloir, par les brutus, c’est seul, face à lui-même, qu’un nouveau monde s’ouvre à lui. Un monde onirique où l’on parle en vers. Un monde magique et extraordinaire, où il découvrira assez de courage en lui pour affronter la réalité de la vie.


À PROPOS DE L'AUTEURE


Alice Dumas est née en 1988 en Provence et fait des études de lettres à Lyon. L'agrégation en poche, elle commence sa carrière passionnée de professeur qui nourrit sa volonté de s'adresser à la jeunesse. En 2020, elle se lance dans l'écriture, son rêve de petite fille. Aujourd'hui maman, elle continue à enseigner tout en laissant le champ libre à sa plume.

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Alice DUMAS

Le casier

au fond du couloir

Nouvelle

Cet ouvrage a été composé et imprimé en France par les

Éditions La Grande Vague

Site : www.editions-lagrandevague.fr

3 Allée des Coteaux, 64340 Boucau

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction intégrale ou partielle réservés pour tous pays.

ISBN broché : 978-2-38460-024-3

ISBN numérique : 978-2-38460-025-0

Loi N°49-956 du 16 Juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse.

Dépôt légal : Mai 2022

Les Éditions La Grande Vague, 2022

Toute ressemblance avec des personnages fictifs, des personnes ou évènements existants ou ayant existé est purement fortuite.

À Valériane, la véritable

À Eléanore et Christophe, mes filleuls

Et à tous ceux qui un jour ont dû affronter leurs brutus…

Le casier au fond du couloir

 « Où l’histoire de Gaston qui perça le secret du placard à balais » 

Au collège de la Verte-Coste, lecteur bien-aimé

D’un murmure à l’oreille, se raconte un secret

L’histoire de Gaston un garçon harcelé

Qui découvrit le mystère du fond de son casier…

Installe-toi confortablement, ami lecteur,

Car il est temps pour toi, il est l’heure

D’entendre l’histoire folle des malheurs

D’Erec et de Gaston sans peur !

Chapitre I

« Où Gaston fait une entrée fracassante »

Le dernier soleil d’août se couchait sur la petite ville de Mauriette-en-Bourg. Gaston regardait l’astre rouge s’enfoncer derrière l’horizon.

Plus le ciel s’assombrissait, plus le nœud dans le ventre de Gaston se serrait. Il avait d’abord cru sentir une brique tomber sur son estomac, mais c’était maintenant un mur complet qui pesait sur tout son intérieur.

Il faut bien dire, cher lecteur, que Gaston savait que lorsque le soleil reviendrait, il devrait faire sa rentrée, sa toute première rentrée au Collège de la Verte-Coste et cela ne constituait pas vraiment une perspective réjouissante…

Bien sûr tous les élèves appréhendent leur rentrée en sixième, mais pour Gaston, cette journée prenait une dimension spéciale, une dimension affreusement spéciale presque une torture et il regrettait déjà les longues journées d’été passées au côté de sa Mamita. Certes, c’étaient de longues et ennuyeuses journées d’été dont l’énorme et très ancienne pendule du salon, ornée d’un grand héron, égrenait les heures toutes pareilles les unes aux autres auprès de sa vieille Mamita qui voyait si mal qu’elle devait tout regarder avec une loupe, mais cela valait mieux que l’agitation de l’école.

Il faut dire encore, cher lecteur, que Gaston n’était pas le genre d’élève qu’on remarquait beaucoup. Si ses résultats n’étaient pas spécialement mauvais, ils n’étaient pas non plus très bons, ce qui ne lui valait aucune attention particulière de ses maîtres et maîtresses. Gaston n’était pas non plus un grand sportif, ni un bagarreur ou un grand rigolo, ce qui ne l’avait pas vraiment aidé à se faire des amis, bien au contraire. C’était surtout sa tignasse rousse qui le distinguait des autres et qui lui avait valu tout un tas de surnoms farfelus.

En un mot, cher lecteur, Gaston était un peu différent du commun des élèves de son école, parce qu’il était roux, parce qu’il n’avait pas de télévision chez lui, qu’il ne connaissait pas « secret story », parce qu’il n’avait pas de parent, mais une Mamita dans une maison isolée sur la colline, parce que Gaston n’aimait pas faire de bruit et surtout, surtout parce que Gaston était bègue.

Oui, bègue, attentif lecteur, co…co…comme dans bég…bégayer, dirait Gaston. Et tout ceci faisait que Gaston n’aimait pas, mais alors pas du tout, pas du tout du tout parler.

Voilà pourquoi le jeune garçon aux cheveux roux regardait avec un œil humide et désespéré le soleil se coucher.

Le lendemain, il entrerait au collège qui n’est rien d’autre qu’une école avec des élèves encore plus grands, encore plus enquiquinants et surtout avec les brutus… Toujours les trois mêmes brutus qui étaient dans sa classe depuis la maternelle et dont le passe-temps favori était de rendre la vie de Gaston bien cauchemardesque.

Lorsque Mamita l’appela pour le dîner, il descendit au rez-de-chaussée de la longiligne maison du lieu-dit Broces-les-Landes. C’était une vieille bâtisse avec de fines colonnes qui encadraient la massive porte d’entrée en bois. La maison avait dû être superbe, mais elle était aujourd’hui franchement défraîchie.

De hautes herbes folles divaguaient dans le jardin, portes et fenêtres mal jointées laissaient passer les cris du vent, et les fissures du toit, quelques cheminées de pluie. Mais dans le fond, Gaston aimait bien cette maisonnette dont la grande particularité était la forme rectangulaire, s’élevant haut vers le ciel comme une vieille tour de guet ébréchée, avec un toit plus allongé encore, qui lui donnait un petit air de conte de fées.

Sa chambre en bois au troisième étage était emplie de couleurs, de patchworks et de tapisseries faites de la main de sa grand-mère et des dizaines de photographies avaient, quant à elles, envahi les murs des escaliers en colimaçon.

Le deuxième étage était occupé par une salle de bain qui du sol au plafond était ornée de mosaïques où couraient tulipes rouges et œillets bleus.

Enfin, le rez-de-chaussée, minuscule cuisine-salon-salle à manger-chambre à coucher s’étirait tout en longueur comme un chat après une grosse et confortable sieste. C’était le cœur de la maisonnée et la pièce préférée du garçon. Il y faisait toujours bon et un parfum de ragout mijotant lentement venait toujours chatouiller ses narines en embuant les carreaux des fenêtres. De vieux meubles en bois trônaient au milieu de la pièce, au-dessus de la cuisinière, de petits pots en verre renfermaient de précieuses herbes dont Mamita se servait pour agrémenter tous ses plats. Dans le coin droit près de l’entrée, un minuscule lit de camp servait de chambre à sa grand-mère.

Ce soir-là, Mamita lui avait fait des caillettes et une soupe aux orties, mais Gaston ne put rien avaler ; non pas que la soupe verdâtre et poilue lui déplût, mais plutôt parce que son estomac s’était mis en grève :

— Mon petit poulet, tu as bientôt 11 ans et tu vas rentrer en sixième demain… Que le temps passe vite. J’ai l’impression que c’était hier que tu étais une petite grenouille de 3 ans. C’est un grand cap mon petit perdreau… Un grand cap, dit sa grand-mère émue.

Gaston ne pouvait pas parler à Mamita de ses problèmes, des brutus, de l’ennui, de la solitude quand il la voyait si ratatinée et si frêle avec sa grosse loupe que son œil suivait partout, non, il ne pouvait pas. Alors après ce petit discours, il sourit simplement en faisant semblant de manger un peu de soupe. Mais Mamita, si elle était bien myope dans la vie, voyait clair dans le cœur de son petit-fils… Elle posa sa vieille main fripée sur son épaule en signe de soutien. Gaston sortit alors de table et monta sans un mot quatre à quatre les marches de l’escalier pour se préparer à sa cataclysmique rentrée.

Le problème, cher lecteur, c’est que Gaston était un lève-tard et il eut bien du mal, le lendemain matin, à quitter son confortable hamac du troisième étage de Broces-les-Landes. Son vieux sac rapiécé dans une main, une tartine de confiture de rhubarbe-camembert dans l’autre, il s’élança dans la rue en pente qui descendait la colline sans même entendre le salut répété de sa grand-mère qui s’égosillait en lui faisant des signes : « Bonne journée, mon canard ! »

Après avoir dévalé la pente conduisant à la rue principale, il commença la longue ascension vers le Collège de la Verte-Coste qui, comme son nom l’indique était situé au sommet d’une pente énorme qui faisait déjà suer le pauvre garçon. Arrivé devant la grande porte de fer en nage, Gaston respirait avec difficultés. C’était comme une musique qui s’élevait de ses poumons, un sifflement terrible qui lui causait une toux rauque, car, cher lecteur, Gaston était aussi terriblement asthmatique. Eh bien oui, Gaston avait la poisse ! Il ne pouvait courir sans entendre la litanie de ses poumons. Suant, soufflant, soupirant, il poussa l’immense porte de fer, en retard, comme il le serait bien souvent. Et là ?

Rien ! Personne…

Mais où étaient-ils donc passés ? Personne dans les couloirs ! Gaston ne savait où aller.

En dernier lieu, un peu paniqué, il tenta la cour de récré où il trouva tous ses camarades de sixième attroupés. Il essaya de se faufiler discrètement dans la masse, mais sa tignasse rousse le trahissait et il perçut le regard nocif de Madame Tintagel, femme entre deux âges, ni mince, ni corpulente, aux cheveux prématurément gris et aux lèvres pincées qui lui enseignerait les mathématiques pour les quatre prochaines années.

La directrice, dont Gaston ignorait encore le nom, appelait un par un les nouveaux élèves selon une liste monotone pour qu’ils rejoignent leur classe respective. Une sueur froide mouilla le vieux polo rayé du retardataire. Et si on l’avait déjà appelé ? Tu t’imagines lecteur ! S’il avait manqué son tour !? Il sentit son cœur se serrer et se recroqueviller tout au fond de sa poitrine pendant le reste de la petite cérémonie. Puis, il observa un peu le grisâtre décor autour de lui : la cour bétonnée grise, le vieil arbre solitaire gris, les murs gris, les cartables gris… Et seule sa chevelure de feu contrastait avec le décor.

La directrice reprit son souffle et se lança dans l’appel de la dernière classe : la sixième six. Madame Pendrag,- c’était, curieux lecteur, le nom de la directrice, - était une petite femme reblochon chez qui tout était rond, du visage au bedon en passant par les lunettes… Tout était rond. Même sa voix semblait enrober ses paroles de miel.

— Sixième six, présentez-vous Cilia Alissa… Octave Bellamy… Kassandre Dague… Elouen Elouaine…

Un à un, les jeunes élèves se détachaient du groupe pour se ranger derrière les professeurs. Les trois jeunes filles piaffèrent de bonheur en comprenant qu’elles allaient être dans la même classe. Tout comme Octave qui retrouva bientôt Noé, Noa et Jason. Noé, un jeune garçon brun à la silhouette mince, s’avança, sûr de lui en décochant un sourire qui se voulait ravageur à Mademoiselle Dulac et qui se termina en éclat de rire. Il faut dire lecteur que Mademoiselle Dulac, professeur de français, était bien plus douce et belle que Madame Tintagel. Elle ne baissa cependant pas ses grands yeux verts sur Noé qui continua son chemin la tête haute et l’air de vouloir faire une bêtise au coin des yeux. Enfin ce fut le tour de Gaston.

— Gaston Galaad ! s’exclama la voix pâtissière de la directrice.

Le petit cœur de Gaston reprit toute sa place dans sa poitrine. Ouf ! Il n’avait pas raté l’appel ! Mais alors même qu’il se réjouissait, soulagé, et qu’il s’apprêtait à faire un pas, quelque chose retint son pied et – lecteur, tu ne le croiras pas – il s’étala par terre de tout son long, devant tout le monde : la directrice, la vielle Tinta, la belle Dulac et tous les élèves de sixième. Et la cour entière sembla être secouée d’un rire moqueur. Il se retourna et comprit en voyant les trois brutus de l’année dernière qu’il avait été victime d’un croche-patte.

Ils étaient trois, trois inséparables crétins. Le chef de bande, c’était Kilian Mordred, un triste sire plutôt petit, mais toujours habillé à la dernière mode, car son père dirigeait la plus grosse entreprise de Mauriette-en-bourg, compagnie Mordred et Fils, qui avait acheté et vendu presque toute la ville. Kilian, n’ayant pas les muscles pour embêter le monde, soufflait de méchantes idées à Grégorio et Léo, deux grands gaillards assez idiots. Tous les trois avaient trouvé très amusant de poursuivre Gaston l’année dernière et de devenir son pire cauchemar. Comme si l’école n’était déjà pas assez dure comme ça ! Les retrouver dans sa classe alors qu’il y avait cinq autres possibilités, c’était vraiment trop injuste. Gaston serra les dents et les doigts en se relevant, le pantalon troué, la main écorchée et l’honneur froissé, brûlé et jeté aux corbeaux. Sous les derniers éclats de rire, il rejoignit la tête basse le rang où il se sentait pour l’instant bien seul.

Malgré cet évènement pour le moins apocalyptique, l’appel continua comme si de rien n’était. Madame Pendrag appela Kilian, Gégorio et Léo, ainsi que Valériane Perceville, une grande fille très mince aux cheveux si blonds qu’ils paraissaient être de neige, Ninon Andelberg et bien d’autres encore.

Toute la classe suivit alors Monsieur Mirabel, un jeune et jovial professeur d’histoire. Au moins, il n’avait pas Tintagel comme professeur principal et ça c’était déjà une belle victoire.