Les âmes jumelles - Tome 1 - Cathy Antier - E-Book

Les âmes jumelles - Tome 1 E-Book

Cathy Antier

0,0

Beschreibung

Dans un monde où les Vampires ont pris le pouvoir sur l’être humain et dirigent le monde en coopération avec les Métamorphes, Nathan n’est qu’un réservoir de sang pour le terrible Drake Williams.
Enfin, c’est ce qu’il croit le jour où celui-ci le récupère dans la ferme d’élevage où il est né.
Les années ont passées, et il se prépare lentement à devenir comme le vampire qu’il considère aujourd’hui comme son père.
Mais les remous chez les Loups-garous voisins vont changer toute sa vie.
En une fraction de seconde, Nathan va découvrir qu’un tout autre monde côtoie le sien depuis toujours.
Il va devoir se montrer fort pour réussir à survivre parmi ces bêtes sauvages.


À PROPOS DE L'AUTEURE

Cathy Antier, née en 1980 en Normandie, seule avec ses 3 enfants, Cathy s'évade grâce à l'écriture.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



 

 

 

Les Âmes-Jumelles

 

Tome 1

 

Dans l’antre du loup

 

Cathy Antier

 

 

 

Les Âmes-Jumelles

 

 

Tome 1

 

 

Dans l’antre du loup

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Jenn Ink Editions

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

Avertissement

 

Ce texte est une œuvre de fiction. Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou mortes, des lieux ou des évènements réels n’est que pure coïncidence pour laquelle l’auteur(e) décline toute responsabilité.

 

Ce livre contient des scènes à caractère sexuel entre hommes, pouvant choquer la sensibilité du lecteur.

 

Il est destiné à un public averti.

PROLOGUE

 

Assis sur un tas d’herbe, je tente de faire comme maman, et tresser les fibres de coton entre elles afin de créer un vêtement. Mais bizarrement, ce que je fais ne ressemble absolument pas à ce qu’elle fait, elle. Lorsque ses brins se croisent et s’entrecroisent, cela donne un damier parfait, tandis que sur le mien, il y a des bosses et des gros trous.

Un fourmillement parcourt soudainement le groupe où je me trouve, et je lève les yeux pour voir d’où il provient. Je vois alors le gardien responsable de notre section ouvrir la porte grillagée. Un sentiment de peur me parcourt en voyant un homme de haute taille entrer.

Je sais qui il est. C’est le chef. Ce n’est pas la première fois qu’il nous rend visite. Et lorsqu’il le fait, plusieurs d’entre nous disparaissent pour ne plus jamais revenir.

Du coin de l’œil, je vois plusieurs personnes se glisser discrètement dans leurs cachettes, et je baisse la tête. Normalement, vu mon âge, je ne devrais pas avoir peur.

D’après les rumeurs qui courent dans le camp, il n’y a que les personnes ayant plus de quinze ans qui intéressent les gardiens. Les plus jeunes ne sont pas inquiétés.

De petits hoquets se font entendre autour de moi et je relève les yeux, curieux de savoir ce qui a pu provoquer cette réaction. Un homme vient de pénétrer notre section, et je reste figé par sa beauté. Même si je sais que les personnes comme lui sont toutes extrêmement belles, lui semble tout de même au-dessus du lot. Des cheveux noirs artistiquement coiffés lui donnent un petit air bohème, au-dessus d’un visage avenant sur lequel flotte un doux sourire. Des yeux d’un noir absolu qui me donne des drôles de frissons.

Sa voix lorsqu’il s’approche de nous me tétanise totalement sur place. Elle est veloutée, douce et tentatrice. Mes yeux restent fixés sur lui, totalement fascinés par cet homme.

De légers tremblements me parcourent au moment où il se met à rire en compagnie du chef. Il est vraiment exceptionnellement beau.

— Baisse la tête, idiot.

Maman à côté de moi me réprimande à mi-voix pour qu’on ne se fasse pas remarquer. Je sursaute brusquement avant de faire ce qu’elle me dit, et baisse vivement la tête, reprenant mon travail.

Malheureusement, elle a juste oublié que ces hommes, qui n’en sont plus vraiment, ont une ouïe tout à fait exceptionnelle. Les deux hommes tournent la tête vers nous dans un même geste, et je me recroqueville sur moi-même, mal à l’aise.

Je n’ai pas envie qu’on me retire une personne de mon groupe à cause de ma curiosité mal placée. Je risque un coup d’œil, et vois les deux hommes nous observer longuement, leurs regards passant d’une personne à une autre, certainement pour savoir de qui, pouvait venir la phrase.

Les yeux noirs accrochent soudainement les miens, et je suis incapable de regarder ailleurs. Leur profondeur me happe totalement. Mes mains retombent inanimées sur mes genoux, faisant tomber mon ouvrage. Ma mâchoire s’ouvre lentement, me faisant béer comme un idiot.

Une fois de plus, un silence de mort emplit le camp, mais je n’y fais plus attention. Je suis entièrement focalisé sur l’homme qui me fixe du regard. Je ne réagis même pas lorsqu’il fait un pas dans ma direction, pourtant, l’agitation se fait tout autour de nous.

Il s’agenouille devant moi, les sourcils légèrement froncés, et vu à cette distance, il est encore plus beau. Sa peau pâle tranche avec la noirceur de ses cheveux et de ses yeux. Son air concentré ne va pas du tout avec le petit air bohème qui semble le caractériser. Et il ne doit pas avoir beaucoup plus de trente ans.

Enfin, si on compte en âge humain. Mes congénères m’ont appris bien assez tôt à ne pas me fier à ce que me disaient mes yeux. Concernant ces êtres, on ne peut jamais être sûr de leur âge.

— Que fais-tu papa?

L’homme se redresse lentement, comme s’il cherchait à ne pas me faire peur, mais étrangement, malgré le fait que je sache pertinemment qu’il pourrait me tuer aussi facilement qu’une fourmi, je n’ai aucune appréhension face à lui.

Un léger sourire étire ses lèvres et il me fait un clin d’œil avant de se tourner vers le chef du camp. Bien que mon cerveau ait du mal à fonctionner correctement, j’ai bien entendu les mots prononcés. Cet homme sublime serait donc le père du grand chef. Ils ne se ressemblent pourtant pas du tout.

Là où l’homme mystérieux a les cheveux et les yeux noirs, l’autre est tout en blondeur et yeux bleus. Absolument rien à voir.

Je secoue doucement la tête face à ma stupidité. Ils ne doivent pas utiliser ce terme comme nous. Il ne doit pas représenter la même chose pour eux.

Maman m’a expliqué que pour les humains, il fallait un homme et une femme pour faire un enfant. L’homme était appelé papa, et la femme maman. En ce qui me concerne, maman est incapable de savoir qui est mon père, alors j’appelle presque tous les hommes qui nous entourent papa.

De toute façon, c’est presque toujours le cas pour les enfants du camp. La mère est toujours déterminée, en revanche, on ne sait jamais qui est notre père.

Mais d’après ce que m’ont dit les adultes, pour les êtres supérieurs, le terme de père ou de mère est totalement différent. Ces mots ne sont pas de simples appellations. Ils symbolisent le lien qui se fait entre un créateur et sa chose.

— Je ne sais pas! Ce gamin m’intrigue. Un peu comme toi à l’époque.

Mes yeux se détournent du bel homme pour se porter sur notre grand chef, et je fronce les sourcils lorsque lui aussi se met à me regarder plus attentivement. Il vient à la hauteur de son père, et tout comme lui précédemment, s’agenouille devant moi. Son regard bleu clair m’entraîne vers les contes que me narre maman certains soirs où j’ai du mal à dormir. Ils parlent d’une étendue bleue qui se nomme «mer», et qui recouvrirait la totalité de la Terre.

Même si j’ai du mal à y croire, l’espoir qu’une telle chose existe me permet de me relaxer et de m’endormir plus facilement.

Notre grand chef penche légèrement la tête sur le côté et m’observe encore plus attentivement. Au bout de plusieurs minutes, il se redresse, un léger sourire aux lèvres.

— C’est juste un gamin d’une dizaine d’années, papa. Je t’assure qu’il n’a absolument rien de particulier.

L’homme splendide fronce les sourcils à son tour, pas convaincu par les paroles de son fils.

— Tu m’as dit que tu avais besoin de cinq hommes, et cinq femmes, c’est bien ça?

Un sentiment de peur s’insinue dans toutes les personnes présentes à ces mots et je sens le frisson qui parcourt le corps de ma mère à côté de moi. On sait tous ce que cela veut dire.

Le plus souvent, les acheteurs n’ont pas le droit de pénétrer le camp pour choisir eux-mêmes leur marchandise. Une première sélection est faite par les gardiens, avant que les acheteurs ne puissent choisir parmi le panel sélectionné.

Cet homme, en plus d’être le père du chef, doit être très important. Un petit quelque chose dans sa tenue me le dit.

C’est toujours avec fascination que je le regarde discuter tranquillement avec notre chef, un sourire éternellement accroché aux lèvres. Il est vraiment incroyable.

— Je pense que je vais prendre un sixième homme, mais cette fois-ci, pour moi. Pour les autres, tu sais à peu près de quoi j’ai besoin.

Notre chef hoche doucement la tête, avant de se diriger vers les gardiens. L’homme magnifique fait un tour sur lui-même, son regard s’accrochant une fois de plus au mien, alors qu’il s’arrête juste devant notre groupe. Il me fait un clin d’œil et mon ventre se tord doucement à ce geste.

Il se met à faire quelques pas dans le camp, regardant attentivement chaque homme, ses yeux s’attardant régulièrement sur les roux. Il doit certainement avoir une préférence pour cette couleur de cheveux. C’est peut-être pour ça que je lui ai semblé intéressant. Même si mes cheveux ne sont pas vraiment roux, mon brun chaud a tendance à s’éclaircir sous les rayons du soleil, me donnant des reflets plus clairs.

Je remarque également que ce sont les hommes entre vingt-cinq et trente ans qui attirent le plus son regard, et j’en viens à me demander ce qu’il compte faire avec eux.

Je ne sais pas si je dois croire les histoires racontées au coin du feu le soir. D’après les adultes qui se trouvent ici, ces êtres supérieurs se serviraient de nous pour subvenir à leurs besoins primaires. Comme à l’habitude de rajouter le plus âgé d’entre eux, TOUS leurs besoins primaires.

Étrangement, les adultes ne veulent pas développer lorsque les enfants sont là, je me suis donc faufilé près d’eux un soir après que nous ayons été couchés pour enfin savoir ce qu’ils entendaient par là. Mais je n’ai pas vraiment tout compris. Ils parlaient de s’envoyer en l’air, de baiser comme des bêtes ou de les sucer jusqu’à la moelle.

Du charabia pour moi!

C’est avec un point au cœur que je regarde l’homme magnifique s’approcher de Basile. C’est un jeune homme d’environ dix-huit ans, avec de courts cheveux roux, et un regard vert absolument saisissant. C’est un de mes copains préférés. Il a beau avoir une dizaine d’années de plus que moi, cela ne l’embête jamais de jouer avec les gamins comme disent les autres.

Basile esquisse un pas en arrière lorsque l’homme s’arrête devant lui, ce qui le fait légèrement sourire. Un éclat brillant accroche la lumière du soleil, et pour la toute première fois, je vois la canine dépasser de ses lèvres.

J’avale la boule qui s’est formée dans ma gorge, serrant mes doigts sur mes cuisses. Je viens de me rendre compte que depuis l’instant où il est entré dans le camp, j’ai totalement oublié qui il était. Ou plutôt, ce qu’il était.

Bien qu’il soit absolument magnifique, il fait tout de même partie de ceux qui nous ont réduits à l’état de bétail. Les adultes qui s’occupent de nous aiment bien raconter des histoires du temps où les êtres humains régnaient en maître sur la Terre avant que les vampires ne viennent tout bousculer, même si eux non plus ne l’ont jamais connue ainsi. À tel point que beaucoup pensent que ce n’est qu’une belle histoire qu’on raconte aux enfants pour les aider à s’endormir le soir.

Le vampire se détourne pour faire un signe de tête au chef de camp, qui à son tour interpelle les gardiens. Je regarde les gros bras emmener mon ami, qui a baissé la tête, vaincu d’avance.

Je ne réfléchis pas à mon geste avant de me lever pour leur barrer la route, en voyant l’unique larme qui roule sur la joue de mon ami. Basile me fait un léger sourire, mais qui ne monte pas jusqu’à ses yeux. Ce n’est pas son sourire habituel. Et je ne veux pas perdre un de mes amis. Parce que je sais avec certitude que s’il passe derrière ces portes, je ne le reverrais plus jamais.

— Retourne t’asseoir, microbe. Ça va aller pour moi.

— Non, Basile. Je ne veux pas que tu partes. Ou alors, emmène-moi!

Mon ami jette un coup d’œil derrière lui, pour regarder ce vampire qui me fascine tant depuis le début de sa visite. Je ne sais pas trop ce qu’il y a chez lui qui capte mon attention de la sorte, mais j’ai du mal à détourner les yeux de lui.

Basile s’agenouille devant moi pour se mettre à ma hauteur, et tend une main pour prendre ma joue en coupe. Le sourire qu’il arbore est toujours aussi faux, mais sa voix est assurée lorsqu’il se met à parler.

— Tu sais que nous sommes élevés dans ce but, microbe. Nous n’existons que pour ça. Toi aussi, un jour, tu devras quitter le camp. Ce n’est pas facile à accepter, mais c’est notre destin. Nous ne sommes que de la nourriture pour eux. Nous sommes élevés pour les nourrir. Nous devons mourir pour qu’ils puissent vivre.

Je ne retiens pas les larmes qui coulent à gros flots sur mes joues. Je le sais tout ça. Maman m’a déjà dit ce que je devais savoir sur les êtres supérieurs. Qu’un jour, ce sera à mon tour de servir les vampires. Mais je ne veux pas que Basile parte. J’ai encore besoin de lui.

Le gardien à côté de lui tire sur son haut qui se déchire légèrement, et je serre les dents de rage en voyant que c’est celui que je lui ai fait.

Basile se retourne une dernière fois et me fait un clin d’œil.

— Prends soin de toi microbe.

Je hoche lentement la tête, avant de me retourner me réfugier à ma place. Il ne manquerait plus que je me fasse tuer pour avoir voulu prendre la défense d’un camarade.

Normalement, les gardiens ne s’en prennent pas aux enfants. Mais je me suis tout de même interposé alors que l’achat concernait le père du chef. Je vais peut-être me retrouver à nourrir les prisonniers.

Je frissonne de dégoût et me serre contre ma mère. Je baisse les yeux, pleurant toutes les larmes de mon corps. Nous ne sommes peut-être pas réellement frères de sang, dans un camp comme le nôtre où les femmes sont échangées régulièrement on ne peut jamais savoir, c’est pourtant le sentiment qui m’anime à son égard. J’ai toujours considéré Basile comme mon frère. J’ai l’impression qu’il m’a toujours défendu contre les autres enfants, prenant systématiquement ma défense.

Des doigts froids se glissent soudain dans mes cheveux, et je retiens ma respiration, me demandant d’où ils peuvent provenir. Ils tirent légèrement sur les mèches pour me faire relever les yeux, et je me retrouve une fois de plus plongé dans les yeux noirs du vampire si magnifique.

— Qu’est-ce qui peut bien m’attirer chez toi?

Sa voix est basse, et rauque. Légèrement voilée. Comme si je lui posais d’énormes soucis qu’il n’arrivait pas à régler.

Je grimace de douleur tandis qu’il se relève, gardant mes cheveux prisonniers de sa main. Les adultes autour de moi commencent doucement à maugréer, une rumeur de révolte se répandant comme une traînée de poudre.

Il tourne brusquement la tête, et je me mets à trembler de peur en entendant les mots qu’il prononce à l’intention de son fils.

— Andrew! Je le prends aussi!

Mes yeux passent de ses lèvres à ma mère qui s’est jetée à ses pieds, lui demandant pardon pour mon attitude. Cela m’étonne de sa part. Je suis son douzième enfant il me semble, et même si elle me donne à manger régulièrement, elle n’agit pas vraiment avec l’amour des autres femmes du camp. Comme si elle ne voulait pas ressentir d’amour pour ne pas souffrir le jour où son enfant lui sera retiré pour servir de repas.

— Voyons, papa. Tu sais bien que je n’ai absolument pas le droit de vendre des enfants. Je risque des emmerdes avec les autorités de régulation si jamais ça vient à se savoir.

Le puissant vampire se dresse de toute sa hauteur face à son fils, et je sens la force littéralement émaner de lui. Elle sort par vagues successives de son corps, me laissant pantelant.

— Je suis le gouverneur du district neuf. Je pense que j’ai tout de même le droit à quelques avantages.

Tous les vampires autour de nous semblent écrasés par le pouvoir émanant de cet homme magnifique, et je réalise que même chez les vampires, il existe une hiérarchie.

Ledit Andrew hoche difficilement la tête, et la puissance ressentie se fait d’un seul coup moins écrasante. Les doigts du vampire se décrispent d’un seul coup, pour venir me caresser presque tendrement les cheveux.

Je prends une courte inspiration avant que mon corps ne se détende. Je vais bientôt mourir. Je vais enfin pouvoir quitter ce camp où tout est si sale et si puant.

Je n’ai peut-être que dix ans, mais j’en ai déjà assez de vivre dans cette antichambre de l’enfer. Mourir jeune peut être une bonne alternative.

CHAPITRE 1

 

Je me laisse tomber contre le dossier du fauteuil, fermant les yeux pour retenir la nausée qui ne cesse de m’assaillir depuis tout à l’heure. Depuis l’instant où j’ai mis les pieds dans ce camp immonde.

Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi papa m’a demandé d’aller faire son marché. Il sait que je déteste plus que tout me retrouver à cet endroit. Il sait ce que cela me fait de voir mes anciens compagnons d’infortune.

Je me frotte le visage à deux mains tandis que je sens la voiture se mettre doucement en marche. Je n’arrive pas à croire que je me sois retrouvé dans cette situation. Le regard haineux que m’a lancé mon ancien ami reste gravé sur mes rétines.

Jess et moi avions passé pas mal de temps ensemble lorsque j’étais jeune. Nous avions pas mal joué tous les deux. Mais lorsqu’il m’a reconnu au moment où j’ai passé les portes du camp, j’ai vu les émotions se succéder sur son visage.

Tout d’abord l’incrédulité. Ça fait tout de même presque quinze ans que j’ai été sorti du camp par papa. Me revoir à cet endroit en aussi bonne forme a très certainement dû l’étonner.

Ensuite la joie de me revoir vivant. Il a dû croire toutes ces années que je m’étais fait bouffer par le grand méchant vampire. Ce qu’il ne sait pas, c’est que les vampires ne tuent que très rarement la nourriture qu’ils achètent. En réalité, les humains sortant des fermes d’élevage mourraient plus souvent de vieillesse que de mort subite.

En allant vivre avec Drake, j’avais fait d’énormes découvertes sur les vampires. Déjà, ils n’étaient pas vraiment les monstres sanguinaires que nos légendes humaines voulaient nous faire croire. Bien sûr, ils se nourrissaient du sang des humains, et devaient faire en sorte d’en avoir toujours à portée de main. Mais ils ne tuaient pas leurs victimes.

Bien au contraire, ils faisaient tout pour les maintenir en vie le plus longtemps possible pour ne pas avoir à racheter un humain. Parce qu’il ne faut pas croire, mais il faut tout de même débourser une somme assez rondelette pour acquérir un humain. Tout le monde ne peut pas se permettre une telle dépense.

C’est d’ailleurs pour ça que mon père a mis en place un système de reprise. Lorsqu’un de ses humains commence à devenir un peu vieux pour ses goûts, il en fait don à la communauté, en échange d’un tout petit prix, et peut retourner en chercher un autre.

Je soupire doucement en sentant les remous de la voiture, m’indiquant que nous allons bientôt arriver en vue de la maison. Je rouvre doucement les yeux pour regarder la rue défiler au travers de la fenêtre.

Le visage haineux de Jess me revient alors, et mon ventre se contracte douloureusement. J’ai bien vu dans son regard qu’il m’en voulait. Je n’ai pas vraiment compris pourquoi, mais j’ai bien reconnu la haine qu’il pouvait avoir envers moi.

Nous passons le haut portail en fer forgé avant que la voiture ne s’arrête tout en douceur, les pneus crissant sur le gravier. Je pousse un petit soupir, pas vraiment prêt à faire mon rapport à mon père.

Je sais pourquoi il m’a envoyé moi dans ce camp. Théoriquement, dans deux mois, j’atteindrai mes vingt-cinq ans, et c’est cette date qu’il a choisie pour me faire passer de son côté de l’évolution.

Je me souviens parfaitement de ce jour où, dix ans plus tôt, je me suis planté devant lui, tendant mon cou à son attention, lui demandant de faire de moi un vampire. Papa m’a regardé avec un petit sourire ironique, avant de me faire asseoir assez brutalement sur le fauteuil en face de son bureau.

Il m’a expliqué que j’étais encore trop jeune pour le rejoindre. J’ai commencé à tempêter avant qu’il ne m’arrête de son regard dur. Il m’a alors dit de sa voix la plus froide qu’il pouvait tout à fait faire de moi un vampire tout de suite, mais dans ce cas, je devrais finir le reste de ma vie dans le corps d’un adolescent de quinze ans. Personne ne me prendrait jamais vraiment au sérieux à cause de mon air de gamin.

Ça faisait déjà cinq ans que je vivais dans ce manoir et que je côtoyais des vampires toute la journée. J’en avais assez d’être systématiquement regardé comme de la nourriture, et je voulais que les amis de mon père arrêtent de ne voir en moi que le cœur battant et le sang coulant dans mes veines. Je voulais qu’ils reconnaissent tous ce que mon père avait vu en moi dans ce camp.

Ma force de vivre, ma volonté, et mon intelligence. Je n’étais pas qu’un gamin stupide juste là pour donner son sang. Papa avait fait de moi un membre de sa famille. Et je voulais l’être plus encore. Faire vraiment partie de cette famille, tout comme Andrew.

J’avais compris ce qu’il avait voulu me dire, et avais baissé les yeux de honte, avant de m’excuser et de sortir de son bureau la tête basse.

Grâce aux années passées auprès de papa, j’ai découvert qu’il avait transformé Andrew durant la Grande Révolution qui avait vu les vampires devenir les maîtres du monde. Il l’avait trouvé agonisant sur un champ de bataille, et tout comme avec moi, avait senti comme un fourmillement dans tout son corps, lui interdisant de laisser cet homme mourir.

Il l’avait pris avec lui et avait fait de lui un vampire, devenant de ce fait, son père. C’était il y a déjà cinq cents ans. Ça faisait déjà tant d’années que les hommes avaient été réduits à l’état de bétail et d’esclavage par les vampires.

La portière de mon côté s’ouvre brusquement, et je reviens à l’instant présent, faisant un sourire à Basile en le reconnaissant. Je sors de la voiture, et le serre brièvement contre moi. Il a énormément vieilli depuis ce fameux jour où papa l’a acheté. Mais comme tous les humains servant de nourriture, mon ami perd un peu plus d’années de survie à chaque goulée de sang que prend mon père.

C’est une autre chose que j’ai apprise en venant vivre dans ce manoir. Bien que les vampires ne tuent pas leurs victimes, le simple fait de leur prendre du sang à un intervalle régulier, fait que les humains perdent en espérance de vie.

Grâce à mes lectures effrénées pour connaître une partie de mes racines, j’avais appris qu’avant la Grande Révolution, les humains pouvaient vivre jusqu’à plus de cent ans dans le meilleur des cas. En tout cas, ils avaient une meilleure espérance de vie que maintenant. Lorsqu’un homme était acheté par un vampire, s’il dépassait les cinquante ans, c’était un miracle.

Mon pauvre Basile n’a pas encore trente-cinq ans, pourtant, il en parait soixante-dix. Je gage que Drake ne tardera pas à le remettre en vente pour en prendre un plus jeune. Et si je suis bien sûr d’une chose, c’est qu’il l’aurait très certainement déjà fait si Basile n’avait pas été mon ami.

Je récupère ma sacoche dans le coffre de la voiture avant de me diriger vers la porte d’entrée et d’aller directement vers mon bureau.

En tant que fils du Gouverneur du neuvième district, j’ai des responsabilités qui m’incombent. Mon père m’a donné en charge de répertorier tous les nouveaux vampires créés ces dernières années, afin d’avoir un contrôle total sur la population, et savoir exactement combien d’humains nous aurions besoin pour tous vivre.

Je me laisse tomber avec un soupir las, et tends la main pour me verser une rasade de whisky. Je ne suis pas vraiment fan des alcools forts, mais à cet instant, j’ai besoin d’un remontant.

Le sourire goguenard de mon frère en me voyant me balader dans les allées du camp me revient en mémoire, et j’ai juste envie d’y retourner pour lui en mettre une. Mais comme à chaque fois, je me contiens, sachant pertinemment qu’il me mettrait la raclée de ma vie.

Ce que l’on dit sur les vampires est entièrement vrai. Ils ont une force nettement supérieure à celle d’un humain basique, et une vitesse tout à fait hallucinante. Andrew me ferait mordre la poussière en même pas trente secondes.

En revanche, j’attends impatiemment de devenir un vampire afin de régler mes comptes avec lui. Dès l’instant où mon père m’a ramené à la maison, Andrew s’est senti jaloux de l’attention que Drake me portait. Jusqu’à ce jour, il était le seul qui comptait réellement pour notre père, et je débarque du jour au lendemain. Dès cet instant, il a tout fait pour me mettre mal à l’aise.

Comme ce fameux jour où je lui ai demandé pourquoi notre père ne choisissait toujours que de jeunes hommes comme nourriture. Andrew c’est alors penché sur moi, un sourire supérieur aux lèvres et m’a dit tout naturellement :

— C’est parce que pour nous, les vampires, nous ne satisfaisons pas qu’un seul besoin lorsque l’on plante nos crocs dans les chairs tendres.

— Vraiment? Quels autres besoins assouvissez-vous dans ce cas?

Bizarrement, le sourire qu’il m’avait adressé à cet instant-là m’avait noué le ventre d’une étrange manière. J’avais l’impression de ressentir un truc étrange. Comme une chaleur qui me consumait de l’intérieur, un torrent de lave qui se déversait dans mes veines.

Andrew s’était penché sur moi, son souffle se fracassant brutalement sur ma peau surchauffée, ses yeux brillants d’une émotion que je ne connaissais pas encore du haut de mes douze ans.

— Lorsque nous nous abreuvons à une veine, nous assouvissons notre faim, notre soif, mais également notre désir. Nous sommes comme n’importe quel homme, nous avons aussi besoin de nous soulager.

Je me souviens m’être transformé en une tomate vivante tellement mes joues avaient rougi. Le rire d’Andrew alors qu’il se relevait m’avait plus énervé qu’autre chose. Je n’avais que douze ans, bordel! Comment aurais-je pu savoir qu’un vampire faisait tout en même temps?

Ce qui avait alors ramené ma question au premier plan. Pourquoi uniquement de jeunes garçons? La réponse était venue toute seule, et mes rougeurs s’étaient accentuées. C’est ce jour-là que j’ai découvert que mon père préférait avoir un homme dans son lit.

Ce n’est que bien plus tard, en le trouvant occupé à besogner un homme contre un mur tandis qu’il s’abreuvait à sa veine, que j’avais compris qu’Andrew l’était également.

Je vide mon verre d’un geste sec, avant de me redresser et de desserrer ma cravate, la laissant pendre mollement autour de mon cou. J’allume mon ordinateur et sors les documents de ma sacoche, avant de me remettre au travail.

Je mets à jour les différents tableaux, indiquant le nombre de naissances intervenues dans la ferme d’humains, et celles chez les vampires, afin que les calculs se fassent automatiquement.

J’ouvre ensuite ma boîte mail, et remarque tout de suite le message arrivé la veille au soir. Je l’ouvre rapidement et grimace en voyant de quoi il s’agit.

Après la Grande Révolution, les vampires se sont crus les rois du monde, créant des camps afin d’y parquer les humains qui restaient et d’en faire l’élevage. Cependant, ils avaient oublié de prendre en compte les différentes espèces de métamorphes qui peuplaient la terre.

Tout comme pour les humains, les vampires ont voulu enfermer les métamorphes dans des camps fortifiés. Malheureusement, ils ont légèrement oublié que les garous et autres espèces étaient les prédateurs naturels des vampires.

La Guerre des Territoires a alors débuté, décimant une grande partie de la population vampire, tout comme celle des métamorphes. Finalement, il n’y eut ni gagnant, ni perdant dans cette guerre. Un compromis a juste été trouvé afin que tout le monde puisse vivre en paix.

La Terre a été divisée en plusieurs districts, chacun gouverné à la fois par un vampire, et par un métamorphe. Nos deux espèces ont dû apprendre à vivre et à faire des choix ensemble.

Et le mail que je viens de recevoir ne va pas faire plaisir à papa. Car bien qu’eux aussi vivent beaucoup plus longtemps qu’un humain de base, les lycanthropes sont mortels. Ils ne vivent que quelques siècles. En comparaison de l’éternité d’un vampire, ce sont des clopinettes.

Mais cela veut dire également que de leur côté, le gouverneur métamorphe était amené à changer. Ce qui, d’après le message que j’étais en train de lire, était arrivé la veille. Visiblement, nous avions un nouvel allié.

J’ignorais tout du fonctionnement des métamorphes. Durant ces dernières années, sachant que j’étais destiné à devenir un vampire, je m’étais surtout focalisé sur la façon de fonctionner de ma future famille. Je me suis dit que j’aurais tout le temps d’apprendre le reste une fois que je serais devenu immortel.

Malgré tout, tout comme pour les vampires ou les humains, je devais connaître la démographie des métamorphes sur notre territoire afin d’avoir assez de ressources naturelles pour tout le monde. Parce que pour élever des humains, il nous fallait de la nourriture de base, que faisaient pousser les métamorphes et qu’ils nous revendaient.

En me faisant sortir de ce camp, mon père m’avait fait découvrir un monde dont je ne savais strictement rien. Coincés entre les murs de leur prison, les humains n’avaient aucune idée de la complexité du monde aujourd’hui. Pourtant, tout était parfaitement rodé.

Les métamorphes faisaient pousser les légumes et autres joyeusetés de ce genre pour nous les vendre. Nous les donnions à manger aux humains afin de les engraisser, pour que nos vampires puissent se nourrir à leur tour.

Nous étions devenus dépendants des métamorphes!

Je me passe une main nerveuse dans les cheveux, les hérissant au-dessus de ma tête, avant de tendre la main vers le téléphone et de composer le numéro du bureau de mon père. Je dois le mettre tout de suite au courant de cette nouvelle.

Seules deux sonneries se font entendre avant que la voix grave et rauque de mon père ne retentisse. Elle m’a toujours fait un drôle d’effet. Malgré les années passées auprès de lui, elle me donne toujours autant de frissons.

— Nous avons un léger souci, Drake.

Je l’imagine très bien en train de s’asseoir le dos droit sur son siège, l’oreille attentive à mes prochaines paroles. Je suis content qu’il me fasse assez confiance pour gérer une partie de ses affaires. Cela me prouve qu’il a bien l’intention de faire de moi un vampire.

— Je t’écoute Nathan. Un problème avec la livraison de la marchandise?

La nausée que j’ai réussie à faire passer tout à l’heure me remonte dans la gorge tandis qu’il me rappelle ma visite au camp.

Mon père organise une soirée en fin de semaine, et il a bien évidemment besoin de nourriture pour satisfaire ses invités. Et pour me tester, il m’a demandé de m’en charger. Ce que j’ai détesté faire.

— Non! Ça ne concerne pas ce que tu m’as envoyé faire, mais un mail que j’ai reçu.

— Vraiment?

Rien qu’au ton de sa voix, je remarque qu’il est surpris. S’attendait-il à ce que je lui dise que j’avais été incapable de le faire? Que je lui demande de renoncer à faire de moi son véritable fils?

— J’ai reçu un message de la meute de la Lune Rousse m’indiquant que leur Alpha avait perdu sa place et qu’il avait été remplacé.

Le grommellement de mon père à l’autre bout de la ligne me fait comprendre ce qu’il pense de cette situation. Il n’est pas vraiment heureux de perdre son oreille compatissante.

Il n’a pas eu besoin de me le dire pour que je comprenne que le vieil Alpha de la meute de la Lune Rousse, était en réalité à la botte de mon père. Il faisait exactement tout de ce que lui demandait papa. Il ne négociait jamais les prix des céréales vendues. Il se laissait faire comme un chien face à son maître.

Papa va donc être obligé d’éduquer le nouveau venu. Comme s’il n’avait que ça à faire!

— As-tu de plus amples renseignements. Le nom, l’âge, ou tout autre chose intéressante?

Je grimace légèrement en entendant le ton sans appel de mon père et me penche sur le mail reçu. Je le relis plusieurs fois, tentant de trouver des informations dans les mots inscrits, mais il n’y a rien du tout.

— Juge par toi-même : «En application des lois régissant notre district, je tenais à vous informer que l’Alpha Morisson vient de disparaître. Nous vous recontacterons lorsque son remplaçant aura été choisi.».

Le grognement de papa me fait sourire. Il n’aime pas être pris au dépourvu. Et perdre son acolyte de cette manière est certainement de mauvais augure pour lui. Ils s’entendaient comme larrons en foire tous les deux.

— OK! Sinon, parle-moi de ta visite de ce matin.

Cette fois-ci, c’est à mon tour de grogner. Je pensais qu’il aurait oublié de me poser la question. Je sors le carnet dont je me suis servi ce matin pour noter les informations que mon frère m’a données et commence à lui donner tous les renseignements.

— Andrew a mis de côté quatre hommes et deux femmes comme demandé. En ce qui concerne les hommes, il y a deux bruns, dont un à la peau noire, un blond et un roux. Il sait à quel point tu aimes offrir de la diversité. Pour les femmes, il a mis une blonde et une brune de côté, mais m’a donné des photos pour que tu te forges ta propre opinion.

— Tu sais ce qu’il en est, Nathan. Les femmes ne sont pas ma prédilection.

Je rigole doucement. C’est étonnant comme mon père arrive à parler de sa sexualité aussi facilement. J’avoue que j’ai toujours du mal à en parler avec lui lorsque nous sommes face à face. Mais au téléphone, c’est nettement moins gênant pour moi.

— C’est pour ça que j’ai pris la décision pour toi. Je connais à peu près les goûts de tes invités de ce week-end, j’ai donc pris la liberté de les choisir moi-même.

— Merci, Nathan.

Nous discutons encore quelques minutes des derniers chiffres du recensement, avant que je ne repose le combiné sur son socle.

Je jette un coup d’œil sur le cadre posé à côté de mon écran, nous représentant mon père, Andrew et moi à une de ces fameuses soirées. Cette photo n’a que quelques mois, pourtant, j’ai déjà tellement changé depuis ce jour.

Je pense que le fait que le grand jour approche à grands pas pour moi me transforme plus qu’autre chose.

Déjà, je commence doucement à penser au sexe. Jusqu’à il y a environ un an, je me demandais pourquoi toutes les personnes autour de moi en parlaient avec autant d’effusion. Je m’étais déjà touché et mon membre dur m’avait déjà réveillé en pleine nuit afin d’obtenir satisfaction. Mais je n’avais jamais été réellement attiré par qui que ce soit. Homme ou femme, aucun ne m’avait jamais attiré.

Et puis un jour, environ un an plus tôt, lors d’une soirée organisée en l’honneur de papa, j’ai rencontré quelqu’un qui m’a fasciné. Je me suis retrouvé à fixer cet homme pendant des heures, sans pouvoir détourner le regard.

Bien évidemment, comme tout vampire qui se respecte, il a bien senti mon attrait pour lui. Durant la soirée, il m’a coincé dans un endroit sombre pour m’embrasser de façon torride. C’était la toute première fois de ma vie qu’un homme posait ses lèvres sur les miennes. Et je dois bien avouer que j’ai trouvé ça extraordinaire. À tel point que j’en ai redemandé, encore et encore.

Jusqu’à ce que je me mette à paniquer en sentant ses crocs effleurer ma veine jugulaire, alors que sa main plongeait subitement dans mon pantalon. Je n’avais pas compris jusqu’où pouvait entraîner des baisers de cette intensité. J’étais un novice dans ce genre d’expérience.

Heureusement pour moi, papa est arrivé juste à temps pour m’éviter de me faire égorger par un vampire affamé. Enfin, façon de parler.

Quoi qu’il en soit, j’avais découvert que tout comme mon père et mon frère, je semblais plus attiré par les hommes que par les femmes. C’était peut-être ce qui avait attiré l’attention de papa sur nous pour nous transformer. Le fait que nous soyons gays Andrew et moi.

Même si une grande majorité des vampires naviguent des deux côtés, ayant eu un temps considérable pour tout explorer en matière de sexe, beaucoup préfèrent rester conservateur.

Je me resserre un verre de whisky avant de me remettre au travail. Ce n’est pas tout ça, mais j’ai des rapports à taper avant de pouvoir les soumettre à mon père, qui doit lui-même les transmettre à la haute autorité de régulation des populations.

Je m’attaque donc à la rédaction de ces fameux rapports, ne faisant plus vraiment attention à ce qu’il se passe autour de moi, perdant totalement la notion du temps. C’est souvent comme ça lorsque je me plonge dans le travail.

CHAPITRE 2

 

Je m’éveille doucement, ouvrant les paupières, grimaçant lorsque le soleil vient agresser mes yeux. Une troupe de Mariachis est en train de donner un concert dans mon crâne. Et les battements me donnent envie de vomir.

Je regrette amèrement de m’être laissé aller hier soir à ce point-là. Je sais pourtant que je ne supporte pas le même degré d’alcool que mon frère. Je soupçonne même Andrew d’avoir fait exprès de me faire boire autant pour que j’aie un mal de tête aussi infernal ce matin.

Je referme les yeux, me frottant la tête à deux mains, avant de me redresser lentement dans mon lit pour balancer mes jambes sur le côté. Une douche, puis un café, et je serai fin prêt pour commencer ma journée.

J’attends que la pièce arrête de tanguer autour de moi, avant de me lever, posant la main sur le mur pour me retenir et éviter de m’écrouler à terre. Le sol semble mouvant sous mes pieds, et j’ai du mal à garder mon équilibre.

J’arrive tant bien que mal jusqu’à la salle de bains, tanguant à chaque pas. Quelle idée de boire autant. Mais il faut dire pour ma défense, que depuis quelques jours, Andrew semble vouloir se rapprocher de moi. Étrangement, depuis que la date de ma transformation a été arrêtée et planifiée presque dans les moindres détails, mon frère fait des efforts pour m’intégrer à la famille.

J’ouvre d’une main tremblante l’armoire à pharmacie, en sors deux cachets contre le mal de tête, les avalant avec un peu d’eau prise au robinet, avant de me couler sous la douche. L’eau chaude cascadant sur mon dos me fait doucement gémir. Je relève la tête, repoussant mes cheveux sur mon front, et laisse l’eau chaude faire son office.

Je ne sais pas vraiment combien de temps je reste sous la douche, mais en ressortant, j’ai déjà les idées un peu plus claires. J’enfile mes vêtements de travail, un pantalon noir fluide que j’agrémente d’une chemise blanche, et passe mes pieds dans des chaussures confortables.

Je jette un coup d’œil dans le miroir pour m’assurer que tout est en place, et grimace en voyant mes yeux toujours injectés de sang. Heureusement que je n’ai pas de rendez-vous de travail aujourd’hui.

Je sors de ma chambre et descends les escaliers pour me rendre dans la cuisine, presque au radar. Arrivé sur place, je fais un énorme sourire à la cuisinière qui vient déposer une tasse de café devant moi avec quelques petits gâteaux. J’avale le tout en moins de temps qu’il ne faut pour le dire et redemande une autre tasse. Je sens que je vais carburer à la caféine aujourd’hui.

J’entends la porte s’ouvrir derrière moi et me retourne pour voir qui vient d’entrer. Un léger sourire se dessine sur mes lèvres en découvrant qu’il s’agit de Basile. Mais mon sourire s’évapore vite en voyant son air défait tandis qu’il s’approche de la cafetière.

Je me lève pour me tenir à côté de lui et pose une main sur son épaule. Il a tellement vieilli ces dernières années. Nous n’avions que huit de différence tous les deux à l’époque, mais aujourd’hui, on pourrait croire que quarante années séparent nos naissances.

— Tout va bien, Basile?

Il se tourne vers moi, et je me retrouve piégé contre lui alors qu’il fond en larmes. Je pose maladroitement ma tasse sur le plan de travail à côté de moi pour le serrer dans mes bras. Quoi qu’il se soit passé, cela n’est pas bon pour lui.

Je passe une main douce dans son dos, tentant de calmer ses sanglots déchirants. Il lui faut plusieurs minutes pour réussir à se reprendre, et il s’écarte de moi, essuyant ses joues de ses mains.

— Dis-moi ce qui ne va pas, Basile. Tu sais que je suis ton ami. Tu peux tout me dire.

Il secoue doucement la tête, ses cheveux roux balayant l’air. Ses yeux sont toujours emplis de larmes, et je ne sais pas quoi faire.

Je me tourne vers la cuisinière, qui hausse les épaules en signe d’impuissance, avant de lâchement m’abandonner à mon sort en sortant de la pièce, me laissant seul avec Basile.

— S’il te plaît, mon pote. Tu sais que je n’aime pas te voir dans cet état.

La dernière fois que je l’ai vu ainsi, c’est le jour où papa est revenu de la ferme avec un nouvel humain. Toujours roux, je crois sincèrement que mon père à une nette préférence pour les roux, mais nettement plus jeune que mon ami. En tout cas, faisant nettement plus jeune que Basile.

Mon ami avait alors compris que son temps parmi nous arrivait à son terme, et il a pris peur. Mais papa lui a expliqué que ce n’était pas pour tout de suite. C’est juste qu’il était allé commander quelques humains pour une soirée qu’il organisait quelques jours plus tard, et qu’il était tombé sous le charme du jeune homme et n’avait pas pu résister.

Mais tout comme Basile, je n’ai pas été dupe. Tout comme mon ami, je vois bien la vieillesse investir jour après jour les traits autrefois juvéniles du roux. Mais cette histoire remonte déjà à six mois, et Basile a encore vieilli durant ce temps. À tel point que ses magnifiques cheveux orange, présentent plus de gris terne tirant sur le blanc qu’autre chose.

Mon ami se détourne pour attraper un morceau de papier absorbant sur le plan de travail et se mouche à gros renforts de bruits sonores, me faisant doucement glousser, avant de me reprendre en voyant l’air anéanti sur le visage du roux.

— Ton très cher père vient de m’informer que je ferais partie du futur convoi.

Une masse me tombe dans l’estomac, et une boule de douleur se forme dans ma gorge. Nous sommes arrivés ensemble dans cette maison Basile et moi. Et je pensais qu’on en partirait ensemble. Mais ma vie a pris une tournure différente de la sienne.

Tandis que j’étais installé dans une des grandes chambres du manoir en tant que nouveau fils de la famille, mon ami était installé dans le lit de mon père en tant que nouvel amant temporaire.

Papa m’a expliqué quelques années après mon arrivée que les vampires s’installaient très rarement avec des gens de leur espèce. Les luttes de pouvoir ne favorisaient pas l’union dans un couple de vampires. Les suceurs de sang préféraient donc s’enticher d’humains, mais ces derniers mouraient assez vite, et il fallait les remplacer assez régulièrement.

C’est à cette occasion qu’il m’a parlé d’un humain qu’il avait follement aimé, au point de le garder près de lui jusqu’à sa mort. Il a eu tellement mal suite à ce deuil, qu’il n’a plus voulu réellement s’attacher depuis ce jour.

Aujourd’hui, il renvoie Basile, le donnant à la communauté pour le peu de temps qu’il lui reste à vivre. Mon père est en train de m’arracher un de mes plus vieux amis.

Mes mains encadrent son visage et j’essuie rageusement ses larmes qui continuent de couler. Je pense qu’une petite partie de lui espérait secrètement que Drake tombe amoureux de lui et veuille le garder à ses côtés jusqu’au bout, ou alors le transformer.

Si je me souviens bien, Basile n’était pas gay avant d’arriver dans cette maison. Je l’avais souvent vu au camp traîner avec des filles assez bien potelées et rire avec elles. Mais visiblement, papa avait su le faire changer d’avis pour qu’il veuille rester auprès de lui.

— Je vais aller lui parler. Lui dire que je veux que tu restes avec moi. Quitte à ce que je te rachète à lui.

Il me fait un léger sourire et je dépose un baiser sur son front, avant de tourner les talons pour me diriger vers le bureau de mon père. Lorsque la journée de travail à déjà débuté, je ne me permets pas d’aller le voir. Je lui téléphone toujours avant pour être sûr de ne pas le gêner dans une transaction. Je trouve que c’est du savoir vivre.

Mais à cet instant, je ne pense qu’à mon ami qui va se retrouver chez un vampire qui n’aura pas forcément les moyens de le nourrir à sa faim, et qui risque de le sécher tellement il doit être affamé. Je ne veux pas de ça pour mon ami.

À mon humble avis, Basile mérite mieux que ça. Avec les années qu’il a données à mon père, il mérite une meilleure fin.

Une étrange odeur me parvient doucement, et mon pas se fait moins rapide dans les couloirs du manoir. Mon cœur se met à tambouriner furieusement, et mon sang à parcourir plus violemment mes veines. Ma chaleur grimpe en flèche et mon souffle se fait court.

Je hume l’air ambiant, réussissant à ne sentir que cette douce odeur. C’est un mélange de sapin, et de rivière, accompagné d’une note florale que je n’arrive pas à recadrer. Cette senteur particulière fait tressauter mon membre dans mon pantalon, et je fronce les yeux de perplexité.

Une telle chose ne m’est encore jamais arrivée. Je me suis déjà retrouvé dur en compagnie d’autres hommes, en rêvant d’eux, mais jamais en sentant leur parfum.

Je secoue doucement la tête, ne voulant pas perdre mon objectif de vue. Je dois aller voir papa pour qu’il me permette de garder Basile à mes côtés. Mon ami mérite une fin de vie à la hauteur de ce qu’il a fait pour nous.

Pourtant, plus je m’approche du bureau de mon père, plus cette odeur pénètre mon corps, me faisant frissonner violemment. Je me mets à saliver brutalement comme si je me retrouvais devant une pâtisserie super appétissante, et j’ai peur que mon cœur ne sorte de ma poitrine tellement il bat fortement.

Devant la porte, l’odeur se fait encore plus prégnante, et je ne peux pas y résister. Je pousse le battant sans même m’annoncer, chose que je n’aurais jamais faite en temps normal, avant de rester bloqué dans le passage.

Assis face au bureau de mon père, le plus bel homme qu’il m’ait été donné de voir tourne sa tête vers moi, des crocs impressionnants lui sortant de la bouche.

La chaleur dans mon corps augmente de façon exponentielle tandis qu’une douleur fulgurante me parcourt tout entier. J’ai tellement mal que je tombe à genoux dans un cri de douleur inhumain.

C’est comme si mes os étaient en train de fusionner les uns aux autres, que mon sang bouillait dans mes veines, et que tout mon corps voulait changer de forme.

Ma vision se brouille d’un seul coup, malgré tout, je vois mon père se lever d’un bond de sa chaise pour venir s’agenouiller à mes côtés, me serrant contre lui. Je l’ai à peine vu faire.

Un grognement animal se fait entendre, et quelques secondes plus tard, mon père n’est plus à mes côtés. À sa place, l’homme qui était assis se tient devant moi, montrant les crocs à papa.

Montrant les crocs? Serait-ce un vampire?

Mon corps se contorsionne dans tous les sens et je m’écroule à terre, des larmes coulant sans discontinuer de mes joues tellement c’est douloureux. Je ne pensais pas ressentir une telle douleur un jour. Je ne pensais pas que c’était même possible d’avoir aussi mal.

Bien que j’ai une furieuse envie de vivre, durant tout ce temps où mon corps se déchire, j’ai juste envie que tout s’arrête, qu’on mette fin à mes jours pour que je ne souffre plus autant.

— Mais que se passe-t-il?

Je reconnais la voix de papa, mais je suis incapable de lui répondre. Déjà, ouvrir la bouche et former des mots me demanderaient plus de souffle que je n’en ai. Ensuite, parce que je ne sais absolument pas ce qui est en train de m’arriver.

Je sais juste que je souffre à en mourir et que je veux que ça s’arrête.

Je tends la main vers mon père dans l’espoir qu’il puisse m’aider, mais lorsqu’il esquisse un geste dans ma direction, le grognement animal se fait de nouveau entendre. Je fais donc un suprême effort pour tourner ma tête vers l’origine du son, pour découvrir un superbe loup noir.

Je me perds un instant dans cette vision absolument magnifique, mais tout aussi étrange. Mon cerveau sait qu’il s’agit de l’homme qui se trouvait dans le bureau avec papa, mais je n’arrive pas vraiment à l’intégrer. J’ai du mal à faire la relation entre l’homme sublime, et le loup magnifique.

Son pelage d’un noir de jais luit dans la lumière du matin. Sa toison semble drue et bien fournie, et me donne envie de glisser la main dedans.

Ne résistant pas à mon envie, je tends davantage le bras, et glisse mes doigts dans les poils sombres. Un gémissement de pur plaisir passe la barrière de mes lèvres en dépit de la douleur que je ressens toujours. Étrangement, le simple fait de le toucher a semblé m’apporter un peu de bien être, et j’ai pu prendre une grande inspiration.

Mais quand, à bout de force, ma main retombe sur le tapis, la douleur revient, encore plus puissante qu’avant. Un cri de douleur et de rage mêlée m’échappe, et le loup à mes côtés geint doucement.

Sa truffe vient se coller à ma joue, la léchant doucement, et malgré le fait que je devrais trouver ça absolument dégueulasse, je ne peux empêcher mon cœur de faire une embardée de joie dans ma poitrine. Je ne comprends rien à ce qu’il m’arrive. Pourquoi est-ce que je réagis de cette façon face à cet homme?

Le grand loup noir me retourne soudain, me mettant à plat ventre sur le tapis et j’entends le grognement de mon père. Bien qu’il ne soit pas humain, il ne ressemble en rien à ce que peut émettre le loup qui se trouve au-dessus de mon corps.

Il lui répond d’ailleurs d’un glapissement pour lui faire comprendre qu’il doit faire très attention à ses gestes, avant que je ne sente son souffle se poser sur ma nuque, envoyant des frissons dans tout mon corps. Ses dents viennent mordiller mon cou, avant qu’il n’éventre ma chemise, exposant mon dos à la vue de tous.

Heureusement pour moi, il n’y a que mon père en plus du loup de présent dans cette pièce. Je n’aurais pas aimé me retrouver dans cette situation lors d’une soirée organisée par mon père.

— Mais que faites-vous?

Je tourne difficilement la tête en entendant une fois de plus le grognement du loup juste au-dessus de moi, pour regarder mon père faire à nouveau un geste dans ma direction. Visiblement, le loup ne veut pas que papa s’approche de moi. Pourquoi? Là est toute la question.

Mais tout disparaît de mon esprit lorsqu’une douleur plus forte encore que les autres, ce que je ne croyais pas possible, se fait ressentir dans mon épaule. Enfin plus exactement dans la jonction entre mon cou et ma clavicule.

Je sens presque les dents s’enfoncer une à une dans la chair tendre, passer les tendons, avant de s’attaquer aux muscles. Je hurle de douleur, ma tête se relevant d’un coup sous la puissance de l’adrénaline qui me parcourt.

Et soudain, tout semble exploser autour de moi. Ma vue trouble devient tout à coup noire, avant de revenir avec une acuité que je n’ai encore jamais eue. Je perçois toutes les nuances des couleurs autour de moi. Les rouges semblent plus intenses, alors que je vois le dégradé de carmin se dessiner devant moi. Je peux voir des détails à une distance que je ne percevais pas avant.

Mon ouïe aussi est soumise à des transformations. Brusquement, j’entends le battement frénétique d’un cœur juste au-dessus de moi, et j’enregistre les différences avec le mien. Ils ne battent pas à la même fréquence, et ne font pas du tout le même bruit. Le sien émet un son plus sourd, tandis que le mien tend vers les aigus.

La palpation du tapis me semble également différente. La sensation n’est plus du tout la même que tout à l’heure. C’est comme si j’étais à présent nu dessus, et que je ressentais chaque fibre qui ont servi à le tisser.

Et cette odeur envoûtante qui ne cesse de venir chatouiller mes narines depuis le tout début est de retour en force. Elle entraîne des tremblements dans tout mon corps, me faisant haleter.

Les dents se détachent soudain de mon épaule, avant qu’un cri de loup ne s’élève dans la pièce. La douleur m’a enfin quitté, et je peux à nouveau respirer plus facilement. Je prends donc de grandes inspirations, m’étonnant de la capacité de mes poumons. Il ne me semblait pas pouvoir autant gonfler mes poumons avant.

Le museau du loup noir au-dessus de moi, revient me caresser le cou, léchant par à-coups la morsure laissée dans ma nuque. La langue râpeuse me fait gémir de bien-être. Mais je m’arrête net en entendant le son de ma voix.

Elle est plus basse, plus animale. Comme si je n’étais plus vraiment moi-même. Je baisse donc les yeux sur le tapis dans l’espoir de me relever, tout en ramenant mes bras à moi, avant de couiner en voyant les deux grosses pattes blanches qui m’entourent.

La langue râpeuse passe sur ma joue, avant que je ne comprenne qu’en réalité, il est en train de me lécher le bout du museau. Totalement paniqué, je tente de me relever, mais le loup noir ne me laisse pas faire. Je sens ses dents au niveau de mon cou, me maintenant à terre, tandis qu’une puissance phénoménale me parcourt tout entier.

C’est une sorte de faisceau d’énergie qui part du grand loup noir pour s’abattre sur toutes les personnes à des kilomètres à la ronde. Comment je le sais?

Tout simplement parce que je viens de voir mon père, un des plus grands vampires qui existe sur cette terre, se retrouver instantanément à terre, grimaçant de douleur. Papa ne s’est jamais agenouillé devant qui que ce soit, alors le voir faire, face à ce loup m’indique qu’il n’a pas eu le choix.

L’énergie déversée dans mon corps se transforme soudain, tandis que l’odeur que je reconnais maintenant comme celle du loup noir me parvient à nouveau, pour envoyer une décharge de désir pur dans mon aine.

Presque malgré moi, sans vraiment l’avoir décidé réellement, comme si une autre entité décidait pour moi, je relève ma croupe pour aller me frotter contre le grand loup noir. Le grognement appréciateur qui me parvient me donne juste l’approbation qu’il me fallait pour continuer, et je tortille des fesses contre une virilité qui ne cesse de grossir contre mon pelage.

Un nouveau cri sort de la gorge du loup noir au-dessus de moi, mais cette fois-ci, l’autre entité présente dans mon corps, semble le comprendre, car elle se presse encore plus fort contre l’animal penché au-dessus de moi.

Un gémissement rauque passe mes babines retroussées sur mes crocs, en sentant le membre dur s’infiltrer dans mon corps. Je lève plus haut ma queue pour l’accueillir tout au fond de mon être avec un cri de contentement. Des dents se plantent en douceur dans ma nuque, m’ancrant à terre alors qu’il fait des allers-retours à l’intérieur de mon ventre.

Le plaisir monte graduellement en moi, me faisant frissonner, me faisant haleter. Mes pattes avant cèdent, et je me retrouve la tête entre les pattes, ma croupe totalement relevée, la queue en l’air, offert pour ce loup.

Des étoiles commencent à se former devant mes yeux alors que le plaisir continue de grimper en moi, avant que mon propre membre dur comme de la pierre, ne se mette à pleurer en jets successifs sur le tapis sous moi. Un hurlement de pur bonheur sort de ma gorge.

Je suis à bout de souffle, fatigué comme je ne l’ai jamais été, totalement fourbu, pourtant, je ne me suis jamais senti aussi bien de toute ma vie.

La pression de la mâchoire sur ma nuque se fait plus intense alors que les mouvements de reins du loup noir se font de plus en plus violents et erratiques, avant qu’il ne se stoppe brutalement, les pattes arrière parcourues de tremblements violents.

Je sens un liquide chaud s’insinuer dans mon ventre, entraînant un nouveau jet de sperme sur le tapis de ma part. Le grand loup noir s’écroule sur moi, me faisant tomber au sol, avant de venir me lécher tendrement le museau, les oreilles, le cou.

Je ferme les yeux, contenté comme il ne m’est encore jamais arrivé de l’être, le souffle enfin retrouvé. Mon museau capte les odeurs alentours, et je rouvre les yeux pour les braquer dans ceux de mon père. Drake semble effaré par ce à quoi il vient d’être confronté.

Dans un coin de ma tête, je me sens affreusement honteux de m’être donné en spectacle de la sorte devant mon père. Mais l’autre moitié, celle qui ne cesse de diriger mon corps depuis plusieurs minutes, s’en moque comme de ma première chemise. Elle est juste heureuse d’avoir trouvé son loup.

Totalement épuisé, je referme les yeux, me laissant happer par un sommeil sans rêve, réparateur. Visiblement, mon corps à besoin de prendre du repos.

Une légère douleur me fait ouvrir les yeux, avant que je ne constate que devant moi ne se trouvent plus des pattes, mais bien des bras. Je baisse très légèrement la tête pour me rendre compte que je semble avoir retrouvé mon corps d’avant.

Mais ai-je vraiment eu des pattes à un moment donné? Ou tout ceci n’était-il que le fruit de mon imagination?

Trop fatigué pour répondre à ce genre de questions, je referme les yeux, et tombe dans un sommeil profond, d’où rien ne pourrait me tirer.